Chapitre 15
Il est resté assis-là, fixant la moquette de la chambre, le regard perdu. Il est resté assis-là, sur mon lit, l'air de rien.
C'est la première fois que je le vois comme ça. Apeuré. Faible. Dans le doute.
Il me rappelle alors étrangement au souvenir que j'ai de lui plus petit.
« - Tu vas rester là longtemps encore ? »
Je ne sais même pas pourquoi il est entré dans ma chambre. Je présume que j'ai eu pitié et donc je l'ai laissé me suivre mais quand bien même...Savoir que Nathan était dans ma chambre ne me mettait pas spécialement à l'aise. Bien au contraire. Je m'étais donné corps et âme dans la tâche de garder cette pièce, cette zone loin de lui. Je voulais être là où je n'aurais aucune image de lui.
Maintenant, c'était trop tard.
« - Bon bah...Reste là. Je vais me doucher moi. »
J'amasse des affaires : Une serviette, des vêtements plus confortables, prends ma trousse de toilettes et m'apprête à quitter la chambre quand il m'agrippe soudainement au bras.
« - Je viens avec toi. »
Un soupir m'échappe.
« - C'est ridicule. Tu ne vas pas me suivre jusqu'aux douches. Tu restes là, je n'en ai pas pour longtemps.
- Non, j'insiste.
- Et moi j'insiste pour avoir un minimum d'intimité ! »
Mais rien à faire. Il me suit. C'est limite s'il ne s'était pas enroulé telle une liane autour de mon pied.
J'ai l'impression de me traîner un boulet.
J'arrive dans les vestiaires et dépose mes affaires dans le casier. Les douches communes me font penser à celles des salles de sports ou des piscines...C'est bien le seul inconvénient du campus.
Je m'apprête à enlever mon tee-shirt quand je sens un regard sur moi. Un regard surmontant un léger sourire coquin.
Il me désespère.
« - Tu sais pour prendre sa douche, il faut être nu. C'est mieux.
- Tu sais pour être nu, il faut avoir de l'intimité. Sors.
- Et prendre le risque que tu te fasses kidnapper une nouvelle fois ? Jamais.
- Tu me fatigues Nathan...Premièrement je ne me suis pas fait kidnapper, j'ai suivi une personne de mon plein gré et deuxièmement je commence à perdre patience et je t'assure que tu es à deux doigts de te manger ma bouteille de shampoing dans ta face de rat.
- Si je suis là, c'est pour ton bien et...
- Si tu me sors le mot « sécurité », je t'assure...Je te tue ici et maintenant. Il faut que tu arrêtes d'être paranoïaque et possessif. Je ne suis pas à toi. Je ne suis d'ailleurs...A personne. Laisse-moi vivre ma vie et cela commence avec un peu d'intimité.
- Mais il n'y a pas si longtemps...Cela ne t'aurait posé aucun problème de te foutre à poil devant moi. »
Je n'aime pas cette facette de lui. Celui qui insiste, qui ne lâche rien. Celui qui ramène tout au passé alors que nous ne vivons plus dans cette époque. Nous ne sommes d'ailleurs, plus les mêmes non plus lui et moi. Pour rien au monde je voudrais retourner à ce temps-là.
« - Nathan, sérieusement, tu commences à me casser les couilles. Donc soit tu sors... »
Et à peine avais-je eu le temps, une nouvelle fois, de terminer ma phrase que ce dernier était déjà pratiquement en boxer devant moi.
Non mais je rêve.
« - Soit je sors...Soit je viens avec toi ! »
Tout sourire, mains sur les hanches comme s'il prenait la pose, il m'attend alors que je n'ai même pas commencé à me déshabiller. Cela me gêne. Etre nu avec lui me gêne.
Et il ne le comprend pas.
« - Aller Antoine, fais pas ton timide...Pour une fois on est tous seuls et il n'y a personne d'autre. Je t'ai déjà vu tout nu, exhibant ton petit kiki de partout. »
A cette phrase, mes joues s'enflamment en revoyant ces images du passé.
Ce nudiste-là est une version de moi-même que je préfère oublier. Certes à l'époque j'étais beaucoup plus « libertin » on peut dire, mais plus aujourd'hui.
« - Tu sais quoi ? La douche, ça peut attendre. Je n'ai pas tellement transpiré aujourd'hui et je peux très bien dormir comme ça. »
Je récupère mes affaires, refermant la porte de mon casier violement quand soudain, je sens une main m'attraper par le col du tee-shirt pour me ramener à ma place.
« - Hop ! Hop ! Hop ! Soit pas crade et viens te laver ! S'il faut je peux même te déshabiller
- Arrête ça... »
Il passe sa main sous mon tee-shirt tandis que ses doigts glacés se faufilent sur mon torse dépourvu de toutes formes de muscles. Je suis un flan de la tête aux pieds.
« - Arrête...Nathan... »
Je n'ai jamais aimé cette facette de lui.
Jamais.
« - NATHAN ! »
Ma voix se brise. Ma voix se heurte. Le ton monte, le ton chauffe.
Profitant de sa confusion, je me retire et m'éloigne le plus rapidement possible de lui tentant tant bien que mal de me rhabiller et de regagner un grain de calme.
« - T'es vraiment un connard quand tu t'y mets ! C'est pas possible... »
Je me sens gêné. Troublé. J'ai l'impression qu'une part de moi a été secouée plus fort qu'elle ne l'aurait dû. Je crois que sur l'instant, j'ai surtout été choqué. Cela m'a rappelé trop de choses. Trop de souvenirs.
Trop de sentiments.
« - Tu as raison... »
Il ne me regarde pas.
Il ne me regarde plus.
« - Je ne suis pas un mec bien... »
Je n'ai jamais dit ça. Il est vrai que sur l'instant, je l'ai sans doute pensé très fort...Mais je ne l'ai pas dit.
Mes yeux suivent chacun de ses mouvements tandis que mon corps reste en alerte de toutes tentatives d'agression et je le vois ramasser ses affaires et se diriger vers la porte. Sans un mot.
Sans un regard.
Juste cet air de chien battu.
Il me laissa alors tout seul.
Seul avec moi-même. Je venais de gagner cet instant de calme et de tranquillité que je chérissais tant et pourtant, une part de moi, aussi petite et infime soit elle, était désolée. Désolée pour ce qu'il venait de se passer.
Je ne connaissais pas ce Nathan.
Etait-ce dû à sa rencontre avec Julius ? Cet homme avait-il un quelconque rapport avec un tel comportement ?
Ah merde. Voilà que je pense à tout ça, j'ai l'impression que ma tête va exploser.
Ce n'est pas tes oignons Antoine. Occupe-toi de tes fesses, bon sang ! Déjà qu'elles ont faillis passer à la casserole.
Mon dieu...Et si je ne l'avais pas arrêté ? Si je n'avais rien dit ?
Que se serait-il passé ?
L'aurait-il fait ? Serait-il allé jusqu'au bout ?
L'aurions-nous fait ?
Aurions-nous recommencé encore et toujours cette même histoire ? Je n'ai pas envie qu'elle se répète. Je ne veux pas remettre ça. Pas comme ça. Pas de cette façon-là. Je n'étais pas encore tout à fait prêt à remettre ça.
En sortant des douches communes, je m'arrête pratiquement inconsciemment devant la porte de sa chambre. La main tendue, le poing serré, j'hésite à toquer.
Mais malgré tout...Ma main part toute seule. Je frappe une fois. Deux fois. Trois fois.
Personne ne vient m'ouvrir. Il a dû partir.
Peut-être aurais-je l'occasion de le voir demain ? Sans doute même. Le connaissant, il reviendra comme une fleur en prétextant que rien de tout ça ne venait de se produire.
Rentrant à mon tour dans ma chambre, la tête complètement dans le sceau, je me laisse tomber contre mon matelas, enfournant mon visage dans mon oreiller. C'était bien là, le seul moment où je pouvais oublier quoique ce soit.
Dans les bras de Morphée, personne ne viendra me déranger, me hanter et j'en passe.
Que ce soit trois familles de sorciers ou juste un ancien amant ayant un appétit sexuel que je ne partage pas.
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