Chapitre 13

«Je ne fais que m'amuser

Point de vue d'Abigail.

Seule. Voilà ce que j'étais. Seule au monde. Mon père, après son petit séjour je ne savais où, était redevenu très violent, Axel avait rompu avec moi samedi et Briana ne m'adressait toujours pas la parole. Même Justin avait décidé de m'éviter. Évidemment, il avait eu ce qu'il voulait. Tout ce qu'il avait intéressé était de coucher avec moi. Et il avait osé me mettre en garde à propos de Valentin. Il était définitivement le plus gros des salauds.

J'étais blessée parce que je pensais qu'il en avait quelque chose à faire de ma vie personnelle mais je m'étais trompée. Il avait juste utilisé cette avantage pour se rapprocher de moi.

Je n'arrivais toujours pas à croire qu'il avait profité du fait que je n'étais plus moi même pour coucher avec moi. Ce mec était un lâche. Je me sentais salie. J'avais couché avec quelqu'un que je détestais et je n'en avais aucun souvenir. C'était horrible. J'espérais juste que nous l'avions fait dans le noir et qu'il n'avait remarqué aucune de mes blessures.

J'étais assise seule - inutile de préciser - à une table, au self. Briana s'était évidemment faite des "amis de déjeuner" et ainsi ne mangeait pas seule. Pourquoi étais-je toujours celle qui faisait pitié ? Il fallait que je lui parle et lui dise toute la vérité. Je ne voulais pas la perdre. Même si j'avais appris par Axel qu'elle était allée lui dire qu'elle avait des soupçons à propos de Justin et moi et que c'était pour ça qu'il ne me donnait plus de nouvelle, je ne lui en voulais pas. J'avais dû de toute façon tout avouer à Axel. Elle m'avait juste tendu une perche. Maintenant j'étais célibataire et ce n'était pas si tragique que ça bien qu'Axel était la dernière personne que je voulais décevoir et perdre - après Briana.
La seule bonne nouvelle dans cette histoire était qu'étant donné que je n'avais plus de copain, plus de meilleure amie et plus de personne à qui donner des cours, j'avais nettement plus de temps à consacrer à mes révisions et cela c'était clairement vu la semaine dernière. J'avais repris ma place de meilleure élève et j'en étais ravie.

J'étais aussi contente que les vacances étaient enfin ce week-end. Tout ce dont j'avais besoin c'était du repos et de la tranquillité. Je voulais oublier tout ce qui s'était passé avec Justin. Je m'étais permise de critiquer les filles qui s'étaient intéressées à lui alors que j'avais fait en quelque sorte pareil. Je m'étais égarée. Ce qui était bien c'était qu'il possédait mon cahier de philosophie et donc qu'il pouvait recopier comme bon lui semblait les cours puis me mettre ses feuilles dans mon casier. Ainsi, nous pouvions nous éviter jusqu'à ce qu'il ait fini de tout recopier.

Pourquoi s'était-il réveillé que maintenant ? Rien de tout ça ne se serait passé s'il n'avait pas décidé de faire le feignant dès le début.

...

Je venais de terminer les cours et j'attendais devant le lycée la sortie de Briana qui avait pris son temps pour ranger ses affaires. Elle fit son apparition au bout de cinq minutes. Je m'avançai vers elle, un peu nerveuse, je n'étais pas très fière de ce que j'allais lui révéler.

- Briana, l'appelai-je.
- Quoi ?
- Il faut qu'on parle tu ne crois pas ?
- Est-ce que tu as quelque chose de nouveau à me dire cette fois-ci ?
- Oui.
- Je t'écoute.
- Tu ne préfères pas qu'on s'isole ?
- On va chez moi alors, proposa-t-elle.

Ainsi nous allâmes dans sa voiture. Briana conduisait depuis cet été bien qu'elle avait obtenu son permis à seize ans. À peine installées et sorties du parking du lycée, elle me demanda de commencer mes explications.

- Tu ne t'étais pas trompée quand tu m'as dit que tu avais des doutes par rapport à Justin et moi, déclarai-je. Il n'y a pas eu que des cours de philo entre lui et moi.
- Vous avez couché ensemble ?
- On en est resté aux préliminaires mais c'est arrivé plusieurs fois, répondis-je.

J'avais honte.

- Jusqu'à la semaine dernière, ajoutai-je. J'avais bu trop d'alcool et je ne m'en souviens pas mais on l'a fait.
- Il te l'a dit ?
- Oui.

Elle secoua la tête de colère.

- Je t'avais dit Abby qu'il te chercherait la merde. Il peut te détester autant qu'il veut mais tu es une jolie fille et ça a suffit pour lui pour vouloir tenter quelque chose avec toi.
- Je sais. J'aurais dû m'en douter.
- Quel connard ! Profiter d'une fille sans défense comme ça !

Les larmes bordèrent mes yeux. J'étais tellement déçue de moi même pour avoir laissé ça se produire.

- J'ai peur Bri, repris-je. J'ai peur qu'il ait compris pour mon père.
- Tu parles de tes blessures ?
- Il peut aller au commissariat et le dénoncer et je me retrouverais...
- Abigail, me coupa-t-elle. Est ce qu'il t'en a parlé ?
- Il m'évite depuis ce jour.

Elle fronça les sourcils.

- Ce mec n'a vraiment pas de face, cracha-t-elle. Coucher avec toi puis t'ignorer.
- Bri.

Je détestais entendre que j'avais couché avec Justin même si c'était ce qu'il s'était passé. Ça me rendait juste mal à l'aise et encore plus dégoûtée.

- Si il ne t'en a pas parlé c'est qu'il n'a rien vu ou alors c'est qu'il s'en fout. Je pense pas que tu devrais t'inquiéter pour ça, me dit-elle. Demande lui plutôt si il a utilisé un préservatif.
- Il m'a dit que oui.
- Tu ne tomberas pas enceinte, c'est déjà une bonne chose.

Je glissai sur mon siège faisant la moue.

- Je suis désolée pour toi Abby. J'aurais aimé que tu aies une première fois digne de ce nom... avec Axel. D'ailleurs je voulais m'excuser pour...
- Non, lui coupai-je la parole. Tu as bien fait. Je ne pouvais pas continuer comme ça.
- Je veux quand même que tu saches que c'était sur le coup de la colère et que je m'en veux. Je suis censée être ta meilleure amie et ne rien faire qui pourrait te blesser.
- Ce n'est pas grave Bri.

Elle prit ma main et la serra.

- Tu m'as manquée, avoua-t-elle.
- Toi aussi.

Nous échangeâmes un sourire puis elle me lâcha la main pour la remettre sur le volant.

- Alors c'est fini avec Axel ? me demanda-t-elle.
- Fini. Je suis célibataire.
- Comment ça se fait que tu aies laissé Justin te toucher ? Je veux dire Abby, tu n'es pas du genre à te donner à n'importe qui, encore moins à ce pauvre abruti de Bieber.

Je décidai de tout lui raconter depuis les messages jusqu'à la dernière fois où nous nous étions parlés. Évidemment, je ne lui dévoilais pas les secrets de Justin parce que j'avais donné ma parole que je ne dirais rien et j'étais une personne de confiance.

- Donc tu sais tout à propos de lui et il sait tout à propos de toi hormis le fait que ton père est violent avec toi, conclut-elle.
- C'est à peu près ça. Il y a sûrement beaucoup choses qu'il a préféré ne pas me dire.
- Est-ce qu'il est aussi aisé qu'il laisse le paraître ?
- Bri ! Je ne dirais rien ! J'ai promis !
- Après ce qu'il t'a fait, tu peux bien me lâcher un petit truc, essaya-t-elle de me tirer les vers du nez.
- Bri, soufflai-je avant de lui donner une petite tape amicale.

Elle rit. Elle était vraiment trop curieuse mais je ne céderais pas. Nous passâmes une heure entière ensemble où elle m'avait posée un tas de questions. Elle m'avait demandée si j'avais aimé faire ce que j'avais fait avec Justin et je n'avais pas eu d'autre choix que de lui dire que, malheureusement, ça m'avait beaucoup plu. Elle n'aurait jamais pensé que Justin et moi pouvions faire une chose pareille parce que rien que le fait d'entendre la voix de l'autre pouvait nous énerver. Moi non plus je n'aurais jamais pensé franchir le pas avec lui un jour et je ne pouvais expliquer comment nous en étions arrivés là.

Je rentrai chez moi plus libérée même si j'étais toujours mal à cause de tous les évènements passés. Puis j'avais ce sentiment mitigé en moi. Je me disais que c'était une bonne chose que Justin m'évitait comme ça il n'y aurait plus jamais de dérapage entre nous mais en même temps, je n'étais plus habituée à son indifférence par rapport à moi et c'était comme si ses provocations, ses regards indiscrets, ses baisers, ses mains sur mon corps me manquaient. Tais toi Abigail, ne dis pas n'importe quoi.

...

J'arrivai en sciences accompagnée de Briana. J'appréhendais cette heure. Le professeur Allan avait été absent toute la semaine dernière ce qui voulait dire que nous n'avions pas eu de travaux pratiques. Mais il était désormais de retour et ainsi mon binôme avec Justin aussi.

J'espérais qu'il n'aurait pas le culot de m'adresser la parole après m'avoir ignoré durant toute une semaine. Dans tous les cas, je ne dirais pas un mot.

Je m'assis à la table du fond. Justin n'était pas encore là. Je préparais mes affaires en attendant de recevoir le travail à effectuer. Mon coeur battait fort contre ma poitrine. Je commençais à cerner Bieber et j'étais consciente que je pouvais m'attendre à tout avec lui.

Il arriva, de manière non chalante dans la salle entouré de ses deux amis. Son visage se raidit quand le professeur lui annonça que nous étions toujours en binôme. Cependant, il ne dit rien et partit s'asseoir à côté de moi. La tension était de retour.

On nous distribua des fiches. Je les attrapai avant que Justin le fasse. De toute façon, cela m'étonnerait qu'il veuille pour une fois travailler. Je commençai immédiatement à bosser sans lui prêter aucune attention.

Il ne disait rien. Je ne l'entendais même pas bouger ni respirer. Il était si silencieux que je voulais parfois jeter quelques coups d'oeil à ma gauche pour vérifier qu'il était toujours là. C'était bizarre de l'avoir si calme à côté de moi et sans intention de créer des problèmes. Peut être que dans sa tête il était en train d'en créer. Je ne savais pas.

- Justin ? Vous faites quoi ? arriva le professeur. Il faut se mettre au travail !
- Je ne peux pas. Abigail a pris toutes les feuilles.

Je me redressai à sa réflexion.

- De toute façon j'ai terminé, dis-je en remettant les papiers au centre de la table.
- C'est un travail en binôme les enfants. Abigail vous devez accepter de partager le travail.
- Je m'en souviendrais pour la prochaine fois, lui souris-je faussement.
- Bien.

Il s'en alla. Je soupirai. Justin se mit étonnement à son tour au travail pendant que j'attendais sagement la fin de l'heure. Pas de mains baladeuses ni de mots avec une arrière pensée. C'était presque effrayant. C'était comme si après avoir eu ce qu'il voulait, il avait perdu toute attirance pour moi. J'avais l'impression d'être juste comme toutes les autres et c'était blessant.

Briana ne pouvait s'empêcher de se tourner quelques fois vers nous pour vérifier si nous n'avions pas dérapé à nouveau. J'essayais de lui faire comprendre par mes expressions du visage qu'elle devait arrêter de faire ça pour ne pas éveiller des soupçons mais elle ne m'écoutait pas.

La fin du cours sonna et je la rejoignis après avoir rangé mes affaires et rendus ma feuille.

- Bri, si tu pouvais être plus discrète la prochaine fois, lui chuchotai-je pendant qu'elle fermait son sac.
- Excuse moi, c'était plus fort que moi, dit-elle avec une pointe d'amusement.
- Je rêve ou ça t'amuse ?

Nous sortîmes de la salle.

- Ça va, j'ai juste encore du mal à croire que Bieber et toi vous...
- OK, je n'ai pas besoin de l'entendre encore une énième fois, l'arrêtai-je.

Je posai mes yeux droit devant moi et vis Justin, quelques mètres plus loin, appuyé sur un casier. Il me fit un signe de la tête et je compris qu'il voulait qu'on se rejoigne dans le placard à balais. Pour qui se prenait-il ? Je n'étais pas à sa merci. Je voulus ignorer cela mais, malheureusement, Briana avait vu la même chose que moi et cela la rendit furieuse.

- Laisse Abigail tranquille, lui dit-elle en arrivant à sa hauteur. Tu as déjà fait assez de dégâts comme ça.
- Ah donc vous êtes amies de nouveau ? demanda-t-il un sourire en coin.
- Oui Justin, répondit-elle. Et tout va très bien entre nous.
- Waller, tu lui as tout raconté ? s'adressa-t-il à moi en prenant un air sérieux.
- C'est ma meilleure amie et...
- Non elle a raison, me coupa-t-il. Je vais te laisser tranquille. Mais je croyais que t'étais une personne de parole Waller. T'avais pas le droit de tout révéler.

Il fit un pas en arrière avant de nous tourner le dos amèrement. Je baissai les yeux. Je n'aimais pas qu'on pense que je n'étais pas une personne de confiance parce que ce n'était pas vrai.

- Eh Abby, tu t'en fous de ce qu'il pense, ce n'est qu'un con.

J'hochai la tête. C'était la première fois que je me taisais devant Justin. Je le laissais involontairement m'atteindre et me blesser et cela ne me plaisait pas.

...

Je venais de terminer mon service au café et j'étais de retour chez moi. Je voulais juste me reposer mais je devais encore travailler. Mon père était au boulot alors j'avais encore deux heures de libre devant moi. J'allai dans ma chambre et me mis directement au travail. J'étais décidée à garder la progression de la semaine dernière. J'étais très concentrée, j'enchaînais les exercices après exercices jusqu'à ce que quelqu'un toque à la porte.

J'espérais qu'il s'agissait de Briana. Elle venait souvent à l'improviste chez moi avant que nous soyons toutes les deux débordées par les cours. J'ouvris la porte avec un grand sourire aux lèvres qui s'effaça directement quand la tronche de Justin apparut en face de moi. Comment arrivait-il toujours à s'introduire dans mon immeuble ?

- Tu comptes continuer de m'harceler longtemps ?
- Je crois que tu me dois des explications, dit-il sèchement.
- Toi aussi tu m'en dois mais évidemment je suis la seule fautive, rétorquai-je avec sarcasme.
- On s'était donné notre parole.

Ma voisine du palier sortit de son appartement et je fus contrainte de demander à Justin de rentrer chez moi. Je l'emmenai dans ma chambre.

- Je n'ai rien dit à Briana sur ta vie personnelle. Je ne pouvais pas lui cacher le reste, lui expliquai-je.
- Putain Abigail, ça devait rester entre nous.
- Entre te décevoir ou perdre ma meilleure amie, je préfère te décevoir. Surtout avec le comportement que tu as eu après qu'on ait couché ensemble.

Il me regardait en fronçant les sourcils comme s'il ne comprenait pas ce que je lui reprochais.

- Arrête Justin. Tu as eu ce que tu voulais alors maintenant tu fais comme si je n'existais plus, dis-je avec dégoût.

Les larmes montèrent à mes yeux. Pourquoi fallait-il que ça me blesse ?

- Il n'y a rien de tragique là dedans. On n'a jamais cherché à créer quelque chose.
- C'est tout ce que tu trouves à dire ? Il n'y a rien de tragique là dedans ?
- Qu'est-ce que tu veux que je dise de plus Abigail ? Tu sais que je ne fais que m'amuser.
- T'en as pas marre d'être toujours un salaud comme ça ? crachai-je.

Soudain, j'entendis la porte de l'appartement s'ouvrir. Je compris très rapidement que c'était mon père qui était rentré plus tôt que prévu. Mon coeur s'agita. Merde.

- Justin, tu restes ici, l'ordonnai-je.

Je quittai la pièce en prenant bien soin de fermer la porte derrière moi. J'allai au salon pour rejoindre mon père. Je le trouvai en tenue de travail, sac à la main.

- Tu as fait à manger ? me demanda-t-il directement.
- Non je fais mes devoirs d'abord.
- Je t'ai dit que dès que tu rentres à la maison, tu fais à manger. Comment je fais moi quand je rentre plus tôt comme ce soir et que j'ai faim ? commença-t-il à s'énerver.
- Si tu m'avais prévenue, j'aurais préparé quelque chose.
- Ce n'est pas bien ce que tu es en train de faire Abigail.

Tout ce qui m'importait c'était qu'il ne trouve pas Justin dans ma chambre. Il pouvait m'engueuler, cela m'était égal.

- Pardon, dis-je.
- Vas préparer à manger, m'ordonna-t-il.
- Je finis mes devoirs et...

Il attrapa violemment mes cheveux et les tira. Je grimaçai. Il jeta son sac par terre. Son visage avait pris un air sévère.

- Quand je te dis quelque chose, tu le fais, cria-t-il.

Il avait provoqué l'apparition de larmes sur mes joues par la violence de son geste. Mon crâne me faisait mal et il continuait à tirer.

- Papa, c'est bon, je vais le faire, murmurai-je presque.
- Je déteste quand tu m'énerves alors que je viens tout juste d'arriver !

Il attrapa de son autre main mon poignet et serra très fort. Je me retenais de crier pour que Justin ne se doute de rien et me mis à pleurer silencieusement à la place.

- Tu sers à rien ici ! me cria-t-il.

Il tirait encore plus fort et j'avais l'impression qu'il allait arracher mes cheveux. Je continuais à pleurer. J'avais tellement mal.

Puis on entendit un bruit de porte. Je fermai les yeux quelques secondes maudissant Justin de ne pas m'avoir écouté. Le temps que je réouvre les yeux, il était là dans le salon et se jeta sur mon père qui tenait encore mes cheveux et mon poignet.

- Non Justin ! criai-je.

Mon père me lâcha subitement surpris. Il reçut un coup puis deux puis trois au ventre. J'étais paniquée. Justin ne contrôlait plus ses gestes et je croyais bien qu'il comptait le tuer.

- Arrête ! C'est mon père ! criai-je plus fort.

Ce dernier essayait de se défendre comme il le pouvait mais Justin était beaucoup plus fort et rapide. Il s'attaqua à son visage et j'attrapai ses épaules pour le retenir avant que mon père finisse réellement par succomber à ses coups. Cependant, il continuait à frapper ignorant mes cris et mes mains sur lui pour l'en empêcher et mon père finit par tomber au sol. Sa tête heurta la table à manger. Mon coeur s'arrêta de battre.

Le sang commençait déjà à couler. Je pleurais mais plus pour la même raison dorénavant.

- T'es complètement malade ! hurlai-je à Justin. Tu as vu ce que tu lui as fait ?
- Il levait la main sur toi Abigail !
- Et alors ? C'est mon problème !

Je m'accroupis près du corps immobile. Mon père avait perdu connaissance. Il avait les yeux fermés. Son visage ne portait pas de marque des quelques coups qu'il venait de recevoir. Je mis ma main par réflexe sur l'endroit où était son coeur et soufflai intérieurement de soulagement quand je le sentis battre.

- Abigail, tu ne peux pas le défendre.
- Appelle les urgences ! On ne peut pas le laisser comme ça !

Il sortit son téléphone et fit ce que je lui avais dit. J'essayais pendant ce temps de diminuer la quantité de sang qui continuait à couler de sa tête. Mes mains tremblaient. Je ne savais pas comment m'y prendre et c'était horrible de voir mon père dans cet état.

- Ils arrivent, m'annonça Justin.
- Tu peux partir maintenant.
- Non. Je veux rester avec toi. Tu ne vas pas aller à l'hôpital toute seule.

Je levai mes yeux sur lui.

- Et c'est de ma faute si il est comme ça, ajouta-t-il.
- Alors pas un mot à qui que ce soit de ce qu'il s'est passé. Tu me laisses parler.

Il hocha la tête. Je me reconcentrai sur la plaie. J'avais du sang sur ma main. J'avais très peur. Il allait faire une hémorragie.

- Justin, aide moi.
- Qu'est-ce que je dois faire ?
- Il saigne beaucoup trop. Je ne sais pas.

Je pleurais à nouveau. J'étais terrifiée à l'idée de perdre mon deuxième parent. Je ne surmonterais pas cette épreuve une seconde fois.

- Abigail, dit Justin en se baissant à ma hauteur. Il va s'en sortir.
- Je te déteste. Tu joues les héros quand ça t'enchante alors que tu n'es juste qu'un pauvre con.
- C'était pour te défendre.
- Tu n'avais pas à te mêler de mes affaires.
- Attends tu me reproches de...

On sonna. C'était les urgences au parlophone. Justin les ouvrit et en un rien de temps ils montèrent les étages jusqu'au mien. Équipés d'un brancard et du matériel nécessaire, ils entrèrent chez moi et se dirigèrent directement vers mon père. Je leur laissai la place.

Une femme resta à mes côtés et me posa des questions pendant que ses collègues s'occupaient de mon père. Je lui racontais qu'il avait glissé et que sa tête avait tapé malencontreusement la table ce qui expliquait pourquoi il saignait. Elle avait l'air de croire à mon histoire.

Je lavai mes mains, essuyai mes larmes et pris une veste avant de monter dans l'ambulance avec eux. Justin était avec moi et ne disait rien. J'étais bien contente qu'il ne profitait pas de cet instant pour reparler de nos histoires futiles. Ce n'était pas du tout le moment idéal pour le faire.

Nous arrivâmes à l'hôpital et ils emmenèrent directement mon père au bloc opératoire, nous laissant Justin et moi dans la salle d'attente. Il était sûrement dix heures du soir et il y avait donc du monde ici. Je préférai m'isoler dans un couloir pour attendre. Je n'aimais pas attendre dans le bruit. Je m'adossais au mur et croisais les bras sous ma poitrine. Justin s'adossa au mur en face de moi et mit ses mains dans les poches de son jean.

Je sentais son regard sur moi tandis que je fixais le sol. J'étais trop songeuse et inquiète pour parler.

- Pourquoi tu ne m'as pas dit qu'il te maltraitait ? me demanda-t-il subitement.
- Parce que tu t'en fiches non ? répondis-je en accrochant son regard. Tu...
- Ce n'est pas parce que j'ai arrêté de...
- Arrête, dis-je en levant les mains. Tes arguments ne valent plus.
- Tu m'en veux de t'avoir aidé ?
- Je t'en veux de t'imposer dans ma vie privée puis de me dire que tu ne fais que t'amuser.

Il se tut et contracta sa mâchoire.

- Ce qui se passe dans ma vie est tout sauf un jeu Justin. Mon père risque de ne plus se réveiller et je vais me retrouver seule. Je...
- Il va s'en sortir, m'interrompit-il. Je te l'ai dit.
- Et comment tu peux en être aussi sûr ?
- Parce que si j'avais voulu le tuer, je l'aurais fait directement.

Il se redressa.

- Je vais nous chercher à manger. Il semble que la nuit va être longue, dit-il.

...

Pratiquement deux heures s'étaient écoulées et nous étions toujours en train d'attendre que l'opération se termine. J'angoissais. J'avais peur d'entendre les docteurs me dire que ça ne s'était pas bien passé et que mon père n'avait pas pu survivre à un choc si violent et une perte de sang si grande.

Justin était déterminé à rester avec moi jusqu'au bout de la nuit si il le fallait. Il était vraiment incompréhensible. Il m'avait évité durant toute une semaine puis maintenant il voulait rester avec moi jusqu'au matin. Je ne comprenais pas. Il s'était endormi sur une chaise. Il avait la tête posée contre le mur, les cheveux en bataille et les yeux fermés. Il était mignon. Ce n'est important Abby. Ton père est sûrement entre la vie et la mort pendant ce temps.

Une femme en habit d'infirmière se dirigea vers moi. Je me levai.

- Abigail Waller ?
- C'est moi.

J'entendis Justin se lever à son tour derrière moi.

- L'opération s'est bien passée mais votre père n'a toujours pas repris connaissance. On l'a emmené dans une chambre pour qu'il se repose. Vous pouvez rester avec lui si vous voulez mais je vous conseille de rentrer chez vous et de vous reposer aussi. On vous appelera dès qu'il y aura du nouveau.
- Je vais rester, dis-je.
- Non Abigail. Il faut que tu dormes, me dit Justin.
- Vous devriez écouter votre copain. On pendra bien soin de votre père.
- Merci pour tout, dit Justin. On va y aller.

Il prit ma main et me tira vers la sortie.

- Justin, mon père est dans le coma. Je ne crois pas que rentrer chez moi va me rendre l'envie de dormir, dis-je en retirant ma main.
- Alors si tu restes, je reste aussi.
- Il y a cours demain. Tu devrais rentrer.
- Toi aussi !
- Je n'irais pas au lycée tant que mon père ne sera pas sorti d'affaires.
- Ne sois pas stupide Abigail. Tes notes vont chuter une nouvelle fois.
- Tu t'inquiètes pour mes notes maintenant ?
- S'il te plaît Abigail.

Je secouai la tête négativement.

- Non... Je ne pars pas d'ici, refusai-je.

Il souffla avant de passer ses doigts dans ses cheveux.

- Appelle moi si il y a un problème, abandonna-t-il face à ma persistance.

J'hochai la tête et il partit. Je rejoignis mon père dans la chambre où il avait été placé. Je déglutis le voyant allongé sur ce lit blanc que je détestais et qui me rappelait les nombreux jours passés avec ma mère à combattre son cancer. J'avais l'impression d'être condamnée à passer mes jours à l'hôpital et même si pour l'instant, j'étais à la place du visiteur, je me disais que bientôt ce serait à moi de me retrouver sur le lit, à la place du patient.

Je m'assis sur la seule chaise présente et me préparais à rester éveillée toute la nuit.

...

Les amies, j'espère que vous aller bien. Alors je vais enfin m'occuper de l'édition de Quai 27 cet été si ça vous intéresse toujours de l'avoir en version papier :)

Et j'ai une question à poser à celles qui vont au Purpose Tour à Paris : y a-t-il des projets pour le 20 et 21 ou pas encore ? Si oui, j'aimerais le savoir.

Gros bisous.

Christel

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