Chapitre 53 |
N'oubliez pas d'être heureux.
Ce sont les derniers mots que j'ai entendu sortant de la bouche de mon parrain avant qu'il ne prenne congé dans un long et apaisant sommeil dont il ne s'est jamais réveillé. Ne serait-ce qu'une seule seconde, j'ai pensé que Mike nous faisait une blague et qu'il allait se réveiller en abordant un magnifique et sincère sourire. Qu'en fin de compte il n'allait pas nous abandonner.
Que sa maladie n'était pas aussi dévastatrice. Qu'il allait renaître de ses cendres, si je peux dire.
Je l'ai pensé durant des jours précédents son décès. J'ai réalisé que tout cela n'était en rien une blague en me rendant à l'église pour lui faire un dernier au-revoir avant qu'il ne disparaisse pour une durée indéterminée. Car oui, un jour viendra, je le rejoindrais. Lui et mon frère. Et, j'ai hâte que ce jour-là arrive.
En attendant, je dois faire face et me mettre en tête que je ne le verrais plus et ne l'entenderai plus. Ça me fait mal mais je m'efforce d'être forte et suivre les instructions de mon parrain.
Le premier étant : de ne pas pleurer sa mort et je l'ai écouté. Depuis son décès, pas une seule larme n'a été versée. Malgré l'intensité de la douleur que je ressens, qui aurait un grand besoin d'être évacué, je ne le fais pas. Pour lui. Pour l'honorer. La deuxième étant : d'avancer et je le ferais. Ça me prendra énormément de temps. Néanmoins, je me persuade que j'y arriverai car rien n'est impossible à réaliser. Il me faut juste un peu plus de volonté et une aide approfondie.
La troisième étant : une fois totalement guéris de tous mes maux, je dois suivre mes rêves et mon instinct et là aussi, j'exécuterais cette périlleuse mission.
— Chérie, as-tu bu et mangé un bout aujourd'hui ? me demande Sarah en passant une main dans mes cheveux.
— Je l'ai fait, réponds-je en lui souriant vaguement, Ma question est bête au vu des circonstances mais j'aimerais savoir....Est-ce que ça, vous deux ?
— Mal. Mais ça passera. Au moins, lui ne souffre plus et c'est ce qui compte le plus.
Je hoche la tête étant en accord avec ses propos. Ça fait désormais une semaine et trois jours que mon parrain nous a quittés et même si cette perte est très douloureuse, je sais, que lui ne souffre plus et c'est le plus important comme précédemment dit.
— Bruna ? m'interroge la grande brune hésitante.
Je relève mes prunelles brunes et la fixe affectueusement dans l'attente d'une suite. Sarah ne se fait pas prier et m'annonce d'une voix chargée d'émotions :
— Mike avait des projets pour toi. Il voulait te le dire lui-même. T'en faire don mais la maladie l'a rattrapé. Plus vite que prévu. Il m'a donc chargé de te donner cette enveloppe.
La brune me donne une grande enveloppe marronnée, qu'elle avait jusqu'à la dans ses mains depuis son entrée dans cette cuisine et me l'offre tout en me souriant. Du bout des doigts, je l'attrape. J'étudie ensuite le grand papier cartonné et remarque mon prénom inscrit dessus. Destinée à Bruna Watson.
— Je te laisse découvrir ce qu'elle contient. Si tu as besoin d'aide, je suis là, d'accord ?
Je hoche simplement ma tête. Sarah reste droite devant ma personne le temps de quelques petites secondes puis finit par quitter de la cuisine tout en déposant un baiser d'encouragement sur mon crâne.
Entièrement seule, j'inspire fortement et décide — malgré le stress que je ressens — d'ouvrir cette enveloppe. Une fois ceci fait, je glisse ma main à l'intérieur et en sort plusieurs papiers. Dont un qui me fait immédiatement froncer les sourcils. Un chèque d'une valeur de deux milles dollars. Pourquoi mon parrain me donne-t-il de l'argent ?
Je dépose le papier blanc sur l'îlot central et tout en étudiant d'un air songeur les détails écrits dessus. Je me demande vraiment pourquoi il m'a offert un aussi gros paquet d'argent. J'ai beau me creuser le cerveau et me poser les bonnes questions afin de parvenir à assembler les pièces manquantes mais rien ne me vient l'esprit. Je décide donc — pour l'instant — de laisser tomber et de me concentrer sur une autre feuille blanche qui est cette fois-ci parsemée d'écriteaux. Cette lettre a été écrite par Michael. Et je sais d'avance qu'elle répondra aux questions concernant le chèque.
D'une maine droite tremblante, j'attrape la lettre et je commence tranquillement — tout en sentant néanmoins une pointe de nervosité—ma lecture. Dès les premières lignes, la tristesse est à son apogée, les larmes menacent de naître cependant je fais tout mon possible pour qu'elles ne perviennent pas à voir le jour.
“ Bruna, tu sais, je n'ai jamais été doué pour écrire des lettres. Encore moins avec les lettres d'adieux. Écrire ces mots est une vraie corvée à mon goût.
Pas parce qu'ils te sont destinés. Tout simplement parce qu'ils signifient, la fin. Ça signifie tout simplement que je rends actuellement les armes et que je ne te verrais plus, ni toi, ni les deux autres femmes qui partagent ma vie.
Tu te demandes pourquoi, je t'écris n'est-ce pas ? Et bien j'y viens.
Premièrement, je veux à tout prix te dire que je déteste ton mauvais caractère et le fait que tu sois aussi têtue ! Si, tu savais combien de fois, j'ai ressenti l'envie de prendre ta tête entre mes mains et de la claquer contre le mur pour que tes idées te reviennent. Que ton cerveau est de nouveau de la jugeote et que tu cesses de t'en vouloir autant. Parce-que tu n'es pas la coupable de son départ. Tu ne l'as jamais été. S'il te plaît, rentre-toi cette idée en tête, sinon je me ferais une joie de venir te hanter.
Maintenant passons au point de vue suivant. Bruna, sache que tu as toujours été une très belle personne dotée d'un sens de l'humanité grandiose. Personne ne m’avait jamais aimé de manière aussi sincère et bienveillante comme toi. J’aimerais te remercier de m’avoir accompagné, de m’avoir appris tant de choses.
Tu as toujours été présente pour les personnes dans le besoin. Dont moi. Et, je t'en serais éternellement reconnaissant.
Tu as même réussi à me faire promettre des promesses que je n'aurais eu le courage de tenir sans ton soutien continuel.
Que ce soit avec Sarah ou alors mon fameux cancer. J'ai toujours cru que j'étais un lâche beaucoup trop faible pour combattre la maladie. Je l'ai pensé durant des mois. Mais tu as su pour maladie et tu es arrivés tel un héros. Tu m'as fait entendre raison. Une fois de plus.
Grâce à toi, j'ai conscience que que je n'ai pas perdu contre le cancer. Et c'est l'une des plus belles choses que tu aies faites pour moi. Peut-être que le cancer m'a pris, mais il n'a jamais pris mon amour pour toi, pour vous, mon espoir ou ma joie.
Ce n’était pas une “bataille”, c’était juste la vie, qui est souvent brutale et injuste, et c’est tout simplement comme cela que ça se passe parfois. Je n’ai pas perdu, merde. Je considère que la façon dont j’ai vécu avec le cancer est plutôt une grande victoire. Je l'ai compris entièrement grâce à toi.
Désormais, c'est à mon tour de te faire comprendre que tu ne peux pas rester ici. Bruna tu en as assez bavé. Tu ne peux pas rester pour de ces personnes qui n'ont jamais levé le petit doigt pour toi. Pense à toi. Le chèque te servira à payer une partie ton voyage puis si nécessaire, cet argent te servira pour tes frais d'inscriptions pour une nouvelle école.
Plie tes bagages et prend la route et rejoint Lincoln. J'ai déjà tout préparé pour toi. Tu n'as plus qu'à te sentir prête. J'espère que tu apprécieras ce petit geste et que tu m'écouteras cette fois-ci.
Mon énergie, mon amour, mon rire et nos incroyables souvenirs seront toujours présents au même titre que mon esprit. Je ne serais jamais très loin.
Je t'en prie ne pense pas à moi avec pitié ou tristesse. Sourit plutôt en pensant à notre dernier fou rire. Je déteste vraiment faire de la peine aux gens que j'aime alors s'il te plaît ne reste pas sur la fin tragique de mon histoire et soit heureuse en repensant à tous nos souvenirs et nos délires.
Je ne pensais jamais arriver à écrire cette fichue lettre. Voilà bien des semaines que j'essaie de laisser ma plume parcourir la feuille, en vain.
Mais quelqu'un a dit un jour que le travail le plus dur était celui qui n'avait jamais commencé. Alors, j'ai attrapé mon stylo à billes et je me suis forcée à t'écrire.
Et c'est avec la gorge nouée et les larmes aux yeux que je t'annonce que, ça y est, que nous sommes enfin à la dernière catégorie. Celle des adieux.
Je ne sais pas vraiment par où commencer. Je sais que cette partie de la lettre sera un gros, énorme, brouillon, où tout sera mélangé, et je m'en excuse d'avance. Je n'ai pas fait exprès de partir, tu sais. Je n'ai en aucun cas voulu te blesser, ou te vexer en partant. Pardonne-moi.
Je n'ai jamais aimé les aux revoirs ni même les adieux. Ce sont des mots qui restent en travers de ma gorge et qui peinent à venir se coucher sur cette maudite feuille de papier. Ces mots-là me font tellement peur, si tu savais à quel point ! J'ai le coeur brisé de devoir te dire au revoir.
Je t'aime énormément. Et, je t'aimerais éternellement. Merci pour cette vie qui a probablement été la plus merveilleuse et la plus impressionnante possible. Du fond du coeur, je te souhaite une longue vie heureuse et une bonne santé, ma petite filleule. S'il te plaît rend-moi service et prend quelques minutes par jour pour reconnaître que cette folle de vie mérite d'être vécue. N'oublie jamais : chaque seconde compte.
À plus tard.
Je relis une deuxième puis une troisième fois la lettre et une fois les mots bien imprimés dans ma tête, je replie la feuille et tout en posant une main sur mon front, je me dis que lorsque l’on perd quelqu’un ou que l’on se déconnecte d’une personne, un vide insondable se forme à l’intérieur de notre corps. J'en avais déjà fait les frais. Néanmoins, aujourd'hui ce vide se creuse davantage. Les deux personnes que j'aime le plus au monde ne sont plus à mes côtés et j'ai l'impression que cette vague de vide va aspirer toute vie en moi. C'est pour cette raison que je prévois de me rendre chez un professionnel avant que les choses ne dérapent. Je ressens le besoin vital de dire les choses et je vais le faire auprès d'une personne qui pourra m'offrir son attention et ses magnifiques conseils.
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