Chapitre 21 :
Établissement Saint West ; 09 : 13
[ Point de vue de Chloé ]
Être en retard n'a rien s'amusant vraiment rien d'amusant. Je ne comprends pas les gens qui trouvent cela drôle. Il faut prendre sa douche en deux minutes, choisir sa tenue sans prendre la peine de l'examiner de plus près et s'habiller en moins de trois minutes. Les cheveux sont bien souvent mis en une pagaille extrême autour d'un élastique et notre visage n'est même pas maquillé.
Un sacrilège pour ma part. Je sors très rarement sans une couche de maquillage sur la tronche. Étant beaucoup trop dégueulasse sans. Je préfère donc prendre mes vêtements au hasard et mettre plus de temps dans l'ouvrage du ravalement de façade.
- Je hais être dans la galère, me répétais-je en franchissant la porte de l'établissement.
Et en ce moment être dans la galère est mon passe-temps favoris. Je suis en froid total avec mon amie Bruna. Mon couple avec Brooklyn n'en est plus un. Ma tante vient de décéder des suites d'une longue bataille contre le cancer c'est donc principalement pour cette raison, que j'ai été absente deux semaines entières. Mes notes sont en chutes libres et je ne fais que de me prendre la tête avec mon frère qui habite en France.
Je le vois rarement et pour le peu que nous nous voyons c'est pour nous prendre la tête et je ne veux plus de cette situation. Je ne sais pas pourquoi on se dispute mais une chose qui est certaine, une fois mon année terminée, je pars le rejoindre à Paris ou la ville la plus belle du monde d'après les sites et revues internets. Je verrais une fois là-bas si c'est réellement vrai. Ça me fera énormément de bien de souffler un bon coup et de changer d'air surtout après ce qui vient de m'arriver.
Une fois devant la porte grise de ma salle de classe, je toque timidement et ouvre cette dernière en entendant le ton sec de mon professeur de musique.
- Bonjour désolé d'être en...commençais-je avant d'être coupé.
- En permanence.
- Mais..
- Dehors, dit-il d'un ton catégorique.
Je lâche un soupir de frustration en refermant la porte. J'aurais dû m'en douter qu'il n'allait pas me laisser rentrer dans sa classe même si je suis l'une de ses élèves préférées. Pas de traitement de faveur répète-t-il à chaque fois. J'aurais dû le croire à ce sujet.
Ce n'est pas parce qu'il m'aime bien qu'il me laisse faire ce que je veux. Surtout en classe spécialisée. Si j'avais su, j'aurais pu prendre mon temps pour me préparer et cela m'aurait évité par la même occasion une course. Je traîne donc jusqu'à la salle de permanence et une fois dans celle-ci mes prunelles scannent l'entièreté des élèves présents.
La plupart sont endormis avec un beau filet de bave au coin des lèvres sur leurs sacs à dos. La plupart sauf Bruna,qui, a ma plus grande surprise se trouvent ici avec les écouteurs dans les oreilles et un livre à la main. Je crois que c'est le bon moment pour lui présenter mes excuses.
La dernière fois je n'ai pas été tendre avec elle et je m'en veux énormément. Toutes les paroles qui sont sortis de ma sale bouche ce jour-ci n'étaient en aucun cas pensé. J'étais seulement très en colère et triste. Ce qui ne m'excuse pas pour autant.
Je m'approche timidement de mon amie -enfin si je suis encore la sienne à l'heure d'aujourd'hui- et tire la chaise à sa droite. À l'entente des mouvements à ses côtés, la belle brune au visage éteint relève ses prunelles et me sondent avec surprise. Ouais moi non plus, je ne me voyais pas revenir aussi vite vers toi tant je craignais ce qui allait se passer pensais-je.
- Chloé mais où étais-tu passé ces deux dernières semaines ? me demande-t-elle inquiète.
- Ma tante Lila est décédée et je n'avais pas la force de venir, lui expliquais-je en posant mon sac sur la table, Et toi qu'est-ce que tu fais ici ? Tu n'as pas cours ?
- Oh toutes mes condoléances Chloé. Je ne savais pas si je t'aurais rendu visite et t'aurait passé mon épaule. Est-ce que ça va ?
Je lui souris sincèrement heureuse qu'elle prenne de mes nouvelles même après toutes les absurdités que je lui ai dites. Bruna est vraiment une personne magnifique autant intérieurement que physiquement.
Bien qu'on soit en froid avec elle ou qu'on lui aient dit des choses vraiment très méchantes, elle reste et s'occupe de vous laissant de côté cette futile dispute. Elle n'est pas rancunière et je trouve ça vraiment beau.
- Je viens de perdre Lila ça fait mal mais je vais de l'avant. C'est ce qu'il faut faire et non se morfondre. Et toi qu'est-ce que tu fais ici ?
- Tu as raison. Surtout si tu as besoin de moi n'hésite pas. Viré.
- Et moi de même. Comment ça ?
- J'ai traîné dans ma chambre tout le week-end et je n'ai rien fait. Je devais rendre un devoir en histoire mais je ne l'ai pas fait, me dit-elle en me souriant. Et toi ?
- Retard. Bruna ?
- Ouais ?
- Je suis sincèrement désolée.
- Mais non...commence-t-elle avant que je ne la coupe.
- J'ai vraiment été odieuse avec toi. Tu voulais simplement m'offrir une autre issue qu'une soirée et m'expliquer les choses mais je n'ai pas su comprendre et je m'en veux terriblement. Je pensais que tu voulais juste une fois de plus m'éviter et ne pas être mon amie et le fait que j'étais triste et perdue n'ont pas arrangé pas les choses. Ce n'est pas une raison, je le sais mais je voulais tout de même t'expliquer parce-que je ne veux pas te perdre. Tu es une personne très chère à mes yeux et je refuse de te perdre une fois de plus. Excuses-moi. Pardonne-moi. S'il te plaît.
J'ai réellement besoin d'elle. Bruna ne me voit peut-être pas comme sa sœur mais pour moi c'est ce dont est et je ne veux en aucun la perdre. La petite brune attrape ma main dans la sienne et m'offre son plus beau sourire ce qui me réchauffe instantanément.
- L'erreur est humaine, me dit-elle, Je te pardonne mais à une seule condition.
- Laquelle ?
- Soit heureuse.
- Je le serais.
- Parfait.
Ça l'est en effet. Si Lucie aurait été à la place de la belle brune je sais d'avance qu'elle m'aurait fait galeré au moins une bonne partie de l'année. Elle est de nature rancunière et passe son temps haïr les gens qu'ils osent faire du mal à ses proches c'est-à-dire plus particulièrement Bruna.
J'espère qu'elle ne va pas me haïr trop longtemps. Tout en serrant la main de la brune dans la mienne, je me permets de mieux la scanner et me rends compte qu'elle a perdu deux/trois kilos. Je ne sais pas ce qu'elle cherche mais si ça continue comme ça, elle finira par tomber dans la maladie de l'anorexie et je ne veux pas que ça se produise.
C'est une maladie dont on s'en sort difficilement. Qui a des répercussions très lourdes sur la vie de la malade et je ne veux pas que ça lui arrive.
- Tu perds des cheveux ? lui demandais-je.
- Non pourquoi ? s'exclame-t-elle en fronçant ses sourcils.
- Je pensais. Ça te dit un petit restaurant Bio ? Je t'invite.
- J'ai de l'argent.
- Je sais mais je veux te faire plaisir puis prend ça comme mon pardon.
- Très bien. Quand ?
- Samedi.
Elle hoche sa tête me démontrant ainsi qu'elle est d'accord avec moi ce qui me réjouit une fois de plus. Tout rentre dans l'ordre ou du moins commence à rentrer dans l'ordre et ça me fait du bien. Énormément de bien.
- Ça va mieux ? me demande une voix masculine à mes côtés.
Une voix que je reconnais très bien. Que je pourrais reconnaître entre mille.
- Mais qu'est-ce que tu fais ici ? Tu m'as suivi ? lui demandais-je en soupirant.
- Tu m'as fui toute la journée et je voulais prendre de tes nouvelles. Tu n'as pas répondu à mes messages, me reproche-t-il.
- Exacte.
- Pourquoi ?
- Je ne voulais pas te parler, avouais-je en me relevant.
Je frotte du bout des doigts mon pantalon taille haute au niveau de mes genoux.
- Je reviendrai très vite Lila comme tu vois un intrus est arrivé, dis-je en tapotant sa pierre tombale.
Brooklyn roule intentionnellement ses iris ce qui m'irrite au plus haut point. Il sait très bien que je déteste qu'on me fasse ça et il en joue. Avant je lui aurais mis une petite tape sur son épaule mais ne voulant aucun contact physique avec lui, je ne fais rien. Je marche sans l'attendre.
- Tu ne me frappes pas ? s'étonne-t-il.
- Non.
- Ah. Tu vas me faire la tête combien de temps ?
- Mais je ne te fais pas la tête. J'ai juste des choses plus importantes à penser qu'à toi.
- Ça c'était méchant.
- Je sais, dis-je en souriant.
Je sais qu'il veut arranger les choses entre nous. Je ne dis pas qu'il souhaite remette le couvert -de toute manière je refuserais- seulement que nous ayons une relation amicale, civilisé au moins mais pour l'instant je ne suis pas prête pour ça. J'ai besoin de temps autant qu'il en a besoin.
- Comment est-ce que tu te sens ? me demande-t-il sérieux.
- Comme une personne qui vient de perdre sa tante. Et toi ?
- Je vais bien et...
Je le coupe soudainement d'un geste de ma main droite. Il fronce les sourcils se demandant ce qui se passe. Je fouille avec crainte mes poches mais rien. Merde. J'ai oublié mon téléphone là-bas.
- Je reviens.
- Mais tu fuis la conversation ? Mais pourquoi ? Tu sais bien que nous devons mettre nos problèmes à plat pour repartir du bon pied ! Oh tu vas où ? s'écrit furieusement le brun.
Je roule des yeux.
- Mais fermes-là. Ici on n'est pas chez toi mais dans un cimetière abrutis. Je reviens, je vais juste chercher mon téléphone que j'ai oublié, lui dis-je en soufflant.
Qu'est-ce qu'il est énervant. Comment ai-je pu le supporter autant d'années ? Une chose est sûre, je ne me remettrais jamais avec lui bien qu'un bon nombre d'étudiants aient parié sur notre future réconciliation.
Je comprends totalement. J'aurais fait la même chose qu'eux. Avec Brooklyn nous avons toujours été du genre à nous séparer sous le coup de l'impulsion puis à nous remettre ensemble la seconde d'après mais cette fois-ci j'ai ce sentiment en moi qui me dit que c'est la bonne séparation. Qu'un " nous " n'existera plus jamais. Et je pense sincèrement que c'est bon pour nous deux. Sans lui, je me sens plus libre et plus vivante et j'en mettrais ma main à couper qu'il ressent la même chose de son coté.
Tant mieux.
J'arrive près de la pierre tombale de ma tante et une fois devant celle-ci je récupère mon smartphone le fourre dans ma poche et repars tout en disant à Lila que je l'aime.
Et tout en marchant mes prunelles examinent vaguement les pierres tombales jusqu'à ce qu'un nom et une petite photo d'un garçon attirent mon attention. Je fronce légèrement les sourcils en lisant le prénom et le nom qui ne me sont pas inconnus Timéo Watson. 2011-2015.
2011 comme l'année de naissance du petit frère de Bruna Watson. Je sais qu'elle a un frère mais pas qu'il était décédé. Elle me l'aurait dit, je pense. En plus de ça, si c'est réellement son frère, ça ferait plus de deux ans et demi qu'il est décédé. Du moins trois ans si on ne compte pas les deux mois qu'il reste avant l'année 2018.
Putain c'est quoi ce bordel ? Si je réfléchis bien cet événement tragique se serait produit pendant sa fin d'année de troisième, avant sa rentrée en seconde. Mais plus je fixe cette photo plus le visage de son frère me revient en tête et je me dis qu'il n'y a plus aucun doute c'est bien son petit frère.
Ce qui expliquerait pourquoi elle ne parle plus de Timeo et pourquoi nous ne le voyons plus. Qu'est-ce qui s'est passé ?
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