5- you got me feeling like a psycho - part.1
Dédié à Bibou66613, qui a d'emblée su voir la beauté de Jackson et Hana.
5 - you got me feeling like a psycho - part.1
| HANA |
Mais comment pouvait-elle être en mesure d'aligner chacun de ses pas avec des échasses pareilles ? Telle était l'une des grandes questions que se posait Hana.
Le son des talons aiguilles de cette femme était étouffé par le tapis bordeaux qui recouvrait une majeure partie du carrelage brillant de la demeure des Wang. La Suzuki regardait la mère de famille, en essayant tant bien que mal de dissimuler son dédain.
Sa chevelure ébène et courte encadrait avec grâce son visage fin au teint de porcelaine. Ses yeux sombres étaient soulignés par une modeste couche de mascara - mascara dont le prix devait dépasser celui du manteau d'Hana - de même que ses lèvres étaient recouvertes d'une fine touche de gloss pailleté. Une robe noire venait mettre en évidence la finesse de sa silhouette en plus d'ajouter une touche de majestuosité à chacun de ses gestes. Soomee Wang ne laissait planer aucun doute sur son identité : elle avait bel et bien été l'épouse de Monsieur Meng Wang.
— Vos enfants ont tellement grandi, fit-elle remarquer. Je me souviens encore d'Hana lorsqu'elle était au collège...
Sur ces mots, elle cessa de marcher pour prendre le temps de faire volte-face et d'observer le sujet de la dernière phrase qu'elle venait d'énoncer.
— Elle n'avait pas du tout la même apparence. Les cours de boxe lui ont été utiles à ce que je vois. Puis, Hinata est toujours aussi mignonne ! J'ai du mal à croire qu'elle a dix-huit ans, je lui en donnerais facilement quatorze !
Hana roula des yeux et remarqua que sa petite-sœur était embarrassée. En même temps, elle ne pouvait que la comprendre : les gens avaient toujours cette étrange tendance qui consistait à parler d'Hinata comme si elle n'était pas présente. Puis, la mère de Shin s'était exprimée avec une touche d'arrogance qui avait sans aucun doute contribué à amplifier le malaise de sa sœur. La fausse blonde serra les poings et enfonça ses ongles dans sa chair afin de se forcer à ne pas balancer une phrase assaisonnée d'un beau juron.
— Heureusement qu'on grandit, on n'est pas des cailloux..., marmonna Kaito en faisant mine d'apprécier le décor princier du couloir qu'ils étaient en train de traverser.
— Le temps passe vite et nos enfants changent également, dit la mère d'Hana. D'ailleurs, comment va Shin ?
Les trois enfants de la fratrie Suzuki se jetèrent des regards furtifs. L'aînée dut se faire violence pour ne pas dire une parole qui laisserait à deviner le brin de colère qu'elle traînait derrière elle. Une touche de tension planait dans l'air. Ils étaient sur le point d'obtenir la réponse à une question que tous se posaient.
— Il est un peu fatigué, admit la mère du concerné. Ça doit sans aucun doute être à cause du voyage. Et du deuil, dit-elle enfin. Mais vous allez avoir le plaisir de rencontrer son demi-frère ! D'ailleurs, où est Jackson ? murmura-t-elle pour elle-même.
— Jackson ? répéta Hana d'un ton incrédule.
Elle haussa un sourcil, prête à demander quand est-ce qu'on les avait prévenus de la présence de ce type.
— Le demi-frère de Shin, répondit Soomee. Ah bah tiens, quand on parle du loup ! Il est juste derrière vous !
Elle se retourna.
Il était entièrement vêtu de noir. L'obscurité qui émanait de sa tenue créait un contraste des plus fascinants avec la luminosité dans laquelle baignait ce couloir de la villa. Visage fin aux traits ciselés et aux lèvres charnues, regard sombre sur lequel tombaient deux-trois mèches d'une chevelure de jais coupée ras sur les côtés, à l'instar de son frère Shin, Jackson Wang était détenteur d'une allure qui n'avait rien à envier à celle des grands acteurs de cinéma. Hana retint un haut le cœur. Elle ne le connaissait pas, mais elle le détestait déjà. Elle était convaincue de la fausseté de cet air sympathique et accueillant qui ornait son faciès en plus d'illuminer ses prunelles sombres. Pas de doute, une telle expression faciale n'avait pour but que de dissimuler cet orgueil dont était détenteurs chaque membre de cette famille.
— Jackson Wang, enchanté de faire votre connaissance, prononça-t-il par le biais d'une voix forte et claire.
Bien-sûr, il ne fallait pas oublier le sourire ravageur qui laissait voir des dents blanches à l'alignement parfait.
Hana leva les yeux au ciel.
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GONE DAYS
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Un somptueux repas les attendait dans cette salle, et en dépit de toute cette mauvaise humeur qui s'amoncelait en elle, Hana fut forcée de reconnaître et d'admirer la belle ordonnance des lieux. Sur une nappe blanche damassée, dont les ornements n'étaient autres que la représentation du vol somptueux des colombes, s'étendait une vaisselle nacrée, parfaitement conservée. Hana avait entendu dire que les Wang avaient développé un goût prononcé pour tout ce qui touchait à l'art européen, et à la vue de la décoration elle put constater la véracité de ces propos.
Ils se mirent à table.
Kaori se racla la gorge et observa les alentours en essayant de dissimuler sa surprise. Tout semblait avoir été préparé avec soin.
— Qu'est-ce que c'est ? demanda Kaito de but en blanc en regardant son assiette avec un air incrédule.
Hana avait d'emblée remarqué que leur parents l'avaient littéralement fusillé du regard, lui reprochant sans aucun doute son manque de tact et de tenue. Mais elle, si elle avait pu, elle l'aurait serré dans ses bras. C'était ça qui était magique avec cet adolescent qu'était Kaito. Il ne faisait aucune distinction entre les individus et lorsqu'il rivait sur les gens ses pupilles noires il ne leur donnait pas l'impression d'être des personnes supérieures, et encore moins inférieures.
— Ce sont des huîtres et du caviar, l'entrée soigneusement choisie par Jackson et magnifiquement cuisiné par nos chefs ! se vanta Soomee.
A la vue du regard de son frère et de celui d'Hinata, Hana ne tarda pas à comprendre qu'il étaient aussi décontenancés qu'elle. En ce qui concernait son père et sa mère, ils ne laissaient rien paraître face à tant de luxe et de magnificence.
— Oh je vois, souffla Kenzo, c'est typiquement français ça, non ?
— Oui, s'empressa de répondre Jackson. J'espère que ça va vous plaire, n'hésitez pas à dire ce que vous en pensez, ne soyons surtout pas gênés entre nous !
— Ce n'est pas vous qui avez cuisiné, balança Hana. Vous n'êtes pas du genre à vous atteler à...
— J'ai toujours rêvé d'aller en France, fit remarquer Hinata en passant une de ses mèches sombres derrière son oreille.
Hana se retint de soupirer, tandis que Jackson riva son regard sur la petite brune. Il haussa les sourcils, afficha un air surpris et prononça la phrase suivante :
— Ça tombe bien, j'y vais dans quelques semaines !
Il y eut un moment de pause et tous se décidèrent à goûter cette entrée qui leur avait été concoctée avec soin. La fausse blonde ne savait pas quoi en penser. Cette chose qu'elle mâchait possédait un goût étrange. Elle déglutit, incapable d'émettre le moindre jugement sur la qualité de la nourriture qu'elle venait d'avaler. Puis, elle était forcée d'avouer que ses pensées étaient loin d'être concentrées sur ce qu'elle plaçait dans sa bouche.
Où était-il ?
Il fallait s'attendre à le voir débarquer à n'importe quel moment de la soirée. Faire des entrées et des sorties en beauté était l'une des choses dont il était le plus adepte.
— Sinon Jackson, que faites-vous dans la vie ? demanda la mère des Suzuki, visiblement curieuse.
— Je suis concepteur web pour KING, l'entreprise de mon père, déclara-t-il avec une aisance déconcertante. Prendre la tête de la boîte ne m'intéresse pas, fit-il aussitôt remarquer avant de boire une gorgée d'eau. Je préfère laisser ce loisir à mon petit-frère Shin.
Hana fronça les sourcils en remarquant que Jackson ne cessait de lancer des coups d'œil en direction d'Hinata et Kaito. Qu'est-ce qu'il espérait au juste ? Les impressionner avant de conquérir leurs coeurs ?
— C'est vrai que le rôle du patron tyrannique détesté par ses employés lui va très bien, déballa l'aînée des Suzuki.
— Hana ne manque jamais d'humour ! s'exclama aussitôt Kenzo en essayant sans doute d'éviter que la situation ne tourne au drame.
Juste après avoir dit ça, le père de famille lança un regard discret en direction de sa fille. Elle voyait très bien que son géniteur tentait de lui faire comprendre que ce n'était pas le moment de prononcer tout ce qui lui passait par la tête.
— Je vois ça, dit le demi-frère de Shin en un sourire. Mais c'est vrai que ce petit n'est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds. J'ai beau être son aîné je suis forcé d'avouer qu'il dégage une prestance qui a le don de scotcher tout le monde dès qu'il prend la parole.
Elle reposa sa fourchette avant de s'en saisir de nouveau. C'était légèrement étrange de ne pas manger avec des baguettes. La jeune femme baissa les yeux et tenta en vain de se focaliser sur ce qui était étalé sur son assiette. Mais elle était dans l'incapacité de faire abstraction du tremblement de ses mains. Entendre des éloges sur Shin était la dernière chose qu'elle désirait.
— D'ailleurs, je pense qu'il ne devrait plus tarder à venir, fit remarquer Jackson en jetant un regard à la jolie montre attachée autour de son poignet.
Hana sentit peser sur elle le regard de sa petite-soeur. Celle-ci devait sans aucun doute tenter de lui communiquer une vague d'encouragements qu'elle s'abstenait de prononcer à l'oral. Le ventre de la jeune femme s'était noué, elle ne voulait plus rien avaler. Elle sentait une chaleur lourde lui bouffer les joues, et elle baissa la tête en espérant que ses mèches blondes sauraient couvrir son visage et dissimuler l'expression étrange qui venait de s'étaler sur ses traits.
Ses lunettes lui chatouillaient le nez.
Elle avait une mauvaise impression. Le bruit d'une porte qui se refermait, le son régulier de pas qui approchaient... Hana entendait tout.
Elle étouffait. Son col roulé était peut-être un peu trop ajusté.
Puis en quelques secondes, ce fut comme si tout s'était arrêté. Les particules invisible avaient suspendu le cours de leurs déplacements furtifs et inaudibles. Son souffle semblait avoir mit un terme à sa cadence régulière. D'une façon austère, le tic-tac produit par l'aiguille de l'imposante horloge murale venait rappeler que le temps ne s'arrêtait jamais dans sa course effrénée.
— Je vois que les festivités ont commencé sans moi.
Elle se sentit frappée de plein fouet par cette voix masculine et rocailleuse, qui donnait l'impression d'émerger des abysses.
— Mais bien-sûr que non, démentit Jackson. On attendait plus que toi, je t'en prie entre ! Ça ne fait que commencer !
Son visage avait changé. Ses joues étaient plus creuses qu'auparavant, ses traits avaient gagné en finesse et son regard toujours muni d'une profondeur et d'une touche de malice, était désormais muni d'un voile de haine. Ou peut-être que c'était de la tristesse et de la révolte qui valsaient dans ses pupilles ? En réalité, elle n'aurait su dire, mais Hana était convaincue qu'une braise nouvelle s'était logée dans ses yeux. Coiffés en arrière, ses cheveux sombres et épais laissaient son front à l'air libre.
Son expression faciale était d'une neutralité déconcertante, et elle aurait été incapable de dire si ses yeux se plissaient toujours autant lorsqu'il souriait. Par ailleurs, elle crut être victime d'une hallucination lorsqu'elle vit la présence d'un piercing au niveau de sa lèvre inférieure.
Puis, derrière le col serré de sa chemise sombre, Hana vit l'état d'une partie de sa peau : une carnation qui semblait avoir été sujette à de multiples traitements chirurgicaux, mais qui laissait toujours voir un contraste saisissant avec sa peau restée saine. Les pupilles sombres de la jeune femme glissèrent sur la main gauche du grand brun. Elle remarqua d'emblée l'état rigide de son épiderme, et cette immense tâche blafarde et hideuse.
— Je suis ravi de voir les Suzuki parmi nous, déclara-t-il avant de prendre place entre sa mère et Jackson.
Il porta un verre d'eau jusqu'à ses fines lèvres.
— Surtout toi, Hana. Ça faisait un bail, non ? Alors, qu'est-ce que tu deviens ?
À cet instant, elle voulait juste lui crever les yeux.
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