18 - Countdown, countdown...

| CHAN |

Quand Chan avait annoncé à Jisung que Minho avait perdu son chat et qu'il était sur le point d'aller le rencontrer pour voir s'il était en mesure de l'aider, son ami n'avait pas hésité une seule seconde : il voulait l'accompagner. Alors les deux garçons prirent place dans la voiture du plus âgé, et ce dernier commença à diriger son véhicule vers la rue où était situé le café qu'ils voulaient rejoindre. 

Pendant qu'il conduisait, Chan remarqua que son ami avait sa main gauche posée sur son épaule droite. Casquette abaissée jusqu'aux yeux, Jisung ne donnait aucune vue sur son visage et il était difficile de savoir s'il était souffrant. 

— Mauvaise idée de te battre avec Hyunjin..., soupira le plus âgé en secouant la tête. Il ne t'a pas déboité l'épaule j'espère ? 

— Il me fait chier, soupira Jisung. Ça va, t'as vraiment cru que ce type allait me casser en deux ? 

— Mais mec, j'ai vraiment eu peur quand il t'a tapé ! 

Le brun assis à côté de lui explosa de rire tandis que Chan se faisait violence pour ne pas lui faire ravaler son sourire goguenard. Il en avait plus qu'assez de s'inquiéter pour des personnes qui n'en faisaient qu'à leurs têtes, ou encore, de prêter un peu trop d'attention à des individus qu'il connaissait à peine. Il se gifla intérieurement lorsqu'il réalisa qu'il venait de penser à Ciara. Il devait lui donner son premier cours d'hangueul demain après-midi.

— J'ai la dalle ! s'exclama Jisung dès qu'ils quittèrent le véhicule. 

Comme pour illustrer ses dires, il ne prit pas la peine d'attendre son ami et s'engouffra dans le café avec une hâte déconcertante. Chan marcha derrière lui, non sans lever les yeux au ciel. Dès qu'ils furent à l'intérieur de l'endroit bien chauffé, le plus âgé repéra la chevelure blonde d'Hana. Cette dernière était attablée en face d'un garçon qui n'était autre que Minho. 

— Un jus à l'orange, une tarte aux pommes et un donuts au chocolat s'il vous plaît, commanda Jisung. Promis, je te rembourserai ! lança-t-il en se tournant vers son ami. 

Ce dernier esquissa un petit sourire crispé, se faisant violence pour ne pas dire au brun qu'il avait un peu trop pris ses aises avec son portefeuilles. 

— Un jus d'orange s'il vous plaît, dit-il lorsque le serveur désira noter sa commande. 

Les deux jeunes hommes furent servis en un temps record. Alors que Jisung était encombré d'un plateau, Chan avait uniquement un grand gobelet design dans la main. Lorsqu'ils se dirigèrent vers Minho et Hana, cette dernière ne put s'empêcher de faire de gros yeux en remarquant la quantité de nourriture qu'avait commandé le brun. 

— Salut ! dirent les nouveaux arrivants avec une parfaite synchronisation. 

— Coucou, répondit Hana. Bon moi j'y vais, lança-t-elle. Y a mon père qui m'appelle. Euh, Minho... 

Ils se regardèrent et même s'ils ne prononcèrent pas la moindre parole la blonde hocha de la tête comme si elle avait deviné et parfaitement compris ce que son voisin voulait lui dire. Puis sans un mot, elle quitta les lieux, les clés de sa voiture en mains. 

— On lui fait peur ? plaisanta Jisung. Ah mais oui, c'est vrai qu'elle m'aime pas trop depuis que je l'ai baptisée Grincheux... 

— Tais-toi, balança Minho en un rire. J'ai raté grands choses pendant l'entraînement ? Le coach en a pas trop profité pour me cracher dessus j'espère ? 

— Euuhh..., commença Chan avec sa paille coincée entre ses dents. Jeongin a enlevé son appareil dentaire. Hyunjin et Jisung se sont battus. 

— Oh, presque la routine quoi, commenta Minho. Sinon les gars, je pense que nous sommes dans la merde. 

S'il avait été dans un autre contexte, Chan ne se serait pas fait prier pour rire aux éclats en voyant le visage effaré de Jisung. Mais à cet instant, loin de lui était l'envie de plaisanter. Son cœur avait été sujet à une violente secousse dès qu'il eut entendu la dernière phrase de Minho. 

Le plus jeune d'entre eux mastiquait sa tarte aux pommes avec un tout petit peu moins d'entrain qu'il y a trois minutes. Après avoir avalé sa petite bouchée, il prononça le mot suivant : 

— Développe. 

— Oui, rajouta Chan. Je pensais qu'on était là parce que t'avais perdu ton chat, et que tu voulais savoir si ce n'était pas l'un de nous qui l'avait planqué. 

— Mardi je sors de cours, et ma mère m'annonce que Soonie est introuvable. Très vite j'en suis venu à conclure qu'elle avait disparu, expliqua Minho avec un calme olympien. Bon, j'imagine qu'il est inutile d'être le génie d'Aladdin pour deviner que je suis resté en pls pendant un bon petit moment. Ce matin je vous assure que j'étais décidé à venir à l'entraînement. Mais parce que la vie fait bien les choses, j'ai ouvert ma boîte aux lettres et... 

— Et ? l'encouragea Jisung qui était suspendu à ses lèvres. Ne me dit pas que t'as découvert le corps de ton chat dans ta boîte ? 

— Non. J'ai eu une autre surprise, chantonna-t-il. 

Sur ces mots, Minho plaça au centre de la table un papier qui avait été plié en quatre. Non sans avoir déglutit, Chan attrapa la feuille blanche et la déplia en retenant son souffle. Le garçon avait un très mauvais pressentiment, et dès qu'il se mit à lire les mots imprimés sur le papier blanc, il crut bien être sur le point de tomber dans les pommes. De son côté, Jisung n'hésita pas à laisser échapper un léger cri avant de bondir sur sa chaise. 

— District 9 ? répéta ce dernier d'un ton incrédule. Mais, c'est que pour les intimes ça !

Chan était au bord de la peur, d'ores et déjà consumé par l'inquiétude. 

— Ça veut dire que la personne qui a mon chat nous connait assez bien, conclut Minho.

— Ou bien c'est un stalker, suggéra Chan. Et là, c'est deux fois plus flippant. 

Les trois garçons se regardèrent tour à tour, probablement hanté par la même pensée. 

— On y va ? demanda Jisung avant de boire son jus d'orange. 

Le plus âgé était curieux de savoir comment son ami faisait pour avaler quoique ce soit. Mais en le scrutant un peu plus, il n'était pas impossible de déceler dans ses traits quelques signes de peur.

— Je vais y aller, répondit Minho. Le District 9 est un endroit que je connais bien. 

— Alors je t'accompagne, ajouta Chan. Te laisser y aller seul serait beaucoup trop dangereux. 

— Je viens aussi. 

— Merci les gars..., balbutia Minho. Mais, Hana aussi veut venir. Et connaissant les Suzuki, il n'est pas impossible que Hinata vienne avec elle. 

Pour Chan il était évident qu'il ne fallait pas que les sœurs Suzuki soient présentes ce soir. Ce serait beaucoup trop risqué. 

— Mauvaise idée, pensa-t-il à voix haute. Et si elles découvraient la vérité ? On ne sait pas ce qu'il va se passer pendant ce rendez-vous. 

— Il n'a pas tort, fit remarquer Jisung avec une petite voix. 

Incroyable. Le garçon avait fini son super goûter. 

— Je me vois mal y aller sans elle, avoua le brun. 

— Vous vous détestez, non ? Pourtant, toute à l'heure en vous voyant on aurait presque pu croire que les choses se sont arrangées entre vous. Si elle commence à être un peu plus agréable avec toi, crois-moi, il serait préférable qu'elle ne sache pas la vérité, balança Chan. 

En prononçant ces mots assez durs, le plus âgé sentit une pointe de tristesse le piquer en plein cœur. 

À sa grande surprise, Minho secoua la tête pour lui faire comprendre qu'il était bien décidé à ne pas changer d'avis. 

— Tant que Soonie est mêlée à toute cette histoire, Hana a le droit d'être là. Ne vous inquiétez pas, dit-il avec un semblant de sourire amer, je suis le dernier de ses soucis. Ce qui l'intéresse vraiment c'est le chat. 

En proie aux doutes et à une houle de questionnements, l'aîné du groupe se mordit la lèvre inférieure. À cet instant, Chan était hanté par l'horrible impression de n'être ni plus ni moins qu'un monstre égoïste. Tous les propos qu'il avait tenu laissaient à comprendre qu'il ne pensait qu'à une seule chose : se protéger. Il voulait s'assurer que personne puisse découvrir un quelconque élément susceptible d'entâcher sa réputation. Dans le fond, le brun était persuadé que toute cette histoire de chat disparu pouvait être lié à ce qu'il s'était passé ce jour-là. Et il n'avait qu'à croiser le regard des deux jeunes hommes installés près de lui, pour deviner qu'à son instar, ils étaient sujets à des prémices d'angoisse. 

— Je pense pas que je pourrais te faire changer d'avis, conclut-il.

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GONE DAYS

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Parce qu'il était impossible que la mère de Jisung laisse son fils sortir après dix-neuf heures, le brun avait annoncé qu'il allait dormir chez Chan pour avoir la possibilité de bien réviser en sa compagnie. Sa génitrice avait accepté car elle vouait une grande confiance à ce jeune homme très respectueux et aimable, qui avait la chance d'être muni d'un sourire des plus attendrissants. 

— Cette histoire me fait un peu angoisser, avoua Jisung tout en enfilant ses chaussures qui avaient la particularité d'être munies de semelles très épaisses. Et si en plus y a Hinata qui vient, tout est réuni pour que je perde connaissance avant la fin de la soirée. 

Chan le regardait tout en fermant la fermeture éclair de sa veste sombre. 

Vingt heures. District 9.

— Tu n'as jamais parlé à Hinata ? demanda-t-il en espérant que cette question les ferait déboucher sur une conversation triviale qui aurait peut-être le mérite de leur changer un peu les idées. 

— Jamais. Elle parlait à très peu de personnes. Elle était toujours avec sa petite bande de potes, et une fille qui s'appelle Seo Luna, commença à raconter Jisung avec une petite pointe de nostalgie. Pendant sa deuxième année de collège elle était allée en voyage scolaire avec la classe de Hyunjin. J'avais tellement la haine. C'est bizarre, je le connaissais pas très bien à cette époque mais j'avais déjà du mal à le voir en peinture. 

— Aies un peu de la peine pour lui, soupira Chan. Il entend son nom de partout, il est pratiquement harcelé. 

Vingt heures. District 9.

— Je sais que toute cette histoire d'harcèlement est fausse, dit Jisung en enfilant un bob noir. 

Chan haussa les sourcils, surpris d'entendre le brun prendre la défense de son pire ennemi. 

— Ah tu vois, dans le fond tu sais qu'il n'est pas si mauvais. 

— Peut-être. Je me dis qu'une personne comme Hinata n'aurait jamais accepté de lui adresser la parole si c'était vraiment un connard. 

Ce fut à cet instant que l'aîné reçut un message de Minho. Ils étaient là. 

Vingt heures. District 9.

Étant donné que la voiture de Chan n'avait que quatre places et que celle d'Hana pouvait se vanter d'en avoir cinq, ils avaient convenu que ce serait la Suzuki qui les mènerait jusqu'au lieu du rendez-vous. À dix-neuf heures vingt, la jeune femme était déjà garée près de l'immeuble où Chan avait loué un petit appartement qui avait le mérite d'être situé non loin de l'université qu'il fréquentait. 

— Tu viens ? 

Il leva la tête en direction de Jisung qui l'attendait à quelques pas de la porte. Et à cet instant il serra son poing et s'insuffla une bonne dose de courage. 

— Oui, bien-sûr ! 

Peut-être que ce fut son instinct. Oui, peut-être que c'était son instinct qui lui soufflait que le décompte avant un moment horrible venait d'être lancé.