Chapitre 35


« mais je ne suis pas encore prêt à arrêter de penser à toi. »

TOBIAS.

-Tobias ?

-Mmh ? Fredonna le châtain, un peu trop absent.

Loé le regarda avec un sourire et Tobias remarqua que le salon était silencieux et que tous ses amis le dévisageaient.

-Quoi ? Il demanda.

-C'est à toi de jouer, lui répondit Arthur.

Tobias baissa la tête vers le plateau de Monopoly, se souvenant soudainement qu'il était en plein jeu.

-Oh, il souffla.

Il sourit nerveusement et attrapa les dés, obtenant un six et un deux lorsqu'ils rebondirent sur le plateau. Il tomba sur une case chance et dû payer vingt dollars pour avoir acheté des bières.

Tobias paya passivement, laissant Arthur jouer ensuite. Ce dernier tomba sur l'hôtel d'Hercule et là commença un long débat parce que le bouclé n'avait pas la somme demandée.

Tobias se tourna en soupirant, laissant son regard se perdre à l'extérieur de la fenêtre, là où une pluie battante secouait la ville. Ses pensées divaguèrent de nouveau et il se laissa emporter, comme d'habitude, vers ses souvenirs.

Aujourd'hui, ça faisait exactement vingt jours que Brody l'avait quitté dans son appartement après sa première fois.

Aujourd'hui, ça faisait treize jours qu'il avait appris qu'il n'était qu'un vulgaire pari.

Aujourd'hui, ça faisait cinq jours qu'il avait couché avec Brody. Cinq putains jours et il ne pensait qu'à ça.

Cette nuit-là le hantait comme un cauchemar et un rêve à la fois.

Il avait toujours des frissons quand il pensait à la façon dont les mains de Brody avait glissé sur sa peau, comment ils s'étaient embrassés avec désespoir, la manière dont Brody l'avait tenu si près de lui en lui soufflant des mots doux.

Mais, ces frissons étaient rapidement remplacer par un vide dans sa poitrine quand il revoyait le visage détruit de Brody quand il était parti quelques heures après, quand il se souvenait que Brody lui avait brisé le coeur.

Le vide.

Il était de nouveau là et Tobias détestait ça.

Il avait l'impression d'être un peu plus ouvert depuis sa deuxième nuit avec Brody, mais il avait aussi l'impression de devoir jouer encore plus la comédie.

Tout était si confus dans son esprit, il ne savait plus quoi pensait, et cette incompréhension le conduisait à s'enfermer dans sa chambre avec les volets fermés et les lumières éteintes.

Rien. Il ne voulait être rien. Il voulait être vide de toutes émotions.

Le plus dur n'était pas vraiment le tourment infernal dans lequel il était piégé, non, c'était ce constant rappel que Brody était maintenant une partie de lui.

Où qu'il aille, il pensait à Brody. Tout lui rappelait Brody. De son lit à sa bibliothèque, en passant par sa salle de bains et son porche, tous ces endroits avaient un rapport avec le basané. Mais il y avait aussi le café dans le centre-ville, le port, sa voiture, le supermarché, la piscine, le studio, les douches des vestiaires, tout.

Littéralement tout le ramenait à Brody.

Et c'était horrible.

C'est pourquoi il passait le plus clair de son temps ici, chez Hercule, Arthur et Loé. Leur appartement était le seul endroit imperméable à ses pensées noires parce que rien ici n'avait de lien avec Brody ici.

Tobias se prêtait souvent à croire que tout irait mieux s'il partait, mais il savait que même s'il s'enfuyait, Brody demeurerait là, dans son esprit et sous sa peau, comme un tatouage.

-Oh, Tobias, tu joues ou pas ?

Le châtain fut de nouveau ramener à la réalité par le ton joyeux de Loé.

Il ancra son regard dans le sien et remarqua les dés devant lui. Il les contempla un moment, silencieux et immobile.

Il savait que ses trois amis le fixaient dans l'attente d'explication, mais même Tobias ne comprenait pas son comportement.

-Non. Je n'ai plus envie de jouer. Je vais rentrer chez moi, il murmura.

Il se leva et attrapa son manteau sur le dossier du canapé, et sans demander son reste, Tobias s'échappa de l'appartement avec trois voix hurlant son prénom dans l'entrée.

Tobias essayait vraiment, de toutes ses forces, mais il était incapable de ne pas être tourmenter par Brody, pas quand ses blessures étaient toujours autant à vifs.

Quelques minutes plus tard, il était devant sa grande maison, vide et silencieuse, ses parents étant partis pour une affaire importante à Pittsburgh.

Il laissa ses clés traîner sur l'îlot central et il alluma le chauffage parce qu'il faisait vraiment froid. Aussi, il alluma le feu sous la bouilloire et se prépara une tasse de thé à la menthe.

Tobias avait conscience de combien ses gestes étaient monotones, combien il avait juste l'air d'un robot déprimé ou d'une loque humaine. Il déambulait dans les couloirs, les buts dans sa vie étant flous et indistincts.

Il avait toujours redoutait la solitude. Il détestait la solitude. Il était très souvent seul, mais cette forme de solitude était différente que celle qu'il affrontait aujourd'hui.

Avant, il pensait que les quelques personne qu'il avait côtoyé étaient de réels amis, qu'il avait été réellement amoureux des filles qu'il avait fréquenté, que ses parents l'aimaient vraiment, mais tout s'était avéré faux parce que Tobias avait rencontré le vrai amour.

Il avait rencontré Brody.

Brody qui s'était insinué sous sa peau et dans sa tête. Brody, ses beaux yeux et sa veste en cuire. Brody, ténébreux et mystérieux. Brody.

Et aujourd'hui, Tobias était seul face à une immensité vide, faite de rien, et il était seul.

Tellement seul que ça lui faisait mal dans sa poitrine.

Son regard se perdit sur la vieille bouilloire où la peinture rouge commençait à s'écailler.

La pluie battait fort dehors et c'était le seul son autour de Tobias. Ça et celui du petit sifflet au bout du bec de la bouilloire. Il l'enleva du feu et en versa dans sa tasse. Puis il s'assit à l'îlot central avec son ordinateur, essayant vainement de se concentrer sur son nouveau sujet de dissertation.

« Être un avocat de la Défense : volonté de corrompre la justice ou réel souhait d'aider des personnes en difficulté ? »

Tobias n'avait jamais était aussi peu inspiré de toute sa vie.

Il n'était pas sûr d'avoir compris le but du sujet, mais ce qu'il savait, c'est qu'il lui restait deux jours et qu'il devait écrire plusieurs pages. Il n'avait rien écrit, donc pour traduire, il était dans la merde.

Le châtain resta plusieurs heures avachi devant son ordinateur, regardant le clignotement régulier de la petite barre en haut de sa page blanche et vierge.

Rien. Rien. Rien.

Pas d'inspiration, pas d'idées, pas de plans.

Il ne savait même pas de quoi il voulait parler et encore moins s'il voulait réellement en parler.

Tobias était tellement vide et fatigué qu'il n'arrivait même pas à réellement se concentrer sur son devoir. Il soupira et s'étira sur son siège, les membres engourdis de n'avoir rien fait pendant plusieurs heures d'affilées.

Il avala le reste de son thé froid et se leva pour le mettre dans l'évier.

Tobias remarqua son téléphone, abandonné sur le comptoir depuis qu'il était rentré. Il mordilla l'ongle de son pouce alors qu'il le récupéra, s'appuyant contre le plan de travail derrière lui, le coeur battant la chamade dans sa poitrine.

Il n'avait aucun message et il ne savait pas s'il devait être soulagé ou non.

Quand il déverrouilla l'écran, Tobias tomba sur sa conversation avec Brody.

« Je suis désolé. »

Simple. Clair. Net.

C'était le dernier message que Brody lui avait envoyé, deux jours après qu'ils se soient vu pour la dernière fois.

Tobias soupira, les yeux un peu humides.

Il rallumait son téléphone seulement quelques fois par jour et il finissait toujours sur le contact de Brody, hésitant à l'appeler ou non. Il le voulait vraiment, il avait ce constant besoin d'entendre la voix de Brody, de savoir qu'il allait bien et qu'il était toujours là.

Mais parler avec lui signifiait aussi ramener des moments du passé que Tobias avait du mal à digérer, des moments faux et joués quand lui avait toujours était sincère.

C'était une représentation de tiraillement auquel il était confronté. Son amour et sa haine envers Brody.

Mais ce soir, Tobias était plus seul que jamais, faible et stressé, anxieux et triste, et c'est peut-être pour ça que, pour la première fois depuis qu'il avait quitté Brody, il appuya sur l'icône en forme de téléphone.

Il rongeait toujours ses ongles quand il porta son téléphone à son oreille, les yeux humides et les joues chaudes.

Tobias n'attendit que deux sonneries avant d'entendre la voix de Brody.

-Allô ? Répondit Brody.

Tobias dû presser sa main contre ses yeux pour ne pas pleurer et il ne savait même pas pourquoi il était autant émotif, sûrement parce que Brody lui manquait terriblement et qu'entendre sa voix faisait battre son coeur un peu plus vite. 

-Salut, il murmura.

Il dû attendre trente secondes ou peut-être deux minutes avant d'entendre la voix de Brody de nouveau. Tobias mit ça sur le compte du choc.

-Hey, Toby, ça va ? Souffla le basané.

Et sa voix était si rauque et si belle et Tobias voulait l'entendre prononcer son prénom pour toujours.

-Ouais. Ouais, bien-sûr et toi ? Il mentit, pinçant ses lèvres pour retenir ses larmes.

-Ouais, ça va, répondit Brody et Tobias pourrait jurer que le basané haussait les épaules avec une moue d'hésitation.

-Tu fais quoi ? Demanda le châtain.

Il entendit un bruit de sac plastique et une portière être claquée. Il se dit qu'il devait être dans sa voiture.

-Je viens des faire des courses. Ça va faire un mois que je mange des pizzas surgelés et des plats chinois tout fait alors je me suis dis que ce serait une bonne idée d'acheter d'autres trucs. T'sais, des trucs un peu verts qui sont bons pour la santé.

Tobias gloussa, l'atmosphère se détendant légèrement.

-Ouais, il manque plus que tu ouvres tes fenêtres et que tu fasses le ménage et t'auras rempli ta mission de bon citoyen.

Le basané rigola doucement et Tobias se mordit la lèvre, les joues humides mais le coeur ravivé.

-Ouais, c'est vrai, murmura Brody.

Les deux garçons demeurèrent silencieux l'espace de quelques minutes, écoutant la respiration de l'autre et appréciant ce calme.

Tobias se sentait plus appaisé. Il sentait que le poids sur son coeur et ses épaules s'était un peu soulevé et il savait que c'était grâce au rire de Brody.

C'était juste grâce à Brody.

-Tu me manques, chuchota finalement Brody, brisant le silence.

Tobias soupira en baissant la tête, regardant ses pieds, le coeur battant rapidement dans sa poitrine.

Il aurait voulu paraitre fort et détaché, mais il était incapable de mentir. Ni à lui-même, ni à l'homme qu'il aimait.

-Tu me manques aussi.

Et c'était juste beau parce que Tobias savait que Brody souriait. Il le savait parce qu'il entendait sa respiration changer légèrement et aussi le petit souffle de soulagement et Tobias le connaissait juste de cette manière intime.

C'est pour cette raison qu'il avait du mal à laisse Brody partir, malgré ce qu'il avait fait. C'est parce qu'il avait toujours l'impression que c'était la même personne qu'il avait connu au cours des derniers mois.

Tobias retrouvait les mêmes comportements, les mêmes mots, les mêmes rires qu'il y a un mois, quand il était tombé amoureux de lui, aveuglément et sans se rendre compte qu'il représentait une somme d'argent.

En revanche, Tobias effaça l'image du pari de son esprit et se concentra sur la respiration de Brody dans le haut-parler. Puis il soupira et mâchouilla sa lèvre inférieur.

-Ça te dirait de - je suis tout seul ce soir et - et je me demandais si peut-être tu voulais - genre, passer à la maison ? Il demanda doucement.

Brody sembla réfléchir ou peut-être digérer l'information, Tobias ne savait pas mais il était certain que Brody était au moins un peu surpris.

-Euh, ouais. Ouais, carrément. À quelle heure ?

Tobias entendait le sourire dans sa voix.

-Quand tu veux. Je ne bouge pas d'ici.

-Ouais, ok, super. Tu veux que je prenne quelque chose ?

Le châtain regarda son frigo avec dédain.

-Mon frigo et mon ventre sont vides, tu peux prendre quelque chose de gras à manger ?

Le rire de Brody pénétra l'air et Tobias ne put retenir un sourire parce qu'il aimait quand Brody riait.

-Ouais, d'accord, quelque chose de gras, je peux faire ça.

Tobias hocha la tête, même si Brody ne pouvait pas le voir.

-Donc dans une quinzaine de minutes ici. Ok ?

-Ok, répéta Brody.

Le châtain gloussa.

-Arrête de me draguer.

-Je ne te drague pas.

-Reprendre les répliques de Nos Étoiles Contraires, c'est petit.

Brody ria plus fort et Tobias l'accompagna.

-N'importe quoi. Tu te fais des films.

-C'est toi qui fais un film ! L'accusa Tobias.

-Bien-sûr, souffla Brody et Tobias devinait son roulement d'yeux et son sourire.

Et il restèrent encore un peu au téléphone avant que Tobias ne se plaigne d'avoir faim. Brody raccrocha et le châtain s'appuya contre le comptoir, un sourire aux lèvres et son téléphone contre son coeur.

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