Chapitre 6 - Partie 2.

— De toute évidence, non, réponds-je, d'un ton glacial.

Encore une fois, il reste imperturbable, mais finit par laisser un sourire étirer le coin de ses lèvres charnues.

— Il s'agit de votre familier. Chaque Sang d'Argent en possède un, ou plusieurs, d'ailleurs. Une chose est certaine, à la naissance, un animal mystique est attribué à toute personne de votre espèce. Vous êtes... connectée à lui, si je puis dire. Vous ne faites qu'un, depuis le jour de votre venue au monde. Votre magie est sienne et la sienne est vôtre.

Il laisse les mots planer un instant, puis continue :

— Tout porte à croire que votre familier était « dormant ». Il hibernait, en quelque sorte. L'attaque que vous avez subie l'a éveillé et il vous a protégée du mieux qu'il a pu.

— En se servant de moi pour tuer un homme et pour tout détruire sur son passage ?

Le haussement d'épaules de Evander ne fait qu'augmenter ma frustration, mais je demande tout de même :

— Où est-il maintenant, ce familier ?

— Il fait toujours partie de vous. Cela ne changera jamais. Après s'être assuré que toute menace était écartée, il est revenu à sa place et s'est évertué à chasser le poison encore dans votre organisme.

— Mais... vous venez de me dire que l'attaque l'a réveillé ?

— C'est bien ça. Réveillé ne veut pas dire « libéré ». Quant à sa forme originelle, je ne peux pas vous dire à quel moment il la reprendra. Ce sera avec lui que vous devrez en discuter.

Poussant un grognement, je tape l'arrière de ma tête contre la paroi de la calèche. Tout ça, c'est une histoire de fous ! Hier encore, je n'étais qu'une paysanne sans histoires, qu'une personne dotée de quelques petits pouvoirs sans réelle importances. Je me cachais, certes, mais j'avais ma famille et mes amis.

Et maintenant ?

Maintenant, c'est le chaos. Tout est aussi carbonisé autour de moi, que la forêt après mon passage.

— C'est beaucoup à assimiler, mais sachez que vous êtes en sécurité, Princesse.

Le mot me fait l'effet d'un jet d'eau glacée que l'on m'aurait lancée en plein visage et je réponds sèchement :

— Ne m'appelez pas comme ça.

— Princesse ? s'étonne Nami.

— Il a dû inhaler trop de fumée en venant nous aider. Il ne sait pas ce qu'il dit. D'ailleurs, vous n'avez toujours pas expliqué votre présence, là-bas. Comment nous avez-vous trouvés et pourquoi nous avez-vous aidés ?

Les yeux d'Evander brillent d'une lueur mutine, ce qui est, il parait, un trait de caractère chez les Fées. Elles sont charmantes au premier abord, mais caractérielles et leurs promesses sont souvent futiles, parce qu'elles n'ont qu'une parole, mais trouvent toujours le moyen de tordre la vérité et de ne pas tenir leur engagement. Dans les légendes, il est dit qu'elles aiment semer le chaos et que leur violence est douce, empoisonnée. Elles sont fourbes et maîtres dans l'art des coups bas.

Voilà pourquoi je peine à lui faire confiance. Bien que les Fae n'appartiennent - ou n'appartenaient - qu'à des mythes depuis leur extinction supposée, qui peut croire pleinement les on-dit ?

— Vos amis ici, ne sont donc pas au courant de l'honneur qui leur est fait ? Voilà des années que je veille sur vous, Princesse.

— Je ne suis pas une princesse !

— Oh, vraiment ? Ai-je donc perdu deux décennies à observer et à assurer la sécurité de la mauvaise personne ?

Je le fusille du regard, alors qu'une main vient tapoter mon épaule.

« Pourquoi t'appelle-t-il Princesse ? » demande Elion, sourcils froncés.

— Je...

Evander ne me laisse pas le temps de me justifier ni d'inventer quelconque excuse, et dit :

— Parce qu'elle est la dernière née de la famille Raelys. Et également la dernière survivante.

Cette révélation jette un froid dans la calèche. Le seul qui n'a même pas la décence d'avoir l'air désolé ou seulement compatissant, c'est bien Evander. Au contraire, je le soupçonne même d'être plutôt fier de son effet !

— Il ment, hein ? N'est-ce pas, Eleanora ? C'est faux, ce qu'il dit.

La voix de Nami est enrouée. Elle combat des sanglots, je la connais assez pour savoir quand elle est sur le point de pleurer ou non.

— Vos parents adoptifs vous ont appelée « Lumière brillante », lance notre hôte, amusé. C'est assez représentatif de votre personnalité, il faut avouer. Même si ça ne se voit pas, aux premiers abords. Pourtant, votre vrai nom est tout autre. Vous en rappelez-vous ?

— Tout le monde connait le prénom de la princesse. Elle s'appelait Alora, ce qui veut dire « rêve », puisque c'était celui de la Reine, d'avoir une fille. Le fait que je le sache ne serait pas une surprise et ne prouverait rien, puisque tout le royaume sait déjà tout ça.

Il lisse les pans de sa veste hors de prix, couleur émeraude qui est magnifiquement assortie à ses yeux, sans perdre une seconde son expression amusée.

Ravie que cette situation lui fasse autant prendre son pied, alors que je me trouve moi-même au-dessus d'un précipice, prête à chuter encore plus profondément que je ne le suis déjà ! Comment peut-il savoir autant de choses ?

— Certes, mais je parle de sa réelle identité. Alora était le nom qu'ils lui donnaient en public et que tout le monde connaissait, mais quand ils étaient en privé, comment l'appelaient-ils ?

Son regard croise le mien et il sourit alors que mes mains se crispent sur mes genoux, que mes mâchoires se serrent. Cette fois, c'est à mes yeux que les larmes montent et je les retiens de toutes mes forces.

— Elea ? s'enquit Nami.

À bout de forces, je laisse les larmes rouler le long de mes joues, brûlantes comme de l'acide, et s'échappe dans un souffle, quatre mots :

— Amaya. Ils l'appelaient Amaya.

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Hello !

Et voilà qu'on doit s'arrêter sur un cliffhanger ! Princesse ?! Alora ? Amaya ? 😳

À très vite pour la suite !

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