Chapitre 5

La foule hurlait son impatience à grands cris, les tribunes tremblaient sous l'excitation générale et les pieds frappaient d'un rythme soutenu sur le sol. Les habitants de Capoue attendaient avec impatience ce moment depuis plusieurs semaines, leur fougue ne cessait d'augmenter. Les combats annoncés par Marcus Crassus promettaient des rebondissements, du divertissement de qualité et des gladiateurs prometteurs. Le prêteur avait organisé le tout dans les règles de l'art, offrant la nourriture aux spectateurs. Le pain circulait parmi la foule, tout comme l'argent volait de mains en mains, les paris ne cessant d'augmenter.

Certains noms de gladiateurs cumulaient déjà un nombre conséquent de paris. Faustus, un gladiateur d'une école adverse à celle de Lentulus demeurait en tête, sa chance phénoménale avait forgé sa renommée locale et était la raison de son surnom : le veinard. Derrière lui, le Grec, Aniketos qu'on disait invincible avait su gagner la confiance des spectateurs. Mais d'autres connaisseurs plus audacieux misaient sur des nouveaux et la réussite ou non de leur premier combat.

En revanche, si les avis différaient sur les vainqueurs, tous étaient d'accord sur une chose : l'attente était trop longue. La fébrilité cédait petit à petit sa place à l'agacement au fur et à mesure que le temps passait. On se questionnait, on hurlait sur Crassus qui restait en apparence impassible dans sa tribune. L'engouement perdait en vigueur, les paris cessaient d'animer l'amphithéâtre. Un silence de mort finit même par s'installer. Les regards se figeaient sur le prêteur, la colère vibrait, muette et d'autant plus oppressante.

Le prêteur finit par quitter sa loge afin d'aller voir Lentulus et exiger une explication. Sa propagande politique tournait au désastre. Il descendit en dessous de l'arène où devaient déjà être prêts les provocators qui devaient ouvrir les jeux. Tertulla l'observa quitter ses côtés de son regard le plus impassible. Elle tentait de ne rien laisser paraître de ses émotions, de sa joie, de la fierté d'avoir permis aux gladiateurs de s'échapper. Elle avait convaincu Spartacus que Lentulus était bel et bien au courant de ses manigances. Bien que paralysée par la peur des conséquences que son acte pourrait avoir, elle ne pouvait s'empêcher d'être satisfaite de son escapade nocturne du soir précédent.

Alors que le guerrier avait prévu de fuir avant les jeux, il avait reporté ce départ au moment même de ceux-ci. Le maître s'était trouvé soulagé de ne voir aucune agitation la veille du jour tant attendu. Il s'agissait du moment dont on lui avait parlé, du soir durant lequel ses esclaves avaient prévu de partir. Ils n'en avaient rien fait, Lentulus avait vite conclu qu'on lui avait fourni de fausses informations.

Il se trompait sur toute la ligne.

Crassus arriva en dessous de l'amphithéâtre et le trouva vide. Aucune agitation, pas un murmure. Trois gardes censés envoyer les gladiateurs dans l'arène étaient écroulés sur le sol, Lentulus et les deux autres propriétaires d'écoles étaient tous trois attachés entre-eux et baillônés. Plus aucun esclave ne se tenait ici. Mais comment tout cela avait-il pu se faire sans bruit, sans que personne en haut ne s'en rende compte ? Marcus bouillonnait de rage. Il ne laisserait pas les esclaves responsables de sa honte impunis. Il les tuerait tous de sa propre main s'il le fallait mais aucun esclave ne lui avait jamais tenu tête. Alors le ridiculiser devant une foule qu'il devait satisfaire était impardonnable.

Il libéra les trois hommes attachés et leur exigea de lui fournir une explication au plus vite.

-Ils se sont tous retournés contre nous, ils se sont servis de leurs armes pour tuer les gardes. Nous n'avons rien pu faire, s'empressa d'expliquer l'un des trois hommes.

Lentulus s'avança d'un pas et annonça d'une voix blanche :

-Je crois avoir compris que l'un des miens en est à l'origine. Je t'en avais parlé lors de ta visite de mon établissement...

Crassus le foudroya du regard.

-Si tu étais au courant, comment se fait-il que tu n'aies rien empêché ?

Le coupable baissa les yeux sans trouver de réponse. Soudain, un homme habillé pour combattre arriva au pas de course. Un gladiateur visiblement. Il héla les quatre hommes :

-Ils se rendent à l'école de maître Batiatus de ce que j'ai pu entendre, ils vont récupérer les hommes qui n'ont pas été choisis pour combattre aujourd'hui. Je connais le reste de leur plan... mais il me faudra votre promesse de garder mon identité sous silence ainsi que garantir ma liberté.

Le gladiateur annonçait le tout d'une traite, essoufflé. Il dénonçait sans scrupule ses camarades. Lentulus le reconnut : il s'agissait de l'homme qui les avait dénoncés une première fois. Il ne savait pas s'il pouvait lui faire confiance mais n'ayant pas d'autre piste, les hommes décidèrent de se fier à lui et acceptèrent ses conditions. Le gladiateur annonça alors des chiffres, dévoilant que pas moins de trois-cent personnes complotaient, qu'ils comptaient voler toutes les armes restées dans l'école et s'enfuir ensuite en ralliant le plus d'esclaves possible à leur cause.

Les informations leur furent communiquées tandis qu'ils se précipitaient vers la sortie de l'amphithéâtre. Marcus chargea des hommes croisés en chemin de prévenir Tertulla et de faire patienter les spectateurs avec de la nourriture. Il promit que les jeux auraient lieu très rapidement, persuadé d'être plus rapide que de vulgaires esclaves.

***

Ces derniers couraient vers l'école, exaltés par l'adrénaline, par la liberté qui leur tendait les bras. Une soixantaine d'hommes se dirigeaient à vive allure vers le domaine de Lentulus. Là, près de deux cents gladiateurs attendaient leur arrivée pour se débarrasser des gardes et emporter des armes et des provisions. Spartacus et Crixus étaient parvenus à mettre près de trois cents personnes au courant de leurs manigances. Plus il y avait de monde qui se rajoutait, plus leurs risques d'être dénoncés augmentaient... mais plus l'impact que leur départ pouvait avoir grandissait également.

Tandis que Spartacus prenait la tête du groupe afin de guider les hommes à destination, Aniketos avait décidé de rester à l'arrière afin de vérifier que personne ne faisait demi-tour. Il était trop risqué de laisser quelqu'un s'enfuir. Personne n'était au courant avec exactitude du plan mis en place par les deux commandants mais tous en savaient assez pour leur nuire.

Un mouvement attira l'œil d'Aniketos. Un homme cessait sa course et faisait demi-tour à toute allure. Dans l'excitation du moment, les autres semblaient ne pas l'avoir remarqué, personne ne cessait sa course infernale.

-Crixus, hurla Aniketos. Il y a un traître qui vient de partir prévenir les maîtres !

L'homme regarda derrière lui. Il n'aperçut personne dans la rue déserte qu'ils traversaient au pas de course, la population s'étant rendue dans sa grosse majorité aux spectacles. Crixus haussa les épaules et répliqua sans s'arrêter :

-Tu as dû confondre. Continue de courir maintenant, notre absence ne restera pas inaperçue longtemps.

Aniketos ne prit pas la peine de le contredire. Mais il enrageait. Il ne désirait pas faire demi-tour seul, le risque d'être rattrapé le forçant à ne pas s'arrêter... cependant il était certain d'avoir vu un homme partir. On ne l'avait pas cru lorsqu'il avait affirmé que Maximus les avait dénoncés. Sans Tertulla pour confirmer ses dires, rien n'assurait que le plan des deux dirigeants aurait été modifié pour leur offrir la possibilité de s'enfuir. D'ailleurs, Maximus avait nié en bloc, affirmant qu'il n'avait rien à voir avec le traître qui avait fait part de leur envie à Lentulus. Et personne n'avait cherché à croire Aniketos.

Aniketos, l'homme invisible, doué au combat mais peu ouvert aux autres ne s'était pas trouvé beaucoup d'alliés. Il considérait Spartacus comme son ami mais c'était bien le seul qu'il avait. Les autres ne trouvaient pas grâce dans le cœur d'Aniketos. Et cela lui faisait défaut face à des hommes comme Maximus, appréciés de tous.

Ainsi, le Grec ne dit plus rien. Il canalisa sa colère pour la transformer en une énergie qui lui donna la force de continuer à courir. Ils verraient bien, tous, qu'il avait eu raison lorsque Crassus et Lentulus arriveraient comme des furies pour les empêcher de quitter l'école. Mais il n'était pas dans les plans du Grec de se laisser avoir. Il quitterait le bâtiment avant les autres.

Il accéléra la cadence jusqu'à arriver en tête, près de Spartacus. Il lui répéta la même chose qu'à Crixus. Pour leur laisser une chance. Spartacus était un homme intelligent, il écouterait les conseils de son ami. Aniketos n'attendit pas de réponse, laissa Spartacus seul avec toutes les informations en main et disparut dans la foule de gladiateurs galvanisés par leur fuite.

Le ludus* de Lentulus se tenait un peu à l'écart de la ville. Celle-ci se construisait autour du forum dans un enchevêtrement de rues moins régulières que celles de Rome mais construites non sans une grande réflexion : elles étaient assez larges pour laisser passer des chariots. Lorsque les pieds chaussés de sandales des fuyards foulèrent non pas des pavés mais bien de la terre battue, ils surent qu'ils étaient arrivés.

Devant l'entrée principale, deux hommes montaient la garde. Ils virent foncer sur eux la horde de rebelles avec horreur et firent volte-face. Spartacus hurla, des centaines de guerriers surgirent de l'écurie, de la cour, des bâtiments, des terrains d'entraînement. Les malheureux gardes furent attachés dans les sous-sols où furent ensuite entreposés les mentors et les gladiateurs qui ne prenaient pas part à la rébellion.

Tout se fit dans un désordre qui rendit Aniketos fou. Des hommes couraient en tous sens, des armes étaient sorties de la salle d'armes sans discipline, certains se ruaient vers les cuisines, d'autres préféraient abîmer au plus l'école qu'ils haïssaient. Mais que leur avait donc ordonné Spartacus ? Pourquoi personne n'agissait pour faire régner l'ordre et gagner en efficacité ? Si le grec se le demanda, il ne prit pas les choses en mains, décidant de se faire le plus petit possible pour pouvoir filer en douce s'ils avaient bel et bien été dénoncés. Fuir à trois-cent n'était pas possible. Aniketos était loin d'être dupe. Lorsque des hommes armés débarqueraient ici pour les arrêter, tous ne parviendraient pas à quitter l'endroit sains et saufs. Il comptait ne pas faire partie des malchanceux. Pour cela, il devait connaître les intentions de Spartacus. Aniketos fut long à le trouver dans le désordre qui emplissait l'école mais il finit par le remarquer en train de se diriger vers les cuisines. Il le héla :

-As-tu réfléchi à ce que je t'ai dit ? Ils arrivent... nous n'avons plus beaucoup de temps.

Spartacus marchait d'un pas vif vers les cuisines, talonné par Aniketos. Il finit par soupirer :

-Je m'en doute depuis longtemps Ani... Nous avons été trahis une première fois, cela devait se reproduire. Viens avec moi sans poser de questions et en chassant de ton visage cet air effaré. Nous devons gagner le terrain d'entraînement sans se faire repérer, tâche d'être discret.

Aniketos se tut. Il obéit sans poser de questions. Il comprenait ce que tentait de lui dire le thrace sans le formuler à haute voix. Il s'en doutait depuis un certain temps au vu du peu d'attention que Crixus avait porté à ses propos. Les deux hommes paraissaient tous deux trop calmes lorsqu'il leur parlait de trahison.

Il comprenait à présent.

Si les deux hommes réagissaient si peu au fait d'être trahis c'était qu'en réalité ils s'apprêtaient eux-même à trahir les leurs. Jamais il n'avait été jugé possible de partir avec trois-cents hommes. Seule une minorité était destinée à réussir tandis que les autres serviraient de diversion.

Aniketos ne pouvait pas leur en vouloir, ayant lui-même décidé de sauver sa peau en cas du retour des maîtres. Cependant son esprit lui soufflait qu'il aurait dû faire partie des appâts. Il marchait aux côtés de Spartacus uniquement parce qu'il avait eu la chance d'insister sur la venue des troupes. Il en était à se demander combien avaient été choisis pour partir lorsque Spartacus franchit la petite porte menant au terrain d'entraînement des gladiateurs les plus doués et qu'Aniketos put ainsi voir un petit groupe d'hommes rassemblés derrière le mur qui offrait de l'ombre.

Aniketos, en tant que fils de marchand, avait appris à compter. Ils étaient cinquante-trois terrés silencieusement dans cet endroit. Une dizaine d'hommes les rejoignit en silence. Puis Crixus apparut avec sept gladiateurs. Ils furent finalement septante-trois lorsque Spartacus chuchota :

-Je vous ai réunis dans l'urgence. Nous n'aurons pas l'occasion de prendre de provisions, la cour va être envahie très prochainement. Il reste plus de deux cents hommes pour faire diversion, cela nous permettra de prendre de l'avance. Nous trouverons à manger en chemin. Sachez que nous serons sans cesse traqués, forcés de combattre et que plus longtemps ils mettront à nous rattraper, plus leur colère sera grande. Je ne vous force pas à me suivre mais sachez que si vous êtes ici, c'est que nous avions plus confiance en vous qu'en un autre et...

Crixus l'interrompit :

-Tu nous feras tes jolis discours lorsque nous serons loin d'ici. Je crains que ce ne soit pas le meilleur moment...

Spartacus acquiesça et ajouta une dernière chose :

-La plupart des gardes ont déjà été maîtrisés, mais rien ne nous prouve qu'il n'en reste pas. Tâchez d'être discrets et de les mettre hors d'état de nuire avant qu'ils ne puissent donner l'alerte.

Les hommes approuvèrent en silence et le groupe réduit se mit en marche jusqu'à la limite de l'enceinte de l'école. Les dernières barrières ne semblaient pas surveillées, contrairement à d'habitude. En se rapprochant du mur en pierre, Aniketos entendait son cœur tambouriner dans sa poitrine à un rythme effréné. Chaque pas le rapprochait de la liberté. Il ne pensait plus aux pauvres hommes qui servaient de diversion, il ne songeait qu'à Sparte, à sa mère, au goût de la liberté, à...Aelia et Tertulla .

Il les chassa de son esprit en se concentrant sur l'inspection du mur qui devait faire un tout petit peu plus que sa taille. Personne ne le gardait de ce côté-ci, mais peut-être que des gardes les attendaient de l'autre. Spartacus appela doucement Callimorphos, le plus grand et costaud du groupe qui se tenait courbé pour ne pas dépasser du mur. Le commandant lui demanda s'il pouvait jeter un œil au delà du mur pour voir si un piège les y attendait. L'homme s'exécuta et se dressa sur la pointe des pieds. Sa tête se tourna de gauche à droite puis il se tourna vers ses compagnons et déclara d'un ton victorieux :

-Je ne vois personne.

Tout le groupe s'en trouva soulagé. Les hommes s'arrangèrent pour hisser tout le monde de l'autre côté du mur, dernière barrière avant leur liberté. Au moment où Crixus était soulevé et tracté jusqu'en haut du mur, un premier cri retentit. Les troupes de Marcus, Lentulus et les deux autres maîtres d'école étaient arrivées.

L'affolement qui gagnait la cour parvint aux oreilles des fugitifs qui avaient devancé la trahison. Des hurlements, des cris de guerre, le son étouffé des armes qui s'entrechoquaient parvenaient aux oreilles des septante-trois gladiateurs qui se figèrent quelques temps pour écouter.

Ils se reprirent bien vite et quittèrent le domaine en courant, gagnant autant d'avance que la résistance de deux-cents guerriers pouvait leur offrir. Ils venaient de sacrifier autant d'hommes mais ce qui fit faire volte-face à Aniketos était la femme qu'il avait abandonnée : Aelia.

Il entendit son appel terrifié qui semblait proche de la barrière. Il fit demi-tour, sous les interrogations muettes des autres hommes et agrippa le mur pour l'escalader seul. La douleur ne l'atteignait plus, elle était devenue familière. Il parvint au sommet du mur et baissa la tête vers deux femmes en pleurs : Jila et Aelia.

Elles lui jetèrent des regards apeurés et le supplièrent de les emmener avec eux. Aniketos tourna la tête vers le groupe encore visible qui n'allait pas tarder à disparaître. Il n'aurait pas le temps de hisser les deux femmes sans perdre les gladiateurs de vue. Il tendit sa main à Aelia. Elle s'y accrocha de toute ses forces et il la remonta sans rien laisser transparaître de l'immense effort que cela lui avait demandé. La jeune femme atterrit sur le sol sans douceur, écorchant ses pieds nus. Elle releva la tête s'apprêtant à aider Jila à descendre mais fut surprise de voir le guerrier retomber seul de l'autre côté du mur.

Aniketos la saisit fermement par le bras et la tira derrière lui dans sa course effrénée à la poursuite de Spartacus et des autres. Aelia pleura, lui demanda pourquoi il n'avait pas aidé Jila. Mais le gladiateur ne sut que lui répondre. Il avait abandonné l'autre femme par égoïsme, par peur de se retrouver seul et préférant pour l'instant la sécurité du petit groupe. Il l'avait abandonnée elle, comme des centaines d'autres.

Mais il avait aussi abandonné une partie de son âme en agissant de la sorte. Elle restait enfermée entre les murs, piégée par les cris de ceux qui lui avaient permis d'être libre, poignardée par les pleurs d'Aelia et les yeux brillants de peur de Jila.

Chaque nouvel acte commis ici pour sa survie l'éloignait un peu plus du code moral enseigné par son père, sa ville, sa mère,... lui faisait oublier ses propres convictions. Il étouffait. Il se perdait. La servitude le perdait. Mais bientôt, il retrouverait Sparte. Et alors, il se retrouverait lui-même.

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* Un ludus est une école de gladiateurs.

Récapitulatif historique

-Rien n'indique que les rebelles se sont échappés lors de jeux. Le moment exact n'est précisé nulle part. Il s'agit d'un élément romancé.

-Le nombre de fugitifs était estimé entre 73 et 76 (Selon Paul Orose un historien, ils étaient 74 à fuir) et toutes les sources indiquent qu'ils étaient plusieurs centaines à comploter. De là à savoir si Spartacus avait prévu de les abandonner... Impossible de dire, c'est donc romancé.

-Rien n'indique qu'une femme faisait partie des fugitifs. C'est même très improbable mais j'ai pris la liberté de romancer cela car par la suite le groupe a été agrandi par des femmes également.

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