Chapitre 22

Une douce mélodie accueillit le demi-dieu lorsqu'il passa le palier des appartements royaux. Les orchestres ne semblaient jamais cesser bien qu'ils semblassent invisibles. Les boudoirs se succédaient dans des teintes claires et des parfums capiteux.

Un large bassin prenait ensuite place au centre des appartements. Les vaguelettes, plus agitées qu'à l'accoutumée, indiquaient que quelqu'un venait d'en sortir.

Le regard de l'hybride glissa sur les marches qui surélevaient le cabinet de toilette ouvert. Là, derrière un paravent, la silhouette gracile de la reine se dessinait dans une ombre de courbes et contrecourbes grâce à la lumière de la vaste baie vitrée qui prenait place derrière elle.

Arquen déglutit ; s'il n'y avait pas toutes ses servantes enrubannées de voiles blancs qui gravitaient autour de leur souveraine, il se serait empressé de la rejoindre.

Mais enfin, la Reine Vierge apparut, recouverte d'un peignoir de soie rouge. Le contraste avec ses cheveux noirs d'encre était sans appel ; l'intensité des deux teintes tranchaient avec sa peau très claire et ses yeux verts. Cela ne faisait que refléter davantage sa complexité et son aspect insaisissable.

— Arquen, chantonna-t-elle avec un sourire presque carnassier, cela faisait un moment que vous ne m'aviez pas rendu visite.

Le demi-dieu s'inclina devant sa reine :

— Majesté.

L'astre s'avança, juchée sur ses habituels talons aiguilles. Même dans son déshabillé, elle gardait de magnifiques bijoux étincelants au cou et aux oreilles. Ainsi, elle semblait briller et se mouvoir dans un halo éthéré. Son regard de braise restait d'une froideur mortelle alors que sa position ne souffrait aucune hésitation.

Elle méritait amplement sa renommée au-delà des frontières. Jamais l'hybride n'avait croisé de femmes si extraordinaires.

Le cordon de son peignoir accentuait une taille fine alors que l'échancrure du col dissimulait que trop mal une poitrine bien généreuse. Contrairement avec la vampire, Arquen se refusa toute œillade perverse ; il avait bien trop d'estime pour la Reine Vierge. Et peut-être aussi de la crainte. Car la belle n'hésitait pas à nourrir ses monstres de compagnie des quelques impertinents qui avaient le malheur de témoigner leur passion pour elle.

— Arquen, répéta-t-elle de sa voix toujours aussi mélodieuse, venez donc dans mon boudoir.

Elle n'attendit pas de réponse et passa devant lui. Cette fois-ci, l'homme ne put s'empêcher de reluquer les fesses rebondies de l'astre. Ses hanches ne demandaient qu'à être prises et ses cuisses à être caressées.

— Vous venez ?

— Oui... loin de moi l'idée de vous faire attendre.

Il réprima une grimace de frustration et ignora la décharge qui lui avait enflammé le bassin. À chaque entrevue, c'était la même chose.

— « Quelle sacrée aguicheuse, tout de même... »

Luinil s'était allongée dans un sofa avec une grâce toute calculée. Ses lèvres d'un rouge sanglant souriaient malicieusement.

L'hybride s'assit à son tour mais dans une position bien plus rigide :

— J'ai accepté votre mission, Majesté.

— Je savais que vous ne me décevrez pas. Grâce à vous, la guerre tourne à notre avantage.

— Vous me faites trop d'honneur...

Elle se saisit une mèche entre les doigts et joua avec comme si elle se désintéressait soudain de son hôte.

— J'ai cru comprendre que vous craigniez un assassinat de la part de la Fëalocy.

Luinil papillonna de ses paupières fardées sans se départir de son sourire envoutant :

— Je m'attends au pire. J'ai rencontré le roi Elaglar de bien nombreuses fois ; il a transmis sa folie à son ignoble progéniture. Hirilnim m'avait pourtant assuré qu'elle n'aurait jamais d'enfants avec le Roi en Blanc...

— Je ne suis pas certain qu'il lui ait demandé son avis, Majesté.

— C'est ce qu'on dit, en effet.

— Qui vous dit que le prince Morgal sera présent sur la presqu'Île d'Olmor ?

— Les faits. L'armée d'Elaglar est affaiblie. Ils ont besoin de nouveaux hommes et le prince est en âge de se battre. Son déséquilibre nous pousse à ne pas le sous-estimer. Il pourrait s'en prendre à notre élite sans penser aux conséquences.

— Je le tuerai avant.

— Certes. Jenny vous accordera son aide. Cet elfe semble se servir d'une magie particulière.

— Il faudra analyser son aura...

— Ce sera une partie de votre mission... Mais je ne veux pas vous retenir, Arquen, vous avez sans doute d'autres priorités.

Le demi-dieu resta un moment bouche-bée. D'autre préoccupations que sa reine ?

Il secoua la tête pour reprendre ses esprits et conclut :

— Je ne vous décevrai pas, Majesté.

— Je n'en doute pas.

Elle s'éventa sans le lâcher de ses yeux cernés de khôl. Les rayons qui passaient par la vitre faisaient scintiller son diadème de perles si bien qu'on aurait pu voir une véritable déesse de l'amour, ainsi étendue lascivement dans son canapé, offerte aux regards. Mais cela restait de l'ordre du fantasme.

L'hybride la salua et regagna sa suite, le cœur lourd et le sang bouillonnant. Cette femme pourrait le mener au gibet qu'il la remercierait...

C'était Luinil.

Il referma la porte plus sèchement qu'il ne l'aurait voulu. Assise sur un tabouret, Jenny jeta un regard rapide vers le nouveau venu avant de se reconcentrer sur le nettoyage de ses lames.

— En voilà un qui a croisé la reine, murmura-t-elle, un sourire en coin.

— Ah ça va !

Jenny se leva et s'avança vers le demi-dieu de sa démarche chaloupée.

— Je suis presque tentée de faire un geste pour notre duo.

Arquen sourit :

— Il faut savoir se soutenir entre coéquipiers...

La vampire hocha la tête et enlaça le cou d'Arquen de ses bras musclés :

— Je me suis toujours habituée à coucher avec mes collègues. Pourquoi faire exception aujourd'hui ?

Le champion saisit les cuisses de sa partenaire pour la soulever. En voilà une autre qui finirait dans ses draps. Mais dans toutes ces étreintes, il ne pouvait s'empêcher de penser à la beauté tentatrice de la Reine Vierge.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top