Chapitre 3

Morgal se retournait dans son lit, incapable de trouver le sommeil. Il était habitué à des matelas bien plus confortables et à la proximité de son frère. En soi, Malgal était juste à deux mètres de lui, enroulé dans ses couvertures légères. De temps, à autre, il remuait dans sa léthargie, comme pour essayer de s'extraire d'un mauvais rêve.

— « Vivement que notre Vala se réveille, songea son frère en l'observant, il en aura fini avec ces cauchemars. »

Mais l'apparition de leurs pouvoirs tardait. Ce n'était pas un mauvais signe, loin de là. Plus l'éveil se faisait tard, plus le Vala se révélait puissant. Et étant les fils d'un roi, il était logique qu'ils héritent d'une magie surdéveloppée.

Brusquement, Malgal se redressa, le visage marqué par la panique. Il sauta de sa couchette et courut à la fenêtre pour avaler une grande goulée d'air. Comme après chacun de ses cauchemars, ses membres tremblaient et la sueur perlait sur son front. Ce n'est qu'après un long moment de reprise de contrôle qu'il parvenait à se calmer.

Morgal se pinça le coin de la bouche et le rejoignit pour le réconforter. Il le serra dans ses bras et lui murmura :

— Écoute Malgal, il faut mettre fin à ton état. Je te propose de rencontrer la sorcière pendant que nous serons en ville.

— Tu crois qu'elle nous éclairerait ?

— J'en suis persuadé.

— Merci, Morgal.

Son frère enfouit son nez dans son épaule comme pour trouver une consolation à sa situation désagréable. Se faire visiter par une misérable sorcière toutes les nuits ne devait pas être une partie de plaisir. Morgal le ramena sur son lit sans le lâcher. Il ignorait réellement ce que subissait son jumeau durant ses rêves mais cela s'avérait plutôt traumatisant.

Comme Malgal se rendormait, il préféra ne pas le déranger en l'interrogeant sur un sujet qu'il évitait et ils restèrent ainsi l'un contre l'autre jusqu'à la fin de la nuit.




Une journée à Ur-Nabal se révélait pour le moins harassante. Les deux princes se demandèrent comment leur cerveau supporterait ce trop-plein d'informations et de connaissances. La formation s'étendait sur plusieurs domaines, allant de la géopolitique à la science en passant par la maitrise des langues. Pour des jeunes issus des plus hauts rangs de la société, il était évident de solliciter leur capacité intellectuelle au maximum. Sur ce point, les jumeaux s'en sortiraient, la nature les ayant dotés d'une intelligence bien au-dessus de la moyenne.

Non, là où ça allait piquer résidait dans l'enseignement au combat. S'ils savaient tenir une épée dans leur main ainsi que toute la théorie qui accompagnait le maniement des armes, ils perdaient tout leurs moyens dans un affrontement singulier ou en groupe.

Déjà le maître d'armes s'arrachait les cheveux devant leur niveau catastrophique.

— Il me fait de la peine, sourit Malgal à son frère.

— Avec nous, il n'est pas rendu.

— Je sens qu'on aura le droit à des heures d'entrainement supplémentaires.

— Tais-toi et essaie d'envoyer cette flèche dans le noir de la cible.

— Il faudrait déjà que je touche la cible, haha.

— Même moi j'y arrive !

— Elle est à une cinquantaine de mètres !

— Morgal, les autres apprentis vont se payer notre tête !

— Eh bien, nous aurons réussi leur journée au moins...

Il se tut brusquement lorsque le maître les rejoignit à grandes enjambées. Dans la cour d'entrainement, tous les regards convergèrent vers eux.

— Aïe, je sens mal ses intentions, murmura Malgal.

Leur supérieur s'arrêta devant les deux princes, le regard incendiaire.

— Margal ! Molgal ! Si vous pouvez arrêter de converser pendant votre entrainement...

— Moi, c'est Morgal, pas Margal, maître Zavlon, coupa-t-il.

— Peu importe ! Déjà que j'ignore comment je peux faire de vous des guerriers dignes de ce nom mais en plus vous n'y mettez absolument pas du vôtre. Vous croyez que nous vivons dans quel monde ?! En dehors de nos frontières, ce sont les combats qui vous attendent !

Zavlon fit un pas de plus vers eux, les surplombant de sa hauteur :

— Vous n'avez aucune idée de ce qui vous attend. De ce que l'on croise sur un champ de bataille. Votre imagination détraquée ne serait même pas capable de percevoir les atrocités que vous découvrirez ; les cadavres de vos frères, les tripes encore chaudes sous vos pieds, les corps en putréfaction et les armes impardonnables de l'adversaire. Si je devais vous y emmener demain-même, vous chieriez dans votre froc.

Les deux frères hochèrent la tête pour ne pas courroucer davantage leur maître.

— Mettez cette flèche dans sa cible maintenant, lâcha-t-il avant de leur tourner le dos.

— Oui, maître Zavlon.

Morgal tendit la corde l'arc, bloqua sa respiration et lâcha. La flèche fusa comme l'éclair et se figea sur la bordure du cercle.

— Bah parfait, la prochaine fois tu la mets dans le noir, complimenta Malgal.

— Je n'ai pas envie de devenir un adepte du tir à l'arc.

— Et pourquoi pas ? Tu restes loin de la mêlée et tu supprimes ceux que tu veux. Pas mal, non ?

— Tu crois vraiment que l'on nous laissera rester de pitoyables archers ? Nous sommes des princes.

— Eh bien dans ces cas-là, je réserve un dragon.

— Il faudrait déjà savoir en monter. Notre frère Macar a perdu trois ans avant de dompter le sien.

Malgal haussa les épaules et se réattela à son entrainement. Les Fëalocen étaient le seul royaume elfique à dresser des dragons pour le combat et cela leur avait valu de nombreuses victoires.

Morgal allait décocher une nouvelle flèche lorsqu'un groupe d'apprentis passa et s'arrêta à quelques mètres devant lui.

— Je ne veux pas vous tuer donc je vous propose de vous décaler.

— Pour cela il faudrait déjà que tu saches tirer, ricana celui qui semblait être le meneur.

Morgal soupira et baissa son arc :

— Qu'est-ce que vous voulez ?

— T'es un fils Fëalocen ?

— Ouais. Apparemment ça se voit.

Malgal rejoignit son frère, les sourcils froncés, pour savoir ce qu'il en résultait.

— Je croyais que les fils du Roi en Blanc étaient des guerriers uniques.

— Nous n'avons tous les deux pas les mêmes centres d'intérêt que nos cinq aînés.

— On voit ça. C'est très étonnant pour des princes Fëalocen. Peut-être qu'en fin de compte vous n'en êtes pas de vrais.

Morgal reposa l'arc sur son présentoir et se retourna lentement face à l'elfe qui lui mettait bien une demi-tête.

— T'es qui toi ?

— Le prince Tolos, le fils héritier du roi Ovéan Flamarinden.

— D'accord, tu viens de remettre en cause notre légitimité ou je me trompe ?

— Tu ne te trompes pas le morveux.

— Très bien.

Morgal lui attrapa les épaules et lui envoya un formidable coup de genou dans les parties. Tolos se plia en deux dans un râle de douleur, complètement neutralisé. Ses amis se précipitèrent vers lui pour l'aider pendant que Morgal tournait les talons, un sourire de satisfaction sur les lèvres.

— Tu ne l'as pas loupé, remarqua Malgal.

— Il a eu ce qu'il méritait.

— Si tu as rendu l'héritier de Flamarindo stérile tu risques de recevoir un formidable procès.

— J'attends de voir ça.

Ils s'arrêtèrent de marcher lorsqu'ils se retrouvèrent face à maître Zavlon, les bras croisés sur son torse musclé. Si d'ordinaire il ne montrait guère d'empathie, son état actuel prouvait que son visage avait encore des facettes à faire découvrir lorsqu'on le mettait réellement en colère.




— D'accord, c'était une mauvaise idée, admit Morgal.

— Et nous faisons comment pour rencontrer la sorcière si nous sommes interdits de sortie ?

— Qui t'a dit que nous n'allons pas sortir ?

— Mais maître Zavlon nous a...

— Tu crois vraiment qu'il vérifiera ? Nous allons nous acquitter de notre corvée en quelques minutes et après, hop, on se tire de l'école et on rejoint nos amis.

— Et la sorcière aussi.

— Aussi.

Morgal enfonça une nouvelle fois sa fourche dans la paillasse pour déblayer le box. Contre la cloison, Malgal graissait les selles et autres harnachements.

— Pourquoi laver les écuries ? souffla-t-il, il y a les gnomes pour ça.

— Zavlon ne nous aime pas.

— Comme le prince Tolos. Il est venu exprès pour nous chercher des ennuis.

— C'est à cause de l'influence de notre famille. On crée des envieux.

— Bon, pour ma part, j'ai fini la sellerie. On remet du foin et on s'en va.

Morgal retira son tablier de cuir et épousseta sa tunique afin de ressembler à quelque chose. Ils garnirent les mangeoires et partirent vers la herse tout en enfilant leurs longs manteaux à capuche.

— Morgal, j'ai l'honneur de t'annoncer que nous puons le cheval.

— Ce sera toujours moins pire que les créatures dans les rues.

Ils passèrent le concierge sans se faire remarquer et descendirent vers le cœur de la ville. Ruinax et son petit groupe leur avaient donné rendez-vous dans une auberge, près d'un étang artificiel.

Mais les jumeaux préférèrent rencontrer d'abord la vieille bigote avant de les retrouver.

— À ton avis, où se cache-t-elle ? demanda Malgal.

— Je dirais dans les rues les plus insalubres de cette ville, supposa son frère, c'est quand même fou ! Il suffit d'accueillir ces races pour que leur royaume se transforme en vraie porcherie !

— Ce sont des réfugiés, ils n'ont sans doute pas les mêmes priorités.

— Ah c'est clair, ricana Morgal, regarde, ils laissent trainer leurs affaires partout. C'est immonde.

— Tu as toujours été un peu maniaque sur les bords.

— Oui, mais là, ils vont déclencher des maladies... Enfin, ce n'est pas notre problème, après tout.

Tous deux bifurquèrent derrière un petit temple et s'aventurèrent entre deux séries de maisons rapprochées. Jamais ils n'avaient croisé une telle misère. À Elmaril, cela n'existait tout simplement pas. Mais là, la cité-état croulait sous les immondices dans ses quartiers sombres. Des mendiants tendaient désespérément la main vers les deux princes, espérant récolter quelques piécettes. Des enfants en haillons se faufilaient dans des soupiraux, tels des rats, leur maigre butin dans les mains. Les voleurs regardaient passer leur cible avec un sourire carnassier, l'œil à l'affut, la dague à la main. Là, une future mère suppliait son mari de lui accorder quelques sous pour son repas alors qu'il la battait.

— Pauvres gens, murmura Malgal en rabattant plus encore sa capuche sur son visage.

— Ce sont des sauvages, Malgal. La violence et la misère sont les seuls maîtres qu'ils connaissent.

— Peut-être pourrions-nous les aider dans le futur ?

— Ce sont des animaux, ils ne méritent pas notre attention.

Le jeune elfe hocha la tête, peu convaincu. Cette pauvreté l'attristait mais son frère ne semblait pas partager sa peine. Ce dernier empoigna un gamin par le col alors qu'il essayait de lui dérober sa bourse.

— Tu vas où comme ça, petit ?

L'enfant leva un bras devant son visage, prêt à encaisser les coups. Ses deux longues oreilles de chat se plièrent sur son crâne alors que son pelage doré se hérissait. Mais le prince ne le frappa pas. Il lui releva la tête et plongea ses iris azurées dans les billes noires de la créature qui se trouva comme hypnotisée.

— Écoute petit, dit-il d'un ton qui se voulait rassurant, connais-tu une vieille femme à la peau brune avec des cheveux remplis de breloques ? Elle est effroyablement maigre.

Le gamin hocha timidement la tête.

— Bien ! Tu nous conduis vers elle et je te donne de l'argent. Tu es d'accord ?

Il secoua vivement la tête de haut en bas et s'élança dans le labyrinthe de ruelles.

— Je crois que nous devons le suivre.

Les deux elfes se laissèrent guider par le petit félin à l'apparence humanoïde. Le chemin se faisait de plus en plus étroit et se transformait en véritables boyaux remplis de détritus et de boue. Les habitants déambulaient fébrilement, toussant et crachant. Leurs silhouettes courbées et maigres rappelaient les danses macabres des vieux contes pour enfant.

Enfin, le gamin s'arrêta devant une porte vermoulue, encastrée dans un mur croulant et poussiéreux.

— Sympathique ! ironisa Morgal avec une grimace de dégoût sur le visage.

— Paie le cathors, maintenant. Il nous a bien aidés.

— Le quoi ?

— Le cathors. C'est sa race.

— Ah. Tiens petit, essaie de trouver des vêtements plus chauds et de quoi manger.

L'enfant saisit les deux pièces d'or dans ses petites mains et les contempla durant de longues secondes, ses moustaches frémissant de plaisir. Puis il lança un remerciement incompréhensible aux deux princes et disparut derrière un mur.

— Et dire qu'il se verra voler ses pièces dès qu'il rencontrera un plus gros que lui, se désola Morgal.

— Oui... Et si l'on toquait ?

— Pour tout avouer j'ai un peu peur.

— Peur de la sorcière ?

— Non, peur de briser sa porte en frappant dessus.

— Ah.

Malgal secoua la tête et toqua doucement sur le bois moisi. Seul le silence leur répondit. Au loin, les échos des quartiers riches parvenaient jusqu'à ces lieux reculés de tout espoir.

Enfin, la porte s'ouvrit d'elle-même, dans un grincement sinistre.

— Après toi, Malgal.

Il pénétra dans l'antre de l'inconnue, avec un nœud au ventre. Mais si cette entrevue pouvait lui donner des explications sur ces cauchemars, il était prêt à braver toutes les créatures les plus repoussantes.

L'intérieur de la bâtisse se révélait obscure. Seuls des coffrets lumineux de différentes couleurs gravitaient autour des deux intrus. Sur les poutres, leurs yeux perçants distinguèrent des statuettes de rituel ainsi que des dépouilles d'animaux qui pendaient. Ils s'avancèrent silencieusement mais ils devaient se rendre à l'évidence : la pièce unique était vide.

— Vous cherchez quelqu'un ? résonna une voix.

Ils se tournèrent brusquement vers l'origine du son et trouvèrent la vieille femme, assise sur un tabouret, devant sa table. Derrière elle, une marmite chauffait dans une cheminée rougeoyante.

— On vous cherchait, assura Malgal en rejoignant sa table.

— Oui, je m'en doute, répondit-elle d'une voix étonnement claire.

Morgal emboita le pas derrière son frère et jeta un coup d'œil sur le plan de travail : un vieux grimoire où s'inscrivaient des lettres inconnues, des plantes étranges et des fioles translucides garnissaient toute la surface du meuble.

— Mais je vous en prie, messieurs, asseyez-vous.

Elle leur montra de sa main noueuse, chargée de bracelets et de bagues, un banc à la stabilité douteuse.

Les deux princes s'assirent, mal à l'aise, et observèrent leur hôte. Contrairement à ce qu'ils pensaient, elle ne paraissait pas si vieille mais plutôt exempte de toute trace temporelle. Son physique squelettique inspirait la pitié alors que sa tenue quasi-inexistante décontenançait ses invités.

— Je vous attendais, mes beaux-sires.

— Ah oui ? s'énerva Malgal, dans ce cas, pourquoi vous vois-je sans arrêt dans mes cauchemars ?

— Mais ce ne sont pas des cauchemars, mon chou, rétorqua-t-elle en transvasant un liquide verdâtre d'une fiole à l'autre, ce ne sont que des visions hypothétiques.

— Des quoi ?

La sorcière se passa la main dans son épaisse chevelure et continua :

— C'est ton pouvoir de médium qui se manifeste. Tu vois dans le futur comme moi je vois dans tes rêves et tes pensées.

— Mais... Enfin, ce que vous dîtes est absurde. Non seulement notre Vala ne s'est pas réveillé mais en plus je ne suis qu'un elfe. Ce sont les dieux qui ont ce genre de don.

— Oui. C'est vrai.

Morgal leva les yeux au ciel et ajouta :

— Est-ce que vous essayez de nous dire que ce que voit mon frère la nuit sont des bribes de notre futur ?

— Pas forcément le vôtre. Et ce qui est aperçu ne se réalisera pas obligatoirement.

Morgal lança un regard à son frère. Celui-ci semblait au bord de la nausée, il le ressentait bien. Aussi, le laissa-t-il dans son mal-être pour continuer à s'entretenir avec la femme.

— Expliquez-moi ce qu'il lui arrive.

— Tu n'as pas d'ordre à me donner, très cher. Mais je vais pourtant te répondre. Ton frère et toi partagez la même nature.

Elle se leva sensuellement de son siège et se réinstalla sur le coin de la table juste devant son interlocuteur.

— Je suis au courant, merci !

— Non, ce que je veux dire ce que vous êtes deux Réceptacles. Et en l'occurrence, des Réceptacles divins. Cela vous donne donc des pouvoirs particuliers comme le don de clairvoyance.

Il se leva brusquement du banc et aplatit ses paumes sur la table, brisant par la même occasion plusieurs pots.

— Je ne comprends rien de ce que vous me dîtes. Malgal et moi sommes des elfes normaux.

— Absolument pas. Et ta phase de déni sera bientôt remplacée par la lucidité. Regarde, pourquoi, à ton avis, votre Vala prend autant de temps à se réveiller ? Vous êtes... particuliers.

Elle lui attrapa le menton entre ses doigts fins, faisant glisser son autre main sur le torse dans un murmure de satisfaction. Morgal resta figé, totalement ahuri par l'inquisition déplacée de l'inconnue. Malgré l'air totalement réticent du prince, elle se pencha davantage vers lui et aventura ses caresses vers la ceinture. Morgal se dégagea brusquement avant que la situation dégénère tout en essayant de garder un certain sang froid :

— Nous... ne savons même pas ce que sont des Réceptacles, déglutit-il avec la forte envie de s'enfuir.

— Vraiment ? releva-t-elle comme s'il ne s'était rien passé, c'est affligeant. Je vais te la faire courte. La plupart des races sont dotées de pouvoirs magiques et cela depuis leur création. Et toute cette magie propre à un peuple s'incarne en une personne, un Réceptacle. Si le Réceptacle venait à mourir, la totalité des membres de cette race seraient dépourvues de sa magie en quelques secondes. Tu comprends ?

— Mais alors...

— Toi et Malgal êtes les réceptacles des dieux. Il peut y avoir plusieurs Réceptacles par race afin d'éviter de trop grands risques.

Le prince secoua la tête ; ce que lui disait la sorcière était aberrant.

— Je pense que vos amis vous attendent, non ?

Morgal soupira et saisit son jumeau par le bras pour l'aider à le relever.

— Auriez-vous quelque chose pour lui retirer ses visions nocturnes ?

Elle acquiesça d'un signe et saisit un coffret où reposait une dizaine de perles percées.

— Fixez-la sur une de vos mèches, ça éloigne les mauvais rêves. Et prends-en une aussi pour toi, mon chou, car à toi aussi le futur et le passé viendront te hanter. Ce n'est qu'une question de temps.

L'elfe haussa un sourcil, sans vraiment comprendre :

— « Me fait-elle une prophétie ? »

— « C'en est une, Morgal. »

— Vous faites de la télépathie ?!

— Oui. Mon Vala, à moi aussi, est puissant.

Morgal se dirigea vers la porte, Malgal tenant fébrilement contre lui.

La sorcière leur ouvrit le passage mais avant de sortir, elle saisit le bras du prince et lui murmura suavement à l'oreille :

— Nous nous retrouverons, l'elfe. Et sache que Djinévix sera toujours là pour toi...

— Hem... Bien, merci.

Lorsque la porte se referma derrière eux, il souffla de soulagement. Cette dénommée Djinévix l'avait terriblement gêné. En fait, il préférait ne pas y penser et il se reconcentra sur la mine dévastée de son jumeau.

— Malgal ? Tu m'entends ?

— Heu... Oui, excuse-moi, j'ai eu une absence. J'ai... j'ai envie de vomir...

Il se plia brusquement en deux et recracha tout le repas de midi. Heureusement que l'état de la rue était déjà lamentable, l'amas régurgité ne faisait que se fondre dans le décor.

— Malgal, demanda son frère en le relevant, quels étaient ces rêves ?

Il s'essuya la bouche avec un mouchoir et soupira :

— Dans mes cauchemars, Morgal, tu mourrais.

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