Level 15 : Karma putassier
Le temps de leur baiser, Fiona eut l'impression d'être dans une bulle. Son univers se réduisit à Maël et à ses lèvres, sur lesquelles subsistait un léger goût de pizza. Jusqu'à ce que, tout à coup, il pose les mains sur ses épaules et la repousse doucement.
– Désolé, Fio, c'était une erreur..., souffla-t-il.
Une erreur ?
– C-Comment ça, une erreur ? balbutia-t-elle.
Elle amena les doigts à sa bouche, paniquée, pour vérifier son haleine.
Je pue pas de la gueule quand même ?
Réalisant ce qu'elle était en train de faire, elle se ressaisit sur-le-champ. Fort heureusement, Maël, qui évitait son regard, n'avait pas vu la scène. Il se gratta l'arrière du crâne avant de reprendre d'un air penaud :
– À cause de Léo...
Fiona fronça les sourcils, confuse.
Léo ? Pourquoi est-ce qu'il me parle de Léo ?
– Léo ? répéta-t-elle sans comprendre.
– C'est pas comme ça que s'appelle ton mec, non ? Celui qui est à l'INSA...
Maël se prit la tête entre les mains :
– J'aurais pas dû t'embrasser alors que je sais que t'as un copain, c'est vraiment pas cool de ma part !
A ces mots, les neurones de la jeune fille se connectèrent enfin.
Oh, putain ! pensa-t-elle. Quelle conne ! J'avais complètement zappé cette histoire ! Maël croit m'avoir embrassée alors que je suis en couple ? Normal qu'il se sente mal !
Elle était persuadée que Gabriel avait parlé à son pote de sa récente rupture. Et puis, le fait qu'elle ait accepté d'avoir un rencard avec lui aurait dû lui mettre la puce à l'oreille, non ? Cela dit, il était vrai qu'hormis Rosélia et Emma, elle ne l'avait encore révélé à personne.
Désireuse de rétablir la vérité sur-le-champ, Fiona s'empressa de prendre la parole :
– En fait..., commença-t-elle.
Néanmoins, un cri énervé de Rosélia émanant du salon attira leur attention :
– J'y crois pas ! T'es vraiment impossible !
Maël et Fiona échangèrent un regard puis se dirigèrent, après avoir attrapé Loki, sur les lieux afin de voir de quoi il retournait. Rosélia s'était levée du canapé et dévisageait son petit-ami d'un air sévère. Maël essaya derechef de désamorcer la situation :
– Oula ! Il se passe quoi ici ? Vous êtes déjà en instance de divorce ?
Cependant, cette tentative pour détendre l'atmosphère se solda par un échec cuisant. Gabriel, blasé, l'ignora et soupira à l'attention de sa petite-amie :
– Tu trouves pas que t'exagères, là ?
Sans même prendre la peine de répliquer, elle se tourna vers eux et posa des yeux attristés sur sa meilleure amie.
– J'ai besoin d'air, dit-elle d'un ton sec avant de sortir dans le jardin.
Une fois qu'elle fut hors de portée d'oreilles, Fiona se précipita vers Gabriel, le toisant de toute la hauteur que sa stature debout lui conférait, poings sur les hanches.
– Qu'est-ce que t'as encore fait ? aboya-t-elle à son encontre.
– Pourquoi encore ?
– Parce que Lia est parfaite, donc des deux y'a que toi qui peux foirer.
Le jeune homme eut un rictus moqueur.
– Parfaite, mon cul. Elle est surtout casse-couilles !
Cette remarque lui valut un coup de pied au tibia.
– Hé, mais ça va pas ? gronda-t-il en se levant. Tu me cherches ?
Gabriel s'avança vers elle d'un air menaçant, mais le fait qu'il la surplombe d'une bonne tête ne sembla pas l'intimider car elle continua sans se démonter :
– J'attends avec impatience le jour où tu montreras à Rosélia ton vrai visage, espèce de co-
– Oula ! On va se calmer, ici ! intervint Maël, mettant une main sur la bouche de Fiona pour la faire taire, et l'autre sur le torse de Gabriel afin de l'écarter d'elle. Mec, je sais pas pourquoi vous vous êtes disputés, mais la soirée vient à peine de commencer, et j'ai pas envie que vous plombiez l'ambiance. Alors va voir ta meuf et essaye d'arranger ça.
Ce dernier ne lâcha pas Fiona du regard tandis qu'il répondit :
– C'est bon, j'y vais.
Suite à quoi il s'exécuta, la bousculant d'un coup d'épaule au passage. Elle ne put s'empêcher de jeter une oeillade soucieuce en direction de la baie vitrée, jusqu'à ce que Maël se saisisse délicatement de son menton afin de la faire détourner la tête.
– Hé, Fio, souffla-t-il d'une voix douce. Laisse tomber, c'est leurs histoires. Tu devrais pas t'en mêler...
– T'as raison..., soupira-t-elle.
Il eut ensuite l'idée parfaite pour la faire penser à autre chose :
– Tu veux qu'on allume la Switch de mes soeurs ? Je te montrerai les jeux qu'on a !
Il n'en fallut pas davantage à Fiona, dont les inquiétudes furent balayées dès qu'elle entendit le mot "jeux".
– Oh, ouais, carrément ! s'enthousiasma-t-elle, les yeux pétillants d'excitation.
🎮🎮🎮
Rosélia était assise dans le hamac. Ce même hamac qui avait vu naître leur premier baiser, quelques mois plus tôt. Gabriel s'alluma une cigarette, attendant que le tabac l'apaise avant d'aller la voir. Il en avait déjà consommé la moitié lorsqu'il arriva à sa hauteur.
– T'es toujours fâchée ou on peut discuter ? demanda-t-il en soufflant la fumée.
Rosélia lui jeta un bref regard du coin de l'œil.
– Je suis fâchée, mais on peut discuter, rétorqua-t-elle, bras croisés sur la poitrine.
Gabriel poussa un long soupir.
– Je voulais pas lui faire de la peine, hein. Je pensais pas que ça l'affecterait autant !
La jeune fille leva les yeux vers lui, mécontente.
– Je comprends bien tes intentions, Gaby ! Mais ça reste cruel ! Tu réalises pas... Les premiers jours, après la rupture, elle passait son temps à stalker ses réseaux sociaux ! Elle faisait peine à voir ! Il a fallu qu'on s'y mette à deux, avec son petit frère, pour qu'elle arrête. Et toi... Tu la fais rechuter !
Gabriel se massa longuement les paupières.
– Je pensais qu'elle allait mieux, moi ! C'est ce que tu m'avais dit !
– Essaye pas de faire retomber la faute sur moi !
Il poussa un nouveau soupir, déjà las de cette conversation.
Depuis le début, on se prend toujours la tête à cause de sa putain de pote. Ça commence à me gonfler.
– J'ai du mal à comprendre pourquoi ça l'affecte autant, finit-il par articuler lentement. Ce mec en vaut pas la peine, c'est juste un prédateur de merde qui...
– Je sais bien ! le coupa-t-elle. Je sais que c'est un loseur, mais Fiona, elle était vraiment amoureuse de lui ! C'est sa première vraie histoire, elle a même failli perdre sa virginité avec lui...
A cet instant, Gabriel se rembrunit et Rosélia comprit qu'il savait quelque chose qu'elle ignorait. Il prit le temps d'inspirer une nouvelle bouffée de sa cigarette avant de lâcher :
– Elle a pas seulement failli, hein. Elle l'a fait.
Rosélia se redressa à cette déclaration.
– Q-Quoi ? Comment tu le sais ? Elle te l'a dit à toi et pas à moi ?
Il haussa les épaules.
– Non, j'ai deviné, c'est tout.
Sa petite-amie le dévisagea quelques instants, le temps que les pièces du puzzle s'assemblent dans son cerveau.
– C'est pour ça qu'elle est partie en furie pendant le resto à volonté ?
Nouvel haussement d'épaule.
– C'était pas voulu, mais j'ai visé juste, marmonna-t-il en guise d'explication.
Sous le choc de cette révélation, Rosélia se rassit sur le hamac, les jambes tremblotantes.
– Pourquoi elle m'a rien dit... ? C'est dégueulasse ! Moi, je lui dis toujours tout et elle, elle garde ça pour elle ?
A cet instant, les paroles d'Azriel revinrent en mémoire de Gabriel : la druidesse lui avait dit regretter d'avoir couché avec son ex, et aussi ne pas pouvoir se confier à qui que ce soit dans la vie réelle tant elle était embarrassée par la situation.
– Le prend pas personnellement, ça veut pas dire qu'elle te fait pas confiance ou j'sais pas quoi. Elle a peut-être trop honte...
– Y'a pas de quoi avoir honte ! s'agaça Rosélia. Il l'a manipulée ! Il a profité de son expérience et de sa maturité pour obtenir ce qu'il voulait !
– Je sais bien, tout ça. C'est pas à moi qu'il faut le dire, hein !
Poussant un léger soupir, Gabriel vint s'asseoir à côté d'elle.
– Écoute, vraiment, je pensais pas que ça la blesserait à ce point. Moi, je voulais juste lui faire un petit électrochoc, histoire de la pousser à se venger en sortant avec Maël. Et regarde, ça a l'air de marcher : on dirait qu'elle a enfin oublié l'autre pédo !
Afin d'appuyer son propos, il pointa son index vers la baie vitrée donnant sur le salon, où Fiona et Maël, les joy-cons dans les mains, riaient comme des fous en jouant à Just Dance. Pourtant, cela ne suffit pas à calmer Rosélia qui explosa :
– Parce que c'est Fiona ! Cette fille est la personne la plus forte et la plus résiliente que je connaisse ! Elle est toujours souriante, courageuse, et généreuse ! Je l'admire pour ça ; à sa place, je serais devenue amère et rancunière. Pourtant, elle, elle n'est ni l'un ni l'autre. Y'a qu'à voir la manière dont elle se comporte vis-à-vis de toi : on pourrait presque croire qu'il ne s'est jamais rien passé entre vous !
Elle lui jeta un regard sévère avant d'ajouter :
– Alors que je sais que t'as pas été tendre avec elle quand vous étiez au collège...
Gabriel la dévisagea un moment avant de rétorquer d'un ton dur :
– Encore heureux que tu le sais, c'est moi-même qui te l'ai dit ! A la fête de Maël, avant les grandes vacances, sur le hamac où ton cul est posé actuellement ! J'ai été clair dès le début. Je t'avais dit que si on sortait ensemble, ta pote allait en souffrir...
Il se passa une main dans les cheveux avant de reprendre, sourcils froncés :
– Ça t'a pas empêché de m'embrasser juste après. Ni de m'envoyer des nudes tout l'été ensuite. Alors pas la peine de jouer à la bonne copine, maintenant...
Rosélia serra les poings. Elle détestait lorsqu'il la mettait face à ses propres contradictions. Oui, ce soir-là, quand elle l'avait rejoint et qu'elle lui avait demandé pourquoi lui et Fiona se haïssaient, il avait été honnête.
Gabriel avait admis avoir été cruel envers sa meilleure amie par le passé. Il avait d'ailleurs tenté de la repousser à cause de ça. Seulement, comme d'habitude, elle n'en avait fait qu'à sa tête.
Parce que je suis une putain d'égoïste et que quand je veux quelque chose, je lâche pas l'affaire...
Or, à ce moment-là, Rosélia voulait Gabriel plus que tout. Elle aurait souhaité pouvoir se cacher derrière ses sentiments afin de se donner bonne conscience... Sauf qu'à l'époque, elle ne pouvait même pas prétendre être amoureuse de lui, puisqu'elle ne le connaissait pas.
La seule chose qu'elle aimait alors, c'était l'image qu'il dégageait et qu'elle avait de lui. La seule chose qu'elle désirait, en ce temps-là, c'était devenir "la copine de Gabriel Martin."
Parce qu'il était beau, convoité, charismatique, peu commode et qu'il ne laissait pas grand-monde entrer dans son coeur. Parce que plus la cible était inaccessible, plus elle aspirait à l'obtenir. Parce que devenir la petite-amie d'un mec tel que lui signifiait forcément, selon elle, être quelqu'un de spécial.
Parce qu'elle avait des vues sur lui depuis la seconde et qu'il l'avait jusqu'alors toujours ignorée. Parce qu'il ne sortait jamais avec les filles de Saint-Jude et qu'elle s'était jurée d'être la première à réussir là où les autres avaient échoué. Parce que, enfin, il venait de se faire plaquer et qu'elle avait perçu, l'espace d'un instant, sa vulnérabilité.
J'ai vu là l'occasion unique d'attirer son attention, et j'en ai profité. Gabriel a raison : j'en avais rien à faire de Nana, à ce moment-là. Parce que je savais que même si elle râlerait, elle finirait par l'accepter. Car elle a bon coeur et qu'elle accepte toujours tout venant de moi.
– T'as raison, admit-elle à contrecoeur. T'as été honnête avec moi et j'ai fermé les yeux. Ni toi ni elle n'avez voulu me donner de détails sur cette époque, et j'avoue que j'ai pas cherché à en savoir plus car ça m'arrangeait de jouer à l'autruche...
Elle marqua une pause puis reprit après avoir froncé les sourcils :
– Mais je veux savoir, maintenant. Tu faisais quoi, exactement ? Tu l'insultais ? Tu la bousculais dans les couloirs ? Tu lui jetais des boulettes de papier? Tu lui trouvais des surnoms débiles comme tu sais si bien faire ?
Gabriel, bras croisés, détourna le regard sans prononcer un mot.
Si seulement ça s'était limité à ça..., songea-t-il en amenant la cigarette à ses lèvres. En vérité, j'ai fait bien pire : je l'ai brisée en morceaux.
D'une manière générale, la cruauté des adolescents n'avait pas de limite. Or, à l'époque, celle de Gabriel s'étendait encore plus loin que toutes les autres. Pire que les moqueries ou les intimidations, lui avait réussi à l'atteindre là où personne n'avait osé aller. Il l'avait blessée si profondément qu'après ça, elle avait disparu. Le jeune homme serra les poings ; il n'aimait pas repenser à cet épisode. Et il ne pouvait se résoudre à en parler à Rosélia. Car alors, elle le mépriserait au moins autant que lui-même s'était méprisé.
Son regard se perdit à l'intérieur de la maison, où Fiona, hilare, se déhanchait. Une fois de plus, il se demanda pourquoi elle n'en avait pas parlé à sa meilleure amie. Elle qui semblait abhorrer leur couple, il lui aurait suffi de tout raconter à Rosélia afin que cette dernière le plaque sans aucune forme de procès.
Pourtant, elle n'en avait rien fait. Au début, Gabriel l'avait trouvée stupide ; à sa place, il ne s'en serait pas privé. A présent, il se disait qu'elle était juste trop gentille pour son propre bien, et que son chemin n'aurait de cesse d'être semé de connards tels que lui ou l'autre pédo à l'avenir.
Son coeur si pur continuerait d'être brisé, recollé, et brisé à nouveau, jusqu'à ce qu'il n'en reste que des miettes. Car c'était là le lot de toute bonne personne en ce monde.
T'es vraiment trop bête, petit pâté.
– Pourquoi tu me réponds pas ? insista Rosélia, l'extirpant de ses pensées.
– Parce que je suis pas fier de ce que j'ai fait, rétorqua-t-il à contrecoeur. Je veux pas en parler.
Elle plissa les yeux.
– Si ça suffit à assombrir ton humeur à toi, le bourreau, alors imagine un peu ce que ta victime a dû ressentir ! Et là, tu te remets à la faire souffrir !
Il n'avait pas eu de mauvaises intentions, à l'origine. La pousser dans les bras d'un mec gentil et attentionné, c'était sa manière à lui de tenter de réparer le mal qu'il avait fait. Cependant, Rosélia eut une moue dubitative, pas convaincue.
– Je comprends pourquoi t'as fait ça. Mais t'aurais dû trouver un autre moyen. Même si elle a l'air d'aller bien, je suis sûre que ça l'a blessée. Surtout venant de toi ! Tu peux pas savoir, toi, ce qu'on ressent quand on est rejeté !
Gabriel eut un sourire en coin mais s'abstint de commentaire. Lui, qui avait été abandonné par ses deux parents biologiques, connaissait au contraire trop bien ce sentiment : il avait grandi avec.
Toutefois, il refoula la remarque acerbe qui lui vint à l'esprit. Il ne pouvait reprocher à Rosélia d'ignorer ce que lui-même rechignait à raconter. C'est pourquoi, à la place, il rangea sa cigarette dans son cendrier de poche puis glissa tendrement son bras derrière ses épaules.
– T'as connu ça, toi aussi, au collège ? s'enquit-il d'une voix douce remettant tendrement une de ses mèches brunes derrière son oreille.
Elle releva la tête vers lui.
– Pas de la même manière que Fiona. Sans que je sache pourquoi, les autres filles m'ont toujours exclue. Moi, je voulais des amies, mais elles se méfiaient de moi, elles disaient que j'avais des allures de peste. Comme si j'y pouvais quelque chose !
Elle marqua une pause, détournant les yeux avant de poursuivre :
– Du coup, la seule compagnie que j'arrivais à trouver, c'était celle des garçons ; mais ils voulaient pas être juste amis avec moi. Alors je passais mon temps à changer de copain ; mon groupe de potes variait en fonction de mon partenaire du moment. J'étais pas toujours amoureuse, je faisais surtout ça histoire de pas être isolée...
Il soupira en l'attirant à lui. Rosélia posa la tête contre son épaule et Gabriel lui embrassa le sommet du crâne, écoutant patiemment tandis qu'elle reprenait :
– En vérité, j'avais aucune idée d'à quel point j'étais seule avant de rencontrer Fiona. C'est ma première véritable amie. Quand j'ai débarqué à Saint-Jude, j'ai cru que ça allait recommencer... Dès le début d'année, tout le monde m'avait d'ores et déjà rangé dans la catégorie des garces. Tout le monde sauf Fiona. Elle a pas écouté les préjugés des autres car elle est comme ça : elle accepte les gens comme ils sont, sans chercher à les changer...
Elle marqua une pause pour déglutir puis reprit :
– Ensuite, elle m'a carrément sauvé la mise quand un de mes exs a balancé des photos compromettantes de moi à tout le bahut. T'étais pas encore là quand c'est arrivé, mais t'aurais dû la voir... Ce jour-là, à mes yeux, elle est devenue une véritable super-héroïne. Et ma meilleure amie.
Gabriel caressa distraitement les cheveux de la jeune fille. Même s'il n'en avait pas été témoin, il avait entendu parler de cet épisode qui avait, par la suite, valu à Fiona son titre de "princesse de Saint-Jude."
La façon dont, folle de rage, elle avait administré un coup de pied bien placé au type en question avant de le faire virer définitivement du lycée. Ironie du sort, c'était précisément cette exclusion qui avait libéré une place et permis à Gabriel, encore sur liste d'attente, d'intégrer l'établissement.
Comme quoi, le karma peut être une vraie putasse, songea-t-il, amusé.
– Je sais qu'à côté d'elle, continua Rosélia, je fais pâle figure. T'as raison, je suis loin d'être une super copine. J'ai un côté égoïste et égocentrique... Mais je me soigne. J'essaye de m'inspirer d'elle, de m'améliorer...
Elle s'écarta légèrement de lui puis le fixa de ses prunelles sombres.
– C'est pour cette raison que je veux plus que tu l'embêtes, asséna-t-elle d'un ton dur. Fiona est précieuse à mes yeux. Dis-toi que si tu lui fais du mal, c'est comme si tu m'en faisais à moi. Je peux pas sortir avec un mec s'il martyrise ma meilleure pote !
Gabriel hocha la tête, reconnaissant la valeur de ces propos.
– C'est bon, je ferai des efforts, promis.
Cela sembla suffire à Rosélia qui enroula ses bras autour de son cou tandis qu'il enlaçait sa taille.
– Mais j'ai quand même le droit de la taquiner un peu ? s'enquit-il. Elle réagit toujours au quart de tour quand elle s'énerve, c'est marrant...
Elle réfléchit un instant puis acquiesça, amusée.
– C'est vrai que c'est drôle de la faire enrager. Va pour les taquineries, à condition que ça reste gentillet, okay ?
– Vendu.
Et, histoire de sceller cet accord, ils s'embrassèrent.
🎮🎮🎮
– Alors comme ça on joue à Just Dance sans moi, Nana ? l'apostropha Rosélia une fois revenue dans le salon.
Cette dernière se retourna et adressa un sourire rayonnant à sa meilleure amie.
– C'est bon, vous avez fait la paix ? s'enquit-elle. Il s'est excusé, l'autre ?
– L'autre a un prénom, rétorqua Gabriel en la toisant. Et il se trouve juste devant toi.
Rosélia émit un petite rire avant de répondre :
– Oui, c'est bon, on a fait la paix, alors range tes griffes ! On fait une partie ensemble ?
Non sans jeter un ultime regard mauvais à Gabriel, la jeune fille accepta. Maël céda son joy-con à Rosélia avant de rejoindre son pote sur le canapé, lequel le dévisagea avec des yeux empreints de jugement :
– Je savais pas que tu jouais à ce genre de truc.
– C'est ça d'avoir des petites soeurs, que veux-tu ? T'es obligé de regarder des Disney et de jouer à Just Dance...
– Bien content d'être fils unique, alors. Vous êtes ridicules, les filles, vous en avez conscience ?
Piquée au vif, Fiona mit la partie en pause et se tourna dans sa direction pour rétorquer :
– De toute façon tu serais nul à ce jeu !
– Je suis jamais nul dans rien de ce que j'entreprends ! protesta le concerné, sourcils froncés.
– Sauf que là, on parle d'un jeu vidéo. Et je suis certaine que t'en as jamais touché un de ta vie !
Gabriel eut un rictus mais ne nia pas, se contentant de demander :
– Tu veux parier ?
– Euh..., fit Maël après s'être raclé la gorge. Fais gaffe Fio, tu te souviens de ce qu'on a dit sur les paris avec le Sheitan ?
Mais, oubliant toute prudence, elle balaya cet avertissement d'un revers de main.
– T'inquiète, je suis sûre de moi sur ce coup-là !
– Cherche pas Maël, intervint Rosélia. Sa fierté de gameuse a été touchée, je crois.
– De gameuse ? répéta-t-il. Tu joues aux jeux vidéo ?
– Si tu savais ! lui répondit sa meilleure amie. C'est une vraie geek ! Elle passe son temps sur ce jeu, là, Wa-
Fiona mit la main devant sa bouche, l'empêchant de continuer.
– T'es folle ! lui chuchota-t-elle. Raconte pas ça, c'est un secret !
Maël haussa un sourcil.
– Ça m'intrigue de plus en plus, tout ça, souffla-t-il à Gabriel.
– Et moi donc..., acquiesça-t-il en retour.
Et pour cause : ses oreilles avaient tiqué dès la mention de la qualité de "gameuse" de Fiona. Sans s'en rendre compte, il s'était penché en avant et, accoudé sur ses genoux, scrutait le petit pâté de manière insistante, à tel point que, gênée, elle finit par se dandiner sur place face à ce regard inquisiteur.
– Qu'est-ce que tu mates ? bredouilla-t-elle, mal à l'aise.
– Rien, répondit Gabriel en se redressant. Je pensais à un truc, c'est tout.
Il fit ensuite craquer ses articulations avant de lui demander avec un sourire carnassier :
– Bon, on se la fait, cette partie ? T'acceptes le défi ? Je remets Loki en jeu, comme la dernière fois !
Rosélia, qui avait pris la place de son petit-ami sur le canapé, interrogea Maël :
– Tu sais de quoi ils parlent, toi ?
– Aucune idée, répondit-il en haussant les épaules.
Fiona planta ses prunelles dans celles de Gabriel tandis qu'elle répliquait, sûre d'elle :
– Okay, mais je le veux toute une journée si je gagne, cette fois !
– Toute une journée ? répéta-t-il, incrédule.
– Quoi, t'hésites ? le nargua-t-elle. T'as peur de perdre ?
Piqué au vif, le jeune homme accepta puis lui demanda ce qu'elle mettait en jeu, suite à quoi elle marqua une hésitation.
– Hum, si tu sèches, moi j'ai une idée..., fit Gabriel avec un rictus.
Il se pencha vers elle et lui chuchota à l'oreille :
– Si je gagne, alors ce soir on intervertit nos lits. J'irai dormir avec Rosélia et toi avec Maël.
La jeune fille tressaillit, aussi bien à cause de la teneur de ces propos que pour la façon dont il les avait susurrés. Ses yeux glissèrent malgré elle vers Maël avant de revenir sur Gabriel.
– Fais pas cette tête, reprit-il à voix basse, amusé par son air paniqué. Je suis magnanime, je t'autorise à garder tes vêtements...
Il ponctua sa phrase d'un clin d'oeil alors que les joues de Fiona s'empourpraient de gêne. Maël et Rosélia, qui n'avaient pas entendu cet échange, haussèrent des sourcils perplexes.
– Tout ça est de plus en plus étrange, moi j'dis, marmonna le premier, dont les oreilles commençaient légèrement à siffler.
– J'avoue, confirma la seconde en fronçant les sourcils.
Cela dit, les deux autres les ignorèrent complètement, lancés dans une sorte de duel de regard durant lequel Fiona fixa son adversaire sans ciller, les lèvres pincées. Au bout de quelques secondes à s'affronter ainsi, elle finit par acquiescer.
– Très bien, marmonna-t-elle entre ses dents. De toute façon, j'ai confiance en mes capacités : je vais t'écraser !
Joignant le geste à la parole, elle fit craquer ses doigts puis étira ses bras au-dessus d'elle.
– C'est ce qu'on va voir ! Tu devrais pas me sous-estimer, gamine !
A ce moment-là, la lueur de prédateur qui traversa les pupilles de Gabriel lui arracha un frisson et Fiona se demanda si elle n'avait pas, une fois n'est pas coutume, commis une erreur en acceptant ce pari contre lui.
J'aurais peut-être mieux fait d'écouter les avertissements de Maël, en fin de compte...
🎵 Sia — Elastic Heart
https://youtu.be/LqD1tLekh_U
I've got thick skin and an elastic heart
But your blade it might be too sharp
I'm like a rubber band until you pull too hard
I may snap and I move fast
But you won't see me fall apart
Helloooo ! Vous allez bien ? Pas trop froid ? De mon côté je suis un peu naze mais ça va, j'ai réussi à corriger le chapitre à temps, je suis contente. 😄
Il s'agit de l'avant-dernier chapitre se déroulant pendant la soirée chez Maël. J'espère qu'il vous a plu !
Qu'avez-vous pensé de la réaction de Maël après leur baiser, qui ignore que Fiona est célibataire ?
De l'altercation (une de plus pour la collection) entre Fiona et Gabriel ?
Puis de la dispute entre Rosélia et Gabriel ? Suivi de leur échange ?
Votre avis sur la façon dont leur couple s'est formé ? De Gabriel qui refuse de parler de son passé ?
Des idées sur ce que Gabriel a pu faire à Fiona en troisième, pour qu'il répugne autant à y repenser ou à en parler ? 😬
Qu'avez-vous pensé des révélations de Rosélia, sur son incapacité à se faire des amies au collège et de l'importance de Fiona à ses yeux ?
Sinon, Fiona s'est encore laissée emporter à accepter un pari contre Gabriel. 😆Des pronostics sur qui en sortira gagnant, cette fois-ci ?
En attendant de vous lire, je vous fais des bisous et vous dis à vendredi prochain, pour le chapitre concluant cette soirée ainsi que ce deuxième arc narratif ! 😘
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