Parlez moi de vous Rose...Comment vous percevez vous ?
- Elle...Elle avait ce genre de grands yeux verts qui tantôt sans maquillage, tantôt trop soulignés, vous faisant marquer un temps d'arrêt. C'était peut être à cause des fins reflets d'ambre dans ses iris, ou bien les éclats de rire qu'ils refermaient. Dans tous les cas, ils lui dévoraient avidement le visage, comme elle dévorait certaines personnes des yeux, admiratrice, envieuse, peut être amoureuse. Cette fille elle...Elle avait aussi des cheveux peu communs, colorés. Ils étaient passés par toutes les teintes, faisant d'elle un arc en ciel ambulant déambulant dans les couloirs du lycée. Son nez, elle ne l'avait jamais beaucoup aimé, parfois trop large, trop fin, trop en trompette, trop long, pas assez digne d'un portrait des grands peintres. Elle était fascinée par la beauté, et sa silhouette lui donnait l'impression de s'en éloigner, ça non plus elle ne l'aimait pas. Et son sourire...Elle s'efforçait de garder les lèvres closes lors de ce genre de rictus car quand elle souriait en découvrant ses dents, ses yeux se plissaient, ses pommettes ressortaient, son visage se déformait, comme violenté par un rire, un sourire. Sinon, elle était perchée comme on dit, en permanence droguée de la vie. Rêveuse, parfois menteuse, elle s'inventait des vies, des aventures, des discussions. Plus rien n'avait de limites quand elle songeait...Elle semblait, différente, intrigante mais aussi marrante, pas dans le bon sens...Non, comme si elle voulait qu'on lui jette des pierres.
- Rose, pourquoi parlez vous à la troisième personne du singulier ? Et surtout au passé ? Est ce comme ça que vous vous voyez ?
- Rose est dépassée, périmée, c'est des fragments répandus dans le vent, un écho perdu dans la vallée. Et non, c'est ce qu'elle aurait aimé que les gens pensent, c'est moins violent que leurs véritables idées.