Chapitre 9 : The Returned

Chapitre 9 : The Return

Le retour

Ce fut le besoin écrasant, et très urgent, de faire pipi qui finit par réveiller Peter. Il n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, mais la chambre était silencieuse pour une fois, alors il devait être tard. Ou vraiment très tôt. Quoi qu'il en soit, ce n'était pas une heure pour être debout.

Sauf qu'il avait vraiment envie de faire pipi.

- Ugh.

Ses yeux étaient collés, comme si quelqu'un avait déversé une bouteille entière de colle liquide entre ses cils. Peu importe à quel point il essayait de les ouvrir, il n'arrivait tout simplement pas à les décoller.

Quelque chose de chaud et de doux caressa ses cheveux. Glissant dans ses boucles avec une douloureuse familiarité.

- Hey, hey, murmura une voix toute aussi familière, près de l'oreille de Peter. Tu es réveillé ?

Peter se força à ouvrir les yeux. Pendant un instant, tout fut flou autour de lui.

Mais il reconnaissait la voix.

- May ?

Elle apparut à côté de lui – se levant du fauteuil dans lequel elle était assise, placé le plus près possible du lit qu'occupait Peter, pour se pencher au-dessus de lui. Une de ses mains se perdit dans ses cheveux.

Le mouvement le fit presque se rendormir, avant qu'il ne comprenne enfin qu'il était réveillé.

- Oui, chéri, murmura-t-elle, et la main qui n'était pas dans ses cheveux se posa sur la poitrine de Peter. C'est moi.

Elle avait l'air fatiguée – épuisée – mais contente lorsqu'elle lui sourit.

Avait-elle travaillé de nuit ? Peter n'arrivait pas à s'en rappeler, et même s'il était dans une pièce qui ne lui était pas familière, dans un lit tout aussi peu familier, c'était ce fait qui lui fit comprendre que quelque chose n'allait pas. Il avait toujours su quand elle travaillait de nuit.

Ses yeux se plissèrent alors qu'il essayait de la voir plus clairement.

- Ç'va ?

Sa langue était trop sèche. Et froide. En fait, tout son corps était froid. Et lourd.

- Oui.

Son sourire s'agrandit, juste un peu, alors qu'elle riait doucement. Les doigts dans les cheveux de Peter ne ralentirent pas.

- Je vais bien. Tu vas bien. Tout le monde va bien.

Peter – utilisant toute la force qu'il avait à ce moment-là – parvint à lever une main tremblante au-dessus du lit. Elle resta suspendue dans l'air entre eux deux pendant à peine une seconde avant que May ne l'attrape. La rapprochant d'elle pour y déposer un baiser doux.

- Retourne dormir, bébé.

Peter ne fut pas sûr d'avoir acquiescé. Il en avait eu l'intention, en tout cas.

- Ç'va.

Et il replongea.

Quand il se réveilla de nouveau, il était dans le même lit, et dans la même pièce étrange. Et encore une fois, il avait besoin d'aller aux toilettes.

Il était seul, maintenant, cependant. May avait dû partir parce que la chaise près du lit était toujours là, placée juste à côté du lit médical, mais elle était vide. Le lit lui-même était destiné à un usage médical. Peter ne l'avait pas vraiment remarqué la dernière fois qu'il s'était réveillé, mais alors qu'il se mettait en position assise, il put apercevoir les différents fils et électrodes. Et il y en avait un paquet – dont certains étaient toujours connectés. La plupart l'étaient à sa poitrine nue, et en levant les yeux il vit qu'ils mesuraient son rythme cardiaque, sa pression sanguine et sa température. En fait, il y avait plusieurs machines près du lit qui prenaient sa température.

Ce fut là – assis du mieux qu'il pouvait – dans l'obscurité de la chambre, que ça le frappa. Que tout le frappa.

L'attaque de l'école. Le genre de sous-marin. Leur évasion. Leur dérive.

Leur dérive.

- Wanda.

Son nom s'échappa de ses lèvres sans même qu'il s'en rende compte.

Oh mon Dieu. Où était-elle ? S'il était seul ici, alors –

- Mademoiselle Maximoff est actuellement dans la chambre près du hall, résonna la voix de F.R.I.D.A.Y., doucement, à travers l'obscurité de la pièce, et la respiration de Peter s'accéléra quand il l'entendit.

- Est-ce qu'elle est – est-ce qu'elle est –

Il ne pouvait se résoudre à le dire. Il ne pouvait tout simplement pas.

- Mademoiselle Maximoff est en vie et se rétablit, tout comme vous, répondit la voix de F.R.I.D.A.Y., et Peter sentit le souffle qui s'était coincé dans sa gorge se relâcher finalement.

Elle était en vie. Il était en vie. Ils l'avaient fait.

- Elle n'a pas encore repris connaissance mais ses signes vitaux se sont considérablement améliorés depuis que vous avez tous les deux été ramenés au Complexe, tôt, hier matin.

Peter prit une autre inspiration, mais quelque part entre sa poitrine et ses lèvres éclata un sanglot, cherchant à s'échapper. Un autre suivit. Puis un autre.

- Vous semblez être en détresse, Mr. Parker.

Était-ce le cerveau épuisé de Peter ou la voix de l'I.A. avait-elle vraiment semblé plus douce ?

- Voulez-vous que j'alerte Mr. Stark ou Mrs. Parker du fait que vous êtes réveillé ?

Peter passa ses mains sur son visage, chassant les larmes.

- Non, répondit-il instantanément. Non. Ne – ne dis rien à personne. Juste – juste laisse-moi une minute –

Peter prit plusieurs inspirations tremblantes.

- Bien sûr, Mr. Parker.

Peter ne pouvait pas dire à quel moment l'I.A. était devenue réconfortante. A quel moment sa voix avait commencé à lui inspirer un sentiment de sécurité.

- Peter, murmura-t-il quand ses sanglots se tarirent et que sa poitrine ne sembla plus sur le point de s'ouvrir en deux à la moindre minute. Est-ce que tu p-peux m'appeler Peter ?

Il y eut une brève pause.

- Bien sûr, Peter.

Peter laissa échapper un nouveau souffle tremblant.

- Q-quel jour on est ?

Il regarda autour de lui. Il faisait sombre, mais il y avait quelques rayons lumineux qui filtraient derrière les rideaux qui couvraient le mur de fenêtres à sa droite. La pièce elle-même était très simple. Juste son lit, divers équipements médicaux et quelques fauteuils trainaient çà et là, ainsi qu'un canapé le long du mur qui, Peter en était sûr, devait valoir plus que tout ce qu'il possédait.

Il était définitivement au Complexe.

- On est vendredi, Peter, résonna de nouveau la voix de F.R.I.D.A.Y. – toujours aussi douce. Le vendredi 16 Mars 2018, ajouta-t-elle. Il est 7h14 et nous sommes actuellement dans l'établissement plus connu sous le nom du « Complexe des Avengers » dans l'Etat de New-York –

Les mots commençaient à se brouiller et à se mélanger, tout comme les faits énoncés, que Peter avait déjà oubliés. Il se disait qu'il n'arriverait jamais à se défaire de l'image de son meilleur ami, debout, au bout du canon d'un pistolet –

- Ned ?

Son nom s'échappa de la gorge de Peter.

- Ned ?!

Il se redressa subitement, les électrodes accrochées à sa poitrine prenant un angle étrange. Le bip autrefois régulier d'une des machines près du lit s'emballa.

- Mon ami – à l'école – il y a eu une attaque –

Oh mon Dieu. Oh mon Dieu, qu'est-ce que –

- Il y a eu une attaque – est-ce qu'il – est-ce qu'il est –

La réponse de F.R.I.D.A.Y. fut instantanée.

- Mr. Leeds n'a eu qu'une blessure mineure durant l'attaque et se trouve actuellement chez lui, dans le Queens, sur ordre de Mr. Stark qui l'a menacé – et je cite – de « rediriger toutes tes foutues candidatures pour l'université vers Chucky Cheese (1) si tu n'arrêtes pas d'appeler ! Je t'appellerai quand il sera réveillé et prêt à voir des gens, mais jusque-là, repose-toi, gamin. »

Aussi vite qu'étaient arrivés ses sanglots, des rires étranglés prirent leur place, à l'image qu'il eut de Ned en train d'harceler les Avengers pour avoir des informations. A la réponse de Tony. En sachant qu'ils étaient en sécurité. Ils étaient en sécurité. C'était vraiment terminé –

- Il va bien, murmura Peter, se rassurant lui-même plus que pour avoir une confirmation, mais une autre pensée le frappa.

Et le fit paniquer.

- MJ – merde – je ne – je n'ai pas –

Il ne l'avait pas vue. Il ne l'avait pas vue du tout. Elle était en Chimie – pas loin des portes que les soldats avaient enfoncées en pénétrant dans l'école –

A nouveau, la réponse de F.R.I.D.A.Y. fut si rapide que cela interrompit les pensées qui menaçaient de le faire suffoquer.

- Aucun étudiant ou membre du corps enseignant n'a été gravement blessé lors de l'attaque à la Midtown School of Science and Technology – vous et Mr. Leeds étant les deux seuls à avoir été légèrement blessés.

Oh. Ok.

- Ok.

Le mot passa la barrière de ses lèvres alors qu'il essayait d'assimiler les informations.

- Ok. Ok.

Ils allaient bien. Tout le monde allait bien. Wanda irait bien.

D'une manière ou d'une autre – malgré la peur paralysante d'avoir tout perdu, qui l'avait consumé pendant les jours qu'il avait passés dans sa cellule – tout s'était arrangé.

Tout le monde allait bien.

Tout le monde était à la maison.

- Voulez-vous que j'appelle Mr. Stark, maintenant ? murmura la voix de F.R.I.D.A.Y.

- Non, dit de nouveau Peter.

Ses joues étaient mouillées. Pourquoi ses joues étaient-elles mouillées ? Il frotta ses mains contre ses joues de nouveau. Quand avait-il commencé à pleurer ?

- Non. Je vais bien. Vraiment. J'ai juste – j'ai juste besoin –

C'était juste un peu trop, un peu trop d'informations d'un coup. Il se sentait comme s'il avait vécu dans un état constant d'adrénaline et de peur pendant des semaines, et maintenant, tout était terminé. Tout lui tombait dessus d'un seul coup. Il aurait voulu dire quelque chose – essayer de décrire le sentiment dévorant que le sol allait s'ouvrir sous ses pieds qui le submergeait.

- Il faut que j'aille aux toilettes.

Il était plus facile de se concentrer sur ça. Il pouvait gérer ça.

- J'ai vraiment besoin d'aller aux toilettes.

- Il y des toilettes derrière la porte à votre droite.

Peter commença à se glisser sur le bord du lit, mais fut arrêté par les électrodes qui étaient accrochées à sa poitrine.

Il passa une main dessus.

- Est-ce que – est-ce que je peux les enlever ?

La réponse de F.R.I.D.A.Y. fut hésitante, mais pas moins sûre.

- Ils ne sont pas vitaux à votre récupération, dit-elle, et Peter se dit que c'était sans doute la seule raison pour laquelle elle avait accepté.

Tony n'était d'habitude pas très indulgent quand ça concernait sa sortie de l'aile médicale sans personne pour l'entourer – bien que l'hypocrite l'ait fait lui-même à plusieurs reprises, à la grande gêne de Peter et la fureur de Rhodey.

- Oui. Vous pouvez les enlever.

Alors Peter les enleva. F.R.I.D.A.Y. éteignit chaque machine alors que Peter décollait les électrodes, puis il posa ses pieds au sol et se leva.

Et s'effondra.

- N'appelle pas Mr. Stark ! siffla Peter depuis le sol, connaissant les intentions de l'I.A. Je vais bien, j'ai juste – j'ai juste besoin d'une minute.

Apparemment, ses jambes étaient faites de coton. Il essaya de se relever.

Peter n'était pas sûr que le silence de F.R.I.D.A.Y. signifiait qu'elle l'avait écouté ou qu'elle l'avait mouchardé et n'avait pas ressenti le besoin de le lui dire, alors il se força à se remettre quand même sur ses pieds. Il bougea plus lentement cette fois, s'agrippant au lit alors qu'il se dirigeait vers la porte de la salle de bain. Il réussit sans tomber de nouveau, ni Tony arrivant en trombe, ce qui était un plus. Et après avoir vidé sa vessie extrêmement pleine, il se sentit un peu mieux. Un tout petit peu.

Ça ne l'empêcha pas cependant de trébucher dans la salle de bain, alors qu'il retournait vers la porte. Il se rattrapa à l'embrasure de la porte, et prit une minute pour se stabiliser.

Il n'était pas vraiment sûr de savoir quoi faire, maintenant. Il ne voulait pas retourner dans son lit. Non. Il avait passé des jours seuls, sur le lit, dans sa cellule, et ensuite des jours sur une petite pièce de métal au milieu de l'océan. Non. Il voulait bouger, marcher – aller dehors.

Ouais. Il voulait aller dehors.

Mais c'était plus facile à dire qu'à faire. Il avait marché jusqu'à la porte de sa chambre sans tomber. Et ensuite il était sorti dans le hall. Il s'arrêta sous l'arche du couloir, s'appuyant contre le mur plus longtemps qu'il ne voulait l'admettre, enroulant un bras autour de son torse dénudé. Il aurait aimé avoir pris une couverture, ou une veste, mais retourner en arrière pour en prendre une lui semblait demander trop d'efforts.

- Peter, peut-être serait-il mieux que vous retourniez dans votre chambre ? l'appela F.R.I.D.A.Y.

La voix était douce, cependant, ce n'était pas un ordre comme il avait pu l'entendre faire avec d'autres Avengers. Ni même un ton qui balançait constamment entre amusement et frustration, comme quand elle parlait avec Tony.

- Vous n'êtes pas encore rétabli, la température de votre corps est toujours instable et les effets d'une déshydratation sévère s'aggravent en général avec l'activité physique.

- Je ne vais pas faire un jogging, argumenta Peter, mais en parlant, ses yeux s'étaient clos.

Juste une minute.

- Vous êtes fatigué et devriez vous reposer, répondit-elle avec une logique frustrante.

- J'ai juste –

Il lutta quelques secondes pour trouver les mots, mais il n'y parvint pas et abandonna.

- J'ai juste besoin d'aller dehors.

Il s'attendait à ce qu'elle désapprouve, qu'elle le renvoie au lit – en appelant sa tante ou Tony, mais elle ne le fit pas.

Son silence, cette fois, fut plus long.

- Il y a une porte qui donne sur la pelouse en bas des escaliers qui se trouvent sur votre gauche, à mi-chemin du couloir, puis directement à droite lorsque vous arriverez au bas des marches.

Peter se força à rouvrir les yeux.

- Merci, F.R.I.D.A.Y.

Cette fois, sa réponse fut immédiate.

- Vous pouvez toujours compter sur moi, Peter.

Peter n'eut pas vraiment le temps de trop y réfléchir avant que des voix ne résonnent dans le hall. Il se cacha derrière l'arche. Juste assez pour qu'on ne le remarque pas. Il n'était pas sûr de pourquoi il se dissimulait – ce n'était pas comme s'il avait fait quelque chose de mal, mais il sentait que ni sa tante ni Tony ne comprendraient aussi bien que F.R.I.D.A.Y. son besoin d'aller dehors. De s'allonger dans l'herbe, dehors – sans eau ni cellule à l'horizon.

Oh. Peut-être que ce n'était si inexplicable que ça.

Les voix devenaient de plus en plus fortes.

- Vraiment, je devrais retourner le voir.

May. C'était May. Même depuis l'endroit où il se trouvait, Peter pouvait sentir la douce odeur de son parfum. Il était partout dans l'appartement – si fort, parfois, qu'il lui donnait des migraines. Maintenant, ça sentait comme la maison. Comme un endroit sûr.

- Le gamin est en sécurité, et il va bien aller.

Ça c'était Happy. Qu'est-ce qu'Happy faisait ici ? Il ne restait jamais au Complexe, préférant rester en ville.

- Tu le sais, Tony a demandé à presque tout le personnel médical qu'il emploie d'examiner le gamin régulièrement, et ils ont dit la même chose. Il est juste fatigué – mais à ce point-là, pas autant que toi. Sérieusement. Un peu plus et tu auras autant de cernes que Tony

Peter risqua un regard vers le hall, depuis l'endroit où il était caché et les vit tous les deux, debout au milieu du hall, juste à côté du couloir. Happy avait une main dans sa poche, mais l'autre reposait légèrement sur le bras de May – et elle avait l'air d'en avoir besoin. Même avec un regard, Peter put voir l'épuisement dans chaque parcelle de son corps. A la façon dont ses bras pendaient à ses côtés, et ses cheveux qui lui tombaient sur le visage. Elle détestait ça.

Une pointe de culpabilité frappa Peter plus fort et plus vite que ce à quoi il s'était préparé, et il se cacha de nouveau derrière l'arche, s'y appuyant lourdement.

- Je sais, disait May. Je le sais, c'est juste – je viens tout juste de le retrouver.

Les mots n'étaient qu'un murmure, mais Peter les entendit comme si elle les avait criés. Chaque mot était plus douloureux que le précédent. Mon Dieu, que lui avait-il infligé ?

- L'idée de ne pas le garder près de moi –

- Je ne dis pas que tu dois rentrer chez toi, la coupa Happy. Juste que tu manges – le Captain a préparé un énorme petit-déjeuner, à l'étage – et ensuite que tu ailles dormir dans un vrai lit. La chambre juste à côté est libre, et je suis sûr que F.R.I.D.A.Y. te tiendra au courant du moindre de ses mouvements – pas vrai, F.R.I.D.A.Y. ?

Peter sentit son estomac se serrer.

- Absolument, Mrs. Parker, répondit la voix de F.R.I.D.A.Y. Je n'hésiterai pas à vous informer aussitôt qu'il aura besoin de vous.

May laissa échapper un soupir qui avait l'air douloureux.

- Très bien.

Peter pouvait l'imaginer pincer l'arête de son nez avec deux doigts en disant ça, une chose qu'elle faisait souvent quand elle était stressée ou épuisée.

- Très bien – manger, puis dormir. Montre-moi le chemin.

Peter supposa que Happy s'exécuta, puisqu'un instant plus tard, il entendit des bruits de pas, sauf que cette fois, ils retournaient d'où ils venaient – loin de Peter.

- Merci de m'avoir couvert, F.R.I.D.A.Y., chuchota Peter, toujours appuyé contre l'arche.

- J'ai simplement dit la vérité, répondit la voix de F.R.I.D.A.Y. Aussitôt que vous aurez besoin d'elle, je la contacterai.

Peter acquiesça.

- Est-ce qu'elle – est-ce qu'elle va bien ?

Il y eut un instant d'hésitation à nouveau avant que F.R.I.D.A.Y. ne réponde.

- Votre disparition, puis votre disparition en mer, lui a causé beaucoup d'inquiétude et de stress, à elle tout comme aux autres habitants du Complexe, dit-elle enfin, mais avec prudence, comme si elle choisissait ses mots. Mais je n'ai aucun doute sur le fait que votre retour, et votre rétablissement, calmera tout ce stress.

- Stressé à quel point ? insista Peter. Je veux dire, est-ce que tout le monde va bien ?

L'hésitation fut plus longue cette fois.

- Mrs. Parker n'est pas venue au Complexe jusqu'à ce que vous reveniez, et je ne peux donc pas statuer sur sa condition lors de votre disparition, à part à travers les appels échangés entre elle et Mr. Stark.

- Et Mr. Stark ? la pressa Peter, sentant qu'il y avait quelque chose qu'elle essayait vraiment de ne pas lui. Est-ce qu'il était – est-ce qu'il va bien ?

L'hésitation après qu'il eut fini de parler fut encore plus longue – si longue que Peter pensa qu'elle ne lui répondrait pas. Tony était, après tout, son créateur, et c'était une question un peu personnelle. Il serait logique qu'elle ne dévoile pas cette information si facilement.

Peter se détacha de l'arche, non sans difficulté, et commença à marcher en direction des escaliers, comme le lui avait dit de faire F.R.I.D.A.Y., quand elle répondit enfin.

- Mr. Stark était bouleversé par votre perte. Tout comme les autres – je pense donc qu'il est préférable que vous preniez des mesures pour que de tels évènements ne se reproduisent pas.

Un rire hystérique s'échappa des lèvres de Peter avant qu'il ait pu se retenir.

- Ouais – ne t'inquiète pas. Ce n'est de toute façon pas une expérience que j'ai envie de réitérer.

Peter atteignit le bas des escaliers et s'avança.

- Sur votre droite, s'il-vous-plait, Peter, lui dit F.R.I.D.A.Y.

- Mais je peux voir une porte juste ici – dit Peter en se dirigeant vers la porte du patio juste à côté de lui.

- Sur votre droite, s'il-vous-plait, Peter, répéta F.R.I.D.A.Y.

Il regarda vers le haut pendant un moment – une habitude dont il n'arrivait à se débarrasser même si ça faisait rire Tony à chaque fois qu'il le voyait faire – mais ne protesta pas. L'I.A. le laissait faire plus que May ou Tony, alors il pensa qu'il valait mieux ne pas tester sa chance.

- Très bien, murmura-t-il, en se dirigeant vers la droite.

Ce n'était pas très loin. Il n'y avait qu'une porte sur chaque pan de mur avant qu'il arrive dans une grande pièce ouverte, avec des canapés et une table basse en marbre. La pièce était lumineuse grâce aux grandes fenêtres qui recouvraient les murs, et tout comme l'avait dit F.R.I.D.A.Y., il y avait une porte qui menait directement dehors.

Ce que F.R.I.D.A.Y. n'avait pas mentionné, c'était que Tony était actuellement avachi au travers d'un canapé qui séparait Peter de la porte.

Elle avait guidé Peter droit jusqu'à lui. Traitresse.

Peter fit un pas hésitant vers l'avant, ne sachant pas s'il devait y aller quand même en espérant que ça ne réveille pas Tony, ou s'arrêter devant lui.

L'homme avait l'air aussi mal que Peter l'avait imaginé.

Des poches sombres s'étiraient sous ses yeux. Il était avachi au travers d'un canapé comme s'il s'était simplement assis pendant un instant et s'était soudainement rendu compte qu'il ne pouvait rester debout plus longtemps avant de s'effondrer – ses pieds toujours fermement sur le sol. Ça n'avait pas l'air confortable. Même pour Peter, qui avait dormi la tête en bas juste pour prouver à Ned qu'il pouvait le faire. Peter devrait le réveiller. Il devrait vraiment. Ça ne pouvait pas être bon pour son dos de dormir comme ça – en même temps, il voulait toujours vraiment aller dehors. Il avait besoin d'aller dehors. Juste pour un instant, juste pour se prouver à lui-même qu'il pouvait. Qu'il était enfin libre.

Et il n'y avait aucune chance pour que Tony le laisse faire.

Au final, Peter n'eut jamais besoin de faire un choix, comme il était resté longtemps contre l'arche et contre la porte juste avant, si bien que ses jambes avaient décidé qu'elles en avaient marre de marcher et il s'effondra. Il heurta la petite table à côté de lui en tombant – faisant ainsi tomber le bric-à-brac qui se trouvait dessus.

Tony se releva subitement sur le canapé. Ses yeux se posèrent sur Peter une seconde plus tard, et il était debout avant même d'avoir eu le temps de se focaliser sur lui.

- Peter !

Peter, qui était déjà à moitié debout, fut soulevé par des mains tremblantes. Elles se posèrent sur lui, effleurant ses épaules, avant de descendre et de rester finalement sur ses bras. Le stabilisant.

Les yeux sombres de Tony le transpercèrent.

- Peter ? Qu'est-ce qui ne va pas ?

Ces yeux le regardèrent de haut en bas, une main le lâchant pour survoler son corps, pour s'assurer qu'il allait bien. Peter allait bien. Il allait bien – mais cette main tremblait. Cette main stable, sûre, qui l'avait rattrapé plus de fois qu'il ne pouvait le compter, avait fini par trembler.

Tout comme Peter.

Les deux mains de Tony se reposèrent sur ses bras quand Peter vacilla.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu as besoin de quelque chose ? est-ce que tu –

Les mots sortaient rapidement de la bouche de Tony, si vite que Peter dut faire un effort pour tout comprendre. Ses yeux bruns l'observèrent à nouveau, et la terreur se lisait sur chaque ride de son visage. Et il y en avait, des rides. Tony plaisantait tous les jours sur le fait que Peter le faisait vieillir – mais en regardant l'homme plus âgé, Peter fut sincèrement inquiet de voir que c'était vrai. Il avait l'air épuisé, et faible. Pâle. Peter sentit le soudain besoin de le soutenir, en dépit de ses propres genoux qui menaçaient de lâcher.

- Je vais bien, se força à dire Peter entre ses dents. Vraiment –

Il prit une inspiration, dont il avait réellement besoin, et se tint plus droit. Plus stable.

Il allait bien. Il allait bien.

Tony ne fut évidemment pas aussi facile à convaincre. Ses mains bougèrent de nouveau, une venant se poser contre sa poitrine. Elle y resta, une chaleur réconfortante se frayant un chemin jusqu'au cœur de Peter, contre laquelle il ne put s'empêcher de s'appuyer. Et il respira de nouveau. Ce fut plus simple cette fois, avec cette légère pression contre sa poitrine – parce qu'elle le rattachait au sol.

Les yeux de Peter se rouvrirent quand Tony parla de nouveau – attendez, quand les avait-il fermés ?

- F.R.I.D.A.Y., je t'ai dit de m'alerter quand il se réveillerait !

La voix de F.R.I.D.A.Y. retentit au-dessus d'eux.

- Il est réveillé – et vous venez d'être alerté de ce fait.

Tony lança un regard meurtrier en direction du plafond.

- Toi – toi ne crois pas que je ne vais pas te re-coder – menaça Tony, sans réelle conviction non plus.

Ses mains s'enroulèrent plus fermement autour de Peter – le poussant vers les escaliers qu'il venait juste de descendre.

- Qu'est-ce que tu fais ici – viens –

Utilisant plus de force que ce qu'il aurait vraiment fallu, Peter força Tony à s'arrêter avant qu'il puisse faire plus de quelques pas.

- Non.

Tony se retourna vers lui – refusant de le lâcher ne serait-ce qu'une seconde.

- Non ?

- Non, dit de nouveau Peter, en prenant le temps d'inspirer. Je veux aller dehors.

Les yeux de Tony s'écarquillèrent à un tel point que Peter eut peur qu'ils ne sortent de leurs orbites.

- Tu veux faire quoi ?

Tony lança un regard effaré vers l'extérieur, remarquant l'herbe glacée au sol.

- Petit, on est au milieu du mois de Mars – il ne fait pas chaud dehors.

Sa main qui était sur l'épaule de Peter se serra.

- On vient juste de faire remonter ta température à un niveau supérieur à celui d'une Ben & Jerry's, ok, on ne va pas s'asseoir dehors

Tony essaya de le faire avancer davantage, mais Peter planta ses talons dans le sol. Fermement.

- S'il-vous-plait.

Ce fut le seul mot qui sortit alors qu'il essayait de trouver un moyen d'expliquer – de faire comprendre à Tony qu'il en avait besoin. Il avait besoin de ça. Juste pendant une minute. Juste pendant une seule minute.

- Je ne veux plus rester couché. Je ne veux pas – je ne –

Les mots se coincèrent dans sa gorge, tout comme la seconde inspiration qu'il prit, et il s'étrangla pendant une seconde – et alors, ces mains le pressèrent de nouveau, le ramenant sur terre.

L'empêchant de s'effondrer.

- Hey.

Tony se pencha plus près de lui, ses yeux fixés si fort dans ceux de Peter que Peter n'aurait pas pu détourner le regard même s'il avait voulu.

- Hey, petit, regarde-moi. Tu vas bien. Tout va bien.

La voix de F.R.I.D.A.Y. résonna de nouveau.

- Peter a montré de nombreux signes de détresse depuis qu'il s'est réveillé, il y a vingt minutes.

Ce fut au tour de Peter de lancer un regard meurtrier en direction du plafond.

- Et il a exprimé de nombreuses fois l'envie d'aller dehors.

- Je ne veux pas rester dans la chambre – se dépêcha de dire Peter.

Il n'avait pas besoin que F.R.I.D.A.Y. inquiète l'homme au point qu'il fasse venir l'équipe médicale ici. Il allait bien. Il allait bien.

- Je ne veux pas rester coincé ici –

- Ok, acquiesça Tony, ses mains toujours fermement serrées autour de lui.

Peter prit une autre lourde inspiration – prêt à argumenter de nouveau – avant que les mots de Tony ne fassent vraiment sens.

- Ok. Dehors, murmura Tony, les faisant se diriger tous les deux dans l'autre direction.

Il fallut une minute entière à Peter pour réaliser ce qui était en train de se passer – alors même que Tony continuait à parler.

- Dehors, à l'aube, au mois de Mars – F.R.I.D.A.Y., dis à quelqu'un de ramener un pull, et des couvertures, des tas de couvertures. Et un chauffage d'appoint –

Tony se retourna et ouvrit la porte en verre – et l'air froid les frappa.

- Mer-ci.

Mon Dieu, il était presque en train de pleurer. Alors qu'ils sortaient dans le petit jardin, Tony gardant une main serrée autour du bras de Peter, Peter retint ses larmes. Ils étaient dehors, sur la terre ferme.

Il était libre.

Il était libre.

- Je te tiens, petit, murmura Tony alors qu'ils marchaient dans l'herbe glacée qui craquait sous leurs pieds.

Tony frissonna.

- Bon sang – ok, par ici –

Peter ne sentit rien.

Tony les fit s'asseoir tous les deux, gardant une main sur Peter à chaque seconde – Peter croisa ses jambes sous lui, et Tony se pencha vers lui. Aussitôt qu'ils furent assis, Tony s'écarta – et pendant une seconde terrifiante, Peter crut qu'il allait le laisser ici, dans le froid, seul – mais aussi vite que ses mains l'avaient lâché, elles revinrent, et Tony enroula fermement sa veste autour de Peter.

Peter eut du mal à suivre le mouvement et Tony l'aida à enfiler les manches.

- Vous n'avez pas besoin de –

Le regard sévère que Tony lui lança fit taire Peter avant même qu'il ait le temps de finir.

- Garde-la ou on retourne à l'intérieur. Ta Tante va me tuer si elle découvre ça, grommela Tony en finissant de faire passer le bras de Peter à travers la manche. Comment tu te sens ?

Peter voulut hausser les épaules mais abandonna rapidement. Mon Dieu. Tout lui faisait mal.

- Bien.

La veste était enroulée fermement autour de lui, mais Tony ne retira pas ses mains qui étaient sur ses épaules. Au lieu de ça, il s'en servit pour le maintenir en place alors qu'il le regardait droit dans les yeux.

- Tu veux réessayer ?

Les mots n'étaient pas durs – ce n'étaient pas les mots tranchants qui sortaient de la bouche de Tony à chaque fois qu'il se mettait dans une situation impossible. Non. Ils étaient doux. Réels.

Le masque calme que Peter avait plaqué sur son visage depuis qu'il s'était réveillé glissa, juste un petit peu.

- Juste – juste fatigué, murmura Peter, jouant avec les manches de la veste de Tony avant de se rappeler rapidement qu'elle devait coûter extrêmement cher, et il serra les poings pour éviter de l'abîmer. Je sais pas, j'ai juste – dit-il difficilement.

Tony n'insista pas. Il le regarda simplement se battre avec les mots, une chaleur solide auprès de Peter. Finalement, il laissa tomber l'idée de trouver les mots pour décrire le nœud dans sa poitrine qui ne voulait tout simplement pas se défaire.

- Est-ce que Wanda va vraiment bien ?

Tony accepta le changement de sujet sans broncher, et Peter crut qu'il allait en pleurer de soulagement.

- Elle était vraiment mal quand on l'a trouvée – tout comme toi – mais elle se rétablit.

Peter hocha la tête.

- F.R.I.D.A.Y. a dit qu'elle ne s'était pas encore réveillée ?

Tony hésita.

- Non. Non, pas encore.

Le nœud dans la poitrine de Peter se resserra davantage.

- C'est si grave que ça ?

Tony hésita de nouveau.

- On ne sait vraiment pas, admit-il, en enroulant ses bras autour de ses genoux. Wanda est une énigme pour nous tous, continua-t-il, et Peter se retrouva à se pencher plus près de lui. Ce qu'elle a fait – soulever le Raft – on ne savait pas qu'elle pouvait le faire, alors on ne sait vraiment pas quelles seront les répercussions sur son organisme.

Peter acquiesça lentement.

- Mais elle a les meilleurs médecins qu'on puisse s'offrir – et Vision, qui en sait plus sur ses pouvoirs que n'importe qui d'autre – alors elle ira bien. Je te le promets. Prends juste soin de toi, pour le moment.

Le silence se fit pendant un temps – et il s'étira jusqu'à ce que Peter ne puisse plus le supporter.

- Qu'est-ce qui s'est passé ? murmura-t-il.

Tony tourna la tête vers lui.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Tout ça ? souffla Peter, un nuage de fumée sortant de ses lèvres. Qu'est-ce qui s'est passé à l'école ? l'espèce de sous-marin ? Comment vous nous avez retrouvés ? Comment on est revenus ici –

Les mains de Tony se reposèrent sur ses épaules.

- Ok, ok, respire.

N'était-ce pas ce qu'il faisait déjà ? Oh. Ses poumons le brûlaient – peut-être qu'il ne respirait pas. Les doigts de Tony relâchèrent légèrement leur prise, juste un peu, quand Peter prit une inspiration tremblante.

- Voilà. Calme-toi.

Peter hocha la tête, trop fatigué et sur les nerfs pour être vraiment embarrassé par les larmes qui glissaient silencieusement le long de ses joues, jusqu'à son menton. Tony les essuya avec ses doigts, sans rien dire. Peter avait douloureusement besoin de se blottir contre lui.

- Il ne s'est rien passé avec l'école – il y a toujours une enquête en cours, mais avec Ross toujours en poste, ça n'ira pas bien loin, commença Tony quand Peter eut repris un semblant de contrôle sur lui-même, essuyant toujours les larmes qui roulaient sur les joues de Peter sans faire de commentaire. Le Raft a disparu. Il a coulé. Tu n'as plus à t'en inquiéter. Un bateau de pêche vous a récupérés il y a deux jours maintenant – et ils ont contacté les garde-côtes dont le canal de transmission était un de ceux que je surveillais, alors on a pu être capables de trouver le bateau et de vous récupérer. On vous a directement ramenés ici, où vous êtes restés depuis.

La main qui était toujours sur l'épaule de Peter – l'autre continuant à essuyer les larmes sur ses joues – se serra, légèrement. Les yeux de Peter se levèrent pour trouver ceux de Tony.

- Tout est fini, murmura de nouveau Tony, ses yeux ne quittant jamais ceux de Peter. Tout est fini.

Peter perdit la bataille contre le dernier morceau de self-contrôle qu'il possédait et se blottit contre Tony. Ce dernier le rattrapa sans aucune hésitation et enroula ses bras si fort autour de lui que ça aurait laissé des marques si ce n'était pas lui. La pression contre sa poitrine, alors qu'il était blotti contre la poitrine de Tony, suffit à le faire s'effondrer littéralement.

- Tout est fini, murmura Tony, déposant un baiser dans ses cheveux avant de poser sa joue contre sa tête, alors que Peter cachait son visage dans le creux de son cou.

Les doigts de Peter se serrèrent autour du t-shirt de Tony, ruinant sans doute le tissu coûteux.

Ils restèrent comme ça pendant un long moment. Peter blotti dans les bras de Tony en pleurant. Il essaya de retenir ses sanglots, de reprendre le contrôle de lui-même, mais chaque tentative le laissait tremblant et le faisait s'étrangler encore plus. Quelque part, dans un coin de son esprit, Peter savait que sitôt que tout ça serait terminé, il serait horrifié. Il avait passé presque un an à se battre pour faire ses preuves auprès de l'homme, pour lui montrer qu'il était prêt, qu'il n'était pas un enfant, et là il tombait en morceaux dans ses bras. Mais Tony ne l'aurait pas laissé partir. Même quand Peter essaya de se défaire de sa prise, Tony refusa de le laisser partir, parce qu'il savait qu'il ne voulait pas vraiment partir. Ces bras étaient tout ce qui le gardaient en un seul morceau – ou ce qui restait de lui.

Quelque part derrière eux, un petit woosh les avertit que la porte en verre s'était ouverte, et des bruits de pas se rapprochèrent, craquant dans l'herbe glacée. Peter n'ouvrit pas les yeux. Ne s'écarta pas. Il était trop fatigué. C'était juste un peu trop.

- Quelqu'un a demandé une couverture en coton et polyester ?

La voix de Clint leur parvint. Peter sentit la tête de Tony bouger, juste un peu, de l'endroit où elle reposait dans ses cheveux.

- Ok, d'abord, je suis offensé du fait que tu penses que j'aie des couvertures avec du polyester. S'il-te-plait. C'est du coton pur ou de la laine. Pas du polyester

La voix de Tony, au-dessus de la tête de Peter, était plus douce qu'elle aurait dû l'être en d'autres instants. Mais la réplique donnait une impression de normalité. Tout était presque normal. Presque.

- Et ensuite, oui, donne-moi-la.

L'herbe glacée à côté de Peter craqua légèrement.

- Et le chauffage d'appoint ?

La voix de Steve était douce – comme toujours. Peter avait été surpris, quand ils s'étaient rencontrés pour la première fois, par la voix douce de Steve. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait toujours imaginé Steve avec une grosse voix – une voix qu'on pouvait entendre à l'autre bout des champs de batailles, par-dessus la foule. Il avait toujours ce genre de voix dans les films. Les acteurs rugissaient et criaient dans tous les films qu'ils avaient fait sur lui.

Mais Steve était doux. Sa voix était douce. La main qui se posa sur le bras de Tony, juste en-dessous du bras de Tony qui était enroulé autour de ses épaules, était douce. Et Peter ne pouvait pas l'imaginer autrement, maintenant. Tout le reste était faux. Chaque film et chaque légende était fausse, comme s'ils voyaient d'abord Captain America et pas Steve Rogers. Parce qu'ils étaient différents. Ils l'étaient vraiment. Captain America était le visage sur son paquet de céréales. Le visage des vidéos de son lycée que Tony avait remixé et joué en boucle sur tous les écrans du Complexe pendant des jours après que l'équipe soit revenue. Il était ce que les gens avaient fait de lui.

Steve n'était pas... tout ça.

Il était cette voix douce que l'on entendait à l'autre bout des champs de batailles parce qu'on cherchait à l'entendre.

Tony acquiesça de nouveau par-dessus la tête de Peter. Mais son corps se mit rapidement à trembler quand son torse seulement vêtu d'un t-shirt commença à se rebeller contre le vent glacé qui soufflait contre son dos.

- Chauffage d'appoint, acquiesça Tony, pour lui –

Peter sentit la tête de Tony se reposer contre ses cheveux, sa respiration devenant haletante maintenant que le froid les attaquait réellement. Peter essaya de se retourner, d'enlever la veste que Tony avait enroulée autour de lui, mais les bras de l'homme étaient comme des chaines et ne le laissèrent pas bouger. Et puis, Tony laissa soudainement échapper un souffle mécontent, et une seconde plus tard, quelque chose fut enroulé autour d'eux deux. Plusieurs choses, en fait, les emmitouflant ensemble, comme une espèce de –

- Clint, non, hé – non, on n'est pas un burrito

La voix de Tony semblait étouffée et lointaine, aux oreilles de Peter – et il avait commencé à s'égarer de nouveau. Mon Dieu, il était fatigué. Fatigué et juste... fatigué, mais d'une autre manière. Pas le genre mes jambes ne supporteront plus jamais mon poids, mais plutôt le premier « fatigué » - la fatigue familière – dans le sens je suis un peu inquiet à l'idée que tout ce qui se trouve à l'extérieur de ces couvertures me brise complètement. Il avait connu ce sentiment, avant ça – après Ben. Quand le monde entier avait été trop lourd à supporter, et qu'il avait eu l'impression que le ciel lui tombait sur la tête. Quand même quitter l'appartement lui prenait des heures de préparation mentale parce que tout, absolument tout, à l'extérieur, pouvait le briser et –

- Comment tu vas, petit ?

La voix de Steve filtra à travers la panique qui l'avait submergé. Des mains douces ajustèrent les couvertures autour d'eux.

Peter haussa vaguement les épaules en-dessous des couvertures.

Steve sembla le comprendre.

Il s'était assis à la gauche de Peter, alors que Tony était sur sa droite, ses bras enroulés tout autour de Peter à cause des couvertures de Clint, tout comme ses jambes, et Steve se rapprocha de Peter.

Oh mon Dieu. Il était un vrai chauffage d'appoint. Bon sang. Ça ne devait pas être normal. Personne ne pouvait être aussi chaud – ou peut-être que Peter était vraiment trop froid. Quelle que soit la raison, Peter se retrouva à s'appuyer contre Steve – et ouais, ça, ça il en serait gêné plus tard – mais Steve ne s'éloigna pas. Au contraire. Il se tourna légèrement pour que Peter puisse reposer contre sa poitrine et il enroula un bras rassurant autour de Peter et Tony.

- Tu as plus que le droit de te sentir mal, tu as vraiment eu une semaine infernale.

Peter sentit les mots vibrer contre la poitrine de Steve, là où sa joue glacée était pressée.

Peter acquiesça.

- Respire simplement – tu vas bien, murmura la voix de Tony au-dessus de sa tête, son visage toujours appuyé contre les cheveux de Peter. On est là.

Peter acquiesça de nouveau, essayant de ne pas s'effondrer encore alors que les mots semblaient vouloir le briser.

Mais il existait des mots qui vous brisaient pour vous aider à vous reconstruire ensuite – et se reconstruire en mieux. Parce que si la première pierre sur laquelle il se reconstruisait était on est là, Peter savait qu'il ne retomberait jamais. Chaque pierre ensuite serait plus solide que la précédente.

Les yeux de Peter se fermèrent.

On est là.

Il allait bien.

On est là.

Ses amis allaient bien.

On est là.

Il était libre.

On est là.

Les paupières de Peter furent soudainement trop lourdes.

On est là.

Elles se fermèrent définitivement, et en quelques secondes, Peter plongea dans le premier sommeil reposant depuis ces quelques mois.

On est là.

Les yeux de Tony rencontrèrent ceux de Steve par-dessus la tête de Peter, alors que le petit s'endormait enfin. La main de Steve, qui reposait dans son dos, se serra en un poing autour des couvertures et les resserra autour d'eux. Un contact solide et chaud. Une pression qui le maintenant en un seul morceau. Qui les maintenait lui, Steve et Peter.

Les empêchant de s'effondrer.

Ces yeux trop bleus ne se détachèrent jamais de ceux de Tony. Et à l'intérieur, il y vit ses propres mots qui se reflétaient.

Tu vas bien. On est là.

Et il les crut.

(1) Chucky Chesse est une chaine de centres de divertissement américaine et de restaurants. 

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