Chapitre vingt-et-un

"𝑁𝑜𝑤 𝑎𝑛𝑑 𝑡𝘩𝑒𝑛 𝑤𝘩𝑒𝑛 𝐼 𝑠𝑒𝑒 𝘩𝑒𝑟 𝑓𝑎𝑐𝑒
𝑆𝘩𝑒 𝑡𝑎𝑘𝑒𝑠 𝑚𝑒 𝑎𝑤𝑎𝑦 𝑡𝑜 𝑡𝘩𝑎𝑡 𝑠𝑝𝑒𝑐𝑖𝑎𝑙 𝑝𝑙𝑎𝑐𝑒
𝐴𝑛𝑑 𝑖𝑓 𝐼'𝑑 𝑠𝑡𝑎𝑟𝑒 𝑡𝑜𝑜 𝑙𝑜𝑛𝑔
𝐼'𝑑 𝑝𝑟𝑜𝑏𝑎𝑏𝑙𝑦 𝑏𝑟𝑒𝑎𝑘 𝑑𝑜𝑤𝑛 𝑎𝑛𝑑 𝑐𝑟𝑦"
- Guns N' Roses

  Sweet child o' mine, du groupe Guns N' Roses, résonnait dans le laboratoire, quand Peter Parker avait lâché cette bombe d'espoir pur et dur à laquelle Tony refusait de croire, sans pour autant être capable de faire autrement. La solution de Parker était, il devait l'admettre, plutôt ingénieuse. Et voilà que Tony et lui se retrouvaient à éplucher toutes les substances ignifuges existantes afin d'empêcher le corps d'Harper de succomber à des brûlures soit irréversibles, soit fatales. Ils travaillaient d'arrache-pied, cherchant l'illumination qui leur donnerait la réponse tout en stagnant dans cette douloureuse expectative. Le jeune protégé de Stark, lui, semblait avoir retrouvé une détermination perdue depuis longtemps. La sortie du tunnel macabre dans lequel il était enfermé semblait se profiler au loin. Cette excitation nouvelle se manifestait par l'intermédiaire d'une curiosité extrême, comme s'il tentait d'apprendre tout ce qu'il ne savait pas encore au sujet de sa petite amie. Depuis des heures, il demandait à Tony de lui raconter à quoi elle ressemblait enfant, si elle avait été à l'école ou si J.A.R.V.I.S. et lui avaient été ses professeurs. Il apprit ainsi comment elle avait eu l'habitude de sortir le bout de sa langue quand elle se concentrait, habitude qu'elle avait maîtrisée et remplacée par celle de relever ses cheveux. Tony lui indiqua tous les petits indices qui pointaient le bout de leur nez dès qu'elle mentait : le bout des oreilles qui rosissait, le nez retroussé, les mains toujours occupées... Peter était gourmand de toutes ces informations, tant de petits éclats de sa personnalité, à mille lieues de son état actuel.

  - Et quand vous l'avez rencontrée, c'était comment ?

  Il n'avait même pas réfléchi à l'impact de sa question, pour être honnête. Il ne s'était pas dit que ça plongerait son mentor dans un de ses plus beaux souvenirs, encore moins que ça pourrait l'émouvoir aux larmes.

  - Par ici, Monsieur Stark.

  Lui qui était de nature si décontractée, il n'avait jamais été aussi curieusement angoissé. Il se remémorait les mots de cet étrange travailleur social et de toutes ces horreurs que traverserait cette enfant si personne ne l'adoptait. Évidemment, personne ne voulait adopter une petite fille susceptible de brûler un bâtiment entier. Pour Tony Stark, c'était différent. Il avait grandi en étant bercé des histoires que lui racontaient son père ou son amie Peggy Carter à propos de Steve Rogers et de son bouclier en vibranium. Captain America était certes un homme vertueux et doté d'un sens moral aiguisé ; ses aptitudes hors normes n'en étaient pas moins venues d'une expérience scientifique qui l'avait radicalement transformé. Pourquoi cette enfant serait-elle différente ? Elle n'avait pas souhaité recevoir ce pouvoir incroyable : elle avait besoin de quelqu'un pour la comprendre et Tony se sentait destiné à être cette personne. Dans cet orphelinat pour le moins austère, on le fit pénétrer dans une chambre d'enfant aux murs taupe et aux meubles anciens, rudimentaires. Il remarqua immédiatement la petite fille : sa tignasse rousse éclatante se démarquait sur les couleurs ternes de son environnement. D'instinct, l'enfant eut un mouvement de recul.

  - Cesse donc ces manières, la rabroua la directrice. Cet homme a gentiment demandé à te voir, tu devrais être reconnaissante.

  Tony se racla la gorge. La bonne femme ne semblait pas décidée à partir.

  - Pourriez-vous nous laisser seuls un instant ?

  - Elle est trop...

  - C'est une enfant, bon sang !

  Son ton ferme convainquit la directrice : même elle ne pouvait résister au charisme du milliardaire.

  - C'est vous qui allez m'emmener, pas vrai ?

  La voix enfantine de cette fille était trop calme, trop...sûre de son propre sort. Que croyait-elle ?

  - Je ne sais pas, répondit Tony. Je comprendrais si tu n'en avais pas envie...

  - Je ne veux pas qu'ils m'enferment. Je l'ai entendue parler, Madame la Directrice, ils veulent trifouiller dans ma tête, c'est elle qui l'a dit. Vous n'allez pas m'emmener là-bas, si ?

  - Non, je ne suis pas un de ces médecins fous.

  - Et t'es qui, toi ?

  - Je suis Tony. Je vais t'emmener dans ta nouvelle maison.

  - Non !

  Le regard de la petite s'était animé d'une peur paralysante.

  - Tout ira bien, petite, la rassura Tony. Je vais bien m'occuper de toi. Tu n'es pas un monstre.

  Et il le pensait. Comment croire autre chose ? Elle était si terrorisée...

  - Ah oui ?

  Ses yeux portaient encore la trace des nombreuses larmes qu'elle avait versées dans cette pièce.

  - Oui. Je te promets que je vais t'aider.

  - Vous n'allez pas...m'étudier ? C'est ce qu'a dit...

  - Madame la Directrice n'est qu'une vieille chouette aigrie, si tu veux mon avis ! Je ne veux pas t'étudier, Harper. Seulement te protéger. Personne ne te fera de mal.

  - Plus jamais ?

  - Plus jamais.

  Oh, si seulement il avait pu tenir cette promesse ! Il ne se passait pas une heure sans que Tony regrette de n'avoir pas pu la protéger. Quand il releva les yeux vers Peter, il esquissa un sourire triste.

  - Quand je l'ai rencontrée, elle était une enfant terrorisée qui était persuadée que je voulais l'emmener dans un hôpital psychiatrique, expliqua-t-il. Ce jour-là, je lui ai promis que plus rien ne pourrait lui arriver...

  Le regard de Tony se perdit dans la contemplation du mur en face de lui et Peter décida de se taire. C'était le choix le plus judicieux. Tony s'excusa avant de quitter la pièce. Tout ça avait ravivé en lui le besoin de voir sa fille, d'être à ses côtés. Discrètement, il prit avec lui la petite éprouvette dans laquelle se trouvait la molécule qu'il avait synthétisée pendant une des courtes siestes de Peter. Il recommanda au jeune homme de faire une pause et après s'être servi une tasse de café, il se rendit à l'étage où se trouvait la chambre d'Harper. Comme tous ceux qui y entraient, il caressa affectueusement le dos de Rosie, fidèle à son poste, contre les jambes de l'adolescente endormie. Une fois assis, il enferma la main d'Harper dans les siennes et y déposa un baiser. Il ferma les yeux un moment.

  - Tu sais, commença-t-il, les yeux toujours clos, Peter m'a demandé de lui parler de toi toute la journée. J'ai cru que j'allais lui donner un somnifère mais...c'était plutôt agréable, au final. Il t'aime beaucoup trop pour son propre bien, c'est incroyable. Je me demande souvent ce qui leur est passé par la tête, à Pepper et lui, pour s'enticher de nous comme ça. Tu t'imagines, devoir supporter les Stark une vie entière ? Ils ont une force d'esprit exceptionnelle.

  Il rigola faiblement contre la main de sa fille.

  - C'est vrai qu'on a un caractère insupportable et un égo surdimensionné. Ça doit être ce qui fait notre charme. Remarque, ils sont les seuls pour qui on peut mettre cet égo de côté... Je m'égare. Pardon. Enfin, bref. Peter a eu une idée géniale. Ce qu'on voulait faire pour te sortir de là risquait de te brûler de l'intérieur alors...on a abandonné. Et puis il a pensé aux substances ignifuges. Je ne sais pas pourquoi on n'y a pas pensé plus tôt, vraiment. Bref, j'ai trouvé. Il ne le sait pas. Je suis sure à nonante-neuf pour-cent que ça va marcher mais tu sais comment il est, il aurait nourri des espoirs insensés, il se serait attendu à ton retour immédiat et...ça ne sera pas le cas. C'est pour ça que j'ai amené ceci. (Il retourna la seringue entre ses doigts.) Il s'agit de la même molécule qu'on a injecté dans l'utérus d'Helen Grey, à laquelle j'ai ajouté de la mélamine. Ça n'a pas été simple... Les autres composés n'étaient pas compatibles mais celui-ci... Heureusement, Peter a le sommeil lourd et il fait des siestes de plus de vingt minutes. Bon, peut-être qu'une petite goutte de produit tout à fait naturel l'a aidé. (Il haussa les épaules.) Enfin, j'espère que ça marchera. Qu'est-ce que je raconte ? Bien sûr que ça va marcher. C'est moi qui l'ai synthétisé. Allons-y.

  Après avoir soufflé un bon coup, Tony manipula la seringue avec précaution. Du bout du doigt, il tapota dessus légèrement avant de resserrer le garrot autour du bras d'Harper. Ses veines étaient bien visibles, désormais, et il enfonça lentement l'aiguille dans l'une d'entre elles. Tandis qu'il injectait le liquide dans son sang, il pouvait voir le réseau de veines s'illuminer très légèrement. Ça faisait effet : la seule chose à faire à présent, c'était attendre.

  Harper était installée à la table de la cuisine, dans leur villa à Malibu. L'immense baie vitrée lui offrait une vue imprenable sur la mer et cela continuait de la distraire tandis que J.A.R.V.I.S. s'efforçait de lui enseigner les bases des mathématiques.

  - J'en ai marre du calcul, souffla la petite fille. Je veux aller nager.

  - Miss Harper, j'ignore si...

  - Oh, ça ira, l'interrompit la voix de Tony. On va aller se baigner.

  Il venait de faire irruption dans la pièce et affichait un grand sourire. L'océan  était plutôt calme, ce jour-là, et Harper ne pouvait pas risquer grand chose, si près de la côte.

  - Allez, file mettre un maillot de bain, conseilla-t-il à l'enfant.

  - Youpiiiiiie !

  Tout à fait enthousiaste, la tignasse rousse se précipita jusqu'à sa chambre en poussant des exclamations de joie. Un sourire aux lèvres, Tony retira son T-shirt et enfila un short en vitesse et, à son retour, il s'empara de la main d'Harper et l'emmena au bord de l'eau. C'était une journée d'été particulièrement chaude, pour la fin de ce mois de juin. Harper, alors âgée de huit ans, rêvait toujours autant à ces créatures qui, selon les légendes, peuplaient les océans. Toutefois, elle n'étais pas aussi intrépide qu'elle le laissait paraître. Elle se serra contre Tony dès que l'eau devint trop profonde et se cramponna à son bras quand il la guida à travers les minuscules vagues qui déferlaient sur eux. Soudain, elle poussa un cri suraigu qui fit presque sursauter Tony tandis qu'elle nichait sa tête au creux de son cou.

  - Quelque chose m'a touché le pied ! pleurnicha-t-elle.

  - C'était sûrement une algue, Harper, rien de...

  - J'ai peur, Papa, je veux rentrer !

  Là, à quelques mètres de la côte, Tony se figea sur place. Tout en marchant doucement en direction de la maison, il refusa de lâcher Harper. Il la serrait contre lui d'une manière nouvelle : c'était la première fois qu'il entendait ce mot, ce doux et innocent "papa" que lui avait adressé l'enfant. Comme ça, avec le petit coup de pouce d'une algue égarée, Harper lui avait signifié qu'elle l'acceptait en tant que père. À compter de ce jour ensoleillé, ils formeraient le duo qu'ils étaient devenus, les Stark, seuls contre le monde, unis contre vents et marées.

  Un peu plus tard, la semaine suivante, Pepper remarqua à quel point la relation de Tony et Harper avait changé. Il la couvait du regard à chaque instant, déposait des baisers sur le sommet de son crâne à tout bout de champ, la bordait tous les soirs et lui racontaient les folles histoires que lui avaient un jour contées son père et Peggy. Il l'avait adoptée, certes, mais il l'aimait comme un fou, peut-être plus que n'importe quel père au monde. Il aurait tout fait pour elle, sans hésiter. Alors, il le lui a dit. Elle était sur le point de s'endormir quand la petite murmura un "Je t'aime" si fluet et rapide qu'il n'en crut pas ses oreilles.

  - Moi aussi, je t'aime, répondit-il. Plus que tout au monde.

  Là, dans cette chambre où Harper dormait depuis six longs mois, Tony reposa la seringue et se surprit à implorer des dieux dont il ignorait l'existence. Si ça ne marchait pas...mais ça marcherait. Ça ne pouvait que marcher : s'il n'y croyait pas, c'était perdu d'avance. Il se pencha pour embrasser son front et lui murmure cette phrase qui était devenue leur petit rituel personnel.

  - Je t'aime, mon ange, je t'aime plus que tout au monde. Reviens, maintenant.

  Il quitta la chambre rempli d'espoir : pour que le remède agisse, il faudra probablement quelques heures -au mieux. Au pire... Il soupira avant d'afficher un sourire et de rejoindre Peter dans le salon. Il le vit en train de discuter avec Pepper autour d'un café bien mérité. Il prit place auprès d'eux.

  - J'ai un truc à vous dire.

  Les deux têtes se tournèrent immédiatement vers lui.

  - J'ai administré un remède à Harper.

  - Un remède ? s'étrangla Peter. Mais, Mons-

  Tony lui jeta un regard entendu.

  - Pardon. Tony, se corrigea-t-il, nous n'avons pas encore tout passé en revue et...

  - La mélamine. C'était le meilleur ignifuge qu'on puisse combiner avec l'autre molécule. Je ne t'en ai pas parlé précisément parce que je savais que tu prendrais cet air angoissé. Au moins, c'est fait.

  Pepper lia ses doigts à ceux de Tony et le regarda avec espoir.

  - Je sais que tu sais ce que tu fais, lui confia-t-elle. Tu es sûr que ça fonctionnera ?

  - À nonante-neuf pour-cent. Ce que j'ignore...c'est combien de temps ça prendra.

  - Alors nous attendrons, affirma Pepper, résignée. Six mois se sont déjà écoulés. Que sont quelques jours ou quelques semaines de plus, hein ? Au moins, maintenant, on voit la fin de ce cauchemar.

  Tony hocha la tête et, pour une fois, il sentit qu'il avait pris la bonne décision. Toute sa vie, on lui avait reproché ce qu'il n'avait pas pu faire. Là, il savait que c'était ce qu'il devait faire. Il le voyait dans le regard plein d'espoir de Peter et dans celui, fier et ému, de Pepper. Il le sentait dans le merci silencieux de ce garçon du Queens qui avait changé la vie de sa fille, il le sentait dans la pression des doigts de l'amour de sa vie. Le plus important : il en était convaincu au plus profond de son âme.

***
Tony a trouvé la solution ! Alors, à votre avis, combien de temps avec qu'Harper soit de retour ? Tony a encore fait son Tony et n'a rien dit à personne, bien sûr... Vous avez aimé le petit moment Peter/Tony ? Je me suis encore perdue sur Instagram hier et les fanarts de ces deux-là me donnent toujours autant envie de les voir ensemble à l'écran une nouvelle fois ! 🥺 N'hésitez pas à voter et à commenter !

- Céline

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