"Oh how I miss you
My symphony played the song that carried you out
Ooh how I miss you
And I, I miss you and I wish you'd stay"
- Ed Sheeran

Il était encore tôt lorsque, dans le Queens, un adolescent se préparait tout doucement à retourner au lycée. Depuis son retour à la réalité, Peter appréhendait de reprendre les cours à la Midtown High School. Il savait que Ned et M.J. étaient dans la même situation, évidemment, mais lui, il était encore en plein deuil. Il mangeait ses céréales sans grande conviction, sous l'œil attentif et inquiet de sa tante May. Elle n'avait peut-être pas souffert de la perte de Peter, puisqu'elle avait également disparu, cela ne l'empêchait pas pour autant de ressentir tout l'impact qu'avaient eu les actes de Thanos. Son neveu lui était revenu brisé et changé.

- Tu es sûr que tu veux y aller ? s'assura-t-elle pour la troisième fois, ce matin-là.

- Oui, je...je dois y aller. Ned sera là et je ne peux pas le laisser affronter ça tout seul.

- Et...et Harper ? tenta-t-elle.

Le visage de Peter se ferma immédiatement et May regretta aussitôt sa question. Elle passa une main dans les cheveux du garçon et déposa un baiser maternel sur le sommet de son crâne.

- Je sais que tu t'inquiètes pour elle, souffla May. Et je ne t'empêcherai jamais d'aller la voir, c'est clair ?

L'adolescent hocha légèrement la tête avant de mettre son bol dans l'évier et de passer les lanières de son sac à dos sur ses épaules. La minute suivante, il était dans le bus qui lui semblait à la fois familier et à des années lumières de lui. La vieille dame qui avait l'habitude de s'assoir derrière le chauffeur n'était plus là, comme beaucoup d'autres passagers. Certains jeunes qui prenaient le bus avec lui avaient grandi et avaient probablement leur propre voiture, désormais. Peter soupira en arrivant au lycée et partit à la recherche de son meilleur ami. Ned, ému, le serra dans ses bras en voyant l'air triste de son ami.

- Comment tu vas ?

- Je fais aller. Toi ?

- Oh, tu sais, la routine.

Ned afficha un léger sourire qui se voulait encourageant tandis que M.J. les rejoignait.

- Salut, les losers.

Bien qu'elle ne sache rien à propos de l'identité secrète de Peter, elle comprit tout de suite qu'il n'était pas d'humeur à plaisanter.

- Où est Harper ? demanda-t-elle alors que Ned lui faisait les gros yeux.

Peter regarda ses pieds un instant : il ignorait complètement où elle se trouvait, à présent.

- Chez elle, avec sa mère et sa sœur, répondit-il d'une voix hasardeuse. Elle...elle ne reviendra pas au lycée.

Il regarda ailleurs ; il était incapable de soutenir le regard de ses amis.

- Hey, Penis Parker !

- La ferme, Flash, marmonna le jeune homme, alors qu'il n'aurait pas relevé, en temps normal.

Sans un mot supplémentaire et sous les trois paires d'yeux étonnés de Flash, Ned et M.J., il s'éloigna du groupe d'un pas lourd, les mains dans les poches. Il arriva devant son casier et l'ouvrit afin de se cacher derrière la petite porte métallique. Il combattit les larmes de toutes ses forces. Tout avait changé ; on était loin du bon vieux temps.

***

À des milliers de kilomètres de là, Harper se préparait minutieusement pour leur escapade nocturne. Ils avaient prévu de se rendre sur place dès vingt-et-une heures afin de repérer les lieux ainsi que les victimes potentielles de la Nécromancienne. Leur plus gros problème serait de l'identifier : chaque témoin qui pensait l'avoir vue l'avait décrite de manière totalement différente. Leurs dépositions étaient aux antipodes les unes des autres ; là où l'un était persuadé d'avoir aperçu une femme pâle aux cheveux roux, un autre clamait que la coupable était brune et avait le teint hâlé.

- Je ne serais pas étonnée d'apprendre qu'elle est une sorte de métamorphe, marmonna la jeune femme tout en ajustant sa robe. Qu'est-ce que tu en penses ?

Elle se tourna vers Bucky afin de s'assurer qu'on ne pouvait pas deviner la présence de ses armes. Un tout petit pistolet se cachait contre sa cuisse tandis que dans sa pochette aux allures innocentes, elle avait dissimulé un arc que son père avait créé spécialement pour elle, alors qu'il ne l'avait même pas encore ramenée parmi les vivants. Il s'agissait en réalité d'une capsule minuscule qui, une fois dépliée, s'avérait être un arc extrêmement pratique et meurtrier. Elle l'adorait. Si elle cherchait à obtenir l'avis de Bucky sur l'aspect pratique, lui, était époustouflé.

- Tu ne vas quand même pas...y aller...comme ça ?

- Quoi ? Qu'est-ce qui ne va pas avec cette robe ?

- Et bien, elle est très...enfin...

Harper éclata de rire. Oui, sa robe arborait un décolleté plutôt vertigineux et la jupe était fendue pour lui permettre un accès rapide et aisé à son arme.

- C'est pas drôle, Harper, tu sais, on t'a vue grandir, nous, et maintenant tu...

- Oh, Bucky, serait-ce ton côté émotif qui resurgit ?

Le Soldat de l'Hiver se renfrogna presque aussitôt, faussement humilié.

- Je ne vois pas de quoi tu parles, se défendit-il en se débattant avec sa cravate.

- Viens ici, s'exaspéra la jeune fille tout en levant les yeux au ciel.

En deux temps, trois mouvements, elle noua la cravate de Bucky.

- Tu es prêt ?

- Et comment ! Mademoiselle...

Avec un sourire amusé, Harper s'empara du bras qu'il lui offrait : il portait une chemise un rien trop grande et des gants afin de dissimuler son bras en vibranium.

- Allons-y.

***

- Maman, maman, viens vite !

- Qu'est-ce qui se passe, ma puce ?

La petite Morgan n'arrêtait pas de tirer sur la robe de sa mère, l'air inquiète, ce qui était bien trop étrange pour une enfant.

- J'étais dans la pièce de papa et...

- Tu sais que je ne veux pas que tu y ailles.

- Pardon, mais...il y a quelque chose qui clignote.

- Tu as touché à quelque chose ?

- Non, promis !

Intriguée, Pepper Potts-Stark s'empressa d'aller vérifier cette information. Elle alluma les lumières et constata avec effroi qu'il y avait bel et bien un problème : un voyant rouge clignotait sur un des écrans. Il était en veille et en l'effleurant du bout du doigt, Pepper découvrit une photo d'Harper. Elle ignorait de quoi il s'agissait alors elle ne se gêna pas pour en apprendre plus. Elle fit plusieurs retours en arrière et tomba sur les plans du costume d'Harper. Elle porta ensuite toute son attention sur la signification du voyant lumineux : ça signifiait que le système avait été enclenché. Elle pensa qu'elle ne devait pas s'inquiéter... Elle décida de vérifier malgré tout et elle eut bien raison : en ouvrant le logiciel de localisation, ce qu'elle vit lui fit l'effet d'une bombe. Sa fille n'était pas à New York, non : elle était en Europe.

- Morgan ?

- Oui ?

- Va jouer dans ta chambre, je dois passer un coup de fil.

La petite obéit à contrecœur tandis que Pepper composait un numéro qu'elle ne pensait pas devoir appeler dans de telles circonstances.

- Allô ? lui répondit une voix fatiguée.

- Je peux savoir comment il est possible que ma fille ne soit pas à tes côtés ? Et aussi, pourquoi je ne suis pas au courant ?

- Pepper, je...

- Écoute-moi bien, Steve Rogers. Elle n'a pas pu échapper à la vigilance de tous les résidents alors tu sais forcément où elle est, et tu vas me dire immédiatement pourquoi ma fille est au beau milieu de l'Europe, c'est clair ?

***

- Wow, je comprends mieux maintenant, fit Harper en pénétrant dans la salle immense où avait lieu la réception.

Il s'agissait en réalité du bar d'un hôtel et c'était tout simplement gigantesque : les lustres anciens éclairaient la salle d'une lueur tamisée et un quatuor à cordes enchantait les invités par leur musique douce et entêtante. Dans sa robe rouge, Harper observait les alentours, attentive au moindre individu suspect. Déjà, des hommes riches et puissants offraient des martinis à des femmes tout aussi influentes qu'ils sous-estimaient simplement.

- Il faut qu'on cherche un homme entre cinquante et soixante ans, affirma Harper, à voix basse.

- Ils ont tous cet âge-là, marmonna Bucky. Comment on fait ?

- C'est facile ; tous ces hommes sont mariés et resteront discrets. Il faut trouver un homme soit divorcé, soit veuf depuis peu. Toutes les victimes de la Nécromancienne correspondaient à ce profil. Bon... Tu ne passeras pas facilement pour quelqu'un comme ça mais on peut essayer. Juste...essaie d'avoir l'air riche, accessible et triste. Tu crois pouvoir gérer ?

  - T'as pas idée...

  Harper laissa échapper un rire avant de s'éloigner de Bucky. Elle aussi devait partir en chasse : elle comptait interroger un maximum d'hommes qui auraient pu être abordés par cette femme. Elle se déplaçait entre les invités, tous vêtus de costumes hors de prix et de robes plus somptueuses les unes que les autres, attirant le regard de nombre d'entre eux. Il fallait bien reconnaître qu'ainsi vêtue, elle attirait des regards à la fois admiratifs et jaloux. Consciente de sa visibilité et de son physique, Harper décida d'en profiter. Au bar, elle commanda un martini.

  - Une si jeune demoiselle ne devrait pas boire d'alcool, lui susurra un homme, étonnamment jeune parmi tous ces actionnaires et chefs d'entreprises. Il avait des cheveux blonds laqués vers l'arrière, des yeux d'un bleu perçant et un simple costume noir. Il avait opté pour un noeud papillon, apportant à sa tenue un air hors du temps tout à fait charmant. Harper battit des cils.

  - Et un homme aussi jeune que nous ne devrait pas se trouver ici, répliqua-t-elle.

  - Vous avez du répondant, remarqua-t-il. J'aime ça. Jack Thorne, enchanté.

  - Morgan Parker.

  Après avoir prononcé les deux premiers noms qui lui étaient venus à l'esprit, la jeune femme lui tendit la main et au lieu de la serrer, il y déposa un baiser. Feignant la flatterie, Harper gloussa comme elle avait vu beaucoup d'autres femmes le faire, ici, tout en essayant de se débarrasser de lui : il n'était pas ce qu'elle cherchait et ne l'aiderait nullement à atteindre son objectif. Il buvait beaucoup au fil de leur conversation et Harper traînait son martini en longueur. Elle fut bien obligée d'accepter celui que lui offrit Jack Thorne une fois le sien terminé.

- Que boira la demoiselle ?

  - Vodka martini, répondit-elle. Avec...supplément d'olives. Au moins...trois olives.

Elle prit une gorgée tout en l'écoutant parler.

  - Alors, Mademoiselle Parker, qu'est-ce qui vous amène vraiment ici ?

  - Je vous l'ai dit, Monsieur Thorne ! La cause des orang-outangs me tient réellement à cœur !

  Thorne posa négligemment sa main sur l'avant-bras nu de la jeune femme en rouge. Un sourire naquit sur son visage, un sourire qui se mua bien vite en rictus.

  - Vous mentez.

  - Je...je ne vois pas ce qui vous fait penser cela !

  Subtilement, Harper tenta tant bien que mal de se libérer de son emprise : sa poigne s'avérait plus forte qu'elle n'en avait l'air.

  - Je sais ce que vous êtes venue chercher en ces lieux, Mademoiselle Parker.

  Une lueur jaune traversa ses yeux.

  - Ou devrais-je dire...Mademoiselle Stark.

  Le visage d'Harper perdit immédiatement ses couleurs : elle s'était pourtant cachée, elle avait pris toutes les précautions possibles...

  - Comment...?

  Apeurée, elle chercha Bucky du regard.

  - Votre ami, le Soldat de l'Hiver, a déjà été neutralisé. La Nécromancienne veut vous voir seule.

  Harper fut prise de vertiges. Elle s'appuya au bar, cherchant désespérément une quelconque stabilité : le monde entier semblait tourner sur lui-même. Elle ne sentait plus que la main froide de Jack Thorne dans son dos tandis qu'il l'aidait à traverser la salle. Pourquoi les danseurs alentours ne constataient-ils pas sa détresse ? Où était Bucky et que lui était-il arrivé ? Juste avant de perdre complètement connaissance, elle comprit qu'elle se trouvait désormais à l'arrière d'une voiture. Ainsi allongée sur la banquette arrière, la dernière chose qu'elle vit fut le plafond du véhicule. Elle sombra dans le noir complet, remplie d'inquiétude pour Bucky...et elle-même.

***

Eeeet voilà pour ce nouveau chapitre ! Qu'en pensez-vous ? Morgan Stark saves the dayyyy ;) Sinon, ça sent un peu le roussi pour nos deux aventuriers... J'espère que ça vous a plu, n'hésitez pas à voter et à commenter !

- Céline