Chapitre dix-neuf

"𝐿𝑒𝑡 𝑢𝑠 𝑑𝑖𝑒 𝑦𝑜𝑢𝑛𝑔 𝑜𝑟 𝑙𝑒𝑡 𝑢𝑠 𝑙𝑖𝑣𝑒 𝑓𝑜𝑟𝑒𝑣𝑒𝑟
𝑊𝑒 𝑑𝑜𝑛'𝑡 𝘩𝑎𝑣𝑒 𝑡𝘩𝑒 𝑝𝑜𝑤𝑒𝑟, 𝑏𝑢𝑡 𝑤𝑒 𝑛𝑒𝑣𝑒𝑟 𝑠𝑎𝑦 𝑛𝑒𝑣𝑒𝑟"
- Alphaville

C'est la jeune Rosie qui accueillit Pepper lorsqu'elle entra dans la chambre de sa fille. Elle se blottit contre ses jambes, sautillant partout en attente de caresses. Le chiot n'était là que depuis deux mois et s'était pourtant bien habitué aux visites régulières que recevait sa maîtresse. Elle n'avait peut-être jamais eu de réel contact avec Harper mais, bizarrement, Rosie ne quittait presque jamais son chevet. Pepper tira la chaise qui avait été installée dans la chambre et s'y assit, le dos et les épaules voûtées. Il lui fallut quelques secondes avant de serrer la main de sa fille dans la sienne, le geste le plus maternel et protecteur qui soit. Elle la regarda en silence un instant avant d'entreprendre sa routine matinale. Elle s'empara d'un linge humide et s'appliqua à nettoyer le visage, les bras, les jambes de sa fille. Elle remit sa robe de chambre bien en place, remonta le drap sur sa taille puis saisit la brosse à cheveux qui, comme toujours, se trouvait rangée sur la coiffeuse. Elle passa la brosse dans les longues mèches rousses de la jeune fille, toujours dans le silence le plus total. Elle passa à la partie plus délicate et lui brossa les dents. Une fois sa toilette achevée, elle reprit sa place au chevet d'Harper et posa sa main sur la sienne. Elle se racla la gorge.

- Un des nombreux débats qui animent nos repas, c'est de savoir si tu peux nous entendre ou pas, expliqua-t-elle avec un sourire triste. Je n'en ai pas la moindre idée, si je suis tout à fait honnête.

Pepper laissa échapper un long soupir tout en fermant les yeux. Elle s'empêchait toujours de pleurer, au cas où sa fille serait bel et bien en mesure de l'entendre. Refoulant ses larmes et ses sanglots, elle avala sa salive avec difficulté.

- Je me dis qu'avec un peu de chance, tu nous entends peut-être. C'est Peter qui y croit le plus. Je pense qu'il a surtout besoin d'y croire. Tu lui manques tellement... Comme à nous tous, enfin. Ton père passe ses journées au labo et...je crois qu'il est sur une piste. Il ne m'en dit pas trop. Tu sais comment il est.

Les cheveux d'Harper avaient poussé, dans son sommeil, et personne n'avait osé les lui couper. Ils atteignaient presque le bas de son dos, à présent, et ils bouclaient beaucoup plus qu'avant. Pepper n'avait jamais vraiment compris cette habitude de les lisser...

- Qu'est-ce que tu fais à tes cheveux ? lui demanda Pepper.

- Je...je les trouve plus beaux comme ça.

Devant elle, Harper tenait à sa main le fer à lisser de sa mère et s'appliquait à raidir chacune de ses jolies boucles. Pepper fronça les sourcils tout en la laissant à sa tâche. Elle resta perplexe, cependant, et lorsqu'elle la retrouva dans sa chambre, en train de mettre du mascara, elle posa deux mains rassurantes sur ses épaules.

- C'est ce nouveau lycée qui te met dans cet état, pas vrai ?

Un peu gênée, Harper baissa la tête. Bien sûr que son premier jour à la Midtown High School la rendait anxieuse... En plus de découvrir de nouveaux visages, elle allait devoir mentir sur son identité et...serait-elle capable de faire une telle chose ?

- J'ai juste...un peu peur.

- De quoi ?

- Des autres. Et s'ils ne m'aimaient pas ? Pire : s'ils comprenaient qui je suis ? Je ne voudrais pas mettre papa dans l'embarras. Je sais que mon identité est quelque chose de précieux.

Pepper laissa un sourire attendri flotter sur son visage tout en s'asseyant sur un des poufs que possédait sa fille. Elle était un peu en contrebas et prit les mains d'Harper tout en la couvant du regard.

- Tu es une fille pleine de qualités, ma chérie, la rassura-t-elle. Tu ne devrais pas te mettre autant de pression, d'accord ? Si les autres élèves ne t'apprécient pas à ta juste valeur, eh bien, tant pis pour eux. Et je sais que tu feras peut-être une ou deux bêtises, et c'est normal. On sera toujours là pour te rattraper, n'oublie jamais ça.

- Je n'ai pas envie d'être la nouvelle élève...

- Tu ne le seras pas. C'est la première année de lycée pour tout le monde ! Les autres aussi vont débarquer dans un monde complètement différent de ce qu'ils ont connu jusque là. Ne te fais pas de soucis. Tout se passera bien.

- Tu le penses ?

- J'en suis sûre.

Tout de même un peu rassurée, Harper se blottit dans les bras de sa mère tandis que ses traits crispés se relâchaient. Avec un sourire, elle lui indiqua qu'elle était prête à partir. Exceptionnellement, Tony et Pepper l'accompagnèrent incognito, à l'arrière de la voiture d'Happy. En quittant le véhicule, elle leur fit signe de la main et leur offrir un sourire confiant. En marchant vers le lycée, elle poussa un profond soupir avant de se jeter dans la gueule du loup.

- Elle ira bien, murmura Tony tout en saisissant la main de Pepper.

- Je sais, mais tu aurais dû la voir, ce matin... Elle était si anxieuse !

- Pep, c'est une ado...

- Oui, mais...

- Elle ira bien.

Tony exerça une légère pression sur ses doigts, emmêlés avec les siens. Il porta la main de Pepper à ses lèvres et y déposa un doux baiser pour la réconforter. Leur bébé avait grandi si vite qu'ils avaient parfois l'impression qu'elle avait poussé sur l'espace d'une nuit. Pepper exhala bruyamment avant de fixer son regard sur la route, devant eux.

- Elle ira bien, murmura-t-elle, plus pour elle-même qu'autre chose. Elle ira bien.

Au souvenir de cette journée, Pepper ne put réprimer un sourire. Au fil des années qu'elle avait passées à la Midtown High School, Harper s'était peu à peu transformée en adolescente normale, un peu trop plongée sur son smartphone et avec ses passions bien à elle. Pepper, elle, l'avait observée s'épanouir telle une fleur sauvage, devenir, chaque jour, un peu plus comme son père. Elle voyait son regard fasciné quand elle travaillait avec lui sur ses armures ou bien simplement lorsqu'elle le regardait manipuler sa technologie.

- Tu sais, Harper, si tu nous entends... Je ne te dirai qu'une chose. Tu nous manques atrocement, c'est vrai. Mais je veux que tu ne te sentes pas coupable, c'est clair ?

Des images bien trop vives et douloureuses lui revinrent en mémoire. Tout ce qu'elle avait essayé de faire, alors que la vie de Tony s'achevait sous ses yeux, c'était l'empêcher de culpabiliser. Elle avait attendu qu'il rende son dernier souffle pour pleurer et exprimer pleinement sa douleur. Avec Harper, c'était la même chose. Si elle devait partir... Pepper refusait de la voir partir en lui laissant le moindre sentiment de regret.

- Tu nous manqueras si jamais...si jamais tu ne te réveilles pas. Mais si c'est trop difficile, si tu ne peux plus te battre... Nous comprendrons. Tu as tant fait pour nous, Harper, et je t'aime plus que tout. Tu as été mon premier enfant, tu... Tu as fait de nous une famille. Ne regrette rien.

Elle sentait les larmes rôder derrière ses yeux, dangereuses, telles des hyènes fourbes et malignes. Elle renifla pour les empêcher de s'échapper et sortit précipitamment de la pièce. Une fois dans le couloir, elle s'autorisa enfin à ouvrir les vannes. Elle pleura toutes les larmes de son corps tout en s'assurant que personne n'était là pour la voir. Elle devait rester forte.

- Madame Potts ?

Elle essuya rapidement l'eau salée sur ses joues et tamponna ses yeux. Elle afficha un air indifférent avant de se retourner.

- Peter ! Je ne t'avais pas entendu arriver.

- Désolé. Est-ce que...ça va ?

Pepper observa un moment le jeune homme du Queens qui se tenait devant elle. Il semblait si fatigué... Il ne méritait pas toute cette douleur, toutes ces épreuves. Et pourtant, il était resté.

- Oui, oui, c'est juste...je viens d'aller la voir. Tu veux y aller, peut-être ?

- C'est là que j'allais, mais si vous avez besoin de rester plus longtemps, je...

- Non, non, ne t'inquiète pas, je vais...je vais aller chercher à boire, de toute façon. Rosie sera contente d'avoir de la compagnie.

Avec un sourire, Pepper passa à côté du garçon, ignorant son regard désolé et inquiet. Elle se dirigea à pas rapides vers la cuisine, prête à se servir une tasse de café. Ses mains tremblaient tellement qu'elle fut forcée de reposer la carafe, accompagnant son geste d'un soupir de frustration avant de poser une main sur son front. Elle sursauta lorsqu'une main s'empara de sa carafe et remplit sa tasse à sa place. C'était une main marquée par les années : Steve.

- J'ignore comment tu le prends. Du sucre ?

Elle hocha la tête alors qu'il lui faisait signe de s'assoir avant de poser sa tasse devant elle. Il prit place juste en face, les mains croisées sur la table de la cuisine, son alliance brillant à la lumière du jour qui entrait par les nombreuses fenêtres.

- Tu veux en parler ?

Les mains enroulées autour de sa tasse de café, Pepper tergiversa un moment avant de décider qu'en parler à quelqu'un lui ferait probablement beaucoup de bien. Elle se taisait depuis si longtemps...

- C'est si difficile de la voir comme ça, souffla-t-elle. C'est comme si je revivais... Non. Quand Tony est mort, j'ai cru que mon cœur s'était déchiré en deux et qu'il ne se reformerait jamais. Mais là... C'est pire. C'est mille fois pire. Tony est l'homme de ma vie mais Harper, c'est...

- Ton tout premier enfant, acheva Steve. Je comprends. Tu sais, Tony et moi n'avons jamais eu les rapports les plus cordiaux possibles, plaisanta-t-il faiblement. Et pourtant, Harper... Cette gamine est incroyable. Tony et toi l'avez élevée d'une manière spectaculaire. Ne lui dis pas que j'ai dit ça, bien sûr.

Pepper gloussa discrètement, presque imperceptiblement. Steve en fut très satisfait.

- Enfin... Harper est devenue une jeune femme incroyablement forte, juste, déterminée. Je suis sûr et certain qu'elle se bat de toutes ses forces pour se réveiller.

- Comment en es-tu si convaincu ?

- Tu la connais. (Il haussa les épaules.) Tu crois vraiment qu'elle aurait fait tout ça pour ne pas en voir le résultat ? Elle compte bien profiter de ce qu'elle a accompli, ça, c'est sûr. Sa famille est réunie et c'est tout ce qu'elle voulait. Elle n'est pas près de la quitter.

Pepper se tut. Que pouvait-elle dire de plus ? Elle s'en voulait presque de perdre espoir et pourtant, elle ne pouvait pas s'en empêcher. Chaque jour où elle voyait Harper dans cet état était un jour qui la convainquait qu'elle l'avait définitivement perdue. Elle termina sa boisson avant de se lever.

- Merci, Steve, murmura-t-elle simplement. J'avais besoin d'entendre ça.

Le vieil homme sourit avec sincérité et compassion tout en dépliant son journal. Lui aussi, il avait failli perdre espoir et puis, il s'était rappelé qu'après tout, c'était Harper Stark dont il était question. Harper Stark, la fille passionnée et têtue qui avait ramené Iron Man d'entre les morts. Bien sûr qu'elle allait revenir : c'était la seule issue possible.

***
Un peu d'émotion maternelle pour ce chapitre... Que pensez-vous de cette partie ? J'espère qu'elle vous plaît ! N'hésitez pas à voter et à commenter ! L'épilogue approche... 🥺

- Céline

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