Chapitre dix
"𝐸𝑣𝑒𝑟𝑦𝑡𝘩𝑖𝑛𝑔 𝐼 𝘩𝑜𝑙𝑑 𝑑𝑒𝑎𝑟 𝑟𝑒𝑠𝑖𝑑𝑒𝑠 𝑖𝑛 𝑡𝘩𝑜𝑠𝑒 𝑒𝑦𝑒𝑠."
- Dermot Kennedy
Tandis qu'Harper enfilait son haut et se brossait les cheveux, elle redoutait plus que tout le moment où Peter reviendrait à la charge. Bien sûr, elle n'avait pas fait ça pour le distraire : il lui avait véritablement manqué. Lui, ses baisers, ses caresses... Cela ne signifiait pas qu'elle était prête à affronter sa déception pour autant. Elle savait très bien qu'en lui annonçant son départ, elle lui ferait énormément de mal, surtout lorsqu'il comprendrait qu'elle emmenait Harley avec elle. Malgré tout, elle restait persuadée que s'éloigner de lui était la meilleure solution pour l'aider à se sentir mieux. Sans Harper, il pourrait enfin faire son deuil correctement, sans s'inquiéter pour elle. Elle était encore perdue dans ses pensées quand le garçon, une fois habillé, posa ses mains sur ses épaules. Il déposa un baiser sur le sommet de son crâne.
- Tu comptes me dire ce que signifient ces billets d'avion ? demanda-t-il sur un ton étonnamment calme. Je n'ai pas envie de devoir deviner.
La jeune femme souffla un bon coup et le regarda au travers du miroir, face à elle.
- Je sais que ça ne va pas te plaire, mais...
- Tu pars, ça, j'ai compris, soupira-t-il. Mais où ?
- En voyage. Je sais où est mon père et je vais aller le chercher.
- Et...c'est où ?
- En Norvège.
- Alors pourquoi les billets dont ta mère parlait...pourquoi elle a mentionné l'Espagne ?
Les yeux de Peter brillaient d'une étincelle particulière qui semblait la supplier de ne pas tourner autour du pot. Il voulait la vérité, il la méritait. Harper quitta sa chaise et fit mine de trier ses livres, sur une étagère.
- J'ai décidé de prendre quelques vacances, annonça-t-elle d'une voix neutre. J'ai toujours voulu visiter l'Europe, alors...
- L'Europe ? Mais c'est...c'est grand, l'Europe.
- Je sais.
- Combien de temps ?
- Je l'ignore. Normalement, il me faudrait vingt-quatre heures de route pour faire le voyage mais...je pense que ça devrait durer une bonne semaine ou deux.
Harper ouvrit un livre qu'elle avait commencé mais jamais fini, le referma puis le rangea. Elle ressentait un besoin irrépressible d'avoir les mains et l'esprit occupés.
- Je...je pourrais venir avec toi, non ?
La voix de Peter était hésitante, comme s'il connaissait déjà la réponse à la question qu'il avait posée. Il l'avait tentée, pourtant. Il avait osé alors qu'il était presque certain de recevoir un non catégorique en tant que réponse. De là où il était, il put voir les épaules de sa petite amie s'affaisser et sa tête se baisser légèrement.
- Ce n'est pas une bonne idée, souffla-t-elle.
- Pourquoi ? Imagine ce qu'on pourrait voir, en Europe ! s'exclama-t-il tout en l'entourant de ses bras. Les gondoles à Venise, la Tour Eiffel, la mer...
- Non, Peter, c'est...c'est non.
D'un geste qui se voulait doux, elle s'arracha à son étreinte. Elle se passa une main dans les cheveux tout en se dirigeant vers la porte de la chambre.
- Mais...pourquoi ?
- Parce que je ne veux pas !
Les mots étaient sortis de sa bouche sans même qu'elle y réfléchisse à deux fois : elle voulait que Peter reste à New York. C'était le seul moyen pour qu'il aille mieux : il devait rester loin d'elle. Elle finit par se tourner vers lui et regretta aussitôt : ses yeux étaient rougis et son air bien plus perplexe que la normale.
- Tu...tu ne veux pas ? s'offensa-t-il. Tu vas partir seule, alors ?
Pas de réponse. Peter tourna le dos à la jeune femme lorsqu'il comprit qu'elle avait l'intention de partir avec Harley. S'il s'était agi de Sam ou de Bucky ou encore de Pepper et Morgan, elle n'aurait pas été silencieuse. Il se frotta le visage avant de serrer les poings.
- Dis-moi pourquoi lui et pas moi.
- Il n'est pas... J'ai besoin...
- De lui ?
- Oui, ça, tu le sais déjà. J'ai besoin de lui comme j'ai besoin de toi, Peter.
- Alors pourquoi ce n'est pas moi qui prends cet avion avec toi, hein ? cria-t-il presque.
C'était très rare de voir Peter hausser la voix ainsi, aussi Harper eut-elle un mouvement de recul subtil. Devant le mutisme de sa petite amie, il ouvrit la porte à la volée, prêt à partir.
- Attends ! pleura-t-elle. Peter, tu ne comprends pas... Je ne peux pas rester ici. Je ne peux pas...je ne peux pas t'imposer ça.
- De quoi tu parles, Harper ? s'énerva-t-il. Tu ne m'imposes rien, bon sang ! Si je suis là, c'est parce que je l'ai choisi. Tout ne tourne pas autour de toi !
- Je n'ai jamais dit que c'était le cas, je te signale !
Cette remarque avait réussi à plonger Harper dans l'énervement à son tour. Comment osait-il insinuer une chose pareille ?
- Si je pars sans toi c'est précisément parce que tout ne doit pas tourner autour de moi, bordel !
- Tu as le raisonnement le plus irrationnel que j'ai jamais vu, Harper, souffla Peter. Alors vas-y, pars, pars avec Harley si tu veux. Moi, j'en ai marre de devoir me battre pour rester à tes côtés. C'est bien ça que tu veux, non ?
- Hein ? Non, ce n'est pas du tout... Tu ne comprends rien.
- Alors dis-moi ce que je ne comprends pas !
- Ce que tu ne peux pas comprendre, apparemment, c'est que dès que je suis dans les parages, on pense qu'il faut surveiller ses moindres mots, faire attention à la moindre allusion qu'on pourrait faire à mon père, et... Harley ne fait pas ça. Harley comprend. Toi, tu es trop...tu es trop affecté et quand je suis là, je t'étouffe. Je le vois bien, Peter. Ne me fais pas croire que tu n'as pas besoin d'être consolé, toi aussi.
- Si, et je n'ai jamais prétendu le contraire, mais...
- Mais avec moi, ce n'est pas possible. Comment pourrais-tu oser te plaindre quand j'ai perdu mon père, hein ? Bah oui, bien sûr, tu ne peux pas ! Si je pars, tu pourras...tu pourras être malheureux comme tu as besoin de l'être. Je ne serai plus là pour t'étouffer. Ce ne sera pas long et...
- Et quoi ? Tu crois que ça nous fera le moindre bien ?
- Je pense même que ça nous fera un bien fou.
- Tu te trompes.
- Si tu le dis, céda Harper.
- Alors c'est tout ?
- Que veux-tu que je dise de plus ?
- Je ne sais pas, dis-moi que j'ai raison et...
- Certainement pas. Je sais que je prends la bonne décision. Quand je reviendrai, tu t'en rendras compte et tu comprendras que j'ai eu raison de faire ça.
- Parfait. Je...je vais rentrer chez moi. Pas la peine de me raccompagner en bas, je connais le chemin.
L'amertume dans la voix de Peter, mêlée à sa mélancolie, brisa le cœur de la jeune femme. Elle savait qu'elle prenait la bonne décision. Elle prenait forcément la bonne décision. Elle regarda Peter quitter la pièce et pendant un instant, elle hésita à le suivre. Elle n'en fit rien et resta là, pantoise, à regarder cette porte par laquelle son âme sœur venait de la quitter. Elle ne le reverrait plus avant un moment et même si elle était persuadée que c'était pour leur bien mutuel, elle ne pouvait s'empêcher de douter : et si elle venait de tout gâcher ?
***
Le lendemain, Harper avait déjà fini de préparer sa valise. Bien au chaud dans le jet privé, Harper s'émerveillait face à l'excellente organisation de sa mère. Le voyage était millimétré à la minute près. Harley était assis en face d'elle : il ne croyait pas à son air enjoué et joyeux. Il savait très bien que quelque chose s'était passé entre Peter et elle, la veille. Elle ne lui en avait pas parlé et il ne lui avait pas posé la question : il fallait qu'il attende qu'elle ait au moins eu le temps d'y réfléchir de son côté. Lorsqu'Harper eut embrassé sa mère une dernière fois, l'avion put enfin décoller, deux adolescents impatients à son bord.
- Il faut absolument qu'on goûte la sangria, s'enthousiasmait Harper tandis qu'elle jetait un œil à leur plan de voyage.
- Je suis totalement d'accord mais d'abord, on ira dormir, Harpee, lui recommanda Harley. Je te signale qu'il fera presque nuit quand on arrivera à l'hôtel.
- C'est vrai, je suis déjà fatiguée, dit-elle sur le ton de la plaisanterie.
- Sans blague, c'est pas comme si tu avais eu une journée éprouvante, hier !
L'ironie du garçon était à peine dissimulée et Harper arqua un sourcil en le regardant.
- Qu'est-ce que tu veux dire par là ?
- Tu sais bien, souffla Harley avec un léger rire. Tu veux qu'on en parle ?
- Il n'y a pas grand chose à dire, vraiment.
- Et pourtant tu as passé toute ta soirée à pleurer, et je suis presque sûr que sa soirée à lui n'a pas été très différente.
La jeune femme demeura silencieuse pendant quelques secondes. Parler de Peter et de leur dispute était bien trop compliqué à faire sans pleurer à nouveau.
- Je sais, mais ce n'est pas pour ça qu'il y a grand chose à expliquer. Je lui ai dit que c'était mieux pour nous si je restais à l'écart pendant quelques temps, il l'a mal pris, il est parti, fin de l'histoire. Il n'y a vraiment...pas grand chose à dire de plus.
- Comme tu voudras.
Harley lâcha l'affaire -c'était le choix le plus judicieux- et baissa à nouveau les yeux sur son téléphone. Harper, elle, continua de passer en revue leur programme même si le cœur n'y était plus vraiment. Sans même s'en apercevoir, elle vérifia son téléphone au cas où Peter lui aurait envoyé quelque chose : rien. Elle finit par s'endormir et lorsqu'elle se réveilla, c'est parce que son cher ami était en train de la secouer pour l'avertir de leur arrivée. Les yeux encore endormis et les membres engourdis, Harper quitta l'appareil tant bien que mal et se dirigea vers leur taxi. Ils arrivèrent très vite à l'hôtel et elle s'effondra sur son lit. Sur l'autre lit, juste à côté du sien, Harley continuait de regarder son téléphone. Il attendait une réponse.
"Écoute, Peter," avait-il envoyé, "elle est persuadée que partir est dans votre intérêt à tous les deux. Je l'ai vue soupirer plusieurs fois devant son téléphone. Si tu pouvais peut-être prendre de ses nouvelles... Je ne sais pas ce que vous vous êtes dit exactement, mais ça ne lui a pas fait du bien du tout."
Il avait envoyé ça très peu de temps après leur conversation, dans l'avion, et il n'avait toujours pas reçu le moindre signe de la part de Peter. Il lui en voulait un peu, en réalité : c'était un garçon gentil et intelligent, alors pourquoi ne comprenait-il pas le point de vue d'Harper ? Elle lui avait dit que c'était pour son bien et même si ce n'était pas forcément la solution, la dernière chose qu'elle souhaitait était de lui faire du mal d'une quelconque façon. Depuis toutes ces années, Harley ne l'avait encore jamais vue regarder quelqu'un comme elle le regardait, lui, Peter Parker. Il ne laisserait certainement pas l'un ou l'autre gâcher ça. En tournant la tête sur sa gauche, il surprit Harper en train de roupiller tranquillement sur son lit, au-dessus des couvertures, entièrement habillée. Elle n'avait pas même pris la peine de se changer et sa bouche légèrement entrouverte ne lui donnait pas l'air très futé. Bien sûr, il s'empressa de la prendre en photo. Il hésita quelques secondes avant de la partager sur Instagram. Il pensait aux conséquences : la fille d'Iron Man ne pouvait pas se permettre ce que toute jeune adolescente se permettrait. Et pourtant, son père, lui, ne s'était jamais gêné pour faire ce qu'il n'aurait pas dû. Alors, Harley partagea la photo sur son propre compte, avec cette simple description : "Toute la caféine du monde ne peut pas vaincre le décalage horaire." Il enfila son pyjama et s'endormit lentement en pensant que le lendemain, Harper lui en voudrait certainement pendant un bon quart d'heure et qu'après, ils pourraient enfin rire comme ils le faisaient avant. Avec ce voyage, il comptait bien lui rendre toute sa joie de vivre.
***
Une dispute Starker :(((( Ça m'a brisé le cœur rien qu'en l'écrivant ! J'espère que ce chapitre vous plaît et que vous prêts pour l'aventure de Harley et Harper ! On va les appeler H2 hahaha ! N'hésitez pas à voter et à commenter !
- Céline
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top