Chapitre 1 - Mia

Je ne suis pas prête. Je n'aurais même jamais dû accepter cette proposition. Comment une jeune femme de 24 ans pourrait diriger une entreprise aussi grande que la O'Leary Corporation ? C'est impossible. J'aime l'humanitaire, là n'est pas le problème, mais gérer toute une entreprise travaillant dans ce milieu ? Échouer serait une catastrophe. J'ai vécu toute ma vie dans ce milieu en étant persuadée qu'un jour j'en ferais partie, je ne suis plus si sûre que ce soit une bonne idée.

- Mia, regarde moi.

La voix de Lexy me tire de mes pensées. Je suis en train de paniquer. Ça ne m'arrive que rarement, je suis normalement bien plus sûre de moi, mais lorsque c'est le cas, j'ai du mal à retrouver pieds. J'inspire profondément avant de planter mon regard dans celui de ma belle-sœur. Je crois que si elle n'était pas là, il y aurait déjà longtemps que j'aurais fuis les locaux pour me terrer dans mon appartement plutôt que dans le bureau de mon futur assistant assistant. Lexy m'observe, l'air aussi bienveillant qu'au premier jour tout en caressant son ventre arrondi.

- Il faut que tu respires, Mia. Tout va bien se passer. Tu as déjà prouvé que tu en était capable.

Je n'en suis pas si sûre. Je n'étais pas destinée à diriger cette entreprise, je ne suis pas l'aînée. Mon frère, Hayden, faisait ça à la perfection. Il a suivi de grandes études, s'est préparé toute sa vie pour ce rôle, et c'est pour ça que j'avais accepté de devenir son associée, que nous nous séparions les tâches, parce que je le faisais avec lui. Et à l'annonce de la grossesse de Lexy, sa femme, il a démissionné sur un coup de tête. Il a tout lâché pour devenir un simple employé dans notre branche événementielle, comme si j'étais prête à gérer tout ça seule !

- Je pense qu'Hayden s'est trompé. Je ne suis pas faite pour ça, déclaré-je en respirant trop rapidement.

Ma belle-sœur lâche un rire cristallin, visiblement très amusée par mes lamentations. je suis tout ce qu'il y a de plus sérieuse, pourtant, je ne suis pas sûre d'être prête, et surtout, je ne suis pas la seule à le penser.

- Mia, tu gères tout ça depuis des mois. On sait toutes les deux que Hayden t'a peu à peu laissé les rênes pour passer plus de temps avec ma fille. Sa démission n'était qu'une formalité. Comment veux-tu que ça n'aille pas ? Et depuis quand tu doutes ? Je croyais que pouvoir prouver qu'une femme en était capable était une idée qui te plaisait !

Mes épaules s'affaissent à l'entente de ses mots. Bon sang. Elle a totalement raison. Je voulais prouver à tous que ce n'est pas parce que je n'ai pas les diplômes pour et que je suis jeune que je ne suis pas capable de réussir. J'ai appris aux côtés de Hayden, je baigne dans ce milieu depuis ma naissance, bien sûr que j'en suis capable. Ma mère a créé et dirigé cette entreprise avant mon frère, elle l'a fait en étant déjà mère de deux enfants, si elle a réussi, je le peux aussi. Je veux reprendre le flambeau, lui faire honneur, je ne pourrais pas le faire en me lamentant sur mes difficultés. Ce sont les doutes des collaborateurs qui me montent à la tête, et je dois les faire taire.

Je m'assieds face à Lexy, le cœur battant à tout rompre.

- Tu as totalement raison. Je dois juste me détendre, je crois... Ce n'est pas le moment de baisser les bras.

Lexy me tend la main, le visage fatigué par la fin de sa grossesse, et je l'attrape, un peu plus sereine en sa présence. C'est elle qui m'a permis de me trouver. Quand elle est arrivée dans l'entreprise, elle a travaillé en tant qu'assistante pour mon frère, puis m'a formée pour travailler à ses côtés avant de devenir directrice des ressources humaines. Elle m'a soutenu plus que n'importe qui, sans elle et Hayden je n'en serais certainement pas là. Certains considèrent leur belle-sœur comme une simple pièce rapportée, à mes yeux Lexy est la sœur que je n'ai jamais eu.

- Qu'est ce que tu fais là, d'ailleurs ? Tu n'es pas sensée être en congé jusqu'à l'arrivée du bébé ?

Hayden a insisté pour qu'elle ne travaille plus jusqu'à l'accouchement, et Lexy a difficilement pu refuser. Quand mon frère veut quelque chose, il est dur de lui dire non, pourtant Lexy semble avoir réussi à n'en faire qu'à sa tête.

- Hayden et Avery on décidé de me faire une surprise et de décorer la chambre du bébé, j'ai voulu les laisser un peu en tête à tête, donc j'ai trouvé un endroit pour me poser en attendant.

Un large sourire étire mes lèvres. Je ne suis pas surprise par cette information. Avery est la fille de Lexy, pas celle de Hayden, pourtant celui-ci la considère tout comme, et leur relation est touchante, fusionnelle. Même moi, je la considère comme ma nièce, tout comme mon futur neveu ou nièce qui grandit dans le ventre de Lexy.

- Alors ce bureau est à toi le temps que tu voudras, mais que je ne te vois pas toucher aux ordinateurs, compris ?

Lexy travaille du côté des ressources humaines, et elle a beaucoup de mal à lâcher prise. On a bien trouvé une remplaçante le temps de quelques mois, mais Lexy se sent toujours obligée de vérifier ce qui est fait. Elle a peur de l'erreur, d'être simplement prise pour la femme du patron, elle pense toujours avoir besoin de faire ses preuves alors que tout le monde ici la sait compétente.

- Promis, je reste sage. En attendant, tu as de la visite qui t'attends dans ton bureau.

Je fronce les sourcils, persuadée que je n'avais pourtant aucun rendez-vous organisé dans la journée. Est ce que j'aurais fait une erreur pareille ?

- Qui donc ?

- Va voir et tu sauras.

Un rire amusé m'échappe, m'attendant à tout moment à découvrir une bêtise en vue du sourire de ma belle sœur, et je quitte ce petit bureau pour rejoindre le mien voisin. A tout moment je m'attends à y découvrir ma mère, ou encore mon père venu me surprendre. Je pousse la porte sans attendre, mais lorsque je découvre la personne qui se trouve face à moi, tout mon corps se fige. Je rêve.

- Qu'est ce que tu fais ici ? demandé-je un peu sèchement.

- Très heureux de te revoir, Miamor, j'attends toujours ta réponse à ma dernière lettre.

Je croise les bras contre ma poitrine, avec la soudaine envie de me cacher du regard de Max. Le meilleur ami de mon frère n'a rien à faire ici. Il est censé être en France, en train de développer notre filiale européenne, et c'est pour ça que je n'ai jamais répondu à ses courriers. Parce qu'avec la distance, je me moquais de couper les ponts. L'avoir face à moi change la donne.

- Tu vas attendre encore longtemps pour ma réponse. Je peux connaitre la raison de ta visite ? Si tu cherches Hayden, j'espère qu'il t'a prévenu qu'il ne travaillait plus en tant que chef d'entreprise.

Je m'approche de mon bureau tout en parlant, puis je tente de remettre de l'ordre dans mes papiers pour faire quelque chose de mes mains. Mais avant que je n'ai vraiment pu comprendre, Max s'approche de moi jusqu'à se placer dans mon dos, ses mains sur mes hanches, et il dépose ses lèvres dans mon cou en créant tout un tas de frisson sur mon épiderme. Je suis bien incapable de le repousser, une centaine de souvenirs de nous deux remontant à la surface.

- Ne me dis pas que tu n'es pas contente de me voir... susurre-t-il.

- Il me semble t'avoir dit que c'était terminé entre nous, dis-je dans un souffle.

- Et dans la dernière lettre que nous avons échangée, je t'ai dit que je n'étais pas prêt à renoncer à toi. Peu importe ce qu'en pense ton frère.

Je m'écarte vivement de lui en entendant ses propos. Alors voilà pourquoi il est revenu. Il n'a pas supporté que je mette fin à notre relation. Nous avons échangé des lettres pendant des mois et des mois, et quand nous nous retrouvions, nous finissions toujours nu dans un lit... Jusqu'à ce que tout se complique. Je n'ai pas mis fin aux choses parce que mon frère n'accepterait pas que je sorte avec son meilleur ami, je l'ai fait pour moi. Et je n'ai pas besoin de me justifier.

Max me fixe de son regard charmeur, et je le détaille comme si je ne l'avais pas vu depuis des années. J'ai toujours aimé passer mes mains dans ses cheveux bruns bouclés, et observer son visage parsemé de taches de rousseurs. Sans compter ses lunettes qui lui donnent un air bien trop sexy pour être réel. Mais peu importe à quel point je le trouve attirant, plus rien n'est possible, il faut qu'il le comprenne.

- Max, je t'ai dit que ce n'était plus possible.

- Je sais lire, Miamor.

- Arrête avec ce surnom.

- Sinon quoi ? Tu comptes me forcer ? me cherche-t-il.

Je lui jette un regard noir, ceux que je lui jetait bien avant que nous ne nous rapprochions, à l'époque ou je le détestais d'être si arrogant, même si c'est cette arrogance qui m'avait fait craquer la première fois. Max me sourit, visiblement amusé de constater qu'il me fait toujours autant d'effet, puis se pose à mon bureau comme si de rien n'était.

- Bien que je sois très heureux de te retrouver, Miamor, je suis là à la demande de ton frère.

- Pardon ?

Je ne peux pas croire qu'Hayden ait appelé Max sans m'en parler. Il ne sait pas ce qu'il se passe entre nous, mais je suis quand même à la tête de cette entreprise, j'ai mon mot à dire bon sang ! Et c'est très exactement ce genre d'acte qui me fait douter de mes capacités, parce que mon propre frère ne me fait pas confiance.

- La filiale en France se porte à merveille, et ils n'ont plus besoin de moi, explique Max. Hayden m'a annoncé la grossesse de sa femme, et en a profité pour me demander de rejoindre les rangs de la filiale principale, annonce-t-il fièrement.

Je le dévisage, un mélange de colère et de déception prenant place en moi. Hayden aurait dû me prévenir. Surtout à présent que je suis seule à gérer tout ceci, c'est à moi de prendre les décisions. Et voir Max et son air narquois dans mon bureau ne fait que m'énerver un peu plus.

- Et je peux savoir ce que tu comptes faire ici ? Nous n'avons aucun post à pourvoir pour toi.

- Bien sûr que si. J'ai cru comprendre que le bureau à côté du tien était libre.

Un rire m'échappe sans que je ne le contrôle.

- Tu veux être mon assistant ? Est ce que tu as trop bu Max ?

Je prends place face à lui, là ou mes clients sont censés s'asseoir. Max ? Mon assistant ? Ce ne serait qu'une vaste blague. Il a l'étoffe d'un chef d'entreprise, pas d'un assistant, et je n'ai de toute façon pas envie de travailler avec lui. Max ne se démonte pas.

- J'ai déjà vu ça avec Hayden. Je ne serais pas ton assistant, mais ton bras droit.

Je suis certaine que le sang a déserté mon visage et que mon teint est à présent livide. Bras droit. Hayden m'a collé dans les pattes mon ancien amant pour bras droit.

- C'est non, déclaré-je sèchement. Je ne veux pas de toi dans les parages, je me débrouille parfaitement seule. Et ce n'est pas négociable.

C'est un mensonge, en réalité, j'ai peur d'être dépassée. Mais je préfère de loin me démener que d'accepter de travailler avec Max. Ça n'apportera rien de bon, à part des histoires.

- En fait, tu n'as pas le choix, j'ai déjà vu avec Lexy pour mon contrat d'embauche.

Alors voilà pourquoi elle est ici... Je grogne, avec l'impression d'être prise au piège. Si Hayden a l'excuse de ne pas savoir ce qu'il y a eu avec Max, Lexy le sait, et je suis persuadée qu'elle l'a fait volontairement pour tenter de nous rapprocher.

- Alors je te demanderai de ne pas te mettre en travers de mon chemin. je travaille mieux seule.

- Dommage, parce que notre première mission en tant que duo est d'organiser une réception pour mon retour. Alors qu'en dis tu, partenaire ?

Je serre les dents de toutes mes forces. Il se rit de moi. Il sait parfaitement que je déteste être forcée à être près de lui, parce que je ne suis pas sûre de résister à ses avances. Je suis même certaine qu'il a l'intention de profiter de cette faiblesse pour me faire revenir sur cette décision.

- J'en dis que j'ai du travail et que tu es sur ma chaise. Alors bouge.

Je me lève des fauteuils face à mon bureau pour rejoindre Max, et j'attends patiemment face à lui qu'il daigne bouger. Pourtant il n'en fait rien, au contraire, il passe ses mains derrière mes cuisses pour me rapprocher de lui, et je grogne en me retrouvant à califourchon sur Max. Pourquoi doit-on toujours se retrouver dans ce genre de situation ?

- Ce n'est pas en te comportant comme ça que je vais t'accepter ici, Max. Nous ne sommes pas chez toi en France, je travaille.

Il me fixe de son regard whisky, visiblement très amusée par cette proximité qu'il a créé et que je suis incapable de rompre.

- Allez, Mia, dis moi le problème. Depuis quand tu ne parles plus ?

- Dans mes souvenirs, on ne parlait pas beaucoup quand on était ensemble.

Il lâche un rire rauque face à ma tentative d'humour, et je me retiens de sourire face à la vérité que je viens de sortir. Non, c'est sûr que nous étions plus occupés à autre chose.

- C'est vrai, mais on pourrait changer ça.

Je m'approche doucement de son visage, le regard planté dans le sien. Max sourit un peu plus en m'imaginant surement l'embrasser, et lorsque mes lèvres frôlent les siennes, je pose une main sur son érection, le regard noir.

- Bouge. De. Ma. Chaise. Sinon je t'assure que ce sera moins drôle. Compris ?

Un nouveau rire lui échappe avant qu'il ne se lève en me soulevant de façon à me tenir contre lui. Je tente de le repousser, mais il me maintient contre lui pour ne pas me faire tomber.

- Si tu ne me reposes pas, je hurle.

- Super, comme ça ils penseront qu'on s'envoie en l'air.

Je le frappe sur le torse sans réfléchir, et Max lâche prise, me faisant tomber au sol.

- Putain Max !

- Tu m'as demandé de te lâcher, Mia !

Je me releve en le fusillant du regard. Il me cherche, et il va réussir à me trouver. Ce n'est qu'un gamin qui n'a rien à faire ici !

- Sors de ce bureau, j'ai du travail.

Max se rapproche à nouveau de moi, les mains glissées dans les poches de son costume bleu marine. Je déteste savoir qu'il va rester ici.

- Aucun souci, cheffe. On se verra de toute façon d'ici peu pour l'organisation de cette soirée.

- Pour le moment, je préfère que tu sortes d'ici, déclaré-je calmement.

- Et je respecte ça. Mais tu vas devoir me voir tous les jours, Miamor, il va falloir t'y habituer. Et crois moi, je n'ai pas dit mon dernier mot.

Max me frôle tout en me contournant, et je reste bien droite, bien trop tendue pour que ce soit naturel. Il me fait de l'effet, même après tout ce temps, rien ne sert de le nier. En revanche, ce que je sais, c'est qu'il n'y aura plus rien entre nous. Surtout si je dois le supporter en tant qu'employé.

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