Partie 2 : Chapitre 16 Dungeon Break
Le vent était glacial. Les aventurières avaient progressé jusqu'à atteindre le pied de la météorite. Cette dernière, dégageant une aura de froid continuelle, augmentait drastiquement la chute de neige, obligeant les filles à progresser plus lentement que prévu. Ou du moins, pour Mei et Sanerte.
— Comment se fait-il que tu marches aussi facilement dans toute cette neige ? grommela la Nécromancienne en resserrant sa cape de fourrure autour de ses épaules pour se protéger des bourrasques gelées.
— C'est une Hylisse, répondit Mei. Elle possède la compétence de race « Danse du givre », ce qui lui permet d'échapper aux malus affectant sa vitesse de déplacement. Or, comme lorsque nous étions dans le blizzard du Mal'Ice, nous sommes affectées par « Enneigé », un état qui réduit nos déplacements.
— C'est vraiment de la triche, soupira l'elfe à la peau sombre.
— Dit la fille qui peut espionner les gens avec son « Oeil perfide ». En tout cas, cela nous permet d'avoir une éclaireuse efficace, alors je ne vais pas m'en plaindre.
En effet, lorsque Mei avait remarqué qu'elle progressait plus facilement malgré les éléments, l'Assassine avait décidé de jouer le rôle d'éclaireuse. Le trio avait ainsi pu éviter un groupe de singes aux longs bras, des maclaces d'après Sanerte, dont le nez coulait comme une fontaine commençait à geler, ainsi que quelques renices qui semblaient à la recherche de proies. Heureusement pour elles, la cryométéorite était formée comme une vrille et elles purent ainsi escalader la paroi pentue plus facilement que si la glace n'avait formé qu'un unique bloc. Au bout de plusieurs minutes, les trois filles ressentirent un frisson et elles déglutirent.
L'air autour d'elles semblait plus lourd, anxiogène, et leurs respirations accélérèrent, les aventurières suffoquant à cause de la soudaine pression. Le blizzard sembla se calmer, comme s'il était lui-même affecté par l'aura, dévoilant les alentours. À quelques mètres des joueuses, un mur ébréché semblait sur le point de se briser. Elthir s'approcha de la fissure et faillit tomber à genoux. Plus elle rompait la distance entre elle et la paroi, plus elle se sentait écrasée par l'énergie qui s'en échappait. Elle eut même l'impression d'apercevoir deux yeux rouges qui la fixaient avec rage mais son corps se décida enfin à obéir et elle recula, rompant l'illusion. Le souffle saccadé, l'Assassine porta sa main à sa gorge.
— Sanerte, rassure-moi, le boss ne dégage pas cette énergie dans le donjon ? finit-elle par réussir à dire après avoir repris le contrôle de sa respiration.
— Je ne pense pas. Le « Dungeon Break » doit amplifier ses pouvoirs et nous les ressentons bien plus forts dehors mais, à l'intérieur, il devrait être au même niveau que nous, vu qu'après la chasse du Mal'Ice, nous avons gagné un autre niveau.
Rassurée, l'Hylisse de niveau dix-sept chercha l'entrée du donjon et finit par découvrir un tunnel qui semblait s'enfoncer dans la météorite. Lorsqu'elle s'en approcha, elle vit apparaître devant elle la fenêtre de dialogue lui demandant si elle voulait, avec son groupe, pénétrer dans « L'ombre du Glacier ». Ses amies se rapprochèrent et elle valida, les téléportant toutes les trois.
Lorsqu'elles réapparurent, elles se trouvaient dans une grotte entièrement constituée de glace, y compris le sol. Cela surprit Mei qui glissa en voulant marcher et s'écrasa lourdement. Sanerte, profitant des crampons de ses bottes nouvellement acquises, l'aida à se redresser, essayant de masquer tant bien que mal son sourire amusé. Tandis que l'androïde s'entraînait à ne pas trébucher en s'appuyant sur la Nécromancienne, l'elfe des neiges observait les parois de la caverne.
Il lui avait semblé apercevoir quelque chose derrière, mais ce n'était qu'une impression. Soulagée, elle pivota pour observer les progrès de sa camarade lorsqu'elle sentit une vibration dans son corps. Aussitôt, son nez se mit à saigner, en même temps que celui de Sanerte.
— Nous sommes attaquées ! eut-elle tout juste le temps de dire avant qu'une force invisible la percute.
Repoussée par le choc, l'Assassine glissa sur le sol et se réceptionna contre le mur. Se relevant prestement, elle essaya d'identifier la menace mais ne vit malheureusement rien. Un déplacement d'air sur sa droite lui fit croire qu'elle était de nouveau victime d'une attaque et elle voulut riposter contre le mystérieux agresseur mais ses lames ne tranchèrent que le vide. Ses points de vie diminuaient lentement, comme si elle subissait des dommages sur la durée. Ne sachant que faire, elle se mit à attaquer autour d'elle à l'aveugle, espérant toucher l'être qui la tuait à petit feu. Mei était dans la même situation. Même si elle ne saignait pas à cause de son corps mécanique, celui-ci lui indiquait, par l'intermédiaire de son interface, qu'elle était victime du même poison que ses camarades.
Tandis que l'androïde essayait de balayer la salle à l'aide de ses tirs de fusil, Sanerte réfléchissait.
— Il n'existe pas d'ennemis purement invisibles dans cette toundra. Donc nous avons affaire à une créature qui se cache.
Ses yeux se posèrent donc sur les murs et ce fut alors que sa mémoire lui rappela un passage de l'encyclopédie qu'elle avait lue à Bourg-Sentra.
« Les Chauves-glaçons sont des créatures qui utilisent leurs cris pour perturber les sens de leurs proies tout en les blessant, avait écrit l'auteur de « Écosystème enneigé : Que faire dans la neige ? ». Afin d'éviter de subir leurs illusions, utilisez une surface réfléchissante pour observer votre environnement. »
Aussitôt, elle distingua les formes des chauves-souris se reflétant sur la glace composant la grotte et sourit. Elle bondit et, à l'aide de sa « Faux modestie », elle sectionna la première bête qui était suspendue la tête en bas au plafond. L'illusion vacilla sur le coup, révélant deux autres représentants de cette race.
Ne possédant qu'un unique œil, elle avait deux paires d'ailes plus proches de celles des insectes que de celles des chiroptères. De plus, à la place du nez, un étrange pic de glace sculpté en klaxon propageait leurs cris parfaitement inaudibles pour les oreilles des joueuses mais qui générait l'illusion et les dommages.
Ayant désormais des cibles à abattre, Mei détruisit sans difficulté les deux animaux, ne leur laissant aucune chance. Dès que le dernier chauve-glaçon s'effondra, les points de vie des filles cessèrent de diminuer, confortant Sanerte dans son idée de la source des dommages.
— Bien joué, Mei ! la félicita-t-elle.
— C'est plutôt à nous de te remercier, lui répondit Mei en buvant une potion de soin. Comment as-tu su que ces bestioles se trouvaient au plafond ?
— J'avais lu un passage sur les chauves-glaçons. Je savais qu'ils utilisaient leurs cris pour créer des illusions et donc, qu'il fallait les regarder à travers un objet réfléchissant.
— C'étaient donc elles que j'avais aperçues en regardant les parois de la caverne, s'exclama Elthir en se frappant le front de la paume de sa main. Je n'avais pas fait le rapprochement. Mais quelle idiote !
— Pas besoin de te flageller ainsi, l'excusa la Nécromancienne. Cependant, nous avons eu de la chance que je m'en souvienne à temps sinon je ne sais pas comment nous aurions fait.
— Maintenant qu'on sait que ces chiroptères existent, nous serons plus prudentes, poursuivit l'androïde. Allons, dépêchons-nous avant que le « Dungeon Break » n'éclate.
Le trio progressa dans le boyau glacé et déboucha dans une autre pièce. Ou du moins, dans un autre corridor dont les parois semblaient plus transparentes que les précédentes. Surprise par ce changement de décor, Mei leva la main pour stopper l'avancée de ses camarades et marcha en prenant garde à ne déclencher aucun piège. À un mètre de là, elles arrivèrent à un embranchement. Elle observa les deux couloirs et aperçut plus loin de nouveaux coudes.
— Nous sommes dans un labyrinthe, conclut-elle en se tournant vers ses alliées.
Ces dernières la rejoignirent et, avec elle, se concertèrent.
— On se sépare ? demanda Elthir.
— Mauvaise idée, grommela l'androïde, agacée par la bêtise de l'Assassine. Si nous nous perdons, il nous sera impossible de nous retrouver à temps pour arrêter le « Dungeon Break ».
— Techniquement, on peut se séparer sans se perdre, objecta Sanerte.
Étonnée, la Mécatech se tourna vers elle, faisant comprendre par son regard qu'elle attendait plus d'explications.
— Je peux invoquer Mickey et Mélisande et les envoyer en éclaireur. Si jamais ils tombent sur des culs-de-sac, ils pourront graver sur les murs une croix nous indiquant que ce n'est pas le bon chemin. Nous, on fait pareil et ainsi, on divise le temps d'exploration par deux. Vous en pensez quoi ?
Trouvant le plan de la Nécromancienne plutôt intéressant, les deux rivales acquiescèrent. Invoquant ses morts-vivants, l'elfe à la peau sombre leur indiqua le couloir de gauche en leur donnant des directives très précises, évitant à l'IA du jeu de faire n'importe quoi. Ensuite, elle et ses alliées prirent le corridor de droite et commencèrent à progresser. Pendant une dizaine de minutes, elles cherchèrent la sortie du dédale, balisant leur progression à l'aide de croix gravées. Alors qu'elles arrivaient sur un énième cul-de-sac, Sanerte sentit sa connexion avec ses invocations se rompre, Mélisande en retard après Mickey.
— Ils ont été attaqués ! dit-elle à Mei et à Elthir qui sursautèrent.
Opérant un demi-tour, le trio rejoignit l'entrée et prit la route des morts-vivants, sur leurs gardes. Avançant plus facilement à l'aide des symboles faits par les deux ressuscités, les aventurières finirent par déboucher dans une zone plus vaste, aussi grande qu'une petite pièce. Au centre de la caverne, des maclaces les attendaient. L'un d'entre eux, mort, gisait dans un mur tandis que les trois autres tenaient dans leur main des stalactites en forme de gourdin. Apercevant les nouvelles venues, ils frappèrent leurs armes improvisées sur le sol, se voulant menaçants, avant de se jeter sur les filles.
Le combat aurait dû être simple. Déjà affaiblis par Mickey et Mélisande, les singes à longs bras n'auraient pas dû opposer une forte résistance aux joueuses. Cependant, dès l'instant où les animaux s'étaient élancés vers elles, les deux elfes et l'androïde avaient ressenti l'aura qui les avait terrassées à l'extérieur. Même si plus faible comme l'avait annoncé Sanerte, la pression gênait les trois combattantes en les faisant s'essouffler. Elthir avait l'impression qu'elle était si lourde que le moindre effort lui demandait toute son énergie. Mei, agacée, voulut tirer avec Lei au railgun mais l'un des maclaces, profitant de la lenteur de ses mouvements et de sa faiblesse, lui déroba son arme durant la transformation. Surprise, l'androïde voulut la récupérer mais les monstres se jetèrent sur le canon électro-magnétique, obligeant la joueuse chinoise à courir pour la récupérer.
Ses nerfs arrivant à bout, l'Assassine se jeta elle aussi au corps à corps, lorsqu'une idée lui traversa l'esprit. Elle se positionna entre deux maclaces et fonça vers le premier. Ce dernier, plus vif qu'elle à cause de l'aura, réussit à asséner son attaque avant celle de l'elfe. Mais c'était exactement ce que souhaitait Elthir.
— Fugue !
Prenant appui sur le gourdin gelé avec son pied, elle se propulsa en arrière, droit sur l'autre monstre qui ne s'y attendait pas. Libérée de la pression pour quelques instants, elle planta ses dagues dans le crâne de l'animal qui s'effondra aussitôt et réceptionna au passage Lei. Elle l'envoya à Mei qui sourit. Repassant en mode fusil à ions, elle se décida à profiter du sol glissant pour éviter le coup qui lui était adressé. Emporté par son élan, le troisième singe n'eut pas le temps de changer sa course que Sanerte le faucha. Ne restait plus que le dernier maclace qui fuit en voyant les trois combattantes se tourner vers lui, s'enfonçant dans le dédale.
Dès qu'il disparut de leur champ de vision, les joueuses sentirent la pression sur leurs épaules disparaître, leur permettant de souffler.
— Et bien, je commence à me dire que la suite va être difficile, commenta l'androïde. Si nous devons combattre le boss en étant affaiblies, je ne sais pas comment on va faire.
— Pour lutter contre son aura, j'ai une idée, expliqua l'elfe à la peau sombre. Mais pour cela, il faudrait déjà vaincre le mini-boss.
— Je me demande à quoi il va bien pouvoir ressembler, souffla l'Assassine en s'étirant. Allons le découvrir tout de suite ! déclara d'un ton décidé la Mécatech.
Le trio, après avoir récolté les fourrures que laissaient les singes derrière eux à la suite de leur disparition, prit le couloir menant à la salle suivante et ses membres soufflèrent de soulagement en cœur en découvrant que ce n'était pas un nouveau labyrinthe. La troisième salle était occupée par un étrange poulpe aux tentacules se terminant en pioche de glace. Le combat fut plutôt long pour les joueuses car elles mirent un peu de temps à comprendre que, si elles ne sectionnaient pas tous les appendices de la bête, cette dernière était immortelle. Cependant, lorsqu'elles virent la bête modifier son comportement quand il commença à lui manquer la moitié des membres, usant plutôt de souffles et de coups de bec pour attaquer, elles comprirent la supercherie. Une fois morte, le Glaken laissa derrière lui un tentacule que Sanerte prit dans sa poche.
Le groupe poursuivit sa route et finit par déboucher dans une caverne bien plus vaste que les précédentes. Dès qu'elles franchirent le seuil de la pièce, l'aura affaiblissante se fit ressentir, manquant de les mettre à genoux tant elle était puissante dans la salle du boss. Mais la Nécromancienne avait déjà anticipé cela et fit un signe à Mei. Cette dernière se plaça difficilement devant les deux elfes et suivit le plan que son amie à la peau sombre avait partagé avec elles dans la salle précédente.
— L'aura qui nous agresse est une compétence de domination. Donc, si nous lui opposons une compétence similaire en face, les deux devraient s'annuler, avait-elle expliqué.
— Tu as une compétence de domination ? s'était étonnée Elthir.
— Moi non. En revanche, Mei, oui.
L'androïde avait immédiatement compris qu'elle parlait de « Hurlement de l'alpha ».
— Quand je te ferai signe, place-toi devant nous et attends que je te dise d'agir. Mais pas avant, car si jamais tu te trompes dans le timing, nous n'aurons aucune chance de vaincre ce monstre, avait alors ajouté la Nécromancienne.
Reprenant le cours de ses pensées, la Mécatech emplit ses poumons d'air et retint sa respiration.
— Maintenant ! cria Sanerte en voyant la silhouette du boss se redresser, devenant plus imposant.
— Hurlement de l'alpha !
Alors que l'aura de domination du boss s'intensifiait, les deux compétences entrèrent en conflit et se brisèrent mutuellement, arrachant un hoquet de surprise à l'entité les attendant au centre de la grotte.
Profitant de la stupeur du Kibraham, d'après ce que pouvait lire la joueuse japonaise, cette dernière l'examina tout en se mettant en formation. Proche du gorille, son corps possédait deux pattes plus grandes et plus volumineuses que celles arrière, se terminant par des griffes aiguisées. De plus, sur ses bras, des excroissances orangées avaient poussé, formant des gantelets rugueux. En revanche, la tête de la bête ressemblait plus à celle d'un loup. Le museau allongé comme un canidé, il possédait deux crocs proéminents, sortant de sa mâchoire supérieure. Au-dessus de ses yeux rouges emplis de colère, des sortes de plumes noires sortaient de sa fourrure bleutée, formant deux sourcils froncés et imposants.
Revenant de sa surprise d'avoir vu sa compétence de domination se faire briser, le Kibraham rugit en se remettant sur ses pattes arrières, frappant son torse pour intimider les joueuses. Celles-ci, ayant adopté une formation en triangle, empoignèrent leurs armes et le combat commença. Mei, occupant le rôle de tank, se plaça devant le boss et encaissa ses violentes frappes à l'aide des sorts de soin de Mélisande, invoquée par Sanerte. Cette dernière, se trouvant sur le flanc droit du monstre, faisait danser sa faux entre ses mains, couvrant le corps de son adversaire d'estafilades. Malheureusement, le cuir épais de la bête empêchait la lame de s'enfoncer plus profondément. Enfin, Elthir, située à l'arrière du Kibraham, se concentrait sur ses dommages sur la durée, lançant de temps en temps sa lame pour accumuler les points de viciosité.
Au bout de cinq minutes, elles avaient réussi à arracher la moitié de la jauge de vie du boss qui poussa un rugissement assourdissant. Il bondit, échappant aux attaques des joueuses, et s'accrocha à une stalactite à l'aide de ses pieds ressemblant à des mains. Il frotta alors ses deux gantelets l'un contre l'autre. Des flammes se formèrent subitement après la troisième friction et entourèrent ses avant-bras. Il frappa l'air en direction de Mei qui vit alors une boule de feu se diriger droit sur elle. Sanerte, rapide, se jeta devant elle et, activant sa « Danse des limbes », dissipa l'attaque avant qu'elle ne percute son alliée. Seulement, le Kibraham semblait pouvoir former autant de projectiles enflammés qu'il le voulait et se mit à bombarder les joueuses.
Les défendant comme elle le pouvait, la Nécromancienne cria, s'adressant à l'androïde.
— Fais-le tomber, je ne peux pas tenir plus longtemps !
Apercevant la stalactite à laquelle le boss s'accrochait, Mei eut une idée.
— À terre !
Ne cherchant pas à comprendre, l'elfe à la peau sombre et son homologue plus claire, qui les avait rejointes pour profiter de la protection de son alliée, s'exécutèrent.
La joueuse chinoise bondit devant ses camarades et planta sa claymore dans le sol.
— Vengeance de Lei !
Deux projectiles enflammés percutèrent la lame de plein fouet, chargeant immédiatement l'arme qui se changea en canon électro-magnétique. Mei s'en saisit et balaya l'air devant elle, visant le plafond. Le rayon d'énergie faucha la totalité des stalactites alignées avec celle du Kibraham qui ne s'y attendait pas. Ce dernier chuta et s'écrasa de tout son poids sur le sol de la caverne. Étonnamment, la caverne ne sembla pas vraiment être fragilisée par le tir de railgun et le choc du corps du boss sur son sol.
Se hâtant, Mei métamorphosa Lei en fusil et déchargea son arme en direction du corps du gorille à tête canine tandis que ses alliées se jetaient au corps à corps.
— Poussée de meurtre ! Lame enduite ! Entaille !
— Balayage !
Les coups s'accumulèrent sur le Kibraham qui s'apprêtait à se relever. Mais Sanerte eut une idée en apercevant les stalactites plantées dans le sol de l'arène.
— Mei ! Immobilise-le et répare ton railgun, on va lui porter le coup de grâce !
Malgré sa stupeur car il était rare de voir la Nécromancienne proposer un plan en pleine action, l'androïde obéit et leva sa main en direction du plafond.
— Les chaînes innocentes !
Des liens d'or jaillirent du sol et du sommet de la caverne, saisissant les membres du boss qui s'immobilisèrent. Dès qu'elle eut lancé son sort, la Mécatech lança sa compétence « Réparation » pour diminuer le temps de recharge de son canon électro-magnétique. Pendant ce temps, les deux elfes continuaient de se déchaîner au contact de la bête, l'une enchaînant les « Frappe osseuse » tandis que sa faux tailladait sa cible, l'autre frappant à toute vitesse, cumulant les coups critiques et les dommages sur la durée. Ce dernier, rugissant de fureur, essayait de se libérer de ses entraves mais le sort était inviolable.
Après cinq secondes cependant, les chaînes disparurent, rendant sa liberté au Kibraham. Il voulut frapper les deux insectes qui le tuaient à petit feu mais Sanerte avait anticipé ce geste.
— Amitié macabre !
Mickey apparut au-dessus d'elle, bloquant le poing de la bête.
— Elthir ! Fugue et monte sur une plateforme derrière toi ! Mei ! Séisme !
L'Assassine, comprenant ce que voulait faire son amie, bondit en arrière à l'aide de sa compétence, se perchant sur une des stalactites tombées après l'attaque de l'androïde. Cette dernière, voyant que la Nécromancienne avait imité son homologue à la peau plus claire en grimpant sur une plateforme, sourit.
— Séisme foudroyant !
Lei, sous forme de railgun, fit exploser le sol. Au moment où le tir fusa, les deux elfes bondirent de leurs perchoirs pour éviter le séisme qui déséquilibra le boss. L'arme de l'androïde se changea en claymore et les trois joueuses lancèrent une ultime attaque.
— Lame ionique !
— Balayage !
— Poussée de meurtre !
Le Kibraham poussa un dernier rugissement et s'effondra, abattu. Épuisées, Elthir et Mei trouvèrent la force de rejoindre Sanerte qui s'était écroulée contre le cadavre du monstre.
— Vous avez été parfaites, s'exclama cette dernière.
— Tu peux parler mais sans ton plan, je ne suis pas sûre que nous nous en serions sorties aussi facilement, lui répondit l'Assassine en se laissant choir à côté de son amie.
— Je confirme les dires de la Chérie. Tu as été magistrale !
Elles se reposèrent un peu, profitant du répit pour reprendre leur souffle. Lorsqu'elles furent en état de se relever sans que leurs jambes ne flageolent, Sanerte, sous les encouragements de ses amies, ouvrit le coffre du boss. À l'intérieur, elles découvrirent un Croc de Kibraham, un parchemin de compétence donnant accès à l'aptitude « Aura du sommet » que l'elfe à la peau sombre donna à Mei et enfin une sorte de bille.
Curieuse, la Nécromancienne ignora la lueur lui indiquant qu'elle venait de prendre un niveau, se saisit de la petite sphère et, la sentant fragile, elle la brisa.
— Vous obtenez la recette du set d'équipements « Chaîne alimentaire des Terres enneigées », lui indiqua le système à l'aide d'une fenêtre de dialogue.
Tandis qu'elles rentraient, Mei expliqua aux deux elfes ce qu'il venait de se passer.
— La bille que tu as obtenue était une sphère d'équipement. Cela permet d'obtenir des recettes d'équipements inédites. Si tu n'es pas Forgeronne, tu peux transférer la recette à un PNJ et ce dernier te fera l'équipement à ta place. Je ne pense pas que les habitants de Morholt pourront te fabriquer les pièces de ton set mais on pourra en trouver un à Cloruth.
Elles finirent par arriver à Morholt où Kuja les accueillit avec joie lorsqu'il apprit qu'elles avaient réussi à empêcher le « Dungeon Break ». Il alla annoncer à ses concitoyens que le village était désormais en sécurité et ces derniers organisèrent un banquet pour récompenser leurs sauveuses. Ces dernières profitèrent de la fête, et une fois le repas avalé, elles se réunirent dans l'une des chambres que leur prêtait le maire.
Elles discutaient un peu de ce qu'elles venaient de vivre jusqu'à ce qu'Elthir consulte son menu de statistiques. Elle sursauta lorsqu'elle vit qu'elle était niveau vingt. Ses deux amies l'imitèrent en la voyant hoqueter de surprise et sourirent.
— Nos efforts ont bien payé ! s'amusa Sanerte en répartissant ses caractéristiques.
Une fois cela fait, elles échangèrent sur leurs nouvelles aptitudes débloquées. Pour la Nécromancienne, elle avait eu un sort appelé « Murmures de l'Envie », lui permettant de diminuer l'Esprit d'une cible pendant dix secondes. De son côté, Mei, en plus de la compétence « Aura du sommet » qui réduisait elle aussi l'Esprit mais aussi l'Endurance de sa victime pour cinq secondes, avait obtenu « Évents d'urgence », une aptitude qui, toutes les dix minutes, lui permettait d'annuler la surchauffe de son canon électro-magnétique tout en divisant par deux le temps de recharge de l'une de ses compétences utilisant le railgun. Enfin, Elthir avait débloqué le « Coup vif » qui doublait sa Dextérité pendant une seconde et qui générait deux points de viciosité.
Le délai si court avait surpris l'elfe des neiges mais lorsqu'elle calcula qu'elle arrivait à placer un coup par dague en une seconde, elle se dit que cela lui permettrait d'augmenter drastiquement sa puissance.
— Et maintenant, on fait quoi ? demanda l'Assassine après qu'elles eurent fermé leurs menus de compétence.
— Je vais devoir me déconnecter, indiqua la Nécromancienne. Mais demain, nous pourrions peut-être nous rendre à Cloruth pour récupérer nos classes de métier avant de quitter le continent par le port de la ville.
— N'oublie pas que tu dois forger ton armure, Sanerte, reprit la Mécatech. Par contre, demain, je ne pourrai pas me connecter avant 16h30, je suis désolée.
— Ce n'est pas grave, répondit l'elfe à la peau sombre. Je négocierai pour pouvoir jouer jusqu'à 19h, comme ça on pourra profiter un peu plus.
Elthir, quant à elle, fut heureuse de savoir qu'elle allait passer plus de temps avec sa grand-mère. Elles se déconnectèrent après s'être donné rendez-vous à Bourg-Sentra.
Le lendemain, après avoir fait les boutiques avec son aïeule, l'Assassine apparut dans Gillarg Stories à l'heure convenue.
— Salut ! dit-elle en apercevant ses deux camarades discutant près de la porte sud de Bourg-Sentra. J'espère que je ne suis pas trop en retard.
— Seulement deux minutes et vingt-six secondes, la nargua Mei avant de se changer en moto. Allez, en piste !
Et le trio prit la route de Cloruth. Il leur fallut une bonne heure de route pour atteindre la capitale des Fraharfs, les nains des sous-terrains. Tandis qu'elles voyageaient, un rugissement au loin fit sourire les filles quand elles reconnurent le tyrannys.
— Visiblement, elle s'est bien remise ! Il faudra demander à Mesilis d'aller voir les bébés quand elle accouchera ! cria Sanerte pour se faire entendre à cause du vent généré par la vitesse.
La tête horrifiée que lui rendit Elthir fit tellement rire la joueuse australienne qu'elle manqua de tomber du véhicule. Elles finirent par atteindre leur destination et, pendant que les deux elfes s'émerveillaient du paysage de la ville, l'androïde demanda au nain en charge de l'ascenseur où se trouvait le quartier des forgerons.
Après avoir suivi ses indications et avoir rencontré Adak, le chef du clan, qui s'empressa de forger l'armure de Sanerte, les deux rivales admirèrent leur amie dans sa nouvelle tenue.
Le croc du Kibraham était devenu une magnifique tiare ornée de plumes de faisan, rappelant les deux sourcils du boss. Le tentacule du Glaken avait été reforgé en étrange haut qui semblait à la fois visqueux et chaud. Enfin, à l'aide des fourrures de maclaces, Adak forgea une tassetière rembourrée. Avec les gants et les bottes, l'ensemble était particulier mais il était certain que plus jamais l'elfe ne craindrait le froid.
Alors que cette dernière expliquait que, en plus d'ignorer le froid, son armure la protégeait des malus infligés par la neige et les auras tout en réduisant les dommages des attaques de type glace de vingt pour cent, une ombre dissimula les soleils.
Surprises, les trois filles levèrent la tête et une fenêtre de dialogue apparut devant leurs yeux, leur indiquant que Cloruth était la victime d'une attaque. Devant la silhouette titanesque, les trois amies ne purent s'empêcher de se saisir les mains, inquiètes. Mais Elthir sourit et pressa légèrement les doigts de ses compagnons.
— Vas-y, le jeu, envoie-nous ce que tu as de pire, nous l'affronterons ensemble ! pensa-t-elle en croisant les regards déterminés de Mei et de Sanerte.
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