CHAPITRE XVIII : DOULEURS, SOUVENIRS ET DOUBLE MALÉFIQUE
Le dos raide. Le regard vitreux. La mâchoire contractée. Les muscles tendus et les poings crispés. Des iris se perdaient dans le bleu d'un ennemi à qui le contrôle demeurait interdit. Les mains sur les hanches, le reflet parlait d'une voix forte sans que son hôte n'en ai conscience. Seul leurs regards communiaient.
Derrière la porte à côté de laquelle était adossé le jeune homme, les soignants s'affairaient autour du malade. Du cyclamen, de l'hellébore, de la jacinthe, du jasmin, de la lavande autant de parfums qui émanaient des potions utilisées. Pourtant ces odeurs aux vertues apaisantes échouaient à détendre Ty. En effet, la lame emprisonnée dans son bras le démangeait. Ainsi, il luttait contre l'envie de la sortir pour se rendre dans le centre ville dans le but unique de trouver des saletés de créatures pour répandre leur sang. Aussi, motivé par ses aspirations, le tatouage représentant l'épée s'éveilla sous la première couche de peau. Quelques centimètres de l'extrémité tranchante apparurent et le double sourit. Remarquant le geste de la lame, Ty sursauta en écarquillant les yeux. Mécaniquement l'une de ses mains monta caresser la membrane mobile qui recouvrait le globe de l'œil.
Contaminant son sang par vague, la première émotion mélange de peur et de dégoût fit battre son cœur. Le poussant à prendre une pénible inspiration, une sueur froide coula le long de son dos. Paralysé face à son double, L'Enchantress frémit en constatant la décoloration de son iris. Profitant du tumulte, sa moitié maléfique essayait une fois de plus de lui arracher le contrôle. Bandant les muscles de ses avant-bras et baissant la tête, Ty serra les dents tellement fort que ces dernières grincèrent. Ordinairement, il aimait bien lutter contre l'esphrit mais pas quand il se sentait vulnérable. Tandis que, dans sa démarche pour s'éloigner de la source qui projetait son sosie, ce dernier se servait du mur, des flashs de souvenirs enfouis refaisaient surface. Replongeant dans ses remembrances douloureuses, Ty s'épongea le frond d'une main tremblante.
La mort de ces parents dans un accident causé par un ivrogne la nuit de la saint sylvestre. Des funérailles rapides et une nouvelle vie chez une tante sadique. Sa chambre, un espace réduit dans le grenier de cette dernière. Ces muscles se contractèrent lorsqu'il entendit sa voix pâteuse d'alcoolique. Elle l'avait attaché plus d'une fois. L'avait fouetté pour des choses stupides comme un stylo imaginaire qui glissait sur le sol. Ces marques, ils ne les avaient plus depuis qu'il avait rejoint l'Institut. Désormais, ces stigmates il les conservait dans le cœur. Serrant le poing, il observa une dernière fois son reflet qui lui parlait avant de suivre le chemin emprunter par Poslim un peu plus tôt. Il avait besoin d'un verre.
Au bas des marches, Ty se rua sur la bouteille qu'il avait essayé d'attirer en vain. Portant le goulot à sa bouche, il avala le liquide sucré mais légèrement amer comme s'il s'agissait d'un soda. Tous ces sens étaient en alerte et pour ne pas arranger les choses, il n'arrivait pas à activer son mode imperméable. De ce fait, il percevait chaque conversation, chaque bruissement dans l'air de même que les quelques gouttes de pluie qui commençaient à tomber. S'essuyant rageusement la bouche, Ty zigzagua entres les meubles pour aller se planter devant l'une des vitres. Son double l'observait avec un sourire mauvais. Lui souriant, Ty leva son verre en devinant ses pensées.
Au même moment, Anestia dont il avait senti la présence l'enlaça par derrière. Ces mains glissèrent légèrement sur son torse sans qu'il ne s'en plaigne. Pour la première fois, il se laissa faire parce qu'il avait besoin de compter pour quelqu'un. Se retournant lentement, il hocha la tête devant le sourire de son ex amante. Elle le dévisageait comme à sa grande habitude mais cette fois avec quelque chose de différent. Vraisemblablement, elle se retenait de fantasmer sur lui et voilait même certaines de ses pensées. A son tour, Ty sourit et lui fit boire un peu de sa boisson.
- Alors comme ça, je n'ai plus droit au contenu de cette mignonne tête ?
Rougissant, la jeune fille baissa les yeux avant de prendre place dans l'un des canapés. Suivant son exemple, Ty s'assit en face d'elle. Ensuite, après avoir retiré son blouson de cuir, il s'allongea un peu plus confortablement. Il détailla sa sœur d'arme pendant un moment avant que sa voix ne résonne encore.
- Tu as envie que ça marche du coup tu fais des efforts, dit-il en hochant la tête pour lui-même. Je le comprends tout à fait et je suis sûr que dans une autre vie je t'aurai admirer d'une certaine façon. Mais attention à ne pas faire mal à ce pauvre type que je n'arrive pas à saquer des fois. Lui il a encore une âme.
- Rares sont les fois où tu joues les moralisateurs et à chaque fois je ne sais pas comment réagir.
- Je suis sérieux pourtant. Il ne mérite d'être le substitut de personne alors j'espère que tu sais ce que tu fais, ajouta-t-il en la regardant brièvement.
- Occupe toi de ton double plutôt.
- Quoi ? Tu n'aimes plus ressentir sa présence et le considérer comme un être à part entier ?
- Touché.
- Bref ! Viens plutôt me faire un massage. Nous avons cinq minutes avant que ton mec ne débarque. Alors, presse toi de me faire du bien.
Riant, Anestia s'empressa de se mettre en action. Elle glissa les mains sur ses muscles tendus avant de se résoudre à utiliser son iji. Le marquant sous la nuque, Ty lui serra la main en laissant son corps absorber l'infravernut. Pourquoi n'y avait-il pas penser plus tôt ? Il laissa échapper un soupir d'aise en sentant le nœud dans ses tempes se dénoué.
- Eloigne toi, il est déjà là.
- Depuis quand tu te préoccupes de ce genre de détails ?
Se relevant, Ty redevint sombre. Jamais elle ne comprendrait. Aussi, il s'éloigna en lisant la déception dans son regard. Récupérant sa veste, il dit :
- Je ne pense pas que je réagirai autrement si quelqu'un qui m'appréciait allait de l'autre côté de l'Atlantique pour m'acheter mes bonbons préférés. J'ai beau être insensible mais j'essaierai du mieux que je peux de ne pas insulter ces efforts qui confirment bien l'amour qu'elle me porte.
Avant qu'elle n'ai eu le temps de répondre, Ty disparut. L'infravernut l'avait assez détendu pour qu'il réussisse à activer son mode invisible. Depuis le fond de la pièce, il observa les deux amoureux partager un baiser langoureux. Il ne regrettait pas d'avoir évité de se la faire après l'unique nuit qu'ils avaient partagé. Pourquoi ? Parce que primo, elle méritait quelqu'un d'un peu plus normal. Deuxio, elle méritait quelqu'un qui serait capable de miser sur la mutualité et non l'individualité. Tercio, elle méritait quelqu'un qui ne serait pas uniquement intéressé par l'amitié et le sexe sans implication. Il avait fait son choix et l'assumait pleinement, quand n'était-il de son ex amante ? Pour l'heure il évitait de croire ce qu'il supposait et valait mieux qu'il se presse d'aller rejoindre une certaine serveuse.
Note de l'auteure :
Hey ! Complète immersion dans la vie de Ty avec ce chapitre. J'espère qu'il vous aura plu ! Nous ne savons toujours pas qui est ce mystérieux inconnu transporté à l'Institut. Jouons un tout petit peu voulez-vous ? À votre avis qui est-il ?
Je vous dis à la prochaine !
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