𝟻𝟶. 𝙲𝚘𝚕𝚍 𝚌𝚊𝚜𝚎.
Bonsoir, ça-va ? 🕰
(𝖣𝖾́𝗆𝖺𝗋𝗋𝖾𝗓 𝗅𝖺 𝗏𝗂𝖽𝖾𝗈 𝗉𝗈𝗎𝗋 𝗏𝗈𝗎𝗌 𝗉𝗅𝗈𝗇𝗀𝖾𝗓 𝖽𝖺𝗇𝗌 𝗅'𝖺𝗆𝖻𝗂𝖺𝗇𝖼𝖾)
"Le mariage est une mosaïque que vous construisez avec votre conjoint, ce sont des millions de petits moments qui créent votre histoire d'amour."
Jennifer Smith.
𝙰𝙲𝚃 𝟽.
🌷 𝙼 𝚊 𝚛 𝚜.
𝟧𝟢. 𝖢𝗈𝗅𝖽 𝖼𝖺𝗌𝖾.
Ghost.
Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit.
Mes doigts pianotent contre l'écran de mon téléphone. Je suis en pleine conversation avec Seiji.
Mon seul réconfort, c'est le souffle régulier de Cassie contre mon torse.
Elle inspire, ma colère revient.
Elle expire, ma colère s'envole.
J'ai la tête en ébullition. Mes pensées se bousculent dangereusement.
Il va falloir que je sois très stratège sur ce coup, pour l'assassiner.
Mon index tapote les contours de mon téléphone en attendant la réponse de Seiji.
Je jette un coup d'œil à l'heure. Il est 5 h 40.
Dans vingt minutes, je devrai réveiller Cassie pour qu'elle rejoigne sa copine.
Je suis coupé de mes pensées en recevant la réponse de Seiji, qui ajoute de l'huile sur le feu de ma frustration :
« Seiji : On peut pas tuer Ross maintenant. »
« Seiji : On doit encore passer par le 707 pour certaines affaires. Ça serait prendre un trop gros risque. »
Je me mords nerveusement les lèvres, ma patience atteint ses limites.
Ça fait six mois que j'aurais dû enterrer ce fils de pute vivant.
Il me faut une solution pour éliminer Ross et Taylor Armitage, et vite.
« Seiji, là, je m'en bats les couilles des affaires. »
« Seiji : Va dire ça à ton grand-père, kisama. (enfoiré) »
« S'il faut que je brûle ce club pour qu'il comprenne. Je vais le faire. »
« Seiji : T'as déjà tabassé Ross la dernière fois. T'as tabassé Taylor. On va trouver quelque chose de plus malin, mais avant la fin des élections, mieux vaut pas provoquer davantage les Armitage. C'est pas la première fois qu'ils attentent à l'Ordre, on risque de tout faire foirer. »
« Si tu vois la tête de Ross et Taylor sur un piquet aux infos, c'est moi. »
Exaspéré, je verrouille mon téléphone et le dépose à côté de moi sur le lit.
Je suis happé par la respiration douce de Cassie.
Mon regard se pose sur elle. Ses poignets sont entrelacés contre sa propre poitrine. Je sens son mollet entre les miens, nos bassins se collent chaudement.
Quand elle dort, ses lèvres et son nez gonflent un peu.
Et ça, c'est vraiment adorable.
J'essaye de résister à la rage que j'ai en la regardant.
Mais ses paroles tournent en boucle dans ma tête.
L'idée que je suis encore enchaîné à l'Ordre et que c'est ça qui m'empêche de me lever au beau milieu de la nuit, et d'aller trancher leur gorge comme je le désire, là, maintenant, me frustre d'autant plus.
Il faut que je trouve un moyen.
Plus je vois la gueule de Taylor dans mon esprit, plus ma colère s'exacerbe.
Pour me calmer, je commence à glisser mes doigts sur le visage de Cassie. Je suis doucement le contour de son nez, j'effleure ses lèvres, trace la finesse de ses sourcils, et souligne ses longs cils.
J'ai envie de lui faire des enfants, putain.
Tendrement, le dos de mes doigts caresse sa joue.
Et ça lui provoque un petit réflexe. Son souffle se coupe une seconde.
Je viens de la réveiller.
Ce n'était pas mon intention, et je me sens un peu coupable pour ça, mais je me rappelle que de toute façon, il est bientôt six heures.
Je la regarde se réveiller doucement, ses paupières papillonnent timidement alors que sa respiration prend un rythme mon profond. Elle finit par ouvrir complètement les yeux, un peu déboussolée.
Je dois me contenir de la mordre quand ses poings fermés massent ses paupières alourdies par le sommeil. Son geste me donne presque envie de dormir.
Puis au bout de quelques secondes, ses yeux un peu gonflés par ses larmes de la veille se lèvent vers moi.
Dans une envie irrésistible, devant son visage adorable, je penche la tête vers elle, mes lèvres déposent un baiser sur son front chaud.
Son sourire m'oblige à poser ma paume doucement sur sa joue. Elle colle ses petites mains sur mon torse, là où mon cœur est en train d'accélérer dangereusement.
Et je sais qu'elle le sent battre si fort pour elle.
— Coucou, Cal', me chuchote-t-elle. T'as bien dormi ?
Là, je vis un rêve éveillé.
Je me retiens de lui dire que je n'ai pas une seule goutte de sommeil dans le sang.
Mais c'est quand même le plus beau réveil de ma vie.
Ce petit salut, tout doux, tout simple me fait sourire. Sa voix un peu cassée parce qu'elle vient de se réveiller, je veux l'entendre toute ma vie.
— Përshëndetje, gruaja ime.
Ses sourcils se lèvent. Étonnés. Je ressens la question sur les traits de son visage.
— Qu'est-ce que ça veut dire ?
— Ça veut dire, articulé-je en glissant ma paume le long de son bras, bonjour, ma femme.
Malgré la faible lumière de la pièce. Je suis sûre de percevoir ses joues se teinter de rouge.
C'est une des choses que je préfère le plus chez elle.
— Përshëndetje, burri im, me répond-elle timidement. (Bonjour, mon mari)
Je lève rapidement les yeux dans les siens.
— Hein ? articulé-je, en me redressant sur mon coude.
Un rire léger s'échappe d'elle face à ma réaction.
Je me rends compte que ma bouche est restée ouverte à cause du choc, et ça à l'air de vraiment l'amuser.
Sans hésiter, je l'attrape par la mâchoire et me place au-dessus d'elle. Son expression passe de la surprise, à une expression de chaleur qu'elle ne contient pas. Ses sourcils se tortillent délicieusement devant moi et elle se mord les lèvres.
Putain de merde... !
Ses mots m'ont rendu fier, putain !
Je me sens comme son super héros. Et elle l'a dit dans ma langue qui plus est, avec une prononciation parfaite.
Rien ne pourra jamais me faire cesser d'aimer cette femme !
Au-dessus d'elle, nos regards se verrouillent l'un dans l'autre avec une intensité brûlante, déconcertante. Chaque détail de son visage ensommeillé décuple l'intensité de mes envies. Des vagues de chaleur me submergent de partout.
J'ai envie d'elle, maintenant, pitié !
— Je veux que tu m'appelles comme ça, tous les matins, zemër, ordonné-je presque suppliant.
Je la sens frissonner sous moi à son tour. Elle déglutit lourdement, mais je vois que son regard chargé de désir descend vers nos bassins collés. Son expression oscille entre un mélange d'excitation palpable et de la surprise. Ses yeux sont légèrement écarquillés, ses lèvres restent un peu entrouvertes.
— Cal'... ton...
Je sens son ventre contre le mien se crisper de jouissance, tout en laissant un gémissement étouffé lui échapper, ce qui me provoque un serrement tout aussi délicieux et intense dans mon estomac.
Je baisse à mon tour les yeux plus bas, et je suis pris d'autant de surprise quand je me rends compte que je bande presque à mon maximum. Et mon sexe tendu s'écrase contre le sien.
Je n'ai que mon short fin de pyjama, elle aussi.
Je relève rapidement les yeux sur elle. Son visage et son ventre se tortillent un peu de sensations qu'elle subit à l'instant.
— Më fal..., articulé-je en prenant conscience de la situation.
Je me recouche précipitamment sur le dos, à côté d'elle, en essayant calmer mon souffle et de contrôler les décharges brûlantes qui ne calment pas la tension entre mes jambes.
Je résiste presque à l'idée à mettre ma main sur ma queue pour la baisser comme un putain d'adolescent.
Cassie reste allongée à côté de moi, également sur le dos, elle ne bouge pas, et son souffle est légèrement saccadé, frissonnant... Je sens que ça l'a autant excitée que déstabilisée.
Elle a tout senti.
Je passe une paume sur ma mâchoire en n'osant pas faire plus de mouvement.
La tension sexuelle et ce silence s'étirent entre nous, j'ai l'impression qu'il est palpable, et aussi épais et gros qu'un éléphant. Mon cerveau se charge d'un tas d'images salaces que je n'arrive pas à chasser de mon esprit.
Si seulement je pouvais encore enrouler cette natte deux fois autour de ma paume...
Nous restons allongés sur le dos tous les deux, à fixer le plafond pour nous calmer. Je sens que si je la regarde, je vais coucher avec elle sans retenue.
Je ne sais pas combien de temps s'écoule, mais son souffle se calme, le mien aussi.
Elle ose bouger la première. Je vois sa main se tendre entre nous. Cassie tapote deux fois l'écran de mon téléphone, sûrement pour vérifier l'heure.
— Mais t'es un malade ! s'exclame-t-elle en me présentant son écran.
Je me tourne vers elle, et il me faut quelques secondes pour comprendre.
Je ne peux m'empêcher d'éclater de rire en voyant la photo sur son fond d'écran. Cassie, rouge de confusion et de surprise, me fixe, interloquée.
— Quand est-ce que t'as pris cette photo !?
— Ça fait longtemps, je lui réponds amusé avec un haussement d'épaules.
— Mais change ! Tout le monde va la voir !
— C'est qui tout le monde ? Personne n'a accès à mon téléphone, ne t'inquiète pas pour ça.
— Tu ne vas pas sérieusement la garder ? me questionne-t-elle avec une grimace sur le visage.
— Si tu m'en fais une autre maintenant, je la change, la taquinai-je.
— Non, je viens de me réveiller ! proteste-t-elle.
— Ti je më e bukura, mikrob, dis-je en m'appuyant sur mon coude. (C'est toi la plus belle, microbe)
Elle me fixe, perdue entre rougeurs et l'envie de comprendre ce que je lui ai dit. Mon téléphone dans sa main est toujours suspendu dans l'air, et son regard louche de mes iris à mes lèvres.
Mais finalement, elle repose mon téléphone sur le lit et en secouant la tête, elle me lance en glissant sur le lit :
— Tu es un malade, Cal'.
— Oui, depuis le premier jour, j'ai la maladie d'être fan de toi, mon amour ! Étouffe-moi avec ces fesses sur mon visage, par pitié !
Son rire léger emplit la pièce, elle secoue encore la tête en levant les yeux au ciel cette fois-ci, et se hisse hors du lit pour aller rejoindre l'autre.
— Tu t'en vas, lui demandé-je.
— Oui.
— Ça m'énerve.
— Ça ira pour toi, je pense, m'explique-t-elle sincèrement en avançant doucement dans ma chambre.
Je laisse un rire m'échapper.
— Et tu te casses sans me donner ta bouche là ? je lui dis en arquant un sourcil.
— Oui, parce que je suis super pressée, désolée.
— Mais tu es une folle toi, reviens là !
J'essaye d'être indigné, mais mon sourire trahit mon amusement.
Cette fille est tarée, c'est pas possible.
— Non, mais je n'ai pas beaucoup de temps, me dit-elle en enfonçant la poignée.
— Microbe ! lancé-je choqué en m'appuyant sur mes coudes.
Pour réponse, cette petite peste m'envoie un baiser de loin, avant d'ouvrir ma porte et sortir de ma chambre sans pitié.
Mon baiser, putain !
Petite peste.
Je me renfonce à nouveau dans mon lit.
Mon regard se rive sur le plafond.
Elle vient à peine de partir, et c'est le temps qu'il m'a fallu pour que ma rage me ronge de nouveau. Je trouve tout de suite la situation insoutenable. Je réfléchis à des façons de contourner l'Ordre, et reprendre un contrôle sur ma vie et mes actions juste pour enterrer ce fils de pute.
Nerveusement, je passe ma paume sur ma mâchoire, et je me redresse.
Je quitte ma chambre, décidé à aller me doucher pour faire descendre la tension s'est emmagasinée en moi.
Dans ma salle de bain, je fais une toilette rapide avant de me débarrasser rapidement de mes vêtements. C'est à peine si ma queue s'est calmée. Je passe sous les jets d'eau chaude.
Mais rien ne calme ces putain d'envies de meurtre.
Rien ne me provoque plus de haine que le sentiment impuissance.
Ce désespoir de voir le danger, de le regarder droit dans les yeux, et de ne rien pouvoir faire dans l'immédiat...
Ma paume referme la vanne d'eau après ma douche.
Je m'essuie rapidement le corps et les cheveux et place une serviette autour des hanches.
Mes pas me mènent de nouveau vers ma chambre, et j'entre dans mon dressing. En ouvrant mon tiroir pour mes boxers, je suis interrompu par une voix féminine qui résonne de l'autre côté du mur :
— Cal' ?
C'est mon microbe.
Je sors la tête de mon dressing. Elle est à ma porte, elle a juste glissé sa tête.
— Viens-là, je lui dis en faisant signe de la main pour qu'elle approche.
— En fait—
— Approche, insisté-je en ne lui laissant pas place la négociation.
Cassie hésite un instant sur le seuil, en jetant des regards vers le couloir, avant de finalement franchir le pas de la porte, elle entre dans mon dressing avec une expression mélancolique.
— Qu'est-ce qu'il se passe ?
Ses lèvres font la moue.
— Lalita sait... me dit-elle tristement en faisant quelques pas vers moi. Elle sait que j'ai dormi avec toi.
Je remarque immédiatement le changement dans sa voix. Son aveu la peine comme si dormir avec moi représentait la pire des trahisons qu'elle aurait pu faire.
Mais en même temps, je la vois fixer la serviette qui entoure ma taille, puis ses yeux glissent inévitablement vers mes cheveux encore humides, sur mon torse...
Elle déglutit, et malgré sa petite préoccupation pour sa copine, la lueur de désir dans son regard est palpable.
— Elle t'en veut ? je lui demande en fouillant dans l'armoire pour trouver un boxer.
— Euh..., commence-t-elle, mais son regard se perd encore sur mon torse. Elle ne m'en a pas donné l'impression, mais je me sens mal quand même...
— C'est rien, zemër, je la rassure tout en sélectionnant un sous-vêtement. Arrête de t'autoflageller à chaque fois que tu fais quelque chose.
Cassie fait la moue, clairement pas convaincue par ma réponse.
Je glisse mon boxer le long de mes jambes sans enlever ma serviette, et une fois vêtu, je la laisse tomber.
Mon amour ne me quitte pas des yeux. Elle pince les lèvres et hausse légèrement les sourcils.
Elle fixe un moment le relief de mon sexe, avec une rougeur brutale qui teinte ses joues. Un frisson torride me griffe le corps.
Et à côté de mes sensations, je me retiens de sourire.
Je crois qu'elle se rend à peine compte de ce qu'elle fait, et j'avoue être fier de l'effet provoqué. Et en même temps, des salves dévastatrices de chaleur me donnent sérieusement envie de la prendre à quatre pattes dans ce putain de dressing.
— Tu voulais me dire quelque chose ? je lui demande finalement en enfilant un t-shirt.
Elle relève rapidement les yeux vers moi, ses pupilles dilatées me jaugent comme si elle se demandait si je l'avais bien surpris me reluquer.
Je t'ai déjà cramé, petite peste.
— Oh... euh, oui, du coup Lalita est réveillée, est-ce que tu peux nous raccompagner chez nous ?
Elle est distraite par chacun de mes mouvements.
Et c'en est trop pour moi.
Je termine de boucler le bouton de mon pantalon, j'hoche la tête en m'approchant rapidement d'elle.
La tension entre nous ne demande qu'à être : li-bé-rée !
Ma paume s'entoure soudainement autour de sa gorge, ça lui arrache un gémissement de surprise et moi un putain de frisson dévastateur qui me serre brutalement le ventre. Je la plaque contre la porte du dressing qui se ferme dans un claquement.
Je m'empare de ses lèvres, nos souffles se mélangent, ma main plonge dans ses cheveux doux, l'instant devient si intense que sans attendre, je ne résiste plus à l'envie de fourrer ma langue dans sa bouche. Elle glisse avec chaleur autour de la sienne. Je reconnais le goût de la menthe de mon dentifrice.
Je sens son corps chaud réagir contre le mien, et ça m'excite tellement que j'ai l'impression de l'écraser contre cette porte tant mon envie de la posséder est pressante.
Cassie avec une fièvre égale, glisse ses mains sous mon t-shirt. Elle explore la texture de ma peau avec une urgence qui en dit long sur ses propres désirs.
Son toucher sur mes muscles me fait frissonner. Mon sexe durcit dans mon pantalon.
La chaleur monte d'un cran, le baiser s'intensifie, et je sens, j'entends ses gémissements s'échapper de ses lèvres.
Mon ventre est en feu, chaque contact avec elle attise davantage le désir qui nous lie.
— Tu me fais tellement d'effets, putain ! Mon amour, tu me rends dingue ! murmurai-je contre ses lèvres, la voix rauque.
Elle gémit en se pressant davantage contre moi, son corps répond instinctivement au mien.
À cet instant, elle et moi savons qu'on ressent un mélange de besoins, de passion, et d'une connexion profonde qui défie tout ce qui pourrait nous séparer.
Et entre deux baisers, elle m'achève en me soufflant chaudement :
— Toi aussi, je te jure. Je ne sais pas ce que tu me fais... mais tu me donnes tellement chaud. J'ai envie de te faire tout et n'importe quoi !
Pitié !? J'ai bien entendu ?
Et merde quoi, j'adore sa voix !
À mon tour, ses mots me font gémir.
Je suis tellement étonné par sa confession que je l'embrasse encore plus fougueusement en la coinçant contre cette foutue porte. Et même malgré ça, j'ai l'impression que ce n'est pas assez !
Je veux l'avaler, avaler son cœur, faire un avec elle.
Je veux me sentir au chaud, enfoncé dans son vagin mouillé.
Ma main descend de ses cheveux pour trouver son sein que je presse soudainement. Elle se laisse frémir sous mes doigts en murmurant un « hmm, oui ! » qui me fait exploser. Je me mets à caresser ses tétons durs. Chaque mouvement de mes doigts lui arrache des gémissements étouffés et des « hmm Cal' » chaudement soufflés.
Finalement, j'en veux plus, ma paume ne résiste plus, je la glisse sous son t-shirt pour sentir la peau de ses seins ronds. Elle pose ses mains sur ma nuque, alors que nos lèvres se rencontrent encore, je lui lâche ces quelques mots brûlants de désir :
— J'ai envie de toi, maintenant.
— Je... moi auss—
— Cassie ?
Cassie me pousse avec un petit cri choqué, les yeux écarquillés de panique, elle cache ses lèvres gonflées avec ses paumes, rouges de honte.
La voix de sa putain de copine vient de résonner dans mon couloir !
— Cassie ! la rappelle Lalita avec une pointe d'inquiétude dans la voix en s'approchant dangereusement.
— Oui, j'arrive Lali' ! s'écrit microbe en s'arrangeant.
Cassie plaque ses cheveux et lisse son t-shirt, alors que je peine à reprendre ma respiration et que je sens mes lèvres gonflées à cause de notre baiser passionné.
Mais c'est définitivement terminé quand elle ouvre la porte précipitamment, sans un regard de plus pour moi, et se dépêche de sortir de ma chambre, me laissant seul avec mes couilles et la queue dure comme du béton.
Quelle chieuse cette Lalita, putaiiin !
Mes bras se croisent contre ma porte dans un soupir douloureux, et je regarde le sol en sentant ma énième défaite face à cette grande idiote.
— Désolée, j'entends dire Cassie à Lalita, il a dit d'accord pour nous raccompagner.
— Tu es toute rouge, remarque Lalita.
— Hein ? N-non ! Pas du tout !
Elles descendent les escaliers en débattant des rougeurs de Cassie, et je reste seul, devant prendre un moment pour calmer la tempête à l'intérieur de moi. Ma queue est encore un peu dure. Et la douleur que je vais avoir dans les couilles aujourd'hui m'agace déjà.
Je prends une grande inspiration et finis enfin par quitter le dressing.
Je prends mon téléphone sur mes draps, j'en en profite pour faire mon lit.
Ça ne m'aide pas à penser à autre chose qu'elle.
Mes pas me mènent hors de ma chambre.
Je descends dans le salon.
Il me faut cinq secondes pour réaliser le tableau que j'ai devant moi.
Cassie et Lalita sont assise, enveloppées dans leur couverture, Lalita tient la télécommande dans sa main, et a mis Channel 5, pour regarder Peppa Pig.
En me dirigeant vers ma cuisine, cette grande conne a en plus l'audace de me toiser dans ma maison, je lui rends son regard jusqu'à ce qu'elle le détourne en première.
Quand elle le fait, je pose les yeux sur Cassie, qui me fixe en rougissant. Je ne résiste pas au petit sourire en coin qui courbe le coin de mes lèvres en repensant à ce qui vient de se passer dans mon dressing.
Putain... le jour où on le fait, je ne l'oublierais jamais.
En secouant légèrement la tête, j'entre dans la cuisine, pour me faire un café. Je place la tasse sous le jet, insère la capsule avant de la démarrer la machine.
Les voix de Peppa Pig sont perturbées par des chuchotements discrets qui ne me permettent pas de distinguer clairement ce qu'elles se disent.
Mais de toute façon, Cassie se tourne vers moi, et elle m'articule d'une voix basse qui m'oblige à lire sur ses lèvres :
— Tu peux faire un autre café ?
Microbe m'indique le chiffre deux en me montrant ses deux doigts levés.
Je sais pertinemment que Cassie ne boit pas de café, donc celui-là est clairement destiné à l'autre.
Le premier café se termine, je le mets sur le côté et prépare le second.
Si ce n'était pas l'amour de ma vie qui me l'avait demandé, je ne l'aurais jamais fait.
Pendant que le second café se fait, je prends du pain, et tartine du kaçkavall dessus. Un fromage blanc albanais.
J'en fais trois, et en dispose deux sur une assiette à côté de sa tasse de café et un sachet de sucre à côté, je verse de l'eau dans un verre, avant de me diriger dans mon salon.
Je dépose la tasse près de Lalita, et elle me regarde étonnée. Elle semble surprise que j'aie deviné son envie de café.
Cassie m'articule un « merci » discret avec un joli sourire qui me donne juste envie de foutre l'autre à la porte et de continuer là où on s'est arrêté tout à l'heure.
— Mange, j'ordonne à Cassie qui hoche la tête en réponse.
Je retourne dans la cuisine pour manger ma tartine.
Et là, je me réalise que j'ai vraiment le son de Peppa Pig en fond dans ma putain de baraque.
La nourriture stagne dans ma bouche, et je fixe un point sur mon îlot central.
J'ai vraiment Peppa Pig en fond dans ma maison ?
Non seulement, avant Cassie, aucune femme n'avait jamais mis les pieds ici.
Mais en plus, pour elle, je suis même prêt à supporter ce putain de cochon défiler sur mon écran plat.
Tu vas me tuer, microbe...
Je termine de manger ma tartine et mon café, et remarque que Cassie et Lalita ont également terminé de manger et boire. Je prends un cure-dent et le place entre mes lèvres.
— Prenez vos chaussures, vos manteaux, on y va.
Lalita éteint la télévision sans attendre, et les filles se lèvent rapidement.
Cassie tente de plier la couverture, mais je lui fais signe de la main de laisser tomber.
Elle la plie quand même avant de suivre Lalita vers l'entrée pour prendre leur chaussure et leur manteau.
Je nous guide à l'étage pour rejoindre mon garage.
Cassie et Lalita marchent bras dessus, bras dessous.
Je prends ma veste en cuir et mes clés pour déverrouiller la voiture.
Quand je vois que Cassie choisit de s'installer à l'arrière avec sa copine, je lui lance un regard interloqué. Elle me rend mon regard en ne comprenant visiblement pas. Et je dois me faire violence pour ne pas faire un doigt d'honneur à Lalita qui referme sa portière en me toisant comme à son habitude.
Chieuse de merde.
À mon tour, je m'installe derrière le volant, et démarre la voiture, en ayant l'impression d'être un putain d'Uber.
Mon amoureuse devrait être à côté de moi, putain.
Mais elle a posé sa tête sur l'épaule de Lalita et ne lui lâche pas sa main.
— Ton adresse, demandé-je à Lalita, le doigt suspendu devant la console tactile, en la toisant à travers le rétroviseur intérieur.
— 24 Dallinger Road, répond-elle sans détour.
Je tapote l'adresse sur mon GPS et lance :
— Cassie, je te raccompagne d'abord.
Cassie et Lalita échangent un regard perplexe face à ma décision de ramener Cassie en premier.
— Et pourquoi ça ? me demande Lalita, l'air sceptique.
— Ça me fait faire un détour, et je bosse, répliqué-je, gardant mon ton neutre.
— Ton job c'est pas juste de protéger Cassie ?
Je sens la provocation dans sa voix, j'enlève le cure-dent pincé entre mes lèvres en ne lâchant pas du regard à travers le rétroviseur.
— Ça, et j'ai d'autres diplômes, tu veux les voir ?
— Non, sans façon, je m'en tape, rétorque-t-elle sèchement.
— Voilà, c'est bien ce que je pensais, donc ferme-la.
— Cal' ! me réprimande Cassie les yeux un peu écarquillés.
J'entends le « pendejo » à peine audible de Lalita, et je me retiens de ne pas insulter tout son arbre généalogique.
Cassie nous observe tous les deux, son regard se veut sévère, mais franchement, tout ce que ça me provoque, c'est des envies évidentes de devenir le père de ses enfants dès le matin.
Je sors de mon garage, et nous nous engageons doucement sur la route.
Le trajet se déroule dans le calme, même si parfois, j'entends leur petite voix échanger quelques banalités.
Après une trentaine de minutes, nous arrivons devant chez Cassie.
Je m'arrête devant son portail, et tout de suite, Cassie se tourne vers Lalita.
Je vois ses yeux briller un peu, elle fait la moue, et elle plonge dans ses bras. Elles se serrent pendant de longues secondes, et je me demande bien ce qui a pu se passer cette nuit pour que ça leur provoque autant d'émotion.
— Tu peux m'envoyer un message quand tu es rentrée ? demande Cassie avec une d'inquiétude dans la voix.
Lalita hoche la tête.
— Merci, lui répond-elle en se décollant doucement de sa copine. Je t'aime, Lali'.
— Je t'aime aussi, chula.
Cassie rougit, avant de se tourner vers moi, un sourire timide aux lèvres :
— Merci de m'avoir déposée, est-ce que tu me diras quand tu rentres ?
Sa voix est douce, presque hésitante.
Je veux manger son cœur, merde !
Je lui offre un petit sourire en coin et hoche la tête.
— Super, alors à demain, ajoute-t-elle.
— À demain, zemër, je lui réponds doucement.
Elle hoche la tête, lance un dernier regard compatissant à Lalita avant d'ouvrir sa portière et nous quitter.
Un silence tombe dans la voiture, et je la regarde attentivement se diriger vers sa porte. Elle longe son allée et rentre chez elle.
Ce n'est que lorsqu'elle a refermé sa porte d'entrée que je démarre.
J'ai reposé Cassie en premier pour une seule raison.
Il s'écoule à peine une minute avant que je ne brise le silence :
— J'ai besoin de savoir si Taylor s'approche de Cassie quand vous êtes en cours, commencé-je en faisant jongler mon regard de la route Lalita via le rétroviseur.
Elle semble surprise par ma question, ses yeux se relèvent brusquement pour croiser mon regard dans le miroir.
— Parfois... mais après Halloween, il n'a plus rien fait, me répond-elle avec cette distance dans sa voix un peu cassée.
— Qu'est-ce qu'il faisait avant Halloween ?
— Il voulait lui faire une réputation avec ses sales potes de merde, me lâche-t-elle avec un dégoût évident.
J'enregistre l'information.
Ma BMW continue de serpenter les rues matinales, et la question me démange trop alors je lui demande :
— Qu'est-ce que vous faisiez sur ce pont ?
Lalita détourne rapidement le regard, visiblement mal à l'aise avec la direction que prend la conversation.
— Ça ne te regarde pas, me rétorque-t-elle sèchement.
Je vais garder mon calme pour le moment.
— À partir du moment où ça implique Cassie, ça me regarde, répliqué-je catégorique.
— T'es pas son père à ce que je sache, donc non ça ne te regarde pas, insiste-t-elle, un peu plus agressive.
Je garderai mon calme plus-tard , finalement.
— Si ça me chante, j'serais son père et tout qu'elle voudra que je sois, tant que ça me permet de la protéger, je réponds-je fermement. À partir du moment où vous venez sonner chez moi à une heure de matin, ça me regarde, et j'ai tous les droits de te demander de me chanter sans fausses notes les raisons de cette putain de sortie nocturne. Tu m'as dit que c'était de ta faute, donc j'aimerais bien comprendre ce qui l'a poussée à faire ça alors qu'elle sait pertinemment que ce n'est pas prudent !
Mon ton est monté légèrement. Elle commence sérieusement à tendre mes nerfs.
Je la toise en faisant toujours jongler mon regard de la route à elle.
Lalita ouvre la bouche, pour me répondre quelque chose, mais elle se ravise et laisse son regard se perdre à travers la fenêtre.
Sa face me donne l'impression qu'elle est de plus en plus mal à l'aise.
En tournant dans une rue, je ne peux pas en rester là.
— Écoute, tu l'as vraiment mise en danger ce soir, et ça me démange de savoir ce qui avait de si important à faire à minuit, je lui dis en tentant de garder une voix plus contrôlée.
Elle pivote lentement son regard vers moi, ses yeux scrutent les miens à travers le rétroviseur. J'ai bien l'impression qu'elle tente de me percer à jour.
— À quel point... tu tiens à elle ?
Je n'avais pas anticipé sa question.
Un peu prit de court, ça me fait froncer les sourcils.
— Pourquoi ?
— Pour te placer sur mon baromètre spécial enfoiré. Je veux savoir à quel point t'en es un, me réplique-t-elle avec sérieux.
— Tu peux me mettre à l'extrémité de ton baromètre alors, et même faire exploser le compteur, parce que je suis le plus grand connard de ta vie. Mais en ce qui concerne Cassie, je ne joue pas, déclaré-je sur un ton dur.
— Ça, rien ne me le garantit, me lâche-t-elle sèchement.
— Heureusement que je m'en bats les couilles de ton avis.
— Tu peux t'en battre les couilles autant que tu veux, moi aussi je ne rigole pas quand il s'agit d'elle, alors je préfère vraiment te prévenir que si tu lui brises le cœur, tu vas me connaître, me menace-t-elle sans vergogne.
La détermination dans ses paroles force presque mon respect.
Je la fixe à travers le rétroviseur.
Je sais ce qu'elle a fait pour Cassie ; et franchement, j'y crois quand elle me dit qu'elle me ferait du mal pour protéger son amie.
Même si je sais pertinemment qu'elle ne fera jamais le poids contre moi, cette fille est un pilier pour Cassie.
Mon cerveau pèse le pour et contre, je décide de la laisser défendre microbe. Elle lui est loyale, elle la rend heureuse, je n'en demande pas plus.
Pour réponse, je laisse mon regard se perdre sur la route.
Mais Lalita ne lâche pas le morceau :
— Donc ? Tu tiens à elle ? Ou tu veux juste la baiser ?
Je marque une pause.
Je pourrais la faire taire avec deux trois paroles bien placées, mais sa gueule déprimée ne me donne pas envie de l'enfoncer encore plus.
Même si je ne lui dois aucun compte et que ce que je ressens pour Cassie ne la regarde pas, je sacrifie encore une occasion de la remettre à sa place juste parce que je me dis que c'est une personne que microbe admire.
Et la protéger implique aussi de ne pas avoir cette grande conne en ennemie.
Lalita continue de me fixer en attendant ma réponse alors que je tourne dans une rue, je lui avoue d'une voix calme :
— Je tiens à elle.
Lalita lève un peu les sourcils, visiblement surprise par ma réponse sincère.
Il est clair qu'elle ne s'attendait pas à ce que je le reconnaisse.
Elle ouvre la bouche, cherchant ses mots, puis elle me dit doucement :
— Elle aussi... elle tient à toi... Alors, fais attention à son cœur, il est fragile et déjà abîmé.
Je sais...
— Ne t'inquiète pas pour son cœur, et Cassie est forte.
Lalita semble encore prise de court par ma réponse.
Son visage passe par plusieurs émotions, mais c'est l'étonnement qui l'emporte encore.
— Oui, c'est vrai..., murmure-t-elle finalement.
Pendant quelques minutes, sa réponse jette un silence dans le véhicule. Je roule sans un mot, jusqu'à ce que la question qui m'obsède décide de revenir me hanter.
De nouveau je la relance :
— Qu'est-ce que vous faisiez sur ce pont ?
Lalita détourne le regarde vers la route, son visage est stoïque, sans trop d'émotions. Elle semble s'être perdue dans ses pensées, et au bout d'un moment, elle serre la mâchoire, comme si elle revivait des scènes qui la stressaient.
Ce silence s'étire, il devient lourd et pesant, avant qu'elle me réponde finalement :
— Je voulais mourir.
J'avoue que c'est moi qui hausse les sourcils et relève brusquement les yeux vers le rétroviseur pour chercher son regard.
Sa réponse m'a pris par surprise comme un coup de poing en plein visage. J'aurais pensé à tout, sauf à ça. Et le désespoir dans sa voix résonne dans cette voiture.
Lalita ne me regarde pas, mais des larmes silencieuses coulent sur ses joues, on aurait dit qu'elle ne se rend même pas compte qu'elle pleure.
Je me reprends et je lui demande :
— Pourquoi ?
Cette fois-ci, elle me lance un regard fugace, ses yeux humides et tristes me fixent pendant de longues secondes avant qu'elle ne détourne à nouveau les yeux vers la route :
— Pourquoi ça t'intéresse ? me renvoie-t-elle sur la défensive.
— Parce que Cassie est triste quand tu l'es. Donc plus j'en sais sur toi, mieux je peux l'aider.
Ma réponse semble la troubler et surtout la faire réfléchir. Je vois une myriade d'émotions l'accabler, elle est confuse, surprise, perdue, hésitante.
Elle cligne des yeux, une larme perle le long de sa joue. Je ne peux pas m'empêcher de penser que ça a l'air d'être la guerre dans son crâne, et que son visage, d'ordinaire si expressif, est maintenant une toile de doutes et de questionnements.
Ses yeux scannent mon visage comme si elle tentait de me percer à jour, trouver quelque chose :
— Tu es... amoureux d'elle... à ce point ? me demande-t-elle d'une voix cuiseuse et sceptique.
Encore une fois.
Je suis pris de court par sa question.
Une chaleur me submerge en repensant à tout ce que Cassie me fait sentir. À chaque fois que je pense à elle, tout le reste me semble tellement secondaire.
Elle me manque déjà, et sur le coup, j'ai envie de faire demi-tour pour la rejoindre.
Si seulement ce n'était que de l'amour.
C'est pire que ça.
Elle possède mon âme entre ses doigts. Et je la lui donnerais si elle en avait besoin. Je la laisserais me détruire si ça lui permettait de se reconstruire.
Ses orages gris sont venus saccager mon destin, et en passant, elle a tout transformé sur mon chemin. Je ne pourrais plus jamais revenir en arrière.
Je ne lui réponds pas cette fois-ci. Mais mon cœur tambourine si violemment dans ma cage thoracique que j'ai l'impression qu'il va sortir.
— À quoi tu serais prêt à faire pour elle ? poursuit-elle plus qu'intriguée, j'ai même l'impression que son expression se radoucit légèrement.
— Elle te le dira quand je ferai ce qu'elle me demandera, je réplique.
Lalita lève les sourcils :
— Tu pourrais faire n'importe quoi pour elle..., murmure-t-elle plus pour elle-même que pour moi.
Elle se prend un moment pour réfléchir à ma réponse.
Puis elle revient à la charge en me disant :
— C'est toi qui as tabassé Taylor... ?
Je fronce les sourcils :
— Qui te l'a dit ?
— Cherry, me répond-elle.
Cassie a certainement dû lui dire la dernière fois que je suis venue la chercher.
— C'était moi, avoué-je.
— Pourquoi ?
— Il s'est approché d'elle.
Son regard scrutateur ne me lâche pas :
— Tu l'as presque tué...
Je ne réponds rien, mais dans le silence qui suit, je me mets à penser que ce jour-là, j'étais prêt à aller encore plus loin si Cassie n'était pas restée.
Je lui aurais fait monter chaque marche d'Oxford, jusqu'au toit, et je l'aurais laissé son corps s'écraser plusieurs mètres plus bas, sans le moindre remords.
Avec toute l'ironie du monde, c'est Cassie qui a sauvé la vie de Taylor ce jeudi soir-là.
Nous approchons du quartier de Lalita.
Je la vois chercher mon regard à travers le rétroviseur, et pour la seconde fois depuis que j'ai côtoyé cette femme, je vois de la terreur dans ses yeux.
La même que j'avais aperçu à l'hôpital quand Cassie était tombé d'épuisement parce qu'elle avait cessé de s'alimenter.
Lalita semble hésiter, ses lèvres tremblent, mais finalement, elle me confie doucement :
— Il y a un homme...
Je fronce légèrement les sourcils en restant accroché à ses mots. Elle marque une pause pour inspirer profondément et souffler, comme si ce qu'elle s'apprêtait à dire portait le poids de l'univers.
— Un homme m'a fait du mal... Quand j'avais huit ans. Il va revenir chez moi, et ça m'a paru insurmontable, c'est pour ça que je voulais mourir.
J'écoute, mes yeux se plissent légèrement.
Je comprends immédiatement ce qu'elle est en train de m'avouer.
Et étrangement, la pièce manquante du puzzle semble s'emboîter avec la rage et le mystère qui entoure cette femme.
Elle s'est fait violer, et c'est pour cette raison qu'elle est autant terrorisé par les hommes.
— Cassie m'a sauvé la vie hier soir. Et si elle n'était pas venue, je ne serais pas dans cette voiture aujourd'hui.
Je tourne dans la rue, sa maison est à un juste un kilomètre.
À cet instant, je n'ai plus qu'une seule question :
— L'homme, c'est qui ? lui demandé-je froidement.
— Mon oncle..., murmure-t-elle.
— Un nom ?
— Arturo Perez...
Je ne dis rien, mais mon regard s'assombrit.
Ghost prend le dessus, et évalue déjà toutes les options.
Et en regardant à nouveau Lalita, elle comprend mon silence comme une invitation à continuer.
— Il arrive... dans deux jours, du Mexique... Pour des affaires. Et je ne veux pas qu'il s'approche de ma petite sœur... Je ne veux pas qu'il lui fasse du mal.
Je continue de conduire, parcourant les derniers mètres en attendant qu'elle me liste toutes les informations dont j'ai besoin.
— C'est le PDG de « Paso del Jaguar », une grande firme de téquila mexicaine... j'aimerais...
Son hésitation est palpable, sauf qu'avant même qu'elle ne l'articule, je sais déjà ce qu'elle va me demander.
— Je voudrais qu'il n'arrive jamais à destination...
J'inspire doucement.
Mon regard croise celui de Lalita à travers le rétroviseur.
On s'est compris.
Et dans ses iris noirs, je réalise à quel point... il y a une part d'elle qui est profondément sinistre et sombre.
Bien plus que je n'aurais pu l'imaginer.
Son regard est intense, et je suis sûre que la nuit où elle a protégé Cassie, elle aurait pu lui donner sa vie ou tuer Taylor pour elle, sans hésiter.
Et je sens aussi que si ce n'est pas moi qui fais en sorte que son oncle n'arrive jamais, elle le fera.
Une sorte de pacte glacial s'inscrit entre nous dans cet habitacle.
Étrangement, sa rage me rappelle un peu la mienne, et je la comprends.
Elle détourne le regard la première en même temps que je m'arrête devant sa maison.
Dans un silence de mort, elle déboucle sa ceinture, et glisse vers la portière.
Sa main se pose sur la poignée, mais juste avant de sortir, elle se tourne vers moi une dernière fois :
— Cassie ne doit jamais le savoir...
L'avertissement est très clair dans sa voix.
Je hoche la tête en signe d'accord, elle fait de même, j'ai même l'impression de voir un peu de reconnaissance dans ses yeux.
— Écoute... Callahan... Je te la confie, mais... prends soin d'elle, s'il te plaît. Cette fille est une guérison pour les autres quand elle est heureuse, ajoute-t-elle d'une voix chargée d'émotion.
Ses yeux luisent de larmes qui menacent de tomber.
Encore une fois, j'acquiesce doucement.
Tout ce que je veux avec mon amour, c'est l'aimer en paix.
Après ça, Lalita sort de la voiture et claque la portière derrière elle.
Un peu perturbé par la conversation, j'observe un moment sa silhouette s'éloigner, puis je démarre et me gare à quelques pâtés maison plus loin.
Je mets le frein à main, sors mon téléphone et cherche la conversation avec Wayne, sans attendre je tape rapidement mon message :
« Trouve-moi tout ce que tu peux sur un passager du nom d'Arturo Perez, il va prendre un vol reliant le Mexique pour Londres, dans deux jours. C'est le PDG de Paso del Jaguar. »
J'attends quelques secondes et constate qu'il a lu mon message.
En patientant, j'ai l'impression d'être enveloppé par Ghost.
Mon esprit synthétise les informations de la mission.
Arturo Perez, est une cible de taille.
Il est riche et puissant, s'il passe par un vol international il ne fera pas exception à la règle et sera très certainement accompagné d'une escorte 24 heures sur 24.
Il faut que je trouve la faille pour approcher l'objectif.
Je suis coupé dans mes réflexions par la vibration de mon téléphone.
En quelques minutes, Wayne m'a rassemblé tous les détails dont j'avais besoin : le numéro du vol, la réservation du taxi qui doit emmener Arturo dans un hôtel prisé de Londres dans lequel il va passer deux nuits.
« Wayne : Est-ce que tout va bien ? »
Je change de conversation, et retourne sur celle de microbe en tapant rapidement ma réponse :
« Je vais rentrer, microbe. »
Je laisse mon téléphone sur le siège passager.
Mon esprit coordonne déjà un scénario.
Je redémarre doucement la voiture, les roues tournent lentement sur le bitume.
J'ai deux jours pour me préparer.
L'hôtel sera ma faille.
Je sais déjà comment je vais mettre fin à ses jours.
✤
Dimanche.
Le crépuscule enveloppe le grand manoir de ma famille.
Le jardin de mon père est nu à cause de l'hiver, mais bientôt, ses cosmos noirs fleuriront de nouveau.
En pénétrant la propriété, je place instinctivement ma paume sur mon cœur en levant les yeux sur le blason de ma famille.
— Callahan !
Je tourne rapidement la tête vers la source du bruit.
C'est Gjallim Dervishi, le petit frère d'Hira, qui m'accueille avec un large sourire. Ses grands yeux bleus me fixent avec admiration comme à chaque fois qu'il me voit. Je m'approche de lui, un petit sourire en coin.
— Gjallim, comment ça va ?
— Moi, ça va super ! C'est génial de te voir, Callahan ! Je pense qu'on va bien s'amuser ce soir, hein ? me répond-il avec enthousiasme.
Je ne pense même pas avoir été en mesure de cacher le sourire crispé qui a tiré mes traits. Ça fait plus d'un mois que je repousse tous les dimanches ce rendez-vous.
— Restons pas là, l'invité-je pour rejoindre ma famille.
Tandis que Gjallim me liste tout ce que sa mère et sa sœur ont préparé pour le dîner de ce soir. Je nous guide plus profondément dans le manoir.
D'ici, j'entends déjà la voix de plusieurs hommes, parmi elles, je reconnais le rire de mon père et celui de Jorik, le père d'Hira.
Sa joie ne présage rien de bon. Il adore ce qui se passe putain...
Mon inquiétude monte d'un cran, et mon entrée dans le grand salon où les hommes de ma famille et celle des Dervishi sont déjà rassemblés ne fait qu'ajouter à ma tension.
Je repère directement mon grand-père, Adrian, assit tel un roi sur un fauteuil, un cigare à la main. Il me fixe immédiatement.
Assis sur le canapé adjacent, mon père, Antonio, est accompagné d'un de mes oncles, Bor. C'est le père de Dasar, Keler, et Rinesa.
Sur le canapé d'en face, Jorik Dervishi se laisse tenter par des faras (graine de tourne sol) disposés sur la table basse qui les sépare.
— Et c'est là que j'ai réalisé que j'avais complètement oublié le nom de notre hôte ! lance mon oncle Bor en ricanant. Heureusement que Griselda était là pour couvrir mes arrières. J'aurais eu la honte de ma vie autrement !
Mis à part mon grand-père, les rires fusent.
Mon oncle a toujours été le plus exubérant de la famille, il se prend pour une jeune et persiste à nous faire croire qu'il a quarante-cinq ans alors que ça fait des années qu'il a dépassé la cinquantaine.
Le truc c'est que les échanges entre mon père, mon oncle, et Jorik sont enthousiastes et complices. En approchant d'eux, mon cœur se serre violemment, j'ai l'impression qu'ils ont déjà signé le contrat de mariage entre Hira et moi.
Alors que Gjallim s'assoit brutalement à côté de son père qui le toise pour lui rappeler qu'il doit bien se comporter ici. J'avance, avec le son bas de la télévision qui diffuse le journal de 20 h sur BBC One.
— Callahan ! s'exclame mon oncle, Bor en m'apercevant, il se lève en ouvrant grand les bras de manière théâtrale. Mon garçon, enfin tu nous rejoins !
Je m'avance avec un sourire forcé qui étire mes lèvres.
Pourtant, Bor est mon oncle préféré, mais mon cœur n'est pas à la fête ce soir.
En me serrant la main, il me tire vers lui dans une étreinte chaleureuse. Puis il se décolle de moi et me bombarde question sur ma santé, et mes activités.
Mon père se lève à son tour, et me tapote le bras pour me saluer avec un regard fier, mais à la fois réprobateur. Sans un mot, je l'entends me dire : tu es en retard.
J'ignore ses réprimandes silencieuses, et me dirige d'abord vers mon grand-père pour lui serrer fermement la main, en signe de respect. Il me demande comment je vais, je lui réponds sans plus de discussion, avant de saluer Jorik qui s'est levé pour me dire saluer à son tour avec une petite tape amicale sur le dos.
Mon père nous invite à nous asseoir de nouveau, je me place sur la place libre à côté de mon père en empoignant quelques faras. Je constate le verre de raki (alcool) de mon grand-père, et quelques verres de çaj, disposés sur la table basse.
Bor reprend là où il avait laissé et raconte son anecdote hilarante sur un malentendu lors de son dernier voyage en Albanie.
Je ne me joins pas vraiment à la conversation animée. Gjallim s'assoit à côté de moi, et prend quelques faras qu'il croque en même temps que moi.
Je suis incapable de m'immerger dans l'ambiance, mon esprit est accaparé par mes pensées pour Cassie... Et ce que je suis en train de faire dans son dos.
Mon regard se perd dans le vide, au point où je me focalise sur le son des informations.
— ... dans d'autres nouvelles, un événement tragique a secoué la communauté internationale des affaires aujourd'hui, annonce le présentateur de BBC One. Arturo Perez, PDG de la célèbre firme de téquila mexicaine 'Paso del Jaguar', a été retrouvé mort ce matin.
Je croque un fara en ayant ces images sordides qui se bousculent dans ma tête.
— ...selon les premiers rapports de la police métropolitaine, M. Perez aurait été découvert pendu dans une suite de son hôtel à Londres, dans ce qui semble être un suicide. Les autorités continuent d'enquêter sur les circonstances entourant sa mort...
Mon poing se serre.
C'était nécessaire.
Et si Lalita guérit, Cassie aussi.
Je relève soudainement les yeux en voyant la silhouette d'une femme passer dans la cuisine à quelques mètres devant moi. Séparé par une arche qui mène à la salle à manger, je constate que les femmes s'activent et rassemble des plats. Ce n'est que maintenant que les odeurs de byrek et de tave kosi, s'imprègnent dans mes narines.
Putain...
J'essaye de contenir mon stress en grignotant quelques graines de tournesol. Une nouvelle fois, la silhouette féminine passe. Vêtu d'une longue robe en satin écru, je constate de longs cheveux noirs descendre le long de son dos, et deux iris bleus qui cherche mon regard.
C'est moi qui regarde autre part en premier.
Fais chier, merde !
Soudain, une nouvelle voix féminine interrompt la conversation.
— Bor, le repas va être servi.
Je relève la tête sur Lisa Caine, la femme de Bor. Âgée d'une quarantaine d'années, son style est toujours aussi impeccable et soigné. Elle me sourit avec tendresse en me voyant, et je lui réponds avec politesse en lui demandant si elle va bien, ce à quoi elle me répond positivement.
— Messieurs, allons dîner, réplique mon oncle en se levant.
On se lève tous simultanément. Je traîne un peu en redoutant le moment où je vais devoir passer la soirée en compagnie d'Hira et toute sa famille.
— T'es pas très bavard, me murmure mon père qui marche à côté de moi. Essaye de parler avec Jorik et Gjallim.
— Jorik me connaît très bien, répliqué-je.
— Ne fait pas ton chieur, Cal'.
Nous dépassons l'arche qui mène à la salle à manger où le mobilier est richement orné de couverts, et des plats ont été disposés sur la table.
L'atmosphère est chaleureuse et conviviale. Mais moi je n'y arrive pas.
En entrant dans la pièce, je vois du coin de l'œil la silhouette d'Hira.
Brutalement, je suis frappé par le poids de l'Ordre.
Je me sens déchiré par mes obligations et ma loyauté, et la puissance des sentiments qui pèsent encore plus lourd dans la balance.
Tandis que les hommes prennent place derrière les chaises, les salutations commencent, les femmes viennent me dire bonjour. La première à m'approcher est Griselda, la vieille qui est toujours conviée lors des mariages arrangés. Elle me fait la bise, son rire communicatif résonne dans la salle.
— Ah, Callahan, tu vas voir, Hira est parfaite pour toi ? me chuchote-t-elle en riant.
Sa pointe d'humour me donne envie de tout foutre en l'air.
Je ne m'attarde même pas sur sa réflexion, mon esprit est avec microbe.
Je ne veux pas imaginer ce que ça lui provoquerait de me savoir là.
Je suis interrompu dans mes pensées par Nisjeta, la mère d'Hira.
— Comment vas-tu, me demande-t-elle en me tendant ses joues pour que je lui fasse la bise.
Je lui réponds avec respect en partageant une brève accolade.
Je vais mal.
Et c'est pire encore quand sa mère se pousse légèrement pour me laisser saluer sa fille.
Elle reste à quelques pas de moi, je n'opère aucune approche. Pour seule réponse, elle me sourit d'une façon crispée, qui me montre qu'elle est anxieuse. Je hoche simplement, alors que Griselda nous pousse vers nos chaises pour que nous nous asseyions.
Je glisse sur ma chaise, Hira s'installe juste à ma gauche. Les conversations et les rires animent déjà la table.
La détresse émotionnelle que je ressens me tord l'estomac.
L'Ordre m'enchaîne à cette situation désespérante. Je me sens piégé. Mon cœur bat lourdement avec le désir de fuir loin d'ici. Ce mariage arrangé me pèse plus que je ne l'aurais anticipé.
En fait, il m'effraie. Parce que vu la tournure que prennent les choses, si je n'interviens pas vite, je vais me retrouver bloqué dans cette situation, et je ne pourrais pas sans Cassie.
Alors qu'une gouvernante me sert, mon regard se porte vers mon grand-père. Son regard détaché me fixe. Je sais que je ferais mieux de faire un peu semblant de me joindre aux festivités, mais il sait très bien que faire semblant ce n'est pas vraiment mon truc.
Mon père discute vivement avec Jorik, Bor s'extasie avec eux. Parfois, Lisa et Nisjeta participent à la conversation, alors qu'Hira et Griselda s'échangent quelques paroles chuchotées que je n'entends pas clairement.
Mais finalement, sa voix se démarque doucement parmi les rires rauques de mon père et mon oncle :
— Tu as goûté le byrek ?
Je baisse les yeux sur elle.
Quand ses yeux emplis d'espoir trouvent les miens, je sais déjà que je vais lui briser le cœur.
— Pas encore, répliqué-je sans plus d'enthousiasme.
— Ma mère m'a partagé quelques-unes de ses astuces, je pense que je l'ai bien réussi, me dit-elle doucement pour essayer de détendre l'atmosphère.
Je hoche la tête, ne sachant pas quoi lui répondre.
La seule cuisine d'une femme qui m'intéresse, c'est celle de microbe.
Et à ce moment, j'aurais préféré m'empiffrer de riz aux champignons ou ses yaourts de bourgeoise vegan, plutôt que de manger ce qu'Hira a préparé pour cette soirée.
Je mange pour ne pas attirer l'attention sur moi, mais mon regard balaye la pièce et les discussions plutôt que de se poser sur elle.
Je sens soudainement une tape sur mon bras, et me tourne sur ma droite. Mon regard ouvre grands les yeux, son regard perçant et sérieux me réprimande, et m'invite à faire la conversation avec Hira.
Mes responsabilités me font chier aujourd'hui.
Une bourrasque de colère se réveille en moi, elle me serre le ventre, et sur le coup, assit à côté de cette femme, j'ai juste envie de balayer d'un revers d'une main tout ce pour quoi j'ai prêté allégeance depuis que j'ai douze ans. Effacer ces trois dictons inscrits sur ma peau, pour graver les lettres qui définissent Cassie Sophia.
J'ignore mon père. Je subis ce dîner, je ne subirais pas Hira.
La soirée avance avec une telle lenteur, que je ne compte plus le nombre de fois où mon regard s'est porté sur cette horloge murale qui a été bon nombre de mes cauchemars plus jeunes.
Je me sens coupable, chaque bouchée me donne envie de la vomir. Mais je me force.
Il va falloir que j'en parle.
Mais elle ne fait pas partie de l'Ordre.
Mais si je ne dis rien, ce mariage avec Hira aura lieu que je le veuille ou non.
Sauf que parler, c'est risquer la vie de Cassie...
Si j'avoue mes sentiments, l'Ordre pourrait la considérer comme une menace, étant donné qu'ils considéreront qu'elle me corrompt. Et comme elle ne représente aucun intérêt pour la famille, ils jugeront que si je ne l'abandonne pas, alors elle devra mourir pour que je revienne sur le droit chemin.
Le repas commence à arriver à sa fin. Les baklavas et le çaj sont finalement placés sur la table.
— Callahan, tu dois absolument essayer les baklavas que Nisjeta a préparés. C'est le meilleur que tu puisses trouver hors de l'Albanie ! s'extasie Jorik en vantant la cuisine de sa femme.
J'ai une telle anxiété, que j'avale mon thé avant d'hocher la tête avec un sourire crispé tout en me servant un de ses desserts sucrés. Je goûte la pâtisserie, les saveurs de miel et la texture croustillante des noix me confirme que c'est effectivement un des meilleurs que j'ai mangés.
Après ceux de ma mère.
Les conversations se poursuivent, et alors que je mâche je vois du coin de l'œil qu'Hira se lève discrètement après avoir échangé quelques mots à l'oreille avec Griselda. Elle quitte la table, je termine mon baklava, en même temps qu'une gouvernante me remplit mon verre de thé, je ne prends pas de sucre et porte la boisson brûlante à mes lèvres.
Mais moins d'une minute plus tard, je sens qu'on tapote mon bras.
Griselda s'approche discrètement de moi, et me chuchote :
— Callahan, prends un moment pour parler avec Hira. Elle attend sur le balcon. Ne soyez pas long.
C'est le pire moment de la soirée...
Après l'invitation de Griselda, je prends un moment pour moi-même en inspirant profondément pour me calmer.
Puis, d'un geste presque mécanique, je saisis mon verre de çaj, sentant la chaleur du récipient contre ma paume.
Je m'accroche à cette brûlure le temps de traverser la pièce.
Les éclats de rire et les discussions animées autour de la table s'éloignent alors que je me dirige vers le balcon où Hira m'attend.
Chaque pas me paraît plus compliqué que le dernier.
En m'approchant du balcon, la fraîcheur de l'air extérieur me frappe. Je me rends compte que mes angoisses me faisaient mourir de chaud à l'intérieur.
Je passe l'encadrement du balcon, le son de mes pas résonne sur les carreaux en marbre.
Mon visage est une façade de neutralité, mais en réalité, mon cœur tambourine douloureusement dans ma poitrine, rapide et irrégulier.
Hira est appuyée contre la rambarde en pierre. Sa silhouette élancée n'est éclairée que par le doux éclairage du balcon.
Mes yeux trouvent qu'ils l'ont déjà assez détaillé, et alors que je me pose à l'opposé d'elle dans ce balcon, elle se tourne doucement vers moi. Ses yeux azur perçants me fixent avec intensité.
Putain... aucun iris ne me provoque ce que les orages gris-bleu de mon amour me font...
Hira ne reste pas très longtemps accroché à mon regard, elle détourne ses yeux tristes et nostalgique vers l'horizon nocturne avant de rompre le silence :
— Tu n'as pas l'air heureux d'être ici...
Sa voix est basse.
Je prends une profonde inspiration.
Je sens déjà que la conversation s'annonce difficile.
— Tu aurais au moins pu me dire bonsoir, ajoute-t-elle doucement.
Je la regarde simplement.
— Et tu ne portes toujours pas ta Besa e Përjetshme...
Elle tourne la tête vers ma main. Je baisse les yeux sur mon index nu.
La Besa e Përjetshme, est le nom que l'Ordre donne à cette bague de promesse sur laquelle on grave les noms des mariés...
Besa e Përjetshme se traduit littéralement par : la promesse éternelle.
Au sein de l'Ordre, ce concept est profondément ancré dans nos traditions.
Cette bague n'est pas simplement un symbole de mariage ; elle incarne une série de croyances profondes et de préceptes qui insistent sur un engagement absolu et indéfectible entre les époux.
La Besa e Përjetshme répond à trois règles intangibles.
La première est l'union inviolable. L'engagement entre les mariés est sans faille. Une fois que les noms des mariés sont gravés sur la bague, leur union est scellée non seulement aux yeux de la communauté mais on considère aussi que leur destin ne fait plus qu'un. Selon nos croyances, cette union ne peut être brisée par aucune force ici-bas.
La deuxième, c'est la protection mutuelle. Les époux s'engagent à défendre l'intégrité, l'honneur, et la vie l'un de l'autre. Dans notre famille, le mariage n'est pas seulement une union d'amour. C'est un pacte de guerre.
La troisième est le sceau de l'éternité. Nos croyances nous affirment que tant que l'un des époux garde cette bague, leur amour et leur esprit survivront au-delà de la mort physique. Ça sera à vie sur terre, et jusqu'à ce que la mort nous sépare, on se retrouvera l'au-delà.
En dehors du simple bijou de mariage, c'est un talisman d'engagements éternels, et de liens indissolubles.
En d'autres termes, le rhodium une fois donné ne se reprend jamais.
C'est la mort ou le mariage.
— Je l'ai cédé, avoué-je finalement en la regardant droit dans ses yeux.
Hira lève les sourcils de surprise, un vent de panique et d'inquiétude passe sur son visage.
Elle est choquée, clairement prise au dépourvu par ma révélation. Ses lèvres s'entrouvrent mais aucun mot n'en sort.
— Écoute, t'as l'air d'être une gentille fille et je n'ai aucun intérêt à te blesser. Mais qu'on se le dise, les règles de l'Ordre, concernant ce mariage arrangé, elles me passent au-dessus de la tête, j'en ai rien à foutre.
Sa réaction est immédiate, elle regarde autour d'elle, paniquée, pour s'assurer que personne ne nous écoute.
La peur est visible dans ses yeux, un mélange de méfiance et de crainte.
— J'ai déjà quelqu'un, et encore une fois ce n'est pas pour te blesser, mais je sais déjà que jamais, je n'aimerais une femme autant que je l'aime, elle.
Le poids de mes mots semble s'abattre sur nous deux, un silence lourd tombe entre nous.
Hira recule légèrement, comme si elle essayait de mettre de la distance entre la réalité de mes paroles et ses propres espoirs et rêves.
Hira est bouche bée. Mes aveux ne lui brisent pas seulement le cœur ; ils la détruisent de l'intérieur, et ça se voit sur son visage qui se déforme, torturé par mes dires.
Je ne désire pas lui infliger ça, mais cette situation aurait pu être évitée, et elle le sait très bien.
Elle se tourne complètement vers la vue offerte par le balcon.
Lui briser le cœur ne m'enchante pas. Mais c'est nécessaire, pour nous libérer tous les deux des attentes de nos familles. Je réfléchis déjà à ce que je vais dire à mon grand-père et mon père pour imposer Cassie.
Soudainement, des larmes silencieuses glissent le long des joues de Hira.
— Ce n'est pas nous qui décidons de qui nous avons le droit d'aimer..., me dit-elle d'une voix tremblante.
— Je vais au moins essayer, réponds-je fermement.
Elle me fixe, les sourcils froncés, une panique visible dans ses yeux.
— Tu prendrais le risque d'aller à l'encontre du conseil ? Tu te mettrais les exécuteurs à dos ?
— Je prendrais le risque de mourir, oui.
Ses sourcils se haussent encore de surprise. Sa douleur est si visible dans son regard, que ça me met mal à l'aise, moi-même.
— Tu préfères... mourir que de... te marier avec moi, me dit-elle de façon hachée comme si chaque mot lui faisant plus de mal.
— Më fal, Hira, ne le prend pas personnellement. Mais oui, je préfère prouver à cette femme que la mort n'est rien face à son absence.
Elle essaie d'essuyer ses larmes, mais elles reviennent toujours plus abondamment.
— Mais, tu sais... ça pourrait marcher... toi et moi...
— Je ne t'ai encore rien dit, et tu pleures déjà. Ça ne marchera jamais. Et tu le sais.
Hira me regarde désespérée, en cherchant une réponse, une raison quelque chose qui justifierait mon comportement.
Je suis l'héritier de ce trône. Rien n'explique que je ne choisisse pas Hira.
Aux yeux de l'Ordre, elle représenterait la femme idéale.
Mais mon idéal mesure un mètre soixante et un.
Mon idéal pleure en lisant des romances mafia.
Mon idéal est constamment perdu dans son monde. Et pourtant elle me donne l'impression de me construire un univers tout entier.
Mon idéal m'apaise et me donne envie d'être juste Callahan Michael.
Mon idéal s'appelle Cassie Sophia, pas Hira.
— Pourquoi elle ? Pourquoi elle vaut que tu nous mettes autant en danger face à l'Ordre ? Que ton amour pour elle vaille la peine que tu meures en transgressant les commandements de l'Ordre ?
— Parce que quand elle pleure, j'ai envie de la rassurer. Hira, j'ai tout fait pour que tu ne te berces pas d'illusions. Je ne t'ai jamais montré qu'on avait une chance tous les deux et Dieu seul sait à quel point j'aurais pu faire le connard avec toi. Mais j'ai du respect pour votre famille, et ton père, et c'est pour ça que je suis venu ce soir, pour te dire officiellement que mon cœur est déjà pris.
— J'ai compris..., me murmure-t-elle hâtivement comme si l'entendre encore la brisait encore plus.
Hira détourne à nouveau le regard, essayant de composer avec ses émotions.
Le silence entre nous est lourd et difficile, mais vraiment nécessaire.
Hira fixe l'horizon en appuyant ses coudes sur la rambarde, ses paumes plaquées devant sa bouche comme une façon vaine de contenir sa peine.
— J'ai juste pensé... enfin... je me disais que tu n'étais pas obligé de m'aimer... on pourrait juste se respecter... et ça m'irait... je ne te demanderais pas de me dire que tu m'aimes.
Sa suggestion me fait réaliser jusqu'où elle est prête à aller pour honorer sa famille et m'avoir dans sa vie. Je déglutis, et finis par lui dire :
— Il est là le problème. Moi, j'ai envie d'aimer cette fille, et crois-moi, tu n'as pas envie que je te baise le soir en pensant à elle, en prononçant son nom plutôt que le tien. Et tu n'as pas non plus envie de voir ma gueule déprimée et déçue chaque fois que je te regarderais, toi ou nos gosses, en me disant que ça aurait dû être elle et pas toi. Lorsque je ne te répondais pas quand tu me parlais, ou que j'étais froid envers toi, ce n'était pas pour jouer les connards, c'était pour t'éviter les larmes que tu as maintenant. Au sein de l'Ordre, on demande d'abord à la femme si elle veut de ce mariage ou non. Tu nous as mis dans cette situation. Si tu as dit oui quand Griselda t'a demandé si tu voulais de ce mariage, c'est que tu pensais que j'allais suivre ta démarche, mais tu connaissais déjà ma réponse.
Les larmes de Hira tombent maintenant librement. Elle ferme les yeux un instant, comme pour mieux absorber et digérer la douleur aiguë que mes mots lui infligent.
Le spectacle me provoque un léger froid pour sa douleur. Hira ne m'a jamais rien fait, et je sais qu'elle ne mérite pas la peine que je lui cause.
— Trouve quelque chose à dire à ton père, et moi, je m'occupe du mien. Et tout ira pour le mieux. Une fille comme toi peut avoir qui elle veut, dis-je en essayant de mettre fin à la conversation.
— La preuve que non..., murmure-t-elle entre deux sanglots.
Elle reprend sa respiration en essayant de contenir les soubresauts qui secouent son corps.
— J'ai toujours su que tu ne m'aimerais probablement jamais... pourtant nos familles avaient l'air d'avoir décidé pour nous depuis bien longtemps, j'ai pensé que tu aurais fini par apprendre à m'apprécier... Je me disais que je remplissais tous tes critères. Je ne me suis jamais fait remarquer, j'ai appris mon rôle pour me préparer à devenir la femme que tu rêverais d'avoir... et ça n'a pas marché... et je n'aurais pas pu penser que l'entendre me fasse aussi mal.
— Une femme ne devrait jamais réfléchir à cocher des cases pour un homme, répliqué-je sur un ton calme. Celui qui te désirera trouvera en toi des détails qui toi, te paraîtront futiles, mais pourtant, ils seront essentiels à ses yeux. C'est tes petites particularités qui feront écho à ses attentes, non pas parce qu'elles répondent à un idéal, mais parce qu'elles te définissent toi. Tu n'as pas à me correspondre, et tu ne sais pas non plus de quoi je rêve en ce qui concerne ma femme. Sois ton propre idéal, tu trouveras quelqu'un qui te chérira avec toutes tes qualités et tes défauts.
Hira tourne la tête vers moi. En reniflant avec peine. Je vois ses traits s'adoucir légèrement. Elle hoche doucement la tête. Comme si elle me remerciait pour mes mots.
Je ne réagis pas.
— M-mais, tu sais que je ne peux rien faire contre les règles... murmure-t-elle finalement, la voix brisée.
— Moi, je peux essayer. Donc tu as juste à me suivre, ou trouves un autre prétendant, je réponds fermement.
Ses sanglots secouent son torse. On laisse le silence nous envelopper, et tous les deux nous fixons l'horizon.
Au bout de plusieurs minutes, alors que je me fais la réflexion que je ferais mieux de partir, elle essuie ses larmes en tentant de calmer un peu sa peine. Lentement, elle repousse ses longs cheveux noirs derrière ses oreilles.
Le temps de se ressaisir, je bois quelques gorgées de mon çaj qui a refroidi et finalement, elle se tourne vers moi, les yeux encore humides et brillants :
— Alors... comment elle s'appelle ?
— T'as pas besoin de le savoir.
Hira émet un petit rire triste avant de secouer doucement la tête.
— Tu ne peux pas t'empêcher d'être toujours aussi cynique, murmure-t-elle un peu amusée.
Après un silence moins lourd. La petite brise semble emporter un peu sa douleur.
— Est-ce que je la connais ?
— Ça m'étonnerait, rétorqué-je au tac au tac en la fixant.
— Je connais toutes les filles albanaises de l'Ordre en âge de se marier et qui sont dans la liste de tes prétendantes. Donc si je ne la connais pas, c'est qu'elle n'en fait pas partie.
Elle est bien perspicace, celle-là.
Plus maligne que je ne l'avais anticipé.
Néanmoins, je ne réponds pas et avale d'une traite la dernière gorgée de mon çaj.
— Est-ce qu'elle est albanaise ? insiste-t-elle, scrutant mon visage à la recherche d'un indice.
Mon silence lui donne la réponse qu'elle cherche, et je vois une lueur de compréhension, mêlée de douleur traverser ses yeux.
— Wow... elle a vraiment volé ton cœur pour que tu sois prêt à mourir alors qu'elle n'est ni albanaise, ni un membre de l'Ordre. Ça me tue de l'admettre... mais elle en a de la chance cette fille...
Je laisse le silence répondre à ma place. Mon cœur fait néanmoins un bond dans ma poitrine.
Hira est une brave fille, elle est intelligente, elle trouvera quelqu'un qui lui correspondra en un claquement de doigts.
— Je ne sais pas qui c'est, mais je l'aiderai dans son initiation, et je lui apprendrai la langue, me dit-elle avec une générosité qui me surprend.
— Elle n'en aura pas besoin, je réplique d'un ton sec.
Je veux garder Cassie hors de ce monde le plus longtemps possible, si je le peux.
— Je ne sais pas à quoi tu penses avec cette fille, mais le peu que j'ai eu d'elle me dit déjà que tu te berces d'illusions. J'accepte ta décision, mes sentiments ne seront jamais réciproques, mais non seulement je ne te garantis même pas que toi et moi puissions échapper à ce mariage. Quitte à ce que « je me fasse baiser toute ma vie alors que tu penseras à elle. » Mais en plus, si elle ne fait pas partie de l'Ordre que tu le veuilles ou non, tu ne l'auras jamais sans qu'elle se mette à genoux devant Adrian, devant toi et qu'elle prête serment d'être prête à mourir pour notre clan.
Je reste sans voix face à ces mots qu'elle m'a crachés avec un peu de colère.
Hira a totalement raison.
— Tu ne peux pas fuir l'Ordre, et tes chances sont minces pour qu'Adrian et le conseil acceptent un membre comme ça. Donc mieux vaut que tu aies des alliés dans ton combat, parce que c'est mal parti et tu risques de la tuer, elle et toi, ajoute-t-elle avec une intensité qui me fait frissonner.
Hira sait qu'elle dit vrai.
Sa franchise me met une claque. J'ai l'impression de revenir sur terre et de me rappeler de la réalité cruelle que représentent les règles de notre monde.
Et nos préceptes passent avant nos désirs personnels.
— Je ne dirai rien à personne... mais j'avoue être déçue de ton manque de réalisme. Au revoir, Callahan.
Sans attendre, elle quitte le balcon, me laissant seul dans ce silence de mort.
Mon cœur se serre alors que mes yeux se perdent sur les résidus de thé au fond de mon verre. J'ai presque envie qu'ils me soufflent mon avenir, et qu'il me compte une histoire ou tout ce que j'ai imaginé se réalise.
Mais sa remarque me frappe.
J'ai manqué de réalisme...
Et peut-être... que je ne pourrais jamais me marier avec Cassie...
𝙵𝙸𝙽 𝙰𝙲𝚃 𝟽.
🌷 𝙼 𝚊 𝚛 𝚜.
✤
Bonsoir bonsoir, bonsoir ! 🎃
Ça-va ? ☕️
(Je suis dans mon pays en Martinique 🇲🇶 mais le chapitre était déjà prêt, so enjoyyy !)
Hier ma nièce m'a catch up parce que j'ai dit Go-yave et pas Goi-yave ! Pardonnez population ! 😖🙏🏾
J'aime trop mon pays, c'est trop une dinguerie pardon 🤧 ! Trop contente d'y être retournée !
IT'S TIIIME TO TAKE THE TEA : ☕️, je veux tout entendre, vos impressions, vos ressentis, vos théories, vos retours pour ce chapitre ? Dites-moi tout !
Cal' qui protège Lali... ? Ah la la... BYE !
Bon je peux pas faire une big NDA, il est 7h du matin au moment où j'ai relu le chapitre, je retourne dormir !)
Bon j'y vais bisous, bye ! ❤️
BYE 🏍💨🪐 !
Stardust 🇲🇶
𝚂𝚎𝚎 𝚢𝚘𝚞 𝚜𝚘𝚘𝚗 🕰...
xo, Azra. ✿
IG: azra.reed
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