𝟺𝟺. 𝚂𝚞𝚛 𝚕'𝚑𝚘𝚗𝚗𝚎𝚞𝚛.

Bonsoir, ça-va ? 🕰






(𝖣𝖾́𝗆𝖺𝗋𝗋𝖾𝗓 𝗅𝖺 𝗏𝗂𝖽𝖾𝗈 𝗉𝗈𝗎𝗋 𝗏𝗈𝗎𝗌 𝗉𝗅𝗈𝗇𝗀𝖾𝗓 𝖽𝖺𝗇𝗌 𝗅'𝖺𝗆𝖻𝗂𝖺𝗇𝖼𝖾)






"Mais j'ai une promesse à tenir et des kilomètres à faire avant de dormir, et des kilomètres à faire avant de dormir"
Robert Frost





𝙰 𝙲 𝚃 𝟻.

❄️ 𝙹 𝚊 𝚗 𝚟 𝚒 𝚎 𝚛.






𝟦𝟦. 𝖲𝗎𝗋 𝗅'𝗁𝗈𝗇𝗇𝖾𝗎𝗋.








Cassie.





Université d'Oxford.
Royaume-Unis.
18H15.




La porte des toilettes se referme derrière moi dans un léger claquement.

Je traverse les couloirs maintenant vides d'Oxford. Le son de mes Ugg s'affaisse sur le sol en pierre, et mes doigts s'amusent avec la bague en rhodium de Callahan que j'ai accrochée autour de mon collier de perles.

Sincèrement, posséder ce bijou m'a fait réaliser que j'aime qu'il soit toujours là... quelque part près de moi...

Même si je ne le vois pas...

Je frissonne à cause du froid. Malgré mon retard de ce matin, la journée a semblé durer une éternité. C'est évident que j'ai eu du mal à me concentrer entre la dispute que j'ai eue avec ma mère et les révélations de Nelly sur ses parents et sa situation...

Je termine la journée seule ce soir, car le jeudi, j'ai mon option littérature avec madame Doolittle. Elle a d'ailleurs réussi à légèrement égayer ma journée avec son cours sur Virginia Woolf. Une romancière anglaise qui mettait en avant la psychologie et les émotions de ses personnages.

J'ai déjà hâte de rentrer pour découvrir un de ses livres.

Soudainement, je sens mon téléphone vibrer dans la poche de ma veste. Je le sors en constatant une notification de Callahan :

« Burri im : t'es où, microbe ? »

Son message m'arrache un sourire. Jamais je n'aurais pu soupçonner aimer qu'on me surnomme microbe.

Je m'empresse de lui répondre alors que je longe les couloirs qui mènent vers la sortie :

« Je marche, désolée. »

« Je suis passée aux toilettes. »

La réponse de Callahan ne tarde pas, et encore une fois, ses mots me provoquent une petite joie :

« Burri im : dépêche-toi, tu me manques. »

« Burri im : et j'ai un rendez-vous dans une heure, cours, microbe. »

Je ne peux m'empêcher de rire en accélérant le pas. Mais ma curiosité prend le dessus, et je ne résiste pas à l'envie de savoir de quel rendez-vous il parle exactement :

« Tu as un rendez-vous ? »

Encore une fois, je n'attends même pas sa réponse car elle arrive presque immédiatement.

« Burri im : professionnel. »

« Burri im : Mais je ne dis pas non à un rendez-vous non-pro avec toi, ma préférée. »

Je rougis légèrement en lisant ses mots, et une chaleur s'immerge de mon ventre à mes cuisses. J'essaye de cacher le sourire niais qui éclaire mon visage alors qu'un groupe d'étudiants passe juste à côté de moi.

Sans trop y réfléchir, je tapote ma réponse :

« Oui, je veux bien, pourquoi pas... »

En redoutant sa réponse, ma nervosité m'incite à fourrer rapidement mon téléphone dans mon sac.

Comme si tu n'allais pas le voir dans deux minutes chrono, Cassie.

Il n'y a plus personne dans les couloirs.

Je presse un peu le pas pour accéder enfin à l'aile qui mène dans la cour principale de l'établissement.

En serrant ma veste autour de moi, la sécheresse de l'air et cette fin de journée me donnent une sensation étrange d'oppression. Le silence des couloirs m'incite à jeter plusieurs regards furtifs par-dessus mon épaule.

Mais je suis seule.

Un petit frisson me parcourt l'échine, suivie d'un petit malaise naissant. Je déteste vraiment être en solitaire dans cette fac.

À mesure que j'avance, mes pas se font plus rapides, presque précipités. Et quand j'arrive enfin au bout du couloir qui donne vue sur la cour, un léger soulagement détend mes épaules.

C'est éphémère.

Mon cœur s'arrête net, lorsque je le vois.

Taylor.

De l'autre côté de la cour.

J'ai la violente impression qu'il n'y a plus assez d'air, et je me stoppe. La sortie est à quelques mètres. Callahan m'attend sûrement sur le trottoir devant, assis sur sa moto comme à son habitude.

Des centaines de questions se bousculent dans mon cerveau. Une angoisse palpable augmente en constatant que Taylor aussi s'est arrêté et que c'est moi qu'il fixe avec cette animosité dans le regard.

Je ne sais pas quoi faire, continuer comme si de rien n'était, ou reculer.

Ma raison me dit que ma sécurité se trouve juste derrière les murs d'Oxford qui m'entourent. Je dois rejoindre Callahan. Alors je fais un premier pas pour me mener vers là où il m'attend toujours.

Sauf que je m'arrête net une nouvelle fois en voyant que Taylor commence à s'approcher de moi. La peur panique fait trembler mon cœur je serre mon sac contre moi, et instinctivement je recule face au danger.

Je ne peux pas accéder à la sortie sans d'abord passer par Taylor, et mon corps ne veut pas prendre le risque de l'effleurer. Sauf qu'en reculant je sais que je me mets encore plus en danger.

Je place ma paume devant moi et m'écris terrorisée :

— Ne-ne t'approche pas de moi !

— Je veux juste te parler, Cas' !

Il se met à trottiner vers ma position, un petit cri de terreur m'échappe, je me mets à reculer de plus en plus rapidement en le voyant approcher, jusqu'à opérer un demi-tour express pour essayer de rejoindre les toilettes et m'enfermer à l'intérieur pour contacter mon garde du corps.

En même temps, je fouille frénétiquement dans mon sac à la recherche de mon téléphone que j'ai jeté dedans.

J'essaye de trouver une échappatoire, mais j'entends le claquement menaçant des mocassins de Taylor qui résonne contre le sol en pierre. Il s'approche dangereusement et rapidement de moi. Ma panique me donne terriblement chaud, et je ne trouve pas ce putain de téléphone !

Je regrette de ne pas avoir tenté d'essayer de courir vers la sortie, maintenant, je me sens bien seule dans cette épreuve !

T'es trop bête, putain !

Soudainement, j'entends sa cadence changé. Il se met à courir !

— Cas' ! Arrête-toi !

Je pousse un cri de peur, et mes doigts finissent enfin par attraper mon téléphone.

Juste au moment où je le déverrouille, j'ai à peine le temps de voir la dernière notification de Callahan, qu'un hurlement de douleur m'échappe lorsque je sens qu'on tire cruellement sur mes cheveux.

J'ai l'impression que mon cœur bat dans mon crâne tant la douleur me lance, j'essaye de me protéger avec mes bras au-dessus de ma tête en redoutant qu'il me frappe encore.

D'anciennes images m'assaillent et me font redouter les prochaines minutes qui vont s'écouler.

Sauf que mon dos se plaque violemment contre le mur et il me lance avec frustration :

— Putain, calme-toi, Cas' ! Il faut vraiment que tu arrêtes de faire ça à chaque fois que tu me vois !

J'ai l'impression que sa voix sombre désire vraiment que j'arrête de le craindre. Sauf que tout ce que je ressens pour lui, c'est de la terreur !

Je tremble en sentant sa poigne m'écraser contre le mur. Mon cerveau panique et il est incapable de se dire que la situation ne va pas se terminer autrement que mal. J'ai des douleurs au crâne et chaque parcelle de mon être prie pour que tout ça s'arrête.

J'arrive à peine à me débattre, mon téléphone dans la main, je puise dans le peu de courage que j'ai pour essayer de me défendre, mes cris sont à peine audibles, et à cette heure, je doute que quiconque passe par là.

— Cas', merde, arrête ! ARRÊTE MAINTENANT ! hurle-t-il, ce qui a pour effet de me paralyser.

Mon téléphone m'échappe de mes mains et tombe au sol lorsqu'il me replaque contre le mur avec une force brutale pour asseoir sa domination sur moi. Choquée, mes yeux écarquillés commencent à briller de larmes, je me sens suffoquer et désespérer.

Ses mains serrent ma veste contre ma gorge, j'essaye de le pousser mais rien n'y fait ! Et sa voix résonne soudainement, trop proche, trop féroce :

— Qu'est-ce que tu as foutue hein !?

Sa question est un crachat de colère, ses yeux noisette plantés dans les miens avec une intensité qui me paralyse. Je secoue frénétiquement la tête pour démentir peu importe ce qu'il croit de moi. J'essaye de parler et lui dire que je n'ai rien fait, mais les mots ne sortent pas !

Son visage se rapproche de moi, avec rage il renchérit une seconde fois :

— Je te parle Cas' ! T'as parlé à quelqu'un de notre petit arrangement !?

Il hurle, comme si en augmentant le volume, il pourrait extraire les réponses de ma bouche. Mais je n'arrive même pas à comprendre le problème :

— De-de quoi tu parles !? je réussis enfin à articuler tétanisée.

Ma voix est sortie tel un murmure brisé. J'essaye de me défendre face à ses accusations.

Taylor resserre sa prise sur moi comme si ma réponse venait de dupliquer sa colère. Il me pousse encore plus contre le mur, son autre main se presse contre ma gorge, me coupant légèrement mon souffle.

— Je... Je n'arrive pas... à r-respirer... supplié-je, suffocante.

La panique s'installe, les larmes glissent abondamment sur mes joues. Je sens mon corps lutter pour chaque goutte d'air.

— Te fous pas de ma gueule ! Je sais que t'en as parlé à quelqu'un putain !

Mon cœur bat à tout rompre, une terreur brute se mélange à un instinct de survie qui prend le dessus le temps d'une seconde. Je rassemble toutes mes forces et, d'un mouvement désespéré, je parviens à frapper Taylor dans la jambe.

Surpris, il relâche son emprise, juste assez pour que je me dégage en titubant.

Je trébuche et tombe sur les fesses, mais par chance, mon téléphone se retrouve sous ma main tremblante. Je commence à glisser sur le sol en même temps que j'entends Taylor cracher :

— Ma beauté, tu n'aurais jamais dû faire ça !

Alors qu'il avance vers moi, j'appuie précipitamment sur l'icône d'appel sur le contact de Callahan. Il répond tout de suite :

— Microbe ?

Mon corps se retrouve soulevé subitement. Mon téléphone est arraché de mes mains et se retrouve propulsé de l'autre côté du couloir, mais juste avant qu'il tombe, sans réfléchir, ma panique me fait hurler :

AIDE-MOI !

Mon téléphone s'écrase plus loin, l'écho de l'appareil claquant contre le sol me brise le cœur, et le visage de Taylor est déformé par une rage que je sens dans ses gestes qui me maîtrisent.

Il me remet debout et ses mains rudes encadrent mon visage. Ses doigts serrent mes joues avec une force qui me fait grimacer de douleur et je ne peux pas m'empêcher de me demander ce que j'ai pu lui faire de si mal pour mériter autant sa violence :

— Tu me fais mal, m'écriée-je désespérée. Arrête Taylor !

— Tu ne comprends pas que tu m'obsèdes putain ! Pourquoi t'en as parlé !? Pourquoi t'as fait ça putain de merde ! Mon frère s'est fait DE-FON-CER à cause de toi ! Putain, bébé, t'es conne ou quoi !?

Les mots de Taylor me frappent aussi durement que ses mains sur moi. Sa voix est sombre, anormale. Son haleine chaude s'écrase contre mon visage. Et je reste choquée, paralysée par l'intensité de ses émotions...

Un terrible frisson me parcourt...

Et si...

C'était lui ?

Mon stalker ?

Non.

Non ça n'aurait aucun sens.

Ça ne peut pas être Taylor...

Ce n'est pas possible !

Mais dans ses yeux ancrés dans les miens, j'ai l'impression de voir un homme au bord de la rupture. Comme s'il ne se rendait pas compte qu'il brûlait de folie. La même folie qui m'a terrorisée il y a deux ans de ça et qui me hante encore.

Désespérée à l'idée que Callahan ne me retrouve pas à temps, je me débats de toutes mes forces, en hurlant et en poussant son torse pour essayer de me libérer de son emprise.

Tu ne peux pas le laisser faire, Cassie !

J'essaye de crier aussi fort que je peux, mais le son se perd dans le vide du couloir, ce qui me provoque des larmes d'impuissance encore plus envahissante !

Mais un bruit choqué m'échappe lorsque Taylor disparaît violemment de mon champ de vision. Il est projeté avec violence contre le sol. Devant mes yeux, il y a un bras enroulé dans un manteau aviateur marron.

Le choc est tel que je reste un instant figée. Et doucement, je relève la tête.

Callahan.

C'est la première fois que je vois cette expression aussi assassine, criante de haine et de rage chez lui... Le coup qu'il vient de donner est parti si fort qu'une mèche de ses cheveux lui barre le front. Un frisson malaisant me parcourt l'échine.

Au fond de moi, malgré le fait que je me sente immédiatement rassurée qu'il soit là, je sais déjà que c'est une expression que je vais détester voir chez lui.

Et je veux déjà oublier ce visage assassin qu'il a, là, tout de suite :

— Cal'...

Je n'ai pas le temps de prononcer ou d'amorcer quoi que ce soit. Il ne lui faut pas une seconde de plus pour rejoindre Taylor, et l'instant qui suit, Callahan s'abaisse à son niveau et déchaîne sa colère sur lui. Une série de coups de poing impitoyables s'écrasent sur le visage de cet homme qui me terrorisait quelques minutes auparavant.

Maintenant, Taylor gémit de douleur, son visage se déforme et rougit sous les impacts brutaux de mon garde du corps.

Je sens mon ventre se retourner face à cette scène. Je reste là, bouche bée, horrifiée par la brutalité de ce que je vois. Taylor est incapable de répliquer, même s'il essaye, le sang coagule sur l'ensemble de son visage et a déjà taché sa chemise Ralph Lauren. Callahan, lui, ne semble pas se fatiguer et continue de lui asséner des coups encore et encore.

J'ai l'impression d'entendre les os de Taylor craquer à chaque coup. Les sons m'écœurent, et je n'arrive pas à reconnaître l'homme doux et taquin que je côtoie depuis cinq mois.

Je sursaute soudainement lorsque Callahan s'arrête et se redresse, il respire lourdement. Son visage est toujours aussi déformé par cette rage monstre qui semble le ronger de l'intérieur. Ses yeux bleus et sombres scannent les alentours rapidement avant de trouver mon téléphone.

Il le récupère et plonge son regard froid dans le mien ce qui me glace immédiatement le sang :

— Attends-moi dehors, me commande-t-il d'une voix sombre et catégorique.

Je baisse les yeux sur Taylor à terre, presque complètement sonné il arrive à peine à se guider lui-même pour se redresser. En gémissant, il crache quelque chose dans un filet de sang... et je me rends compte avec horreur que... c'est une dent... sa dent. ,

Une révulsion m'accapare.

Il lui a cassé une dent... en quelques secondes...

J'ai peur de partir... et qu'il le tue... J'essaye d'articuler quelque chose mais Callahan ne me laisse pas le choix :

— Pars. Dépêche-toi.

Je sens mon téléphone retrouver ma paume. Ses mains sont ensanglantées et il me pousse légèrement pour m'inciter à reculer.

Son toucher sanglant me provoque une vive tristesse, mêlée à une forte confusion...

Ce n'est pas Cal' ça...

Au début, mes pas veulent me faire quitter ce couloir. Mes jambes tremblent et j'ai l'impression qu'elles vont me lâcher à cause de la peur qui m'abrite. Mais je vois Callahan revenir à la charge sur Taylor.

Mon ex-petit copain recule sur le sol, terrifié, il place une paume devant lui comme pour dire à Callahan d'arrêter d'approcher. Ses halètements désespérés et ses crachats de sang me révulsent. Mais Callahan l'attrape avec une telle force avant de le plaquer brutalement contre le mur.

C'est à ce moment que je m'arrête net.

Une part de moi veut que tout ça s'arrête, l'autre se dit que Taylor l'a mérité...

Mais au fond, je ne veux pas que qui que ce soit meure ou soit gravement blessé par ma faute.

Et pourtant aucun mot ne sort de ma bouche.

— Je peux te détruire ta putain de vie... Taylor... tu comprends ?

La voix basse de Callahan contraste avec les gémissements bruyants de Taylor qui me mettent mal à l'aise. Il a un œil violet et à moitié fermé.

Je sais que tant que Callahan sera là, je serai en sécurité. Mais à quel prix ?

Mon garde du corps approche son visage de l'oreille de Taylor comme s'il voulait que personne d'autre n'entende ce qu'il a à dire, et il lui chuchote :

— Il y a un truc dont j'ai vraiment horreur, petit fils de pute.

Taylor semble perdre toute couleur, son visage devient livide et blanc alors qu'il se met à trembler. Il est pétrifié, son œil écarquillé fixe parfois les miens, suppliant silencieusement que je l'aide, mais je me sens tout aussi impuissante que lui.

— J'ai une sainte horreur qu'on touche ce qui est à moi. Donc comment on règle ça, enfoiré ?

Je frissonne froidement.

Jusqu'ici, je me voilais un peu la face. Mais plus le temps passe, et moins je crois que Callahan joue quand il me revendique comme étant sienne... Et puis, la façon dont il parle, avec tant de menaces, ça me tétanise.

— À t-toi ? souffle Taylor, brisé par la peur. Elle-elle est à t...

— Cours.

Taylor cligne des yeux, confus, il ne comprend pas. Et moi non plus, l'ordre de Callahan m'échappe.

— Q-quoi ?

— J'ai dit cours putain !

Callahan élève la voix, et je sursaute à son ton en même temps que Taylor.

Comme déclenché par ces mots, Taylor tente le coup. Il se libère de l'emprise de Callahan, du moins, Callahan le laisse partir.

Mais il n'a même pas le temps de faire quelques pas de pas que sans pitié, Callahan, lui assène un violent croche-pied qui le fait tomber brutalement sur la tête.

Je pousse un cri involontaire, reculant d'un pas, horrifiée par la violence froide de Callahan.

Ces gestes sont juste emplis de sadisme... Il lui fait payer ses actes... sans scrupule.

Taylor gémit et tente de ramper vers moi pour le fuir, alors que Callahan le suit lentement tel un fantôme.

L'image me glace d'horreur...

Je suis prise d'une culpabilité et d'une pitié horrible pour Taylor qui sait qu'il n'a aucune chance. Il se retourne faiblement et lève de nouveau sa paume pour demander une trêve et sa voix chancelante murmure essoufflée :

— Écoute... mec... c'est un malentendu, OK ? J'savais pas... que c'était... ta nana... J'savais pas...

Mais Callahan ne montre aucune pitié.

— Pitié !

Il écrase son pied dans la cuisse de Taylor, qui hurle d'horreur et de douleur.

Mon estomac se retourne, et la terreur m'envahit. Des larmes glissent sur mes yeux et je regrette d'avoir provoqué toute cette situation.

Je veux dire quelque chose, intervenir, mais la peur m'enchaîne. Je n'ai jamais vu Callahan comme ça. Il est complètement aveuglé et transformé par sa rage et honnêtement il me fait peur.

Des mèches de ses cheveux tombent sur son front, collées par la sueur, tandis qu'il continue de frapper violemment Taylor qui hurle et arrive à peine à se protéger avec ses bras.

La brutalité de la scène est en totale contradiction avec le Callahan que je connais, celui qui est toujours calme, doux, protecteur, et réfléchi.

Une sorte de confusion douloureuse me prend, et c'est à ce moment que je réalise que je ne connais presque rien de lui... Je me sens déchirée et perdue.

Le souffle de Taylor se fait erratique, en se protégeant de ses bras, il supplie Callahan d'arrêter dans des hurlements désespérés. Mon cœur bat à la chamade jusque dans mon ventre alors que mon garde du corps lui crache :

— Quand elle te demandait d'arrêter, tu faisais quoi, petite salope ! Tu faisais quoi !?

Et alors que je pensais que tout allait enfin s'arrêter, je vois que Callahan finit par sortir son arme.

Là, c'est trop !

— Callahan ! hurlé-je désespérée.

Il ne semble même pas m'entendre, ou il choisit sciemment de m'ignorer.

J'ose à peine approcher. Mon garde du corps s'accroupit devant Taylor, son expression est impénétrable, froide, terrible.

Mon cœur palpite, j'ai même l'impression que l'air dans le couloir devient plus lourd, plus épais, suffoquant.

Ma panique prend le dessus, et Callahan enfonce un de ses genoux dans le ventre de Taylor, qui gémit sous la douleur.

Puis, il place sa main sur la gorge de Taylor, lui coupant presque le souffle, avant de pousser lentement le canon de son arme dans sa bouche.

Mes larmes m'assaillent et je m'entends implorer Callahan d'arrêter. Mes cris me font mal à la gorge mais il ne m'écoute pas !

— Excuse-toi, prononce Callahan d'une voix si calme qu'elle en est terrifiante.

Sa tranquillité contraste violemment avec la brutalité de ses gestes.

Taylor est pris de réflexes vomitifs sous la pression de l'arme enfoncée dans sa gorge. Il cligne des yeux, les sourcils froncés, ne comprenant pas, ou c'est juste qu'il ne croit pas ce qu'il est en train de lui arriver.

— J'ai dit...

Callahan se penche un peu plus de lui et baisse la sécurité de son arme :

— Excuse-toi auprès de ma dame, Taylor.

Sous la contrainte, Taylor parvient à articuler des mots à travers ses sanglots et ses hoquets :

— J'suis désolé ! J'suis désolé Cassie ! J'te jure que je suis vraiment désolé ! Pardonne-moi, pitié ! Pitié ! J'recommencerais pas ! Dis-lui de tout arrêter !

Callahan retire enfin l'arme de sa bouche, laissant Taylor haletant, choqué, et traumatisé.

Les larmes, de la bave et du sang se mélangent sur son visage décomposé.

Moi, je reste là, à pleurer, submergée par la peur et tout un tas de sentiments contradictoires et indescriptibles qui se battent en moi.

Callahan essuie soigneusement son arme avec la chemise Ralph Lauren de Taylor, puis il le redresse d'une main, et le plaque contre le mur avec une force qui semble inhumaine.

— Voilà ce qu'on va faire. À partir d'aujourd'hui, si tu as le malheur de t'approcher d'elle encore une fois. Si tu as le malheur de la toucher. Si tu as le malheur de la regarder dans les yeux et de ne pas les baisser quand elle passe à côté de toi. Je t'assassine, Taylor, tu m'entends ?

Taylor, réduit à un état de terreur pure, hoche la tête pour accepter le marché.

Mais mon regard se perd sur Callahan.

Il m'a très bien caché sa violence...

Et c'est vraiment terrifiant.

Je n'ai plus aucun doute lorsqu'il me dit qu'il est prêt à aller loin pour me protéger.

J'ai l'impression que cette promesse n'a aucune limite...

— Ose, encore ! Ose, une dernière fois, ose, une fois de trop. Que je constate ne serait-ce que l'ombre d'une larme ou d'une inquiétude dans ses yeux, et je te fais payer chaque goutte, chaque angoisse. Et je peux te garantir qu'en enfer, tu te souviendras de moi pour l'éternité petit bâtard !

Je renifle devant sa promesse mortelle, mais Callahan continue :

— Essaie pour voir ! Et quand j'aurai eu ta tête et celle de ton putain de frère, ça ne sera pas beau à voir. J'enverrai vos têtes décapitées à ta mère avec une lettre signée de vos sangs dans laquelle vous vous excuserez de ne pas pouvoir assister au dîner.

L'image me donne envie de vomir. Je me sens envahie de nausées, et mes mains tremblent involontairement.

Taylor est presque au bord d'une crise de panique, il hoche encore la tête frénétiquement, ses yeux fixés sur Callahan avec une peur viscérale.

— Est-ce qu'on est bon toi et moi ? demande Callahan d'une voix qui exige l'obéissance.

Encore une fois, Taylor acquiesce sans discuter. Mais Callahan lui chuchote à l'oreille :

— J'espère pour toi que ces photos tu vas les faire disparaître. Dès ce soir.

Mon choc me fait ouvrir la bouche.

Une honte m'accapare et je ne m'attendais pas à ce qu'il lui parle de mes nudes aussi ouvertement. Je sens mon visage rougir lorsque le visage de Taylor se décompose en redoutant la punition de mon garde du corps :

— Je-je ne les ai plus, balbutie Taylor.

Quoi ?

Callahan fronce les sourcils avant d'en arquer un pour l'interroger du regard :

— J'te le jure ! Elles ont disparu ! Sur tous mes serveurs, j'ai plus rien ! Q-Quelqu'un les a supprimées de tous mes appareils. J'te jure ! J'ai plus rien de Cas-

— Ne prononce pas son nom putain !

Un coup de poing dans le ventre, terre Taylor au silence. Il me regarde avec pitié, je sens qu'il me demande de l'aide et ma culpabilité prend le dessus en comprenant que je ne pourrais rien faire pour lui.

Et puis c'est à ce moment que je remarque avec horreur qu'il s'est uriné dessus.

Callahan presse son arme contre la gorge de Taylor, sans le lâcher une seule fois des yeux :

— Et ne la regarde jamais non plus. C'est à moi que tu t'adresses.

Il hoche rapidement la tête pour obéir, des larmes perlent aux coins de ses yeux terrifiés.

— J'espère vraiment pour toi que tu dis la vérité... je vérifierais, murmure Callahan.

Callahan se sépare enfin de Taylor qui s'effondre au sol. Il glisse pour mettre un maximum de distance avec Callahan qui lui dit :

— Cours, avant que je te mette une balle dans la tête.

Sans hésiter, Taylor se redresse, il trébuche à plusieurs reprises avant de fuir. Il boite visiblement et son corps se balance maladroitement dans des sanglots étouffés. J'entends ses pleurs et il se retourne plusieurs fois pour s'assurer que Callahan ne le suit pas jusqu'à ce qu'enfin il disparaisse enfin dans la cour d'Oxford.

En entendant le bruit de la sécurité de son arme être réactivé, je tourne la tête vers lui. Il regarde encore droit devant lui, perdu dans ses pensées.

Mon cœur bat à un rythme douloureux et j'ai peur de ne pas reconnaître l'homme qui panse chacune de mes cicatrices...

Mes larmes glissent silencieusement sur mes joues alors que j'essaye de rassembler de façon logiques les images auxquelles je viens d'assister...

Mon garde du corps range méticuleusement son arme dans un geste mécanique. Comme s'il ne se rendait même pas compte qu'il le faisait.

Et lorsqu'il baisse enfin les yeux sur moi, je serre instinctivement mon sac contre ma poitrine.

Et sous mes yeux son expression meurtrière se décompose littéralement en un claquement de secondes. Il reste immobile un moment, son visage se fige à mesure qu'il lit la peur dans mon regard.

La facette monstrueuse qui ne l'avait pas quitté vole en éclat, ses traits changent, passant de la dureté à la douceur. Ses yeux redeviennent ce bleu océan apaisant... et ils me fixent avec une forte inquiétude.

Il fait un pas vers moi, un petit gémissement m'échappe et je me crispe en reculant.

Il s'arrête net en écarquillant légèrement les yeux.

J'ai l'impression que mon geste vient de le tuer.

Son visage se déforme presque d'horreur et de tristesse. Il déteste voir qu'il me fait peur, c'est indéniable. Et quand bien même ses gestes m'ont terrorisés, il y a une partie de mon cœur qui n'arrive pas à le rejeter complètement...

— Cassie...

Sa voix basse m'appelle. Je la sens presque brisée, et malgré sa douceur, je suis toujours aussi rigide.

Il tente de nouveau une approche vers moi. Je recule jusqu'à ce que mon dos entre en collision avec le mur derrière moi.

Sa main rouge et meurtrie passe nerveusement dans ses cheveux, rabattant les mèches rebelles qui s'étaient échappées. Je renifle en sentant les palpitations de mon cœur exploser sous ma poitrine.

— S'il te plaît... me supplie-t-il en faisant un nouveau pas. Ne me rejette pas...

Le ton de sa voix me paraît si vulnérable que j'ai l'impression de le tuer avec mes peurs.

Alors cette fois-ci, je ne bouge pas.

Je suis paralysée par un nuancier d'émotions qui s'entrechoquent à l'intérieur de moi et qui décuplent mes larmes.

Je ne veux pas le rejeter. Mais ces images qui tournent en boucle m'effraient...

— Je... Je ne te ferais jamais de mal... Cassie...

Sa voix me coupe le souffle. Son regard voyage sur mon visage comme s'il cherchait des réponses.

Puis, lentement, il lève ses mains ensanglantées vers moi en signe de paix.

Un frisson froid me parcourt et me retourne l'estomac face à tout ce sang...

— Tu n'auras jamais à avoir peur de moi... Je ne te toucherais jamais. Il faut que tu me croies.

Les images de sa violence me reviennent en pleine face et je ne sais pas si je dois le croire ou non.

Mais quand il pose doucement ses mains sur mon visage, je frémis, incapable de contrôler la réaction de mon corps.

Ses caresses sur ma peau sont douces. J'arrive à peine à croire que ces mains qui calment mes peurs sont les mêmes qui ont massacré mon ex au point de le défigurer en quelques secondes.

Je ne me suis même pas rendu compte du moment où il m'a approché, et je me sens d'autant plus triste de constater que sa proximité m'enveloppe encore de ce sentiment de réconfort et de sécurité.

Je sais qu'il ne me fera jamais de mal...

Je veux y croire...

Mais j'ai tellement peur qu'il dérape un jour...

— N'ai pas peur... murmure-t-il, son souffle chaud s'écrasant contre ma peau.

Je me laisse guider lorsque ses paumes glissent derrière ma nuque et qu'il m'attire contre lui, me collant à son torse. Je reste là, rigide, incapable de répondre à son étreinte.

À travers sa veste, je sens son cœur tambouriner violemment.

Je ne sais pas si c'est à cause de l'adrénaline... ou moi.

— Më fal, zemër... chuchote-t-il. Më fal... (Excuse-moi, mon cœur)

Mon stress et mon choc face à la situation me terrent dans un silence de mort.

Je l'ai déjà vu maîtriser un homme, lors d'un des meetings de ma mère... mais ça n'avait rien à voir avec cette violence brute.

Mes mots me restent bloqués dans ma gorge. Ses paumes me caressent doucement l'arrière du crâne, il me serre contre lui comme s'il craignait que je m'envole.

Moi, je me sens migraineuse à cause de ses pensées envahissantes qui tourbillonnent de la plus chaotique des façons dans mon crâne.

— Tu n'auras jamais rien à craindre...

Je veux juste rentrer chez moi.

— De moi... murmure-t-il tendrement.

Mon cœur est déchiré ce soir.











Ghost.


Pimlico.
Royaume-Unis.
22 h.






Mes doigts massent mes paupières lourdes, ces mouvements me rappellent que mes phalanges sont encore meurtries.

Je suis mort de fatigue...

La scène de tout à l'heure me hante. Elle me possède de la pire des manières.

Elle n'a répondu à aucun de mes messages...

Ni à mon appel.

J'inspire profondément en me rendant compte que j'avais cessé de respirer depuis plusieurs secondes.

Elle n'a pas répondu à mon étreinte non plus.

Sa réaction, son recul, sa peur visible, et pire encore son silence représente une véritable torture pour moi...

J'aurais probablement tué ce fils de pute si j'avais été seul. Il devait bien finir par payer, et repenser à lui me donne envie d'entrer par effraction dans le confort de son manoir, et d'égorger chaque membre de sa famille comme des porcs.

Je serre et détends mes poings frénétiquement pour calmer mes envies meurtrières.

Le coût de mes actes me coûte très cher, aujourd'hui.

Je ne veux plus jamais revoir microbe avec ce regard horrifié à mon égard.

Putain, c'est horrible... Elle ne peut pas me regarder comme ça... Pas moi.

Pas moi, microbe...

Il est presque 22 h. Je m'enfonce à pied dans le quartier de Pimlico. La ville est plongée dans la pénombre de la nuit. Seules les lumières tamisées des réverbères jettent un peu de lumière sur le pavé humide.

En m'engouffrant dans la rue Moreton, je reconnais la berline noire de Stan, le sous-directeur du MI6, qui m'attend à l'intérieur.

En approchant, je prends des dernières inspirations.

Ce qui s'est passé tout à l'heure me pourrit le cerveau sans scrupule. Je n'ai qu'une envie c'est de faire demi-tour et passer ma soirée à la rassurer, à lui montrer qu'elle n'aura jamais à avoir peur de moi et que l'idée même de la toucher de cette façon me répugne au plus haut point.

Putain, j'ai encore merdé ! Elle n'aurait jamais dû voir ça !

Pourquoi elle n'est pas partie !

Je ne l'entendais même plus crier mon nom... Tellement je voulais tuer ce type.

Je toque deux fois contre la vitre passagère de Stan qui sursaute presque en constatant que je suis arrivé. Il déverrouille son véhicule et je monte à bord.

Je m'empresse d'ouvrir ma fenêtre en constatant qu'il se brûle une cigarette, et la fumé a emplit l'habitacle :

— Il faut vraiment que t'arrêtes de fumer ça, lancé-je en secouant ma main pour dissiper l'air.

Stan exhale une bouffée de fumée avant de répondre avec une légère toux :

— Je sais, j'y travaille. Et toi t'as pas fini de mâcher ces bouts de bois ?

Je me rappelle qu'un cure-dent est pincé dans le coin de mes lèvres. Sa réflexion m'arrache un infime sourire qui disparaît aussi vite qu'il est arrivé.

J'ai une humeur de merde ce soir, putain.

Dans un haussement de tête, je l'invite à commencer les hostilités. Sans perdre plus de temps, il me tend une enveloppe.

— Wayne a intercepté quelque chose d'inquiétant en me basant sur les informations que tu m'avais données sur son stalker. Ça concerne directement Cassie, m'informe-t-il en pinçant sa cigarette entre ses lèvres.

Je fronce les sourcils en sentant un stress prendre le dessus sur moi.

J'ouvre la grande enveloppe et, en fouillant à l'intérieur, j'extirpe quelques documents que je survole à peine, car mon regard est attiré par des photos de Cassie... Rentrant chez elle... Juste après que je l'ai déposé...

— C'est quoi... ce délire ? Qui a pris cette photo ? demandé-je en sentant une pointe de rage et d'angoisse me prendre.

— Wayne n'en est pas sûr, il l'a juste intercepté dans une communication en passant par une antenne relais à proximité de chez elle.

La photo de Cassie me frappe de plein fouet. Son petit col roulé blanc... Sa jupe plissée bleu marine, ses bottines, et son manteau blazer bleu marine... C'est elle... Ma petite bourgeoise avec son visage innocent, capturée sans son consentement. Je dois me faire violence pour ne pas laisser mes émotions prendre le dessus et contrôler le tremblement de mes mains.

Ces clichés me donnent envie de tout foutre en l'air.

J'en oublie presque mon moment de rage de tout à l'heure et me convaincs dans l'idée de pourquoi je fais tout ça : pour la protéger, peu importe combien ça me coûte.

Je ne peux pas laisser Cassie crever...

Jamais sous ma protection.

— Cette photo est récente... Elle était habillée comme ça la semaine dernière, putain...

Je ne sais pas qui la traque, mais ça m'inquiète de plus en plus de ne rien parvenir à trouver, et que ce type me nargue en m'envoyant presque par la poste des clichés qu'il a pris d'elle.

Je suis persuadé que c'est de la provocation. Si ce putain de stalker n'en avait pas décidé autrement, ni Wayne ni Stan n'aurait pu avoir accès à ces photos. Il a choisi sciemment de se faire prendre par Wayne pour me faire passer un putain de message : Il est tout près et il agit s'il veut, quand il veut, où il veut.

Et je peux aller me faire foutre pour mettre la main sur lui.

— La photo a été envoyée par un-une hacker, ajoute Stan. Il m'a dit qu'elle s'appelait... Lyly...

— Lyloe, je le corrige.

— Ouais, c'est ça, je crois. Wayne et elle se sont mis d'accord pour rester en observation près de chez les Bennett... C'est tout ce qu'elle a réussi à intercepter pour le moment.

Je reste silencieux un instant.

Wayne avait donc raison...

Finalement, cette Lyloe est efficace. Il faut à tout prix qu'il me mette directement en contact avec elle.

Mon regard se tourne vers Stan qui jette enfin sa cigarette par sa fenêtre, son expression est aussi sérieuse que la mienne :

— Il s'approche trop d'elle... J'aime pas ça, Stan, soufflé-je doucement.

— Ça m'inquiète aussi. Parce que le type à l'air inatteignable. Mais, j'ai peut-être une piste pour toi.

Stan regarde rapidement sa montre sur son poignet. Un haussement de menton l'invite à poursuivre :

— Selon les rapports de Wayne, il y a un individu suspect qui traînait autour de la maison de Cassie.

L'information me fait frissonner légèrement. Je fixe les photos de Cassie, prises si près de chez elle. Il rôde trop près d'elle, il lui a peut-être déjà parlé, ou même fait semblant de l'effleurer... Je n'en sais rien, mais putain ça me fait flipper.

Mon estomac se retourne... Je ne suis pas constamment près d'elle et l'idée qu'il puisse lui arriver quelque chose alors que je ne suis pas là me tétanise.

Rien que tout à l'heure... Il aurait pu lui arriver n'importe quoi si elle ne m'avait pas appelé à temps, et je n'aurais eu que mes regrets pour réaliser mes erreurs...

— On n'a pas beaucoup de temps. Mais Wayne et Lyloe ont remonté la piste de ce type. Ils l'ont retrouvé et observé durant cette semaine. Apparemment, ils ont un tuyau et ils pensent que le type va revenir ce soir.

— Chez elle ? le questionné-je en sentant l'adrénaline commencer à pomper mon cœur. Ils savent qui il est ?

— Wayne m'a dit qu'il viendrait vers 23 h. Donc on doit y aller maintenant. Et ils n'ont pas énormément d'informations sur lui, ce mec sort de nul part, il n'est rattaché à rien qui puisse nous mener sur une quelconque piste. C'est une chance de l'attraper en flagrant délit.

J'ai déjà bouclé ma ceinture.

— Démarre, on y va, ordonné-je d'une voix calme et ferme.

Stan ne perd pas de temps non plus et démarre la voiture. Ses phares éclairent la rue et il nous conduit en direction de Blackheath, en discutant des détails de l'opération, tandis que je suis perdue dans mes pensées.

Je devais juste accompagner cette fille chez elle après les cours, et lors des meetings de sa mère. Ça aurait dû s'arrêter là, merde !

Je ne sais même pas quand les choses ont changé... Et que mon monde s'est retourné.

Le problème c'est que mon petit jeu sexuel en début d'année que je pensais allait durée deux, trois mois, s'est transformée en une étrange envie d'en savoir plus. D'aller sous les dessous de sa peau pour déceler chaque veine, chaque secret, chaque petits murmures qui définissent Cassie Bennett.

Elle est devenue mon obsession, ma star, ma peste, ma passion, et un rêve qui hante ma tête, même quand j'essaye de ne pas y penser, ça ne s'arrête pas.

C'est un petit mètre soixante de hauteur, de longs cheveux miel qui s'enroulent deux fois autour de ma poigne, sept grains de beauté sur le visage, et une allergie mortelle à la noisette ont eu raison de toute ma logique.

Tout m'intéresse, rien ne m'ennuie chez elle.

Je suis fan d'elle putain.

— ...et tout ira bien.

Pitié, je n'arrive même pas à entendre ce que me dit Stan.

Je tourne la tête vers lui en constatant que nous sommes finalement arrivés dans le quartier de Cassie et que Stan gare la voiture incognito à quelques mètres de sa maison plongée dans le noir.

Nous avons un visuel parfait, tapi dans l'ombre.

Je pose mon Tokarev sur mes cuisses.

— Range-moi ça, on devrait éviter de sortir les armes.

— S'il ce type débarque, je le flingue, Stan.

— Fait gaffe, Cal', je ne pourrais pas couvrir tous tes meurtres, tu le sais... Celui de Darren a été une galère monstre à étouffer. Et sa mère pense toujours que c'est un meurtre. Tu sais que je joue mon poste au MI6 à chacune de mes interventions.

Ma paume se pose instinctivement sur le manche de mon arme et mon index tapote nerveusement le métal.

— Je sais, répliqué-je finalement en laissant mon regard rivé sur la rue d'en face. Je ferais attention.

Il me regarde septique :

— J'essayerais, je me corrige, ce qui lui provoque un léger sourire.

Un silence nous prend.

Mon cœur résonne rapidement dans ma poitrine, et dehors le bruit sournois du vent se colle aux parois du véhicule.

Tu dois sûrement dormir, microbe...

J'espère que tu ne pleures pas...

Les muscles de mes cuisses se crispent en pensant à l'image d'elle ensommeillée. L'odeur de ses cheveux dans mon nez... La sensation de ses lèvres pulpeuses contre les miennes.

Mais mon cœur en repensant à la façon dont elle a reculé quand j'ai fais un pas vers elle...

Horrible.

Je suis désolé que tu es eu à voir cette part de moi...

— D'ailleurs, lance Stan ce qui me ramène sur terre. Margaret ne t'avait pas menti, tu sais pour tes suspicions d'empoisonnement en décembre.

Mon attention se reporte une seconde sur le visage de Stan qui ne détourne pas le regard de la maison de Cassie :

— Elle avait bien demandé expressément que le menu se compose uniquement d'ingrédient ne contenant pas de noisette. Elle avait même exigé que tout aliment pouvant être associé ou contenant des traces de noisettes soit complètement éliminé du menu.

Étrangement, l'information est loin de me rassurer.

Même si j'élimine sa mère de l'équation...

— Alors quelqu'un d'autre parmi les invités a essayé de la tuer à cette soirée. Et l'enquête n'avance pas, je n'ai rien pour remonter la piste mise à part une liste de noms de politiciens qui ne mène à rien.

— Je sais... me souffle Stan. Cette histoire est un casse-tête sans nom.

L'angoisse me prend à la gorge.

De toutes les filles qui compose cette terre, Cassie serait probablement la dernière à mériter une liste d'ennemis.

Et pourtant j'ai l'impression qu'elle les collectionne.

— Comment va-t-elle... ? Elle n'a pas trop peur avec tout ce qui se passe ?

Je détourne une seconde le regard sur Stan.

— Ça va. Elle est courageuse.

Le léger rire de Stan ne provoque pas le mien.

— Ça ne m'étonne pas d'elle...

J'aurais bien voulu perpétuer cette conversation, mais un mouvement capté dans mon champ de vision attire mon attention.

Au bout de la rue. Un type vêtu d'un épais hoodie noir dont la capuche a été rabattue sur la tête avance lentement le long du trottoir.

— Stan, regarde ça.

Mon dos se raidit, et je déboucle ma ceinture. À mesure qu'il approche, et que je le distingue de mieux en mieux, je sens chaque muscle de mon corps se crisper. Ma poigne se resserre autour du manche de mon Tokarev.

On observe attentivement ces prochains gestes...

Le mec approche, un sac à dos sur le dos, et quand il ralentit devant son portail, j'ai l'impression que mon cœur veut sortir de mon corps :

— Qu'est-ce qu'il fait ce salopard... murmuré-je pour moi-même, déjà prêt à sortir de la caisse.

— Attends, on observe et on agit, me conseille Stan.

Sauf que cet enfoiré sort son téléphone portable, et il commence à prendre des photos de la devanture de la maison de Cassie. J'ai l'impression que la terre se retourne sous mes yeux, et l'adrénaline m'oblige à ouvrir ma portière :

— Cal' attend !

Mais je ne peux pas laisser ce type continuer, je suis déjà en train de sortir de la voiture.

Mon cœur accélère et tel un fantôme, je traverse discrètement la rue et m'approche sournoisement de lui. L'adrénaline pulse dans mes veines et en quelques enjambées, je l'atteins. Sans attendre, ma poigne saisit sa nuque, et j'abats violemment son visage contre les barreaux en ferrailles du portail des Bennett.

Le bruit sourd me donne l'impression de réveiller tout le quartier. Sa surprise se mélange à une forte douleur :

— Qu'est-ce que tu fous ici toi, hein, craché-je en tentant de dévoiler son visage. Qu'est-ce que tu fais !?

Sauf que je comprends tout de suite qu'il ne compte pas se laisser faire. Il arrive à m'asséner un coup dans le tibia mais je n'en démords pas non plus. Je resserre ma prise en sentant qu'il tente le tout pour le tout pour se libérer. J'entends son souffle erratique en lui cognant le crâne contre le grillage.

La lutte semble effrénée, tout mon corps répond à chacune de ses tentatives pour me fuir, et je reconnais qu'il est coriace. Je sens un coup m'atteindre au visage, je ne sais même pas ou exactement, je sais juste que je ne dois pas le laisser partir, peu importe ce que ça me coûte.

J'arrive enfin à le cogner suffisamment fort pour qu'il soit légèrement sonné.

Je baisse sa capuche, c'est un homme blanc, un brun, yeux noirs, rien que je reconnaisse. Ses yeux clignant sont désorientés.

— T'es qui, enfoiré !?

Alors que je pensais maîtriser la situation, une voix me fait perdre ma concentration :

— Callahan !?

Je relève la tête pour tomber sur le visage inquiet et apeuré de Cassie devant sa porte d'entrée. Elle serre un épais gilet en maille contre sa poitrine et la crainte dans sa voix me frappe en plein ventre. Dans l'urgence je lui crie :

— Rentre Cas-

Ma déconcentration est suffisante pour que l'individu m'assène un violent coup de tête. Une vive douleur explose dans mon crâne, troublant ma vision un instant. Je pousse un râle de rage lorsque l'homme se débat et profite de ma seconde d'inattention pour me repousser.

Il ne perd pas une seule seconde pour s'échapper, ses pas s'abattent sur le sol humide, sans perdre une seconde le véhicule de Stan opère un rapide demi-tour dans la rue sombre, les pneus crissent et je le vois brièvement me faire le signe qu'il part à sa poursuite.

— Putain ! craché-je avec hargne en ayant perdu de vue le mec. Qu'est-ce que tu fais dehors ? Rentre !

Elle hésite un peu et ma colère l'a fait sursauter. Son visage chétif est à peine éclairé par la lumière de la lune.

Cal', ce n'est pas le moment de trouver qu'elle ressemble à un petit ange, tout droit tombé du ciel...

— Tu... t'es... balbutie-t-elle en approchant le long de son allée.

— Rentre, lui ordonné-je d'une voix dure en la voyant venir vers moi.

Le bruit de ses clés résonne dans la nuit froide. Le vent me glace un peu le sang, tandis que je me tiens devant sa maison. Je sens quelque chose de chaud glisser sur mon visage.

— Tu es blessé, murmure-t-elle d'une voix triste et tremblante.

Je lève ma main sur mon arcade sourcilière, et regarde le bout de mes doigts rougi par du sang frais.

Je n'aime pas l'idée qu'elle puisse me voir comme ça alors que je suis censée la protéger, alors je réponds pour la rassurer:

— C'est rien. Allez, rentre, microbe.

Mais elle ne m'écoute pas. Et au lieu de rebrousser chemin, j'entends le claquement de ses clés dans la serrure de son portail. Le grincement du grillage lorsqu'elle l'ouvre me donne l'impression que le monde entier nous entend.

Et pourtant, tout ce que j'entends moi... c'est les cognements de mon cœur qui ne voit que son visage...

Je n'arrive pas à détourner le regard.

Putain... qu'elle est belle...

— Tu saignes beaucoup, insiste-t-elle, tout en restant un peu sur la retenue avec moi.

Elle n'a toujours pas digéré ce qui s'est passé tout à l'heure...

— Je sais. Mais je ne veux pas te voir dehors à cette heure.

— Je ne suis pas dehors, je-enfin, ce n'est pas le sujet. Ton arcade est vachement amochée...

Elle fixe mon sourcil. Moi c'est elle que je regarde. Et je n'arrive pas à calmer l'émotion qui submerge mon ventre, me coupe le souffle et remonte jusque dans ma gorge.

Mes paumes s'étirent discrètement, l'envie de la toucher est presque insoutenable...

— J'ai... j'ai des compresses... dans ma salle de bain, murmure-t-elle déterminée.

Son inquiétude me transperce plus que je ne l'aurais voulu.

Incapable de lui résister plus longtemps, je pénètre l'intimité de sa cour.

— Qui c'était... cet homme que tu... frappais... me demande-t-elle.

Ce dernier mot est sorti avec un léger malaise.

Je ne réponds pas en franchissant le seuil avant de refermer derrière nous.

Je l'incite à entrer dans sa maison, et la chaleur m'enveloppe doucement.

— T'es toute seule ? je demande en enlevant ma veste que je laisse accrocher au porte-manteau.

Elle hoche simplement la tête et dépose elle aussi son gilet en maille à côté de ma veste.

Dans un silence de mort, nous montons à l'étage vers sa salle de bain.

Cassie allume une petite lumière tamisée, et ouvre la porte de son armoire à pharmacie.

Je referme la porte. Sa salle de bain n'est pas très grande. Mes paumes effleurent ses hanches lorsque je passe derrière elle pour m'asseoir sur le rebord de sa baignoire.

J'ai senti son corps se raidir légèrement à mon passage et elle retient un léger hoquet de surprise...

Ce petit son m'enivre déjà...

Je passe une paume sur ma mâchoire pour me reconcentrer, tandis que seul le bruit des objets s'entrechoquant dans sa trousse de secours perturbe le silence.

C'est plus fort que moi, pendant que ma paume descend sur ma gorge, mes yeux se perdent sur elle.

Ses longs cheveux sont prisonniers de son habituelle longue natte qui touche — presque — ses fesses...

C'est nouveau ça.

Elle a coupé ses pointes... ?

Dans mes souvenirs, sa natte était légèrement plus longue. Et mes doutes se confirment en apercevant dans sa poubelle quelques mèches miel superposées...

J'en profite pour observer sa salle de bain. Tout à son image, vintage et ancienne, aux couleurs bleu canard et blanches. Son miroir ovale est orné de dorure, et quelques petits tableaux décorent ses murs tapissés de petites fleurs.

Finalement, je reviens sur elle et baisse les yeux sur ses courbes. Ma langue pousse l'intérieur de ma bouche en la regardant. Ses fesses ressortent légèrement de son pyjama imprimé fruits et légumes en tout genre. Je dois me retenir de lâcher un petit rire devant sa dévotion pour les trucs de mémés.

Une vraie petite star, dans son petit monde.

Un violent frisson descend directement entre mes jambes lorsque, sans qu'elle en ait conscience, le haut de sa chemise en coton glisse lentement. Me dévoilant son épaule laiteuse de la plus subtile des manières.

Pitié...

Mes paumes se frottent entre elles.

Pi-tié...

J'inspire profondément, avec la folle envie de laisser mes pensées dicter ma conduite.

Mais finalement, mon dos se redresse quand Cassie s'approche de moi, avec une compresse imbibée de désinfectant. Je la laisse se placer entre mes cuisses, et quand sa main sa cale doucement derrière ma nuque pour maintenir ma tête, je presse légèrement les lèvres, pris par une onde de sensation profonde et violente.

Elle est en train de m'achever, putain.

Ça commence à faire un moment que je n'ai rien fait... Et elle me donne vraiment envie de mettre fin à mon abstinence.

Alors que moi je la fixe, elle, ne me regarde pas dans les yeux, pourtant je meurs d'envie qu'elle le fasse. Mes muscles se crispent à chaque fois qu'elle tamponne doucement sur ma blessure et le sang qui a coulé le long de ma joue. J'ai envie de l'accaparer, la prendre entre mes paumes, lui dire de se rapprocher, sentir chaque courbe de son corps contre le mien.

Une seconde, nos yeux se rencontrent. J'ai bien l'impression qu'un monde de mots puissant défile lourdement dans cet espace clos.

Ça ne dure pas suffisamment longtemps, mais putain, j'en ai besoin de plus. Ce n'est pas assez.

C'est jamais assez.

Regarde-moi, pitié !

— Qu'est-ce que tu fais par ici... ? me demande-t-elle.

À ses mots, je comprends une nouvelle chose dans ma vie : je déteste lorsque Cassie est froide avec moi. J'ai même une sainte horreur qu'elle me tienne à distance d'elle...

— T'es toujours en colère contre moi.

Ce n'est pas une question, plutôt une constatation amère.

— Non, je ne suis pas-

Elle s'interrompt d'elle-même en expirant longuement par le nez. Elle ne veut pas me mentir, mais elle ne veut pas me l'avouer non plus.

J'adore cette femme.

— Mon travail n'a pas d'horaires te concernant, je réplique sur un ton légèrement taquin dans l'espoir que ça détente un peu la glace qu'il y a entre nous.

— Tu étais en train... de me surveiller ?

Cassie me regarde — enfin — elle cherche une explication sur mon visage.

— Te protéger, je la corrige doucement en plongeant mon regard dans le sien.

Elle détourne rapidement le regard en reprenant son travail sur ma blessure.

— Pourquoi tu... battais cet homme ?

— Je suis tenu au secret professionnel, ma petite peste.

J'ai souri en lançant cette phrase, mais ma réponse ne lui fait pas rire, et mon explication lui suffit encore moins.

Cassie ne réagit pas, et même si elle tente de me le cacher, je sens sa frustration croissante apparaître sur les traits de son visage.

— Et qui était la personne dans la voiture ?

— Encore... un vilain petit secret, je murmure moins taquin cette fois-ci.

Je ne peux pas lui dire qui est Stan, pour ne pas fragiliser sa position au MI6, ni la faire paniquer en lui expliquant qu'un mec rôde autour de chez elle et la prend en photo.

Mais Cassie s'arrête net, le regard déçu et dur :

— Tu ne me diras jamais rien... n'est-ce pas ?

Je ne sais pas pourquoi ses mots ont provoqué une violente accélération de mon cœur. On se fixe, et je sens l'expression de mon visage devenir de plus en plus sérieuse.

Il y a tellement de choses que je voudrais lui dire.

Mais les mots se coincent en moi, je suis lié par des promesses que j'ai interdiction de briser.

Sous mon silence, Cassie capitule en secouant légèrement la tête contrariée. Je sens que je l'ai pas mal déçue au cours de ses vingt-quatre dernières heures, et ce constat me fait vachement chier.

T'es vraiment nul avec cette fille, sale con !

Elle sort un pansement de sa trousse, prête à continuer à me soigner, mais alors qu'elle ouvre le pansement et s'apprête à me l'appliquer, je prends doucement ses poignets. Sa surprise lui fait froncer ses sourcils, et je perçois un mélange de frissons et de résignation chambouler ses émotions.

— Si tu as des choses à me reprocher, fais-le, Cassie, mais ne me torture pas en tournant autour du pot comme ça.

Nos yeux se rencontrent, et le silence qui s'en suit est lourd de sens.

Dans ce petit espace confiné, la tension qui serre mon ventre est presque palpable. Je ressens la chaleur de ses poignets doux et aussi ses tentatives pour que je lâche prise. Mais je ne la laisse pas s'échapper, pas encore.

Sauf que j'ai l'impression que mon emprise éclaire une étincelle apeurée dans ses iris. Et je déteste lui provoquer ça.

— Je ne te ferais jamais aucun mal. Mais j'ai vraiment besoin que tu me parles, murmuré-je.

— Callahan... je veux juste panser ta plaie... je n'ai rien à dire.

— Regarde-moi, lui ordonné-je doucement.

Elle baisse les yeux vers moi, mais c'est furtif, son regard glisse de nouveau vers le sol.

— Tu ne peux pas me regarder dans les yeux, Cassie ?

— S'il te plaît... on n'est pas obligés...

Sa voix est suppliante...

— Cassie, regarde-moi quand je te parle.

Finalement, elle se force à me fixer, mais je peux voir qu'elle lutte, et que chaque seconde passée dans mes yeux lui coûte.

— Tu es toujours en colère contre moi ? Pour tout à l'heure, c'est ça ?

Elle ouvre la bouche pour dire quelque chose mais finalement rien ne sort :

— Je suis désolé que tu aies assisté à ça... Je ne voulais pas que tu me voies comme ça.

Ma voix est basse et intime. En réalité, je regrette vraiment qu'elle ait vu cette part de moi...

L'expression de Cassie semble exprimer un tumulte d'émotions qu'elle a du mal à masquer.

Elle rougit, elle est perdue et confuse, mais finalement, elle me lâche un peu précipitamment et dans un chuchotement :

— Je ne sais rien de toi...

Je ne m'y attendais pas. Mes paumes possèdent toujours ses poignets et pendant une seconde j'essaye de faire le vide dans mon esprit.

Elle a raison. Elle ne sait rien de moi.

— Il n'y a rien à savoir, répliqué-je machinalement.

Cal'...

— Alors... dans ces cas-là, reprends ta bague... rétorque-t-elle sur un ton distant tout en me fixant.

J'ai senti mes sourcils se froncer et mon cœur raté un battement. Je ne sais pas quelle tournure les choses sont en train de prendre, mais je n'ai pas du tout envie de glisser sur cette pente-là. Sauf que Cassie n'en a pas l'air, mais elle est deux fois plus têtue que moi, et quand elle est en colère elle ne fait pas semblant.

— Cette bague ne se reprend pas. À part le jour où je graverais mon nom avec le tien dessus.

— Arrête, Cal' !

Sa fureur me surprend un peu. Elle tire plus fort sur ses poignets, et même si je ne l'ai pas lâché, je sens sa fragilité et la détresse dans sa demande.

Je tique intérieurement en ayant la mauvaise impression d'avoir froissé quelque chose entre nous en laissant ma haine prendre le dessus sur moi tout à l'heure.

Taylor de merde !

J'aurais dû m'occuper de lui en même temps que son putain de frère, à l'abri des regards et je n'aurais pas eu à subir la colère de microbe.

— Comment tu veux que je croie en tes promesses alors que je ne sais rien de toi !

J'ai l'impression que ses mots me giflent. Toujours assis sur cette baignoire, je la rapproche de moi en faisant pression et même si elle essaye de mettre le maximum de distance entre nous, je garde un poignet dans ma paume, tandis que mon autre bras s'entoure dans son dos.

La cadence de mon cœur n'a rien de normal. Je ne suis même pas sûr de comprendre ce que je suis en train de ressentir, et au fond de moi, je sais que je n'y ai pas le droit. Et pourtant, c'est plus fort que moi.

Je reste silencieux un moment en cherchant les mots justes dans ce désert de non-dits.

Puis, je murmure sans me contrôler :

— Shqiptarët vdesin dhe Besën nuk e shkelin...

Mon amour fronce les sourcils, confuse, je ne peux pas m'empêcher d'avoir un léger sourire en coin alors que je sais pertinemment le poids et les responsabilités que cette promesse que je viens d'invoquer renferme.

Je lui traduis doucement, presque dans un souffle :

— Un Albanais préférerait mourir plutôt que de violer la besa.

Elle ne comprend toujours pas, et j'ajoute :

— Ça veut dire que les promesses que je te fais sont vraies, et en prononçant la besa, je ne peux en aucun cas rompre ma promesse. Si je ne les respecte pas, je suis un homme mort, Cassie.

Mon bras se serre dans son dos.

Je ne veux pas qu'elle parte.

Mais sa réticence commence doucement à me faire un petit trou dans la poitrine.

Je ne veux plus jamais qu'elle parte...

— Qu'est-ce que c'est... la besa ?

Sa petite voix me donne envie de poser mes lèvres sur son ventre pour la posséder un peu plus, mais je me retiens. Son odeur fruitée tend les muscles de mes cuisses, j'ai autant d'envies que d'apaisement en sa présence.

Son visage est mon paradis.

— Ça signifie... la foi... ou l'engagement sur l'honneur. C'est une coutume très ancienne qui insiste sur la fidélité d'un homme à tenir ses promesses.

Le regard de Cassie cherche la faille dans le mien. Je sens bien que tous mes préceptes sont parfois des concepts inconnus pour elle. Ma paume glisse doucement le long de son dos. J'entends son souffle s'intensifier et ses frissons la crisper.

Mais ça ne dure qu'un instant.

— Je ne suis pas sûre de vouloir m'accrocher à des promesses... Callahan.

Elle est sceptique et je le vois sur les traits de son visage.

— Je comprends... mais tu m'as dit que tu me faisais confiance.

Je cherche dans ses yeux une confirmation.

Mais elle se mord les lèvres. Je sens qu'à l'intérieur, c'est la guerre. Elle veut me dire oui, mais en pesant le pour et le contre, elle se cramponne à l'idée qu'elle ne me connaît pas assez.

Je reprends son autre poignet que j'avais laissé plus tôt et me lève. Je la surplombe de toute ma taille et c'est elle qui relève la tête pour trouver mes yeux. Je vois ses poumons pousser sa poitrine, qui me montre ses tétons qui pointent sournoisement.

— Cassie ?

Elle détourne le regard.

— Tu ne me fais pas confiance ?

Je sens qu'elle veut mettre encore cette putain de distance entre nous. Moi je suis pris d'un besoin irrésistible de me rapprocher d'elle. Je me penche et mes mains se posent doucement sur son visage, mes pouces caressent ses joues.

Elle hésite à me répondre, ses lèvres tremblent légèrement. Je me rapproche encore, nos nez s'effleurent. La tension entre nous est palpable, électrique, dévastatrice...

— Est-ce que tu me fais confiance... ? répété-je doucement une troisième fois tandis que nos respirations se mélangent.

Nos lèvres s'effleurent, un contact si léger que pendant une seconde, je crois à un rêve. Je sens qu'elle veut me céder ça. Elle se laisse aller quelques secondes, et mes lèvres trouvent furtivement les siennes.

Nos bouches se rencontrent, mais le contact est désespérant et furtif. Elle gémit un peu, mais elle n'est pas sûre. Parfois elle s'agrippe à mon pull, mais elle ne le garde jamais très longtemps entre ses doigts. Je sens son corps se tendre sous mes mains.

En réessayant de sentir son affection, elle détourne finalement la tête.

Elle ne veut pas de ce baiser, pas dans ces conditions, pas maintenant.

Son geste creuse encore la distance entre nous.

— Parle-moi, lui demandé-je en espérant qu'elle s'ouvre.

J'espérais qu'elle me donne tout, ses peurs, ses espoirs, tout ce qu'elle cache derrière son silence.

Tandis que moi... je me terre dans mes secrets...

Une sorte d'inquiétude inhabituelle s'alourdit sur mes épaules. La sensation est déprimante. Je la vois me glisser entre les doigts et cette finalité est tout simplement impossible à accepter.

— Tu n'as rien besoin de savoir de plus sur moi, Cassie... il n'y a rien d'intéressant pour toi. Tout ce que tu as vu de moi depuis ces derniers mois, c'est ce que je veux que tu gardes en tête, tenté-je de la rassurer.

— Pourquoi... ça ne m'intéresserait pas d'en savoir plus sur toi ? Je veux apprendre à te connaÎtre entièrement...

— Parce que j'aime celui que je suis quand je suis avec toi. Et je n'ai pas envie que tu voies autre chose que Callahan.

— Qu'est-ce qu'il y d'autres à voir ?

— Justement... Rien d'intéressant....

Mes mots sonnent creux même à mes propres oreilles.

— Ça me fait peur...

— Tu connais mon nom, et mon cœur, zemër, c'est suffisant.

— Pas pour moi. Ce n'est pas suffisant. Je ne veux pas découvrir de nouvelles facettes de toi comme tout à l'heure.

— Tu les as toutes vues, mes facettes, quand je suis avec toi. Tu me connais.

— Non, c'est faux, je n'en sais rien. Tu as... t'as failli... j'ai cru que tu allais le tuer... je ne t'avais jamais vu comme ça... tu étais violent... froid... calculateur, même... s-sadique... comme si tu étais une autre personne. Même tes yeux... ton regard, ce n'était pas comme maintenant...

Je me sens désespéré. Parce que ces tous ces mots, c'est moi aussi.

C'est Ghost. C'est Callahan.

Et je vois bien la lueur qui attriste ses iris qui me fascinent...

Je déglutis en cherchant ma réponse :

— Tu n'auras jamais à subir cette partie de moi...

— Ça, je n'en sais rien !

Elle s'est un peu écriée, en secouant ses bras, elle se libère de mon emprise et recule d'un pas. Plus l'espace physique et mental qu'elle crée entre nous s'agrandit et plus j'ai l'impression que la petite sensation désagréable que j'ai dans la poitrine prend de plus en plus de place.

Son expression me montre clairement qu'elle doute de mes paroles, et de mes intentions.

Son comportement me perd une seconde. Je ne suis même pas sûr de savoir si je suis frustré, en colère ou complètement paumé. Je secoue la tête et lui lâche :

— Je ne comprends pas ce que tu nous fais là.

Ma voix est sortie plus dure que je ne l'aurais voulu.

— Écoute, ce n'est pas grave. Je... je finis de panser ta blessure et après je te laisserai rentrer chez toi, me dit-elle en prenant un nouveau pansement.

— Non, t'as mal compris, Cassie, je ne vais nulle part tant que je n'ai pas saisi ce que tu es en train de me faire là.

— Callahan, je ne veux plus en parler.

Elle se rapproche de moi avec la ferme intention d'appliquer le pansement. Mais je n'en ai vraiment pas fini, et je ne peux pas laisser le débat s'arrêter là :

— Tu comptes fuir toutes nos explications à chaque fois que ça devient trop pour toi ?

Son regard est visiblement choqué par ma question.

J'avoue que c'est de la provocation.

Et j'avoue que je veux qu'elle s'énerve vraiment.

J'attends qu'elle réagisse. Qu'elle me hurle quelque chose au visage, qu'elle me reproche un million de choses, assez pour que je puisse au moins me défendre.

Mais au lieu de ça, elle me dit sur un ton presque clinique :

— Tu peux t'asseoir, pour que je mette ce pansement. Ta blessure saigne encore.

Elle se fout de moi !

Ma frustration explose et monte en flèche en moi.

— Je m'en bats les couilles de ce putain de pansement, Cassie, je veux que tu me parles !

— Et tu veux que je te dise quoi exactement !? s'écrit-elle en perdant patience.

Enfin !

Parce que j'ai un besoin désespéré de comprendre ce qui se passe.

— Je veux que tu m'expliques ce que tu nous fais là. Pourquoi tu me fuis comme ça ?

— Je te l'ai dit, je ne sais pas qui tu es ! C'est tout !

— Tu sais très bien qui je suis, Cassie, t'en sais même un peu trop sur moi.

— Qu'est-ce que je sais concrètement de toi !? me défie-t-elle en m'interrogeant d'un geste de la main.

— T'es vachement culottée pour une fille qui est aussi muette qu'une tombe !

— C'est incomparable ! s'énerve-t-elle. Tu sais un tas de trucs sur moi ! Tu sais que j'adore lire, que Twilight et Valentina sont mes sagas préférées ! Tu sais que je suis timide, et que je bégaye beaucoup ! Tu sais que j'ai un journal intime ! Tu sais que je suis mortellement allergique aux noisettes, tu connais mes meilleures amies, et je t'ai même déjà confié des choses sur Cherry ! Tu as déjà parlé à ma mère ! Je t'ai tout avoué sur mon ex et ces photos que j'ai faites ! Et je peux te lister encore un million de choses personnelles que tu sais sur moi !

Sur le coup, ses mots me frappent comme des coups de poing en pleine face.

Et elle me donne le coup de grâce en me criant :

— Qu'est-ce que je sais de toi à part que tu aimes la moto, que tu es albanais, et ce que tu m'as confié sur tes bagues ? Mes secrets me pourrissent moi, et ne représentent absolument aucun danger pour toi !

Le silence qui suit est lourd.

Parce que moi je ne pourrais pas en dire autant.

Mes secrets la pourriraient elle et mettraient sa vie en danger.

Son index pointé sur son cœur, sa colère transparaît dans sa façon de me regarder, et elle continue de m'accabler en me lâchant :

— Je suis désolée de le dire, mais parce que tu m'as donné une bague de promesse ne signifie pas que tu la tiendras ou que ça me met dans la confidence sur quoi que ce soit te concernant. Jamais je n'aurais pu soupçonner ce que tu as fait tout à l'heure et ça me fait peur ! Je te hurlais d'arrêter, mais j'avais l'impression que tu ne m'entendais même pas. Tu étais... sadique... et incontrôlable... tout le contraire de l'homme doux et gentil que je connais. Tu es impossible à percer à jour, Callahan ! Après ça, tu ne peux pas me demander de te faire confiance !

Est-ce qu'elle a tort ?

Pas totalement.

Est-ce qu'on son discours m'énerve quand même ?

Totalement.

Parce que j'ai la sale sensation de la perdre, et putain, ça fait un mal de chien !

Elle me fixe et je tente de lutter contre ma propre fureur :

— Ton putain d'ex était en train de t'agresser. Est-ce que tu penses une seconde que j'allais le laisser s'en tirer indemne ?

— Non, mais, je- je ne voulais pas que tu le massacres !

Cassie secoue ouvre les paumes comme à chaque fois qu'elle laisse sa colère exploser.

— Ce type serait mort si ça ne tenait qu'à moi, il n'y a personne sur cette terre qui t'approche comme ce bâtard l'a fait !

— Je ne veux pas que tu tues pour moi ! Je ne veux pas que des gens soient blessés à cause de moi !

L'écart entre nos mondes semble devenir encore plus grand après ces mots. Je ne peux pas, je ne veux pas laisser quelqu'un la blesser. Et pour ça, je sais que je pourrais tuer.

Mais Cassie est pure, et moi...

Je suis un fantôme... et mes mains sont sales...

— Non mais t'as rien compris toi, ce mec a fini dans cet état à cause de ses actes à lui ! Tant qu'il ne te touche pas, il ne lui arrivera rien ! Il t'a touché, il m'a trouvé, c'est aussi simple que ça !

— Et tu trouves ça normal ?

— Mais oui, putain ! m'écrié-je en m'approchant d'elle ce qui lui provoque un mouvement de recul. Oui ! C'est normal envoyer ce mec six pieds sous terre après tout ce qu'il t'a fait, j'peux pas croire que tu défendes cet enfoiré devant ma gueule, putain de merde !

— Je ne le défends pas, je te demande juste comment tu peux fièrement te vanter de pouvoir mettre fin à ses jours comme ça !

Je ne peux pas la laisser croire que je prends plaisir à cette satanée violence. Elle doit juste comprendre qu'elle est influencée par ce besoin viscéral que j'ai de la savoir protégée, en paix, et à l'abri de tout danger.

Sans me contrôler, je saisis son visage entre mes mains, la forçant à me regarder, à voir la vérité dans mes yeux. Elle hoquette de surprise, et je nous recule contre le mur de sa petite salle de bain, jusqu'à ce que son dos s'y colle.

— Qu'est-ce que tu ne comprends pas quand je te dis que tu es à moi !?

Elle frissonne sous mon toucher et à mes mots. Je sens ses paumes dans mon ventre essayer de me pousser.

Elle n'en a pas vraiment envie...

— Tu n'as pas le droit de me dire ça... murmure-t-elle douloureusement, alors que je vois que ses yeux commencent à briller.

Elle lutte pour se libérer, et je sens mon cœur battre à tout rompre et je sais que le sien est aussi erratique que le mien.

Je caresse doucement son visage avec mes pouces en espérant que ça calmera un peu le déchaînement de colère qu'il y a entre nous :

— La bague que j'ai autour du cou me prouve que j'ai tous les droits de te réclamer comme étant mienne.

Mais cette fois-ci, elle me dégage brusquement. Je recule de quelques pas, et rapidement, elle retire son collier de perles qu'elle a autour du cou. Elle fait glisser ma bague qu'elle avait saignement garder là, et me la tend :

Je le vis comme un petit coup de couteau dans le ventre et aussi vite que cette douleur est arrivée, je veux qu'elle disparaisse.

— Pourquoi tu nous fais ça ? Putain, pourquoi tu fais tout le temps ça !? Tu ne peux vraiment pas t'en empêcher ! Dès que je fais des pas vers toi, tu fais en sorte de tout détruire pour que j'en fasse un million en arrière et après il faut tout recommencer !

— Parce que tu me fais peur ! Et je ne veux pas finir avec le cœur brisé et des côtes cassées ! me lance-t-elle en essuyant rapidement du revers de la main une larme qui s'était échappée.

Son aveu me coupe le souffle.

Déjà je ne m'attendais même pas à ce qu'elle m'avoue si vite les choses.

Je reste un peu sur le cul pendant quelques secondes.

Le cœur brisé et des côtés cassées...

La phrase me glace le sang.

— Je... je te fais peur ?

Mon murmure me serre le cœur. J'ai l'impression de ne pas avoir assez de place dans ma poitrine pour laisser ce conflit s'exprimer. La tournure de la dispute devient trop oppressante.

L'idée même qu'elle ait peur de moi ou que je puisse lever la main sur elle me déprime complètement. L'air me semble si toxique et mélancolique que je dois inspirer plus profondément pour bien remplir mes poumons.

Je ne sais même pas comment je vais pouvoir m'y prendre pour réparer cette confiance qu'elle m'avait accordée avant de me voir défoncer ce fils de pute de Taylor avec sadisme.

Je vois sa main s'agiter devant moi. Ma bague brille entre son index et son pouce et elle me murmure :

— Reprends-la... s'il te plaît... ce n'est pas grave si ça n'a pas marché...

Elle évite mon regard, ses yeux mouillés sont fixés sur le sol carrelé. Ses mains tremblent, et je fixe cette promesse.

Et rien en moi me dit que je violerais la besa que je lui ai faite.

Rien en moi ne veut reprendre cet anneau.

Rien ne me dit non plus que ça ne marchera pas.

— Je ne peux pas faire ça, je réponds d'une voix basse.

— Callahan, je t'en prie...

Elle insiste en poussant la bague plus près de moi, comme si ce geste allait me convaincre. J'ai presque envie de reculer comme si cette bague était empoisonnée.

— Putain...

Mes mains se croisent sur ma nuque. La cadence de mon cœur m'assassine. C'est une torture sans nom.

— Garde-la... je ne la reprendrais que quand ton nom sera inscrit à l'intérieur.

— Elle ne sera jamais à moi, tu le sais aussi bien que moi !

— C'est faux, Cassie, tu as déjà décidé pour nous !

— Pour nous ? me questionne-t-elle furieusement en plantant ses iris bleu gris dans les miens. Mais de quoi on parle exactement ? Callahan, tu ne me diras jamais rien de plus sur toi ! Et en juillet tu disparaîtras en même temps que la fin de ton contrat ! Tout ça, c'est-c'est qu'un joli fantasme que ni toi ni moi ne pouvons assouvir. Même ma mère me l'a déjà bien fait comprendre ! Et toi tu as l'air d'avoir tellement de secret et de codes que je suis persuadée que si ce n'est pas moi qui garde les pieds sur terre, tu le feras pour moi de toute façon !

J'ai comme une illumination qui connecte les neurones de mon cerveau après son discours.

Pendant une seconde j'envoie les codes de l'Ordre aller se faire foutre en oubliant l'idée qu'une part de ses mots sont vrais.

— Dis-moi la vérité, Cassie, est-ce que tu as vraiment peur de moi, ou c'est juste que tu as peur d'un potentiel nous ? Et l'idée que tu pourrais te donner à moi ?

Son visage s'écarquille de choc. Elle entrouvre les lèvres et je sais que j'ai mis le doigt sur le vrai problème.

— Je ne veux pas avoir cette discussion, récupère ta bague !

— Cassie... putain !

J'ai haussé le ton, et ma frustration s'est manifestée avec mes mains glissant dans mes cheveux que je tire en arrière.

— Pitié... tu sais que tu peux me parler, putain, arrêtes de prendre la fuite à chaque fois que ce que je te dis te stresse !

— Qu'est-ce que tu veux que je te dise !? Je t'ai demandé qui tu étais, et tu ne veux pas m'en dire plus, alors qu'est-ce que ça changera que je parle ou non !?

— Celui que je suis avec toi, c'est la version la plus vraie et authentique que personne n'a jamais eue de moi ! Et, non seulement tu n'as pas besoin de voir les fantômes qui sont en moi, mais en plus, je n'ai absolument pas envie de te les imposer ! Et crois-moi ça vaut mieux pour toi, comme pour moi. Cassie, le vrai problème, là, c'est que tu es morte de peur à l'idée que je te brise le cœur ! Mais je n'ai aucune intention de le faire !

— Ça, tu ne peux pas me le promettre !

— Et pourtant je vais te le promettre quand même, je ne veux pas te briser le-

— Tu n'as pas le droit ! me coupe-t-elle d'une voix étranglée en éclatant en sanglots.

Son désespoir glisse sur ses joues qui s'inondent de larmes salées.

— Pourquoi, Cassie, putain !? Pourquoi ?

Je fais un pas vers elle et notre espace se réduit à nos souffles courts, nos colères et surtout ces non-dits qui, nous le savons, nous empêche de passer le cap. Je cherche son regard, une connexion, quelque chose qui me montrerais qu'elle pourrait croire qu'il y a un peu d'espoir, mais au final elle me dit :

— Dans quoi je m'engage en gardant garde cette bague, hein !? Dis-le-moi !

Elle me montre la bague, la tension s'étire, et j'ai peur qu'elle éclate.

Sa question me coupe dans mon élan.

J'ai les images de mon clan, et ces trois dictons...

"Nderi është mbi jetën" : "L'honneur est au-dessus de la vie".

"Hakmarrja është detyrim" : "La vengeance est un devoir"

"Vie Victus" : "Malheur aux vaincus"

Qui m'enchaîne à un ordre sur lequel je n'ai aucun contrôle.

Et tu sais qu'elle ne fait pas partie de l'Ordre...

Avant même d'avoir eu le temps de répliquer, elle surenchérit :

— Parce que tu ne peux pas décider pour moi de ce qui m'intéresse ou non chez toi. Le regard que tu avais... tout à l'heure... Ce sadisme... Callahan... ce n'était pas toi... C'était... Je ne veux pas croire que c'était toi. Et je ne veux pas me réveiller un jour et me rendre compte que j'ai tout cédé à un homme que je ne connaissais pas réellement ! J'ai trop peur de revivre ça une deuxième fois !

Toute cette dispute s'infiltre dans le tréfonds de mes veines, et je crois que le pire, c'est que je sens à quel point elle a peur de la douleur que ça lui a fait de faire confiance à un homme...

Ça a détruit et bousillé cette fille...

Son père...

Son ex...

Moi...

— Cassie, ce n'est pas parce qu'un fils de pute t'as fait du mal que j'ai envie d'en faire tout autant ! Tu laisses tes peurs me condamner, sans même me laisser une petite chance !

— Je ne veux pas-

Un bruit sourd éclatant au rez-de-chaussée la coupe net dans son discours.

Je lève rapidement la tête vers la porte fermée de la salle de bain, tandis que Cassie se tourne en sursautant. Elle essuie ses larmes sur ses joues.

Mon corps se tend instinctivement. Mon cœur palpite violemment et chaque sens en moi se réveille. Je dégaine mon Tokarev et mes doigts s'enroulent autour du manche froid sans attendre.

— C'est... c'est peut-être Sherlock... chuchote-t-elle en me regardant pas du tout rassurer.

— Reste ici, je vais aller vérifier. Quand je sors, tu t'enfermes dans cette salle de bain et tu te caches dans la douche, tu as compris ?

Mon ordre lui fait hausser la tête sans plus de questions.

Je suis déjà en mode survie, et mon pouce baisse la sécurité de mon arme. Je lance un dernier petit regard furtif à Cassie avant d'ouvrir la porte avec prudence :

— Tu reste ici, je répète d'une voix basse.

Elle hoche encore la tête rapidement, ses yeux larges trahissent son inquiétude. Mais je sors après avoir inspecté le couloir. J'entends le claquement de la serrure qu'elle referme, et je vérifie que la porte est bien verrouillée en baissant la poignée.

Pulsation après pulsation, mon cœur bat à un rythme effréné. Mon arme rivée droit devant moi, je sais que je tirerais sans hésiter si besoin est.

Mon dos se plaque au mur de ses escaliers pour me couvrir. Mon regard balaye chaque recoin sombre, heureusement que la lumière de la lune éclair un tant soit peu la noirceur de la cuisine et du salon.

Le silence de la maison est angoissant. Lorsque j'arrive à la dernière marche, ma basket fait grincer le parquet au sol, je coupe mon souffle, on aurait dit que le monde entier l'a entendu.

Une vieille peur me retourne l'estomac... Malgré mon esprit en alerte maximal, en m'enfonçant dans la demeure, j'ai parfois l'impression trompeuse d'entendre le son lointain de balles tirées en rafales...

Celles en Irak...

Je secoue légèrement la tête pour essayer de reprendre contenance en respirant profondément pour calmer les battements furieux de mon cœur.

Mon avancé m'emmène près de la cuisine.

Je sens mes paumes devenir moites. Il ne faut surtout pas que Cassie sorte, sous aucun prétexte.

Et mon instinct me pousse à contourner l'îlot central. J'avance en priant d'être aussi discret qu'un fantôme.

Mais soudainement, un gémissement m'échappe en sentant une vive et rapide douleur me couper le bras. Mon corps réagit avant même que mon esprit ne comprenne ce qui se passe, je pivote, et plante mon arme en joug sur le visage d'un homme.













Bonsoir bonsoir, bonsoir ! 🎃

Vous allez toujours bien ? ☕️





Franchement... Ce chapitre, CERTES, j'ai ramé pour le sortir de mon voile, mais comment je L'AIME TROP ! J'ai vraiment kiffer travailler dessus, la première partie Cal vs Taylor, pardon mais j'ai bien insisté sur le sadisme de Ghost, et puis après Casbaby qui est vraiment pas bien vis à vis de cette facette de Callahan qu'elle découvre un peu comme un cheveux sur la soupe.

(Je prévois déjà le coup parce que je sais déjà que ma Casbaby va se faire insulter. Mais comprenez bien que Cassie c'est une fille comme vous et moi, et franchement si demain mon albanais d'1m95 tabasse un mec comme ça avec sadisme, personnellement je vais commencer à me poser un tas de question sur ses activités pardon ! Du coup Cassie à un peu chaud de Callahan, sachant qu'elle n'est pas très à l'aise avec les hommes violents non plus, donc ça la perturbe énormément et Cal' c'est pas l'Albanais le plus causant du pays... donc là il doit se mettre en reconquête et oui !)

En tout cas, il m'a bien fallut un bon mois pour me remettre dans Ghost (Tout ça pour me remettre dans Valentina 😬). Mais là dernière fois en lisant les commentaires j'ai vu une fille dire que l'histoire n'avançait pas, et je me suis eh bah elle à raison MDR ! On s'est assez focalisé sur Cas' et Cal', et leur relation s'est assez solidifiée pour laisser place à la destruction, la douleur et tout ce que vous aimez et me quémandez 😗 !

Franchement je voulais vraiment que les personnages soient proches pour que je puisse installer un peu plus d'action, mais comme on dirait que certains n'aime pas les moments chills, itttt's timmmeeee pour un peu de SANG 😙 ! Voilà, aussitôt demandé aussitôt servie !

J'ai même décidé de changer un peu mon scénario pour un peu plus de spicy quoi, qu'on se le dise comme c'est 😘 !


Sinon !


IT'S TIIIME TO TAKE THE TEA : ☕️, je veux tout entendre, vos impressions, vos ressentis, vos théories, vos retours pour ce chapitre ? Dites-moi tout !


J'arrête de vous dire si y'a des théories à faire, en vrai j'aimerais trop avoir aussi vos analyses comportementales ? 🧐


(PS : Je ne sais pas quand je posterais le prochain chapitre les gars 🥲...)


Mon Discord est dans ma bio Instagram pour celles qui veulent échanger après les chapitres Ghost, théories etc... ✌🏾😗





BYE 🏍💨🪐 !



Stardust 🍓



𝚂𝚎𝚎 𝚢𝚘𝚞 𝚜𝚘𝚘𝚗 🕰...



xo, Azra. ✿



IG: azra.reed

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