𝟹𝟽. 𝚁𝚎̂𝚟𝚎 𝚎𝚝 𝚌𝚊𝚞𝚌𝚑𝚎𝚖𝚊𝚛.

(𝖣𝖾́𝗆𝖺𝗋𝗋𝖾𝗓 𝗅𝖺 𝗏𝗂𝖽𝖾𝗈 𝗉𝗈𝗎𝗋 𝗏𝗈𝗎𝗌 𝗉𝗅𝗈𝗇𝗀𝖾𝗓 𝖽𝖺𝗇𝗌 𝗅'𝖺𝗆𝖻𝗂𝖺𝗇𝖼𝖾)






"Quand on enferme la vérité sous terre, elle s'y amasse, elle y prend une force telle d'explosion, que, le jour où elle éclate, elle fait tout sauter avec elle."
Émile Zola.





𝙰 𝙲 𝚃 𝟺.

🎠 𝙳 𝚎́ 𝚌 𝚎 𝚖 𝚋 𝚛 𝚎.






𝟥𝟩. 𝖱𝖾̂𝗏𝖾 𝖾𝗍 𝖼𝖺𝗎𝖼𝗁𝖾𝗆𝖺𝗋.




Ghost.





— J'ai pensé à un truc...

— Oh, faites-le taire, par pitié, soufflé-je amusé.

— Fais chier ! rouspète-t-il en tapant contre le réservoir de kérosène.

Reece se met à râler en mâchant bruyamment son chewing-gum.

Ses lunettes de soleil noires posées sur son nez le rendent encore plus con qu'il en a l'air. Il se met à insulter, sans s'arrêter, la pompe à fuel qui fonctionne mal depuis trois jours.

La base militaire est assez agitée ce matin. Des groupes de soldats se dépêchent, d'autres vérifient leur équipent et son déjà lourdement vêtus.

On est à quelques minutes d'une l'opération de reconnaissance qui était prévue depuis des semaines.

Une jeep passe à côté de nous, et soulève un petit nuage de poussière sur mes bottes.

En entendant la voix de Reece, mon attention se reporte sur lui.

Le générateur d'électricité est bientôt à sec, et il a besoin d'être alimenté.

Reece donne des coups secs et brutaux contre la presse. Mon regard passe de lui à Lyle et Austin qui font partie de notre division. Ils sont tous les deux en train de regarder le carnage que Reece est en train de faire avec la pompe. Je me retiens de rire en jouant avec le cure-dent qui pend sur mes lèvres.

— Bon, t'as pensé à quoi, budall ? On n'a pas le temps là.

Reece se tourne vers moi, un sourire en coin, les yeux pétillants de malice :

— "Budall, budall", m'imite-t-il avant de rapidement changer d'expression. Mais putain de pompe de merde ! J'peux vraiment pas mettre de carburant les gars !

— Un problème, soldat ?

Nous tournons tous la tête vers le colonel O'Brian.

L'atmosphère se refroidit d'un coup, et son regard sévère se plante sur Reece. Sans perdre une seconde, nos corps se raidissent, Reece enlève ses lunettes, j'enlève le cure-dent dans ma bouche, et avec Lyle et Austin nous faisons tous le salut militaire au colonel d'un geste de la main à hauteur de tempe.

— Colonel, continue Reece, la pompe à fuel fait des siennes, mais n'ayez crainte, je suis sur le coup !

Je pince les lèvres pour contenir mon envie d'exploser de rire.

Ce petit con s'amuse toujours à adopter un langage plus soutenu quand il s'adresse au colonel.

— Vous avez quinze minutes avant le départ.

Reece hoche la tête :

— Compris, mon colonel !

O'Brian ne s'éternise pas. Il hoche la tête et nous quitte d'un pas rigide. Je remets mon cure-dent dans ma bouche et jette un regard blasé à Reece, qui pose ses lunettes sur son crâne, puis à Lyle et Austin. On souffle tous les quatre avant de revenir à l'objet de notre attention.

Cette foutue pompe.

Néanmoins, j'avoue que mon regard se dérobe de notre base militaire, et se perd sur l'étendue du désert qui s'étire à perte de vue.

Le paysage magnifique est en réalité si cruel. La chaleur déforme l'horizon en un mirage zigzagant. Mais pour être honnête, je ne cesse d'être émerveillé pas ces dunes dorées.

Parfois, aux aurores, quand on a le temps, on s'accorde un moment de tranquillité avec Reece. On s'assoit sur des chaises pliables et on termine nos cafés jusqu'à ce que le soleil colore d'or ce sable fin.

Il est assez tôt, mais le soleil commence déjà à nous réchauffer.

Mon t-shirt colle à ma peau. Je secoue le tissu pour me faire un peu d'air et ma plaque militaire contre mon torse tinte à chaque mouvement.

La frustration de Reece avec la pompe brise à nouveau le silence :

— Non mais c'quoi c'délire ! Quelqu'un s'est amusé à la saccager ou quoi ? Pompe à la con ! Ça me fait chiiiier sérieux !

Je fixe la pompe :

— T'as essayé de voir si le filtre n'était pas bouché ?

— Ouais, et c'est pas ça, chef. Mais bon bref, je disais !

Le connaissant, je sais déjà que sa question risque d'être aussi conne que lui.

Mon sourire revient, Reece plonge son regard vert et malicieux dans le mien. Sa petite barbe et sa moustache cendré ont bien besoin d'un rasage, mais comme d'habitude, il attendra au dernier moment avant de la raser.

Pendant qu'il se bat encore avec la pompe, je me tourne vers Austin et Lyle et leur lance :

— Il va dire de la merde, je parie mon déjeuner.

— T'as même pas besoin de parier, on sait déjà, affirme Austin en ajustant sa casquette sur son crâne, un large sourire aux lèvres.

— À tous les coups il nous parle de bouffe indienne, ou de mécanique, on commence à le connaître ce petit con, renchérit Lyle en secouant la tête exaspérée.

Reece nous fait des doigts avant de nous balancer :

—T'auras intérêt à me passer ton déjeuner, gueule d'ange, parce que cette question va complètement te retourner le cerveau.

Le surnom "gueule d'ange", me fait secouer la tête. Il m'appelle comme ça depuis qu'on s'est mis à regarder Prison Break, et qu'il s'est rendu compte que mon deuxième prénom était littéralement celui de Scofield, qu'on appelle également "gueule d'ange" dans la série.

Je réajuste mon fusil d'assaut dans mes mains en attendant qu'il parle.

— La question est simple, et c'est...

Je retiens même plus mon sourire, j'anticipe déjà la bêtise qui s'apprête à sortir de sa bouche.

— Et si...

Reece, en mâchant son chewing-gum, et en se battant toujours contre la pompe nous lance enfin :

— Et si on se rendait compte qu'on n'aimait pas le bacon ? Quelle serait notre vie à votre avis ?

La question me fait éclater de rire. Austin et Lyle me suivent dans mon hilarité.

— Allez ! Enculez-moi ce salopard ! lancé-je en riant. Je le savais, putain !

Un sonnerie stridente m'interrompt brusquement.

Je suis tiré de ce que je réalise être un rêve et me réveille en sursaut. Le cœur battant violemment contre ma cage thoracique, ma main se tend instinctivement vers ma table de chevet pour trouver la source du bruit.

Mon téléphone.

Dans mon agitation, je renverse une bouteille d'eau et ma boîte de médicaments. Les pilules se dispersent sur le sol dans un bruit de claquements sec.

Je saisis enfin mon appareil et regarde l'écran.

C'est Wayne.

Je décroche, rapidement en m'asseyant sur le bord de mon lit encore perdu entre rêve et réalité.

— Ouais ? Wayne ? Qu'est-ce qu'il se passe ?

Ma voix est rauque et je dois m'éclaircir la gorge en forçant un peu dessus pour la réveiller.

Ma chambre est partiellement plongée dans une semi-pénombre, les premières lueurs du jour se frayent un chemin à travers les fentes de mes rideaux sombres mal fermés.

— Bonjour, Callahan ? Je m'excuse, je te réveille ?

Wayne, toujours aussi courtois.

Je jette un coup d'œil à l'heure sur l'écran de mon téléphone, il est 6 h du matin.

— T'inquiète. Il y a un problème ?

Je me masse les paupières en essayant de sortir définitivement de mon sommeil.

— Je pars en voyage d'affaires ce week-end. Pas d'appels possibles là où je serai. J'ai traité tout ce qu'il y avait dans l'ordinateur de Darren, mais on pourra voir ça plus tard, il faut d'abord que je te parle de Cassie Bennett.

À la mention de microbe, une pointe d'irritation perce ma fatigue. Mes sourcils se froncent et je sens une tension étrange monter en moi. La plénitude de mon rêve et mon état ensommeillé disparaissent instantanément.

— ...Ouais ? murmuré-je perplexe.

— La dernière fois, quand on a croisé Cassie à Southwark, elle sortait bel et bien du 707. Et ce journaliste, Darren Mills, il fouinait dans sa vie depuis un bon moment déjà. Il a découvert que ce n'était pas la première fois qu'elle s'y rendait.

Poussé par une adrénaline angoissante qui pulse dans mes veines, je me lève de mon lit. Je commence à avancer dans ma chambre, l'information me frappe et m'inquiète de la pire des façons.

Comment ça... Microbe se rend au 707 ?

Une tension s'éveille dans ma poitrine qui se compresse. Les mots de Wayne me paraissent surréalistes.

— Wayne, qu'est-ce que tu me racontes ?

— Elle s'y rendait pratiquement tous les week-ends, pendant presque un an. Il y a deux ans de ça.

Je m'arrête net dans mon couloir.

Ma maison me paraît presque étrangère pendant une seconde. Ses mots me tombent dessus comme des coups de marteau.

— Q-quoi ?

Ma voix trahit mon scepticisme, je me sens grimacer.

— J'espère vraiment que t'es en train de te payer ma tête, lancé-je en allumant la lumière de ma salle de bain.

— Malheureusement, non. Et ce n'est pas tout...

Le calme imperturbable de Wayne me révolte presque face à la multitude de questions et d'émotions qui s'imposent sous ma peau.

Je prends ma brosse à dents, pose mon téléphone sur le rebord du miroir, mais ses prochains mots me pétrifient sur place.

— Elle s'y rendait pour acheter de la MDMA.

Mon reflet dans le miroir capte mes yeux. Ma brosse à dents s'arrête net dans ma bouche pendant une dizaine de secondes, je reste figé, incapable de bouger, de penser, de réagir.

Microbe ? Drogue ? MDMA ?

Hein ?

C'est du délire ?

Je fronce les sourcils, ce sont deux mots qui ne collent pas ensemble du tout. Mon cœur se met à tambouriner dans ma poitrine et je suis presque incapable de processer cette information correctement.

J'ai un mélange de colère, d'incompréhension, de doute, de vide ?

Elle se rend chaque semaine au 707 pour acheter de la putain de molly ?

Encore une fois, comment j'ai pu passer à côté de ça ?

Ça me frappe, en fin de compte... Qu'est-ce que je sais de cette fille ?

Rien que ce qu'elle veut bien me montrer. Je ne sais rien d'elle.

Je ne vois que la partie visible de l'iceberg...

Je suis tellement choqué que je jette un regard incrédule à l'écran de mon téléphone, juste pour m'assurer que je ne suis pas en train de perdre la tête et que je suis bien sorti de mon rêve.

Le nom de Wayne est clairement affiché, et me ramène à la réalité de cette conversation.

— Tche fous pas dma gueule ! Pitié !

— Callahan, je t'en prie... termine de te brosser les dents.

Son ton, bien qu'il ait essayé de le garder neutre, trahi son dégoût.

Je finis rapidement de me brosser les dents, puis je me lave le visage, en essayant en vain de chasser la légère rage qui se diffuse dans mes veines.

Elle s'est bien foutue de ma gueule la dernière fois.

Putain qu'est-ce que je suis con !

Ce qu'elle foutait là-bas putain ? Pourquoi acheter de la MDMA depuis deux ans ? Ces questions tournent en boucle dans ma tête, et me frustrent de plus en plus.

C'est le genre de situation que je déteste le plus, J'ai horreur d'être pris au dépourvu.

Et comme ça la concerne, elle, j'ai encore plus envie de vriller.

Je me regarde dans le miroir en m'essuyant le visage, incapable de calmer mon déluge de pensées. Non seulement ça m'énerve, mais en plus je me sens encore plus idiot.

Je la laisse un peu trop altérer mon jugement. Elle m'empêche d'avoir les idées claires et c'est dangereux autant pour moi, que pour elle.

Je reprends mon téléphone, avant de sortir de la salle de bain.

— Donc, répète-moi ça, lancé-je irrité en avançant dans mon couloir.

— Darren Mills avait plusieurs enregistrements vidéo d'elle. Quelqu'un a placé une caméra dans la ruelle où elle rejoint Ross à chaque fois. Il lui donne un petit paquet de MDMA. Elle le paye, et repart.

Je descends mes escaliers en serrant le poing. Chaque phrase me paraît pire que la précédente.

— Fais tout disparaître ! Je veux aucune preuve contre elle. Détruis ces enregistrements, Wayne.

— C'est déjà fait.

J'aurais dû m'en douter, il a toujours un coup d'avance.

— Mais qu'est-ce qu'elle fout, putain ? je me plains en m'enfonçant vers ma cuisine.

— Ça reste à élucider. Je ne sais pas ce qu'elle fait de la drogue après. Il faudrait peut-être que tu songes à la questionner à ce sujet.

Arrivé dans ma cuisine, je coince mon téléphone contre mon épaule en ouvrant le frigidaire.

— Ouais... je vais lui parler, soufflé-je finalement en refermant la porte.

Je meurs de faim, mais je crois que j'ai d'abord besoin d'un café.

— Et t'as pas plus d'infos sur son putain de stalker ?

Je prends une tasse dans un placard, et il me répond :

— J'ai rien. Je suis allé mener mon enquête au Starbucks, et personne ne connaît de 'Dani'.

— Mais putain ? Wayne !? C'est une blague ?

La tasse claque un peu trop fort dans la machine à café :

— On doit mettre la main sur ce type ! J'le sens vraiment pas sur ce coup-là !

— Ne t'angoisse pas maintenant, Callahan. Tu me parais plus inquiet que d'habitude, me reprend calmement Wayne.

Alors que le café finit de couler dans la tasse, je réalise que Wayne a raison ; je suis plus beaucoup plus inquiet que d'habitude.

Un genre d'angoisse sourde qui me laisse imaginer tout un tas de scénario qui pourrait lui arriver. Ce sentiment de malaise n'est effectivement pas habituel chez moi. Du moins, pas à cette intensité là...

Je passe une main dans mes cheveux, jusqu'à les tirer en arrière pour me ressaisir.

— Il faut juste qu'on règle ces histoires. J'ai l'impression que tout part en couilles et qu'on ne va pas voir la merde venir, expliqué-je en essayant de me montrer plus calme.

— Je comprends. Mais on va finir par le trouver, ce n'est qu'une question de timing.

Je sais qu'il essaye de me rassurer, mais Wayne est vraiment nul pour ça.

— Malheureusement, je dois te laisser. Je te contacterais une fois que j'aurais plus d'informations. Prends soin de toi, Callahan.

— Attends, Wayne !

L'urgence dans ma voix le stoppe. Je prends ma tasse de café fumante et avale une gorgée.

— Oui, dis-moi ?

— Tu pars où exactement ?

— C'est une information confidentielle, me répond-il simplement.

J'avoue que sans me contrôler, un petit rire m'échappe malgré la tension qui me ronge les os.

— Une vraie huître toi, t'exagère-là !

— Je suis navré... mais c'est le protocole.

Sa voix sérieuse et posée me donne presque envie de rire :

— Si seulement t'en avais quelque chose à foutre des protocoles toi, tu bosserais pas pour mon grand-père, rétorqué-je en ricanant. Bon aller, ça marche Batman, à plus.

— Au revoir, Cal'.

On raccroche, et mon rire s'éteint aussi vite qu'il est venu.

La colère que j'ai réussi à contenir le temps de l'appel explose soudainement dans mon ventre.

Je jette presque mon téléphone sur le plan de travail, et passe nerveusement ma main sur mon visage.

— Putain...

Le mot s'échappe de mes lèvres dans un souffle.

Qu'est-ce qu'elle me cache d'autre ? Qu'est-ce que je vais trouver si je creuse encore, merde !

Une anxiété pulse dans mes veines. Je ne sais même plus où me mettre. J'avale des gorgées de mon café pour me réveiller, mais j'ai l'impression d'être dans un cauchemar.

À travers les larges fenêtres de mon appartement, je vois la neige qui commence à recouvrir les rues de Londres. Le manteau blanc qui apaise les rues ne reflète en rien ce qui se passe dans ma tête.

Le week-end s'annonce interminable putain.

Rien que de penser aux missions que je dois faire, je sais pertinemment que je ne pourrais jamais aller la voir ni aujourd'hui ni demain. Pourtant j'ai qu'une envie c'est d'aller la confronter.

Je dois attendre encore quarante-huit heures et ça m'énerve d'autant plus.

Putain... elle n'a pas intérêt à se foutre de ma gueule lundi.








Lundi.


Cassie.





Le ciel est gris et bas sur Oxford en cette fin de journée.

Une neige fine recouvre les pavés de la rue. En saluant les filles, je m'enveloppe dans ma doudoune longue. Mes moufles en laine serrent mon sac contre moi, alors que je me dirige vers Callahan qui m'attend sur sa moto.

J'avoue qu'un sourire pousse mes pommettes.

T'es contente de le voir hein...

J'ai passé le week-end à rêvasser de notre soirée au marché de Noël d'Hyde Park.

Bon, oui, j'ai rédigé des pages et des pages sur lui dans mon journal intime. J'ai bien évidemment noté, surligné et dessiné des cœurs autour de la phrase :

« Ne t'inquiète pas, zemër. Tu n'as rien besoin de faire pour me plaire, je suis déjà fou amoureux de toi. »

Le week-end m'a paru interminable et c'est pour ça que je trottine presque pour le rejoindre rapidement. L'excitation de le voir fait battre mon cœur un peu plus vite. Aujourd'hui, c'était le dernier jour d'examen, je l'ai bien réussi donc tout va bien.

Ce soir, il y a une soirée de gala organisée par le parti de ma mère. C'est une soirée de Noël, juste pour montrer son engagement envers ses électeurs, certains élus de la société se rassemblent.

C'est un événement assez important et qui n'est pas propre qu'aux partis de ma mère, je sais que plusieurs candidats organisent ce type de gala. Et comme chaque année, j'accompagne ma mère. Elle m'a souvent demandé de sympathiser avec les filles d'autres sénateurs, mais je n'ai jamais réussi à le faire.

Mais pour une fois, pour la première fois, même si j'ai horreur des soirées et que l'idée d'y participer me stresse, savoir que Callahan sera là atténue un peu mes angoisses.

J'aime bien quand il est là.

J'approche de lui. La cadence de mon cœur et mon sourire me fait déjà rougir.

Sauf qu'à mesure que j'avance et que je guette l'expression de son visage, un voile de doute se colle à ma peau.

Il ne me regarde pas vraiment. Du moins, pas longtemps. D'habitude, il me regarde toujours approcher... ma joie se tarit un peu et elle est noyée par un léger sentiment d'angoisse.

Son expression me paraît sombre...

Qu'est-ce qu'il se passe ?

Il y a quelque chose de différent ce soir. Et j'ai déjà un million de questions qui tournent en boucle dans ma tête.

Il a l'air... en colère.

Est-ce que c'est à cause de moi ?

Qu'est-ce que j'ai fait... ?

Je m'arrête près de lui, en souriant doucement en espérant que ça brise un peu l'ambiance pesante que je sens déjà :

— Coucou Cal'... Tu vas bien ?

Je me retiens de pincer mes lèvres lorsqu'il me toise. Ses yeux me guettent comme s'ils ne me reconnaissaient pas.

Qu'est-ce que j'ai fait... ? Qu'est-ce que j'ai fait... ? Qu'est-ce que j'ai fait... ?

Une bourrasque de tristesse s'abat sur moi. Le sentiment douloureux qui me pince le cœur devient presque physique.

Mon sourire s'efface, et la confusion et l'inquiétude prennent possession de moi.

Je sens comme un rejet de sa part, et ça me donne la sensation que mon estomac tombe dans mon ventre.

Il me tend mon casque.

Je baisse les yeux dessus, une seconde à peine, mais c'est suffisant pour me rappeler que d'habitude, il m'aide toujours à le mettre. Ce petit changement, qui paraît si insignifiant, me frappe de plein fouet.

J'ai déjà la gorge qui se noue.

— Qu... qu'est-ce qui se passe, Callahan ?

Ma voix est sortie comme un souffle faible et effrayé.

Mais il ne tarde pas à me répondre :

— T'as pas quelque chose à me dire ?

La confusion s'empare de moi, mon cœur vibre violemment dans ma poitrine. J'étouffe.

Comment ça... ?

En fixant sa colère, j'essaye de chercher dans ma mémoire quelque chose. J'ai l'impression d'avoir gâché toute la bonne entente qu'on avait réussi à construire depuis ces quatre derniers mois.

Putain, voilà ! Je finis toujours par merder !

C'était sûr que j'allais finir par faire quelque chose de mal !

Je suis désemparée sous son regard dur. Je n'ai pas l'habitude qu'il me fixe comme ça... et ça me blesse sincèrement. Mes yeux me piquent mais je me retiens.

Je ne le reconnais pas, et je me sens de plus en plus mal. Ma boule d'angoisse dans ma gorge gonfle d'autant plus, mais je parviens à murmurer doucement :

— Q-qu'est-ce que je... je t'ai fait de mal ?

— Réfléchis un peu, t'es sûre que tu m'as bien tout dit ?

Qu'est-ce que j'aurais bien pu lui cacher... ?

— Tu n'as rien à me dire ?

Son impatience me met la pression.

— Tu peux m'expliquer ce que j'ai fait... je ne comprends vraiment pas, Callahan...

— Qu'est-ce que tu foutais à Southwark ? Pourquoi tu ne m'as pas parlé du 707 ? Et de ce qui se passe avec ce type, Ross ?

Merde !

Ses questions me tombent comme un coup de massue.

Putain, comment il peut savoir ça !?

J'ai l'impression d'être exposée au grand jour et j'entrouvre les lèvres pour parler mais sous ses iris intenses qui me scrutent, je les referme en faisant mourir mes paroles.

Mon casque dans mes paumes tremblantes. J'ai mille pensées qui s'entrechoquent. Mon cœur vrille dans ma cage thoracique, j'ai de plus en plus chaud et ça n'a rien d'agréable.

Comment je peux lui expliquer ça ? Ross ? La molly ? Taylor ?

Tu ne peux pas lui avouer ça !

L'angoisse me serre la poitrine, je panique, choquée qu'il ait découvert ce secret.

Comment il a su ?

S'il révèle ça au grand jour, ça va tout foutre en l'air... Les affaires de ma mère, sa réputation, sa place... Je ne peux pas prendre ce risque.

— C'est... pas... C'est vraiment pas ce que tu...

— C'est vraiment mieux pour toi que tu ne me mentes pas, ordonne-t-il catégorique.

J'ai presque eu envie de sursauter, son visage est renfrogné au point ou ses sourcils créent une ombre sombre sur ses yeux.

— T'énerve pas, Callahan...

— Vu comment tu t'es bien foutue de ma gueule en me disant que t'étais chez ta copine, la dernière fois à Southwark, j'pense que t'as d'autres problèmes à gérer que ma colère là.

Je me sens d'ores et déjà vulnérable et impuissante. Étranglée par mon stresse j'essaye de me dédouaner de toute cette situation :

— Mais c'est de l'histoire ancienne. J'y suis plus retournée depuis, je te le jure.

— Moi, je veux savoir pourquoi t'avais besoin d'y aller dans un premier temps ?

— Je...

Au pied du mur, je me sens piégée par mes propres secrets. Ses yeux m'accusent et les mots me manquent.

— Hum !? me presse-t-il.

Je déglutis difficilement, et lui réponds sur un ton bas :

— J'irais plus...

Je sens que ma réponse l'énerve encore plus. Il renchérit au tac au tac.

— Je t'ai demandé ce que tu foutais là-bas ? Tu consommes cette merde ?

— Non !

— Alors pourquoi t'achètes des paquets de molly à ce fils de pute de Ross !?

— Callahan... s'il te plaît, j'ai froid et...

— Écoute, me coupe-t-il sèchement, il y a ton café juste en face si tu as froid. On y va, tu prends ce que tu veux et tu m'expliques tout ce que tu fous dans mon dos, mais tu ne mettras pas un pied chez toi sans que je ne sache pas tout.

Sa colère me donne des frissons au point la cadence de mon cœur devient infernale. Je redoute le pire. J'ai peur qu'on ne se comprenne plus. Qu'il me juge. Qu'il me dénonce. Je ne sais pas comment ça pourrait se terminer si je parle et je ne veux pas tout gâcher.

Alors je lui réponds rapidement :

— Je ne veux pas en parler, d'accord ? S'il te plaît... ?

Ma voix est aussi suppliante que désespérée, et moins je parle plus ça ajoute à sa colère :

— Mais non, ça ne me plaît pas, merde ! Il faut que tu parles au bout d'un moment ! Tu ne peux pas toujours tout garder pour toi comme ça à chaque fois ! T'es une putain d'égoïste, Cassie !

Sa réflexion me coupe le souffle au point ou j'ai presque un mouvement de recul. Mes sourcils se froncent et ma bouche s'entrouvre face à ses mots.

Ils m'ont fait même sensation que recevoir un violent coup au beau milieu du nez. Son comportement me choc autant que ça éveille doucement une amertume en moi.

Déjà... Il m'a appelé par mon prénom...

Et dans ce contexte oppressant qui plus est, je le prends personnellement. C'est comme s'il mettait une distance immense entre nous.

Ou peut-être que c'est moi qui crée cet éloignement... à chaque fois.

Et je n'aurais jamais pu croire un jour que ne pas entendre « microbe » sortant de ses lèvres me ferait aussi mal.

J'ai légèrement envie de pleurer mais je me retiens pour ne rien laisser paraître, même si je sens mes yeux me picoter de plus en plus.

— T'es injuste... Callahan. Je t'ai dit que c'était de l'histoire ancienne. On n'est pas obligé d'en parler...

C'est horrible à quel point ma voix s'étrangle dans ma gorge. Comment ses iris me pèsent non pas comme l'océan calme dans lequel j'ai l'habitude de naviguer, non cette fois-ci, sa tempête fait rage et nous éloigne loin de l'autre, et ça me blesse.

Callahan inspire profondément et détourne le regard devant lui en collant ses paumes devant son visage. Je le vois secouer doucement la tête, et murmurer des mots comme s'il cherchait une réponse à ce qui est en train de se passer.

Ça dure quelques secondes jusqu'à ce que je l'entende clairement prononcer :

— Putain, je ne la comprends pas... J'comprends pas, j'comprends pas, j'comprends pas...

Il se tourne vers moi, en me questionnant d'un geste de la main, le visage déformé par l'incompréhension.

— Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu veux jamais me parler ?

Il a pointé sa paume vers son cœur en insistant bien sur le « me ».

Ma gorge s'étrangle.

Je n'y arrive pas... Je lutte contre mon envie d'éclater en sanglots parce que je déteste me disputer avec des personnes que je considère. Et la déception dans ses yeux me couvre encore plus de honte et de stresse.

Parler, et prendre le risque que ça détruise tout ?

Je ne veux plus jamais refaire ça.

D'une voix basse, suppliante, il continue :

— Pitié, empêche-moi de péter les plombs dans la rue, et explique-moi juste ce que tu foutais là-bas. C'est tout ce que je te demande.

Je le sens presque désespéré à l'idée de tout savoir. Son expression me touche sincèrement mais ça n'enlève en rien mes angoisses :

— Ça ne servirait à rien que je te le dise parce que je n'y vais plus, il faut que tu me croies.

— D'accord. On va faire autrement, autre question, pourquoi tu ne veux pas en parler ?

— Callahan !

— Pourquoi tu ne veux pas en parler ? insiste-t-il.

— Parce que c'est fini maintenant et je ne veux plus parler de ça.

— D'accord, autre question, comment 'ça' a commencé.

Sa persistance me pousse à bout. Je me crispe en sentant la pression monter en moi, j'ai l'impression de n'avoir plus aucune issue.

— S'il te plaît, arrête ! lancé-je un peu plus brutalement. Il faut vraiment que tu arrêtes de faire ça !

Mon cœur tambourine tellement fort qu'on dirait qu'il va sortir de ma poitrine. J'ai peur que mes mains ne tiennent même plus mon casque à cause de mon stresse. Et rien qu'à la tête qu'il tire, c'est clair que mon ton ne lui a pas plu du tout.

— Soit tu parles, soit je fouille. Et je finirai bien par trouver c'est quoi le problème.

Son ultimatum met fin à toutes mes hésitations. Je recule d'un pas choquée, et je m'écrie sans me contrôler :

— Tu n'as au-cun droit de faire ça !

— Aaah tu penses ? Regarde-moi bien alors. Aller monte avant que je m'énerve encore plus dans la rue.

— Rentre tout seul dans ces cas-là !

Je lui rends sèchement mon casque. Et je n'attends même pas avant de marcher rapidement dans la rue enneigée.

— Cassie !

Je ne peux pas, je ne veux pas tout lui révéler !

— Cassie, putain ! Ne m'oblige pas à venir te récupérer !

Sa voix me suit, mais je ne m'arrête pas.

Il pourrait creuser, et rien ne me garantit pas que cette affaire finisse entre les mains de la justice. Ça compromettrait la carrière de ma mère. Et je ne pourrais pas prendre le risque qu'une enquête bousille tout ce qu'elle a construit.

Elle m'en voudrait à mort.

Encore, pour les nudes, j'étais la victime, mais dans cette affaire de drogue, personne ne croira que j'y allais pour Taylor. Il suffit que ça s'ébruite, et c'en est fini de Margaret Bennett.

Je me stoppe net lorsqu'une ombre plus grande que moi apparaît devant moi et m'arrête en plaquant mon casque contre mon ventre.

Nos regards se croisent et s'échangent rage et frustration.

La colère noircit ses yeux bleus et je sens aussi qu'il n'y a pas que de la bienveillance dans les miens également :

— Tu cherches quoi ?

Sa voix froide me fait frémir malgré moi.

J'ai juste envie de fuir la situation alors je fais un pas à gauche pour le contourner mais il fait exactement la même chose et me bloque sans enlever la légère pression qu'il exerce sur mon ventre avec mon casque.

— Je t'ai posé une question. Je sais que t'as pas envie qu'on se fasse ça, alors répond-moi simplement au lieu de fuir.

La cadence de mon cœur devient de plus en plus infernale, mais je lui réponds :

— Toi... qu'est-ce que tu cherches ? Je t'ai dit que je n'avais pas envie d'en parler et j'ai aucune obligation à le faire, a-alors pourquoi tu insistes autant ?

— Et ça marche. Je vais chercher et trouver moi-même, ne t'inquiète pas.

Une nouvelle bourrasque de colère me submerge. Je réussis à le contourner et le dépasser, mais il m'attrape par le bras. Un gémissement agacé m'échappe, et j'essaye de tirer sur mon bras pour qu'il me laisse mais sa poigne ne me laisse même pas l'occasion d'en rêver.

— Laisse-moi, maintenant, ordonné-je amer, sans le regarder.

— C'est quoi que tu ne comprends pas quand je te dis que tu te mets en danger en fermant ta bouche ?

— Rien, je suis juste une idiote. Lâche-moi !

— Putain, tu me fais paniquer ! C'est quoi encore que tu caches !? Je croyais que tu me faisais confiance ?

Je lève soudainement les yeux sur lui.

Son expression ainsi que le timbre angoissé de sa voix m'ont frappé.

Pendant une seconde, je crois presque voir un mélange d'inquiétude et de peur dans ses yeux. Mais pas seulement. Mon silence à l'air de l'atteindre beaucoup plus que ce que j'aurais pu l'imaginer.

On dirait que ça le blesse...

— Callahan, je veux juste rentrer chez moi... murmuré-je suppliante.

Il me tire un peu plus vers lui, malgré ma résistance, ma gorge semble gonfler encore plus. Je déteste ce qui est en train de se passer. Je meurs de froid, et aucun de nous deux nous voulons céder cette partie.

— Dis-moi de quoi... ou de qui tu as peur ? m'invite-t-il à parler d'une voix plus contrôlée.

Taylor.

Il risque de tout ruiner.

Cette histoire risque de créer un scandale pire que si ce n'était mes nudes...

Je pince les lèvres en détournant le regard. Parce que sous ses yeux j'ai l'impression que ma carapace se brise et qu'il ne me laisse avoir aucun secret. Mes larmes menacent de couler, même si je sens que la poigne de Callahan s'est adoucie.

— Regarde-moi quand je te parle.

Il me fait relever le menton pour m'obliger à le regarder dans les yeux.

— Tu peux tout me dire, Cassie, de quoi tu as peur ?

La situation me paraît tellement désespérée que je dois me faire violence pour m'empêcher de m'effondrer devant lui.

— M'oblige pas, Callahan... s'il te plaît...

Après m'avoir fixé de longues secondes durant, son regard se durcit de nouveau. Il me lâche en expirant bruyamment.

Sa frustration est palpable, et sa voix sèche brise le silence :

— C'est toi qui vois, monte.

Son ton ne laisse même pas place à la discussion. Il me rend mon casque en m'incitant à revenir vers sa moto.

J'enfile mon casque silencieusement, en laissant ce froid creuser une petite distance entre nous.

Ce vide entre nous me fait terriblement peur.

Quand il ne dit rien, je sens que ça me fait mal au cœur.

Et c'est à ce moment que je réalise que Callahan a pris une place qu'il ne devrait peut-être pas occuper.

Je monte après lui sur la moto. J'aurais sincèrement préférée rentrer toute seule, mais je choisis d'abandonner ce combat-là. Lentement j'entoure mes bras autour de lui. La peine que je ressens fait glisser une larme le long de mes joues.

Il démarre, et la seule chose que je me dis c'est que je suis désolée de ne pas toujours arriver à parler.

















Bonsoir bonsoir, bonsoir ! 🎃

Ça-va ? ☕️





IT'S TIIIME TO TAKE THE TEA : ☕️, je veux tout entendre, vos impressions, vos ressentis, vos théories, vos retours pour ce chapitre ? Dites-moi tout !


Par contre, euh, les gens qui insultent ma Casbaby, on se calme ? 😤 C'quoi c'délire ?

Cassie c'est une protagoniste avec énormément de peur et d'idée déjà faite. Elle peut pas sauter dans l'inconnu comme ça. (En gros Cassie c'est le Preto de l'histoire MDR) Donc il faut être patiente avec elle, she's trying !

Bref, ça va, vous allez bien 😗

Moi je vous dis... Le prochain chapitre... Ça va biiiien s'passer les gars 😙 ! Trust me ! Faut pas avoir crainte !


On se retrouve sur le Discord (Si j'ai la pêche) !




BYE 🏍💨🪐 !



Stardust 🍓


𝚂𝚎𝚎 𝚢𝚘𝚞 𝚜𝚘𝚘𝚗 🕰...



xo, Azra. ✿



IG: azra.reed

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