𝟶𝟼. 𝙱𝚊𝚛𝚋𝚒𝚎.

(𝖣𝖾́𝗆𝖺𝗋𝗋𝖾𝗓 𝗅𝖺 𝗏𝗂𝖽𝖾𝗈 𝗉𝗈𝗎𝗋 𝗏𝗈𝗎𝗌 𝗉𝗅𝗈𝗇𝗀𝖾𝗓 𝖽𝖺𝗇𝗌 𝗅'𝖺𝗆𝖻𝗂𝖺𝗇𝖼𝖾)





"Je n'ai encore jamais entendu un meurtrier qui n'était pas effrayé par un fantôme." 
John Philpot Curran





𝟢𝟨. 𝖡𝖺𝗋𝖻𝗂𝖾.





2H du matin.





Ghost.







— Du coup on en parle quand ?

Je lance un regard narquois à Seiji dont je ne vois que les yeux à cause du masque qui couvre de moitié son visage.

— T'es vraiment qu'un vieux bouffon, m'informe-t-il en faisant rouler la crosse de son briquet qui allume une flamme.

Un ricanement m'échappe.

Nous laissons nos motos garées en bas de la rue. Mes bottes contre l'asphalte mouillé et le cliquetis du briquet de Seiji sont les seuls bruits qui percent le silence de la nuit. On traverse la route déserte. À chaque expiration, une bouffée d'air tiède et humide se crée contre le masque que j'ai mon visage.

— J'connais ce sale regard, Cal'.

— Qu'est-ce que t'as maman, tu veux que je te montre comment on fait ?

Seiji ricane avant de me dire :

— P'tit con.

— Arrête de bouder, ton tour viendra, des nanas finiront par te remarquer toi aussi.

Il éclate de rire cette fois-ci en ajustant son masque sur son visage.

Nous arrivons en bas de l'immeuble où vivait Carl en plein cœur du quartier de Westminster. La pierre claire se reflète sous les lumières des lampadaires. Je passe le badge devant le lecteur, la porte s'ouvre dans un léger grincement.

— Bon plus sérieusement, m'interpelle-t-il.

Le cuir de nos semelles couine sous le sol en marbre du hall d'entrée.

— Avec cette Cassie, euh, veuillez m'excusez, avec « microbe », comment ça s'est passé ?

Sur le côté, un miroir s'étend jusqu'à l'ascenseur. J'en profite pour lancer un regard en biais à Seiji à travers notre reflet.

— Elle est mignonne, répliqué-je avec un sourire hypocrite en coin qui n'atteint pas mes yeux.

— Ah oui, je vois.

— Hm hm.

Il secoue la tête en souriant tout en appuyant sur le bouton de l'ascenseur qui arrive rapidement et s'ouvre devant nous.

— T'es vraiment incorrigible, Cal'. En tout cas, je confirme qu'elle était toute mignonne, ouais.

On entre dans la cabine d'ascenseur, mon index plié cogne un peu fort contre le numéro 8.

— Pourquoi tu me dis ça, tu veux son numéro ?

Je ne vois que ses yeux, mais je comprends bien que sous son masque, Seiji me nargue d'un air amusé :

— Pourquoi pas tiens, c'est quoi ? me demande-t-il en sortant son téléphone de sa poche.

— +44, commencé-je sur un ton détaché.

Il ouvre sérieusement la page d'ajout de contact et tape le chiffre.

Les portes de l'ascenseur se referment dans un claquement. Une petite musique d'ambiance retentit dans la cabine spacieuse. Je m'appuie nonchalamment contre le miroir derrière moi.

— Ensuite ? m'interpelle-t-til.

— 05.

— Hm, ouais ?

— 01.

Son pouce presse les touches, il me fixe pour avoir la suite :

— 19.

— Et le dernier ?

— C'est le même que ta grand-mère.

Seiji rit bruyamment au point d'en faire trembler ses épaules, il me dit :

— 97 ?

J'ai dû me faire violence pour ne pas froncer les sourcils. Mon regard s'est planté dans le sien.

Putain, pourquoi le numéro de la grand-mère de cet enfoiré se termine sérieusement par un 97 ?

— Cherche encore, articulé-je alors que l'ascenseur s'arrête à notre étage.

Je me place devant les portes mais Seiji me lance un regard faussement indigné, il n'arrive pas à contenir son hilarité. Je dois me retenir pour ne pas céder au rire parce qu'il a une façon de se marrer qui donne l'impression qu'il fait de l'asthme :

— Tu me prends vraiment pour ta mouille toi. Je sais que c'est ça, affirme-t-il.

— Appelle et tu verras, tenté-je en marchant dans le couloir silencieux.

— Putain, mais tu es vraiment le pire, tu le sais ça ?

Son rire résonne encore dans le couloir, j'hésite entre sourire ou claquer sa nuque pour qu'il ferme sa gueule :

— J'hésite à l'enregistrer là du coup. J'suppose que ça ne te dérange pas non ?

— Tu parles trop.

— En tout cas, tu connais déjà le numéro par cœur.

Sans lui répondre. J'insère la clé dans la porte d'entrée de l'appartement de Carl.

— Même mon numéro tu ne le connais toujours pas, alors que ça fait 10 ans que j'ai le même.

Sa voix est tel un brouhaha que j'ai envie de réduire au silence pour l'éternité.

— Ta gueule, craché-je à voix basse.

La serrure cède sous la clé.

Elle a toujours cet air déprimé sur la face.

J'ai vite compris pourquoi avec Margaret.

Je savais qui elle était, mais je ne l'avais jamais vue en face avant ce soir-là. Dans cette gare.

Et, bon sang, la fille est encore mieux en plein jour.

En tout cas, elle ne mord pas quand il s'agit de sa mère. Avec moi en revanche, elle sort les crocs. Et ce n'est pas pour me déplaire. Bien au contraire. Ça s'annonce encore plus excitant.

En franchissant le seuil de l'appartement de Carl, une odeur de renfermé me prend les poumons. Mes bottes font grincer le parquet. Le salon spacieux est plongé dans le noir. En sortant ma lampe torche pour éclairer la pièce, j'entame une rapide inspection les lieux.

Je suis resté combien de temps dans cette gare, à côté d'elle ? Une heure ?

Avec prudence j'entre, Seiji me suit et referme la porte derrière lui. Il allume également sa lampe torche, tandis que mon faisceau de lumière se dirige vers les ombres noires de chez lui.

L'appartement est grand, les murs sont revêtus d'un papier peint raffiné et les meubles de style ancien, probablement d'époque.

C'est la première fois que je mets les pieds dans l'appartement de Carl.

Comme dit, je ne m'entendais ni avec lui ni avec son frère.

La fille ne s'en est même pas rendu compte.

Pourtant, avec ma taille et ma stature ; je ne me fonds pas vraiment dans le décor.

Je commence mon inspection par le salon, en parcourant du regard chaque recoin, chaque ombre. Mes yeux rodés par des années de vigilance captent des détails ; un tiroir entrouvert, une légère empreinte de semelle sur le tapis, un verre renversé mais pas brisé.

Combien de temps ça me prendra ?

Peut-être deux trois mois.

Un désordre s'est installé ici. Un chaos silencieux, immobile, figé dans le temps par la mort de mon cousin.

Les coussins du canapé sont éparpillés comme s'il venait tout juste de partir. J'éclaire les magazines jetés sur la table basse en verre près du canapé.

Seiji s'aventure dans une autre pièce, mais je l'entends parler à voix basse.

— T'es sûre qu'elle ne t'a pas tapé dans l'œil ta cliente, toi.

Si tu savais.

Toutes les choses que je lui ferais.

Son ton moqueur me donne envie de jouer.

En m'approchant d'une petite commode près de l'entrée, mes doigts gantés soulèvent une pile de papier dans un tiroir : ma torche illumine un tas de reçus téléphoniques.

Je les inspecte rapidement, les numéros me sont inconnus. Mon instinct me dit qu'il y a peut-être quelque chose là-dedans. Je prends soin de glisser la preuve dans une poche de ma veste.

— Si, bien évidemment que si, répondis-je finalement.

— Je ne lui envoie pas de message ce soir du coup ?

— C'est pas le bon numéro.

— Ouais, ça doit être ça neko (mon chat), me répond-il avec ironie depuis les chambres du fond.

Je murmure un « ouais, c'est exactement ça. »

Avant de m'arrêter net.

Du coin de l'œil, je distingue le mouvement d'une ombre dans la cuisine.

Je n'ai eu le temps que de pivoter mon faisceau vers la silhouette masquée, qu'elle bondit férocement sur moi avec une rapidité qui me surprend.

Dans le choc, ma lampe de poche s'échappe de ma main et s'écrase sur le sol, nous plongeant dans une semi-obscurité.

— Oh Cal' ! s'écrit Seiji de l'autre côté de la maison. C'est quoi ce bruit-là, oh !?

Malgré sa cagoule, le souffle effréné du mec frappe mon visage. Dans ses mouvements maîtrisés, je peux sentir une expertise dans le combat rapproché, il cherche à me déstabiliser. Mais je comprends vite qu'il ne fait pas de taille contre moi.

Les sons du combat remplissent la pièce : le crissement de nos semelles sur le sol, la commode à l'entrée se renverse dans un fracas alarmant. J'ai le souffle court et saccadé. Mes sens sont en alerte.

Des pas précipités résonnent dans le couloir et Seiji fait irruption dans le salon.

— Putain de merde ! C'est qui c'fils de pute !?

Seiji n'a même pas le temps de venir m'aider, en quelques secondes, mes mouvements déséquilibrent le type contre qui je me bats. J'arrive à lui isoler le bras, le tordre violemment derrière son dos jusqu'à lui luxer l'épaule, son hurlement de douleur résonne dans tout l'appartement.

L'instant qui suit mon cran d'arrêt glisse habilement entre mes doigts.

Je plante :

Cuisse.

Thorax.

Bras.

Le sang gicle sur ma paume gantée.

Le type s'écroule et gît maintenant sous moi, blessé mais conscient. Sa respiration est saccadée, irrégulière. Je m'appuie de tout mon poids, un genou enfoncé dans son estomac, la paume de ma main appuyée fermement contre son torse pour éviter qu'il tente quoi que ce soit.

Seiji me rejoint rapidement.

J'arrache son masque. Homme blanc, cheveux cendrés, yeux sombres. Rien d'identifiable, je ne connais pas ce type.

— T'es qui !? craché-je en plantant mon poignard sur sa gorge.

Il ne fait que gémir de douleur.

— Réponds ! Qu'est-ce que tu foutais ici !? le questionne Seiji en s'agenouillant à notre niveau.

Je fouille rapidement ses poches, et jette au loin son arme au niveau de sa ceinture. À part oraliser sa souffrance, il ne fait rien d'autre. Il ne nous regarde pas, ne tente rien. Comme s'il avait déjà accepté son sort :

— Qui t'envoie ? redemandé-je sur un ton froid.

Soudain, il crache une mixture écarlate qui s'étale sur ma veste en cuir, le dégoût atteint à peine mon visage. J'hésite à le tuer maintenant, mais il prononce ces mots :

— Plutôt crever que faiblir devant un Caine !

Avant que je ne puisse réagir, l'homme fouille frénétiquement dans sa bouche. Il devient soudainement hilare quand il me présente, coincé entre ses dents, une petite capsule transparente qu'il avait cachée entre ses molaires.

Mes yeux s'écarquillent en reconnaissant la forme distinctive de la pilule.

— À quoi il joue cet enfoiré !? s'écrit Seiji.

— Putain de merde c'est du cyanure ! j'hurle en cherchant à l'empêcher de mordre la capsule.

Mais c'est déjà trop tard.

Sa morsure déchire la pilule, un liquide incolore glisse dans sa gorge, la seconde qui suit, il convulse violemment. Je m'éloigne légèrement de lui en regardant ses yeux s'écarquiller avec l'apparition d'une mousse blanchâtre au coin de ses lèvres.

Son corps se raidit soudainement, puis retombe lourdement, inerte. Le poison a agi avec une rapidité terrifiante. On n'a rien pu faire.

— C'est quoi ce bordel ! murmure Seiji en passant sa main sur ses cheveux plaqués.

Je ne réponds rien, en revanche, je sors mon téléphone pour prendre en photo le visage de cet homme avant de le fouiller. Je ne trouve rien qui pourrait l'identifier. Ni bague, ni collier, ni tatouages.

— Il était prêt à mourir empoisonné plutôt que de parler ou prendre le risque de se faire torturer, argumente Seiji. Quel genre d'organisation criminelle soumet ses hommes à faire ça.

— J'en sais rien... J'ai jamais vu ça non plus.

Ce genre de cas existent, mais en période de guerres froides... Voir ça dans le milieu criminel... c'est plus rare, mais visiblement pas impossible.

Ça indique qu'une organisation extrêmement organisée se profile dans l'ombre... Et ça, ça me préoccupe.

Fais chier ! C'est pas le moment d'endosser un énième ennemi !

Je me relève, en attrapant un torchon qui traînait sur le sol, j'essuie le sang sur ma veste et celui qui est en train de sécher sur mes gants

C'est à ce moment que je me rends compte que mon cœur extrêmement bat vite.

Le silence de l'appartement contraste avec le chaos dans ma tête et la centaine de questions qui s'ajoute à l'équation de la mort de Carl.

Pourquoi cet homme était dans son appartement ?

À quel organisme appartient-il ?

Quels sont leurs buts ?

Je sens un nouveau problème vient de s'ajouter à nos emmerdes, et la guerre n'en est qu'à ses débuts.

Seiji s'avance vers moi :

— Ces gens savent qui nous sommes, Cal.

Je m'époussette en fixant ce mort. Le silence s'installe, seul le tic-tac d'une horloge brisée pendant la lutte interrompt ce calme anxiogène.

— On ferait mieux de se casser d'ici.

— On va chez Ross, me demande-t-il en suivant mes pas.

J'acquiesce une nouvelle fois, en ouvrant la porte de l'appartement.





Le "707" éclaire le trottoir de son néon violet.

La basse profonde de la musique émane des portes et s'entend jusqu'au trottoir.

Alors que nous nous rapprochons de l'entrée, l'un des chiens de garde de Ross, un colosse massif vêtu d'un costard noir nous reconnaît à nos masques.

Sans un mot, il s'écarte, et nous laisse passer.

À l'intérieur, le club est en ébullition. Les faisceaux de lumière traversent la pièce, illuminant par intermittence les visages, les corps qui dansent, et les drogués qui sniffent leur dose de coke.

Je fais abstraction du mélange de parfum de sueur qui flotte, mes yeux se perdent entre les serveuses en petites tenues et les hommes en costumes qui appartiennent à tout genre de gang et mafia.

Le 707 est un carrefour de malfrat.

Une toile d'araignée sur laquelle glisse le marché noir. Ici, tout se vend, tout s'achète, tout se négocie. La pègre locale ou la mafia internationale se rencontrent et créent des alliances, facilite les échanges entre trafic de drogue, d'armes d'organes et d'être humain.

Ici, on achète des corps ou de la drogue, et on renvoie la marchandise sur des paquebots en partance des quatre coins du monde.

C'est l'enfer.

Seiji et moi montons à l'étage VIP.

C'est à cet étage que se jouent les accords les plus puissants. On parle de territoires, de marchés, de routes d'importation et d'exportation. De pot-de-vin, de trahisons, d'alliances.

Le jeu auquel Seiji et moi jouons en venant là est dangereux. Je ne crains rien, mais à cet étage, une seule erreur peut être fatale.

L'atmosphère change ici, moins tumultueuse que le chaos du rez-de-chaussée. Le cuir de mes semelles s'enfonce dans la moquette épaisse du sol. J'avance une main dans la poche, au milieu d'une légère brume de fumée diffusée.

Je croise les yeux d'hommes — de gardes du corps — discrets qui patrouillent entre les tables, pour veiller à la sécurité de leur employeur.

Et quels employeurs.

Je suis sûr de reconnaître, Dimitrov Tsarine. Un homme à la barbe blonde épaisse, le torse bombé, entouré de ses lieutenants. Son accent russe trahit son appartenance à la Bratva.

Des rumeurs disent qu'il aurait une fille qui vit ici, à Londres, mais personne ne peut affirmer que ce soit vrai.

Je sais qu'il prépare l'ouverture d'un réseau trafic d'armes en provenance d'Europe de l'Est.

Ça ne pourra qu'enrichir nos affaires. Il aura bien besoin, tôt ou tard de blanchir son argent sale. Et les Caine sauront l'accueillir gracieusement.

Une table attire tout particulièrement mon attention. Une femme asiatique, jeune et tatouée sur les bras, est entourée d'hommes en costume sombre. Elle représente probablement l'un des clans Yakuza.

Je passe ses gens sans un regard de plus.

Enfin, j'arrive à la table qui m'intéresse.

Celle de Ross.

Il est adossé à la banquette arrondie, encadrée par au moins trois filles. Ses mains épaisses et sales sur ces filles qui ondulent sur lui, leurs verres à la main, riant de ses paroles comme si ce qui sortait de sa bouche était vraiment pertinent.

Ross est loin d'être le prince charmant. Aucune femme saine d'esprit n'aurait envie de s'approcher de cet homme à moins d'être généreusement payée.

Et c'est là toute la tragédie, il les paye très bien.

Pauvres petites.

Mon regard durcit, je m'arrête devant la table, ma voix tonne sans introduction :

— Tout le monde dégage.

Ross hausse les sourcils de surprise, il fixe mon masque.

— Ghost ? murmure-t-il, d'une voix non assurée. Qu'est-ce que tu fais là ?

Les filles aussi se tournent vers moi, et il ne s'écoule pas énormément de temps avant qu'elles ne s'écartent précipitamment de Ross, certaines trébuchent dans leur hâte de me fuir.

Je les entends murmurer « c'est Ghost. »

Le carré VIP se vide en un instant.

Je ne réponds pas à sa question, un silence s'installe alors que je me dirige vers sa banquette.

Seiji s'assoit à côté de moi sur le canapé arrondi.

Je sors de ma poche mon téléphone et ouvre la photo de l'homme mort, je la présente à Ross.

Mon index tapote deux fois contre l'écran.

Pas besoin de parler pour qu'il comprenne que je lui demande s'il le connaît.

Ross scrute l'image, ses yeux passent de la photo à moi, la confusion est évidente sur son visage.

— C'est qui c'type ? me questionne-t-il en déformant ses traits. C'est quoi c'merdier ?

Il ne sait pas qui il est.

Je reprends mon téléphone, c'est inutile d'insister.

— T'as des informations sur la mort de Carl ?

Ross me dévisage, les yeux écarquillés, et l'air complètement confus.

— Les Caine t'ont demandé d'enquêter sur la mort de Carl ?

Son ton trahit sa surprise. Il sort un joint de sa poche, ce fils de pute a l'air angoissé.

— Ne fume pas ta merde devant moi, ordonné-je. Et c'est moi qui pose les questions.

Ross me fixe. Je le vois déglutir et déposer sa drogue sur la table, il la tapote nerveusement contre la surface en verre.

— Qu'est-ce que tu sais ? l'invité-je à parler.

— J'en sais trop rien. Il y a des bruits qui courent comme quoi, le p'tit avait peur de s'faire buter.

— Et... tu connais le nom de ce monsieur « bruit qui court. »

Mon index tapote à intervalle régulier contre la table. La tension augmente dans le carré VIP, l'ambiance du club change du violet à des néons bleu vif qui soulignent les reliefs de son visage. J'ai l'impression que la musique vibre dans mon ventre. Ross déglutit, son regard jongle de mon index à mes yeux.

— C'est... J'sais pas trop, un type...

La cadence de mes tapotements s'intensifie légèrement, je ne le lâche pas des yeux.

La traque est lente...

Tic,

Tac,

Tic,

Tac,

Tic,

Ta-

— Gale ! s'écrit-il sous la pression.

J'ai l'impression de voir de la sueur perler sur le front de ce bon à rien.

— Gale Patel ! Tout c'que j'sais c'est qu'le type avait peut-être rendez-vous avec Carl le jour de sa mort.

Je tourne la tête vers Seiji qui envoie déjà les informations à Knight. Mon dos retrouve le dossier de la banquette, je place un bras sur le rebord.

Je poursuis :

— Mais encore, Ross ?

— J'le connais pas très bien, c'est un client qui vient le vendredi soir, il boit toujours du punch, et il demande toujours à voir Barbie.

J'arque un sourcil, il comprend vite que je demande des explications. Et justement, il lève le bras en claquant des doigts :

— Hé, Barbie ! Viens-là !

Une fille tourne la tête vers nous.

Barbie, je suppose.

Elle s'approche. Prostrée sur des talons vertigineux, sa peau ébène contraste avec la teinte auburn de ses cheveux lisses qui lui tombe à mi-longueur.

Je ne m'éternise pas sur sa petite tenue, mais plutôt sur son regard.

Il renvoie une lassitude profonde. Et je ne crois pas y lire de la peur.

Peut-être, juste un peu.

Elle est plus intriguée qu'apeurée, et ce n'est pas vraiment moi qu'elle fixe, mais Seiji.

Elle prend sur son plateau en argent chargé, un verre de whisky, qu'elle fait glisser vers nous.

J'arrête la course de la boisson de mon index, en déplaçant le verre vers Ross.

Je préfère que Seiji ne boive pas ce soir.

Elle comprend très bien que nous n'allons pas boire et cesse sa distribution.

— Tu m'as appelé ? demande-t-elle inquiète.

— Ouais, dis-leur ce que tu sais sur Gale Patel, s'exclame-t-il en nous désignant des doigts avant d'avaler quelques gorgées de whisky.

Non, Ross, ne change pas de comportement devant une femme. J'ai horreur de ça.

— Euh... qu'est-ce que vous voulez savoir ? nous questionne-t-elle presque dans un murmure, à cause de la musique assourdissante j'ai failli ne pas l'entendre.

— Qu'est-ce Gale Patel vient faire dans ce club, demande Seiji d'une voix sombre.

Je dois me faire violence pour ne pas tourner la tête vers lui. La fille hausse les épaules :

— Il vient faire ce que tous les mecs qui viennent dans ce club font.

Seiji prend un moment avant de poursuivre, mais il dit finalement :

— C'est-à-dire ?

— Coucher avec des filles.

Seiji ne répond rien, j'entends soudainement la crosse de son briquet tourner frénétiquement.

Je poursuis :

— Qu'est-ce que tu pourrais nous dire sur lui ?

— Il vient pour de la compagnie. Je ne sais rien sur lui, mis à part son nom. Il paye bien et revient uniquement les vendredis.

— Il a des tatouages, quelque chose de distinctif qui t'aurait tapé dans l'œil ?

Barbie secoue la tête négativement.

— À quelle heure il arrive généralement ? demandé-je.

— Vers 23 h 30.

— À quelle heure il repart ?

— Cinq-dix minutes plus tard, souffle-t-elle sur un ton brisé.

Ce Gale Patel vient ici, la baise 5 minutes, et repart la queue entre les jambes.

Je hoche la tête, prêt à me lever pour quitter cet endroit, sauf que je ne bouge pas car la voix suffisante de Ross attire mon attention. Il finit d'avaler sa boisson avant de dire :

— Hé, mon gars ! Si tu la veux, faudra la payer, tu sais !

Je réalise qu'il s'adresse à Seiji. En me tournant vers lui, je le vois river ses yeux vers Ross. Je fronce les sourcils, pas très habitué à y lire l'émotion noire qui durcit son regard.

Qu'est-ce qu'il me fait là ? À quoi est-ce qu'il joue ?

— Allez, casse-toi, Barbie ! continue Ross en se marrant. Va voir si Dimitrov n'a pas besoin d'une pipe.

Je n'ai pas eu le temps de rétorquer quoi que ce soit, qu'une lame aiguisée s'enfonce, dans un éclair, presque totalement sur la banquette derrière Ross.

Le kunai lui a tranché subtilement le bout de chemise blanche.

La fille recule d'un pas, et son visage s'étire pris de surprise, mais elle ne réagit pas plus que ça.

Elle doit être habituée.

Dans ce monde, on s'adapte ou on meurt.

Encore plus pour une femme au 707, je suppose.

Sans détourner son regard de Ross, Seiji lui dit d'une voix glaciale :

— Ne parle jamais à une femme comme ça. Jamais devant moi. La prochaine fois, je ne manquerai pas ta tête.

Je baisse les yeux sur la main de Ross qui se tâte le bras. Il grimace, et quand il regarde sa paume, un petit filet de sang macule sa peau.

Ross murmure un « fait chier » mais ne rétorque rien.

Malgré l'ambiance assourdissante du club, j'ai l'impression d'être plongé dans un silence sans fin après le geste et les mots de Seiji.

Je ne quitte pas cette lame des yeux pendant un bon moment, avant de me pencher pour la récupérer et la rendre à Seiji. Ross a presque un mouvement de recul.

Mais ce n'est pas aujourd'hui que je le tuerai.

En nous levant, mes yeux froids croisent ceux de Seiji. Même si aucun son ne sort de ma bouche, il sait exactement qu'il a déplacé les limites.

— Tu vas me dire que tu aurais respecté les ordres si t'étais à ma place ? me questionne-t-il alors que nous avançons le long du couloir de l'espace VIP.

Je lui réponds par mon silence.

Nos pas rapides quittent le night-club.

La fraîcheur de la nuit se colle à ma peau à la seconde ou j'ai ouvert la porte en métal. Je ne m'étais pas rendu compte d'à quel point il faisait chaud à l'intérieur.

Une main dans la poche, je sens mon petit paquet de cure-dents, et l'envie folle d'en mâcher un. Les muscles de ma mâchoire sont contractés. J'inspire et j'expire profondément sur le chemin vers nos motos.

Arrivé à leur niveau. Je détache mon casque, Seiji fait de même :

— C'était quoi ça ? demandé-je d'une voix basse en enfonçant mon casque sur ma tête non sans cacher ma colère.

— Un avertissement.

—Ton "avertissement" aurait pu nous coûter très cher ce soir. Je ne sais pas ce qui t'a pris, mais ne refait plus jamais une connerie pareille.

Seiji ne répond pas, mais il m'observe attentivement. Et je sais qu'il lit ma frustration.

Je sors mon téléphone de ma poche en enjambant ma moto sans un regard de plus.

Mes doigts pianotent rapidement au numéro non enregistré :

« Ne dors pas. »

Je m'apprête à démarrer après avoir rangé mon appareil. En reculant pour faire un demi-tour, sa voix m'interpelle :

— Où est-ce que tu vas ? C'est par là.

J'hésite un instant avant de répondre, mais finalement, en baissant ma visière je lui dis :

— Je ne rentre pas au Rendi ce soir.

Seiji hoche lentement la tête.

— Enceinte pas n'importe quelle nana, neko (mon chat), sinon j'envoie un message à ton microbe, me lance-t-il sur un ton taquin.

Je J'allume le moteur en me sentant sourire.

J'ai jamais réussi à rester en colère trop longtemps contre ce budallaqe (imbécile)

— C'est pas le bon numéro, m'écrié-je alors que le rugissement du moteur casse le silence de la nuit.

Je m'éloigne, laissant Seiji derrière moi.

Mains sur le guidon, la nuit m'enveloppe, chaque kilomètre m'éloigne un peu plus du club, de tous ces mystères qui planent sur moi.

La ville disparaît sous la vitesse, le vent glisse sous les pans de ma veste.

Demain, c'est samedi.

Le temps est venu de te revoir, microbe. 













Bonsoir bonsoir, bonsoir ! 🎃

Ça-va ? ☕️




Ah oui, petite précisions ! 


GHOST = Cal'

RAVEN = Seiji. 

BLADE = Neo.

KNIGHT = ? 

C'est juste leur nom de tueur MDR.


AUSSI ! 

⚠️ La prochaine fois, que je vois des commentaires racistes envers Seiji (qui je précise : EST JAPONAIS, pas chinois.) Je bloque avec délicatesse et sans stresse. J'étais horrifiée de voir la facilité avec laquelle certaines se sont permise des réflexions tellement déplacées ? Like, wtf ? La dernière fois que j'avais entendue ça j'étais en primaire, j'arrive même pas à croire que c'est toujours d'actualité pour certains ? 

Je ne tolère absolument pas le racisme, ni la discrimination ! Franchement, je pourrais débiter longtemps mais hier mon texte était trop long, donc je vais m'arrêter juste à là. 


Anyways, Ghost c'est comme la campagne de Margaret ouuuu ? Tous les jours je dois faire des communiqués la PTDR pls- 



En tout cas, IT'S TIIIME, TEA TIME : ☕️, je veux tout entendre, vos impressions, vos ressentis, vos théories, vos retours pour ce chapitre ? Dites-moi tout !



Pardon mais Barbie... Ma woman ? 

Et on en parle de Seiji ouuu ? 

Ou le charisme de mon fils albanais ? Je- BYE 🏃🏾‍♀️💨 ! 


En tout cas, l'intrigue commence à doucement se révéler 😏, c'est d'un gout mais vous avez pas idée comment je suis impatiente d'entrer dans le VIF des secrets... 


Et j'entends que demain, Ghostie à RDV avec Casbaby pour leur première mission BODYGUARD 🫢... On se demande comment ça va se dérouler tout ça... 


On se retrouve sur le Discord pour les Red Paper 🍒🩰 ! Impatiente d'avoir vos théories 😋 ! (Du coup, merci à Natacha, Charlie, Marion et Nawel (désolée 🫣)








Bisous, on se retrouve très vite pour la suite ! 🪐








Stardust 🍓 




𝚂𝚎𝚎 𝚢𝚘𝚞 𝚜𝚘𝚘𝚗 🕰...




xo, Azra. ✿



IG: azra.reed

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