52.

Un silence pesant flotte. Plus aucun bruit ne se fait entendre.

Les secondes qui passent me semblent interminables alors que je fixe Louise du regard. Ses yeux colériques n'expriment aucun regret.

Puis, de grosses détonations résonnent au loin et je tourne vivement la tête vers l'origine de ces bruits. Mais il n'y en a trop. C'est comme si nous étions sur un énorme champ de mines et que tout explosait en même temps. Le sol tremble sous nos pieds.

Consciente de ce qu'elle vient de faire, Louise panique.

- Nous devons partir Aurore !

Mais je n'arrive à la regarder qu'avec des yeux froids.

- Où veux-tu aller ? Nous sommes coincées ici.

Mes sourcils sont froncés et pour la première fois, je sens que quelque chose s'est brisé chez Louise. Jamais elle n'aurait réagi comme ça avant, jamais elle n'aurait décidé de provoquer une telle chose. Et je sens aussi de la même façon que quelque chose s'est brisé entre nous.
Cet espoir pacifique que je nourrissais vient d'éclater en morceaux sous l'impulsivité de Louise.

Elle court à l'intérieur et je la suis jusque devant sa maison. Elle sort en trombe et rejoint les dizaines de gens affolés qui courent dans les rues. De grosses volutes de fumées noires surplombent la ville.

Je ne sais pas quoi faire, je reste bouche-bée devant un tel désordre. Comment a-t-on pu en arriver là ?
Alors, sans prévenir qui que ce soit, je cours vers la forêt.

Mes jambes me brûlent, mon coeur menace d'exploser, mes poumons crient à la torture, mais je ne peux pas m'arrêter. Le besoin de fuir est trop grand, trop pesant. La responsabilité de ce qui se passe pèse trop lourd sur ma conscience.

J'entends des coups de feu, mais je ne saurais dire qu'ils sont tout proches où au contriare, très loin.

Soudain, je trébuche et ma cheville craque dans un bruit sourd. Une vive douleur se propage dans mon pied et il m'est impossible de me relever.

Je hurle de toutes mes forces, je crie mon desespoir et ma tristesse.

- Aurore tu vas bien ? Demande Louise qui a réussi à me rejoindre.

- Non ! Hurlé-je. Non, je ne vais pas bien !

J'entends de vagues bruits et mes oreilles grésillent de façon continue.

- Lève toi, des soldats arrivent !

Louise empoigne mon bras mais je me libère de son emprise. Je n'arrive même plus à la regarder dans les yeux.

- Laisse moi seule ici ! Qu'ils me capturent et me tuent si ça les arrange !

- Aurore ! Je suis désolée ! S'il te plaît lève toi !

Je lève enfin les yeux vers elle lorsque je l'entends sangloter.

- S'il te plait ... Je suis désolée ...

Ma colère s'en va par petits morceaux. Je pense que je ne pourrais jamais lui en vouloir pendant très longtemps.
Mais la réalité me revient en pleine face quand des soldats débarquent au bout de la rue.

L'adrénaline me pousse à me lever et j'ignore la douleur qui me lance dans la cheville.
Louise m'aide à me lever et nous courons dans le sens inverse bras dessus, bras dessous.

Ma vision est réduite mais j'arrive tout de même à distinguer l'obscurité de la ville. Les gens crient car ils ont peur des soldats. Certains tirent dans le ciel pour calmer la foule.
Une autre bombe explose et je trébuche de nouveau. Louise me relève et nous nous engouffrons dans une petite ruelle.

- Il faut aller dans le repère, dis-je tant bien que mal.

Louise se retourne pour me regarder. Je suis adossée sur le mur, j'ai des bouffées de chaleur et ma jambe tremble de douleur.
Louise tient son ventre rond et des larmes maculent ses joues.

- Où ça ? Demande-t-elle.

- Le repère des espions, on doit aller là-bas.

Louise me regarde avec les mêmes yeux incrédules. Agacée, je prends la tête de la course avec peine.
Je mets plusieurs minutes à retrouver le bon chemin. Nous nous cognons continuellment à des gens apeurés. Les soldats semblent tout aussi affolés. Ils tentent vainement de calmer les gens mais ne peuvent se résoudre à tirer dans la foule. Nous courons donc presque librement à travers la ville en ébullition.
Je ne sais pas vraiment ce qu'appuyer sur le bouton a engendré. Je pense que je ne me rends pas encore totallement compte de ce qu'il se passe. Les espions ont-ils attaqué le Gouvernement ? Dans quel but ? Que vont-ils faire de tous les innocents ? De tous ceux qui n'avaient aucune idée de ce qu'il se passe réellement dans le monde ?

Lorsque nous arrivons enfin dans la rue, le calme a reprit un peu le dessus, mais cela reste relatif. Les gens sont cloitrés chez eux, et ils ont l'ordre de rester enfermés jusqu'a nouvel ordre. Ce sont des messages vocaux du Gouvernement diffuséa à traves des hauts parleurs qui nous avertissent de ça. Nous nous dépêchons de rentrer dans la maison et je referme la porte derrière moi avant de m'affaler devant avec une grimace de douleur. Ma cheville me fait horriblement soufrir. Je regarde Louise se mettre dans un coin et pleurer. Je n'ai pas la force de me lever pour aller la consoler, mais je pense aussi que je dois pour l'instant la laisser suele. Peut-être qu'elle se rend maintenant pleinement compte de ce qu'elle a fait.

Je laisse alors moi aussi couler les larmes. Je ne sais pas vraiement pourquoi je pleure, mais j'ai l'impression que c'est la seule chose que je peux faire. Je pensais trouver des gens dans cette maison, mais l'obscurité et le silence me disent le contraire. Nous sommes définitivement seules dans ce merdier que je n'ai jamais voulu.

Après avoir pleuré tout mon soûl, je me sens presque suffisament forte pour tenter de me lever. Je ressens des palpitations dans ma cheville, comme si mon coeur battait à l'intérieur, mais j'arrive tout de même à me déplacer à cloche pied. Je vais dans le salon pour voir s'il y a un quelconque message, mais c'est avec désespoir que je m'allonge sur le canapé. Il n'y a rien. C'est juste une maison vide, dépourvue d'âme et de vie.

J'entends pendant encore de longues minutes les pleurs de Louise qui ne se tarrissent pas. Finalement, je me décide à l'appeler :

- Louise ?

Pas de réponses.

- Louise, viens là.

Je sais qu'il y a des micros, alors je ne parle pas trop fort même si cela peut paraître idiot.

Je l'entends se lever et venir dans le salon. Elle se place dans l'embrasure de la porte et je tends les bras vers elle pour lui montrer que je ne lui en veux pas. Elle comprend mon message et se réfugie à l'intérieur.
Je retrouve la même sensation que dix minutes auparavant. La sensation de contrôler de nouveau ma vie.

- Je suis vraiment désolée, dit-elle dans mon oreille. Vraiment ...

- Chut, répliqué-je. C'est moi qui suis désolée ...

Je la tiens dans mes bras plusieurs longues minutes pendant lesquelles je me bats pour refouler mes larmes. Je voulais que nos retrouvailles se fassent dans un cadre beaucoup plus différent. Je voulais des retrouvailles joyeuses plutôt que des retrouvaielles pleines de tristesse.

***

- Je n'ai jamais aimé quelqu'un aussi fort, avec autant d'ardeur et de passion. Il paraissait tellement ... détaché ... mais tellement concerné à la fois que cela me troublait au début. Et puis, je suis tombée amoureuse de lui un peu plus tard, quand j'ai appris à le connaitre.

Louise prend plusieurs grandes inspirations pour calmer sa respiration. Je l'écoute, le regard fixé au plafond pour ne pas la déstabiliser. Nous faisons toujours comme ça. Nous ne parlons presque pas dans les yeux de l'autre. Petites, cela nous empêchait de nous concentrer, nous éclations de rire tout le temps.

- Il m'a paré plusieurs fois de choses douteuses sur le Gouvernement, mais je n'y croyais pas trop. Je ne sais pas vraiment pourquoi d'ailleurs. J'ai commencé à vraiment me poser des questions quand tu m'as dit que tu allais partir pour le village Sauvage. Mais j'étais enceinte. Je trouve que c'est horrible de voir sa grossesse comme une corvée, mais à ce stade je le pensais du plus profond de mon coeur. Il n'y aurait pas eu le bébé, je serai partie avec toi. Et nous aurions été tous heureux. Toi avec Edan, et moi avec Nhoa.

L'entendre prononcer le prénom d'Edan me fait quelque chose.

- Tu sais, dis-je. En parlant d'Edan, et bien, je ne sais pas trop ...

Louise ne répond rien.

- De quoi tu parles ? Demmande-t-elle.

- Et bien, il s'est passé certaines choses et j'ai été tès confuse ces derniers temps. On s'est éloigné. Je ne sais pas vraiment ce que je dois en penser, mais je pense que nous ne somme plus ensemble.

Elle met un certain temps avant de répondre :

- Oh ... Je ne sais pas quoi dire Aurore. Tu avais l'air tellement amoureuse de lui ...

- Je l'étais mais ... mais je ne sais pas. Il y a eu Jude, et je me suis sentie un peu perdue.

- Jude ?

- Oui, je réponds. Jude.

Après plusieurs secondes, j'entends Louise rire très doucement.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Demandé-je.

- Au moins, nous pouvons nous soutenir.

J'ébauche un faible sourire. J'entends ensuite Louise bouger sur son canapé.

- Tu peux me raconter s'il te plait ? J'ai besoin d'entendre des histoires pour me changer les idées. Est-ce que ça te dérange ?

- Non, pas de problème.

À cet instant je pourrais faire n'importe quoi pour lui remonter le moral. Elle a perdu le seul homme qu'elle a jamais aimé, alors que je me plains d'Edan et de Jude.
Je lui raconte donc tout. En partant du village Sauvage jusqu'à mon départ d'Utopia pour Rarya.
Je lui raconte la vie là-bas. La Boisson, le batram, la mer et le musée.
Je lui raconte notre dispute avec Edan. Je lui raconte le rocher avec Jude.
Je lui raconte notre preier baiser un peu maladroit.
Je lui raconte le bébé que je n'ai pas voulu garder.

Et pendant tout ce temps elle écoute, elle comprend, et elle est avec moi. Je ne demandais que ça. Elle est dabord sous le choc de toutes ces révélations, mais elle accepte vite.

- Nhoa m'avait déjà parlé de choses dans le genre, et je m'en veux maintenant de ne pas l'avoir pris suffisammeent au sérieux. Je m'en veux tellement ... Un matin, je me suis réveillée et il n'était pas avec moi. Ça arrivait souvent, je ne savais pas vraiment ce qu'il faisait mais je lui faisais confiance, et parfois, il partait plusieurs heures puis revenait. Je lui posait toujours pleins de questions, mais il arrivait à tout esquiver brillamment ...

Elle étouffe un rire d'admiration.

Dehors, le calme est revenu. Je n'ose pas tirer les rideaux pour observer la rue ou regarder si le ciel est toujours noir de fumée. Mais il n'y a pas eu de détonations depuis un moment et tout est silence. Peut-être que nous allons être retrouvées par le Gouvernement et qu'ils vont nous enfermer. Ou peut-être qu'Utopia déploira des troupes pour nous retrouver et qu'on sera rapatriées.
Mais je suis trop fatiguée pour y penser. J'aimerais ne plus jamais avoir à me soucier de ce qu'il vas se passer. J'aimerais ne plus jamais avoir à me poser des questions aussi cruciales que "est-ce que je serai encore en vie demain ?"ou encore "que dois-je faire pour survivre dans cette ville dangereuse?".

C'est sur ces interrogations, que j'arrive miraculemesement à m'endormir.

***

Je me réveille en sursaut quand la porte d'entrée s'ouvre violemment. Mon regard vas directement en direction de Louise qui s'est réveillée au même moment que moi. Soudain, une silhouette apparaît.

- Elles sont là ! Crie-t-il.

L'homme se dirige vers nous, il est accompagné de deux autres personnes. Je crois d'ailleurs reconnaître un homme qui était dans l'avion lorsque nous sommes partis d'Utopia.

- Nous devons y aller, déclare-t-il. Maintenant ! Dépêchez-vous !

Je me lève donc rapidement, mais c'était sans compter sur ma cheville. Je m'effondre de douleur au sol.

- Et merde ! Elle est blessée !

On me soulève par les épaules. Ma tête me tourne.

- On a pas le temps, on doit y aller maintenant !

Quelqu'un me soulève et je me retourne donc devoir sur une seule jambe. Louise à toujours une main sur son ventre et me regarde avec inquiétude.

- Où est-ce qu'on doit aller ? Demandé-je faiblement.

- À Utopia. Un avion nous attend près des usines.

J'hoche la tête et je me laisse ensuite guider vers l'extérieur. Il me porte presque ; j'ai un bras sur sa nuque et son bras entoure ma taille pour me soutenir.
Je découvre qu'il fait nuit dehors. Je ne sais pas combien de temps nous avons dormi, mais pas suffisamment si cela ne tenait qu'à moi. J'aurai voulue être plongée dans un sommeil éternel.
J'entends une sirène retentir au loin et des gens crier. Mais mon esprit n'est pas suffisament réveillé pour traiter toutes les informations que je détecte.

- Qu'est-ce qu'il se passe ?

- Nous croyions que vous aviez été capturée, mais après avoir attaque le Gouvernement, libéré les prisonniers et fouillé dans presque tous les locaux, on s'est rendu compte que vous n'étiez nul part. Alors on est venu là.

Son débit de parole est un peu rrop élevé pour que je comprenne tout ce qu'il a dit.

- Et maintenant ? Que va devenir Rarya ?

- Rien pour l'instant. On va laisser les habitants se remettre de ça, et on va envoyer des membre des différents conseils d'Utopia pour leur expliquer la situation. Tout va dépendre de ce que les habitants vont choisir.
J'hoche péniblement la tête.

Les rues sont désertes, ce qui facilite notre progression.
Finalement nous arrivons près de l'avion.

Nous montons à l'intérieur et j'ai l'impression d'être dans un rêve quand je sens l'avion décoller.

- Nous allons vraiment à Utopia ?

Je regarde l'homme qui m'a assisté lors de ma marche.

- Oui, on rentre à Utopia.

Une fois que je suis sûre de ne pas rêver, je m'autorise de nouveau à fermer les yeux pour m'endormir.

Tout est allé tellement vite que je ne réalise toujours pas ce qu'il se passe. Mais je suis tout aussi surprise de m'en être sortie indemne.

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Salut à tous !
Pour commencer, je l'excuse du retard. Je suis malade et je n'avais donc pas du tout d'inspiration pour écrire, ce qui justifie en partie le retard de ce chapitre.

Ensuite, je pense reprendre les publications une fois par semaine. Je ne trouve plus suffisamment de temps pour poster deux chapitres par semaine.

Voilà ..
En espérant que ce chapitre vous a plu (même si je le trouve trop pourri (bon pas vraiment sinon je le posterais pas, mais bon ...))

Bisous !



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