Partie 3

Imaginez deux ascenseurs l'un sur terre, à l'intérieur le parapluie et l'autre avec vous à bord à l'autre bout de l'univers où aucune force ne viendra vous déranger. L'un sur terre, subit la gravité et l'autre est au fin fond de l'univers là où personne n'est jamais allé, là où personne n'ira jamais entre les ultraviolets et les infrarouges là où les spectacles lumineux alliant beauté et grandeur sont quotidien, là où l'infini se contemple. L'un est en panne, bloqué au rez-de-chaussée et l'autre est tiré par le haut de la cabine, par un géant ; l'accélération que donne le géant sur l'ascenseur, est similaire à la force gravitationnelle présente sur terre. Ainsi pour vous, tous se passent comme si vous aviez les pieds-à-terre, vous ne sentez pas qu'un géant tire votre ascenseur. Sans contact avec l'extérieur, il n'existe aucun moyen pour vous comme pour le parapluie de savoir si vous êtes sur terre ou loin dans l'univers. Vous pourriez faire toutes les expériences possibles, vous constaterez les mêmes résultats dans les deux ascenseurs.

Il devient maintenant clair que la gravité n'est pas une force. À l'instar de votre ascenseur tiré vers le haut, il semble que la gravité s'apparente à cela : une accélération. En réalité nous ne tombons jamais, nous sommes naturellement en chute libre, c'est la terre qui accélère en permanence vers le haut, créant ainsi un poids à chaque corps.

C'est donc cela le principe d'équivalence. Il y a une équivalence entre la gravité et l'accélération. La gravité n'est qu'une accélération. Mais alors, vous me direz : qu'est-ce-qui accélère la terre ?

C'est vrai, dans le cas de l'ascenseur, on a bien compris que c'était le géant, mais pour la terre ? En prouvant que la gravité était une accélération, on a créé un nouveau problème autrement plus complexe.

En 1912, après déjà sept ans de travail, de calcul interminable qui ne menaient à rien, il me fallut voir les choses autrement. Il me fallait du changement, penser autrement mais surtout, je compris qu'il me fallait de l'aide.

Un jour nous étions au bar, avec quelques amis nous avons créé une association, une amicale qui se réunissait chaque semaine. Nous discutons de l'actualité ; à cette époque, se dessinait déjà les prémisses d'une nouvelle guerre. Le conflit mondial semblait inévitable et nous spéculions sur la date. Je leur parlais de mes dernières idées. Et on débâtait ensemble. Un temps cela m'a aidé, mais très vite nous tournions en rond, nos nombreuses discutions semblaient se figer dans le temps, elles devenaient stériles alors que je recherchais du nouveau et du dynamisme. Michele Beso après quelques verres, avait toujours une petite anecdote à nous conter. Ce jour-là il nous parlait des indiens d'Amérique. Il disait que pendant des jours, les indiens dansaient pour fêter le début de l'été. Il s'agissait du solstice d'été ; les jours suivants étaient les plus longs de l'année. Durant 8 jours les indiens se peignaient le corps de couleurs verdoyantes et chaleureuses, cueillaient les plus belles fleurs pour s'en vêtir, chantaient et jeunaient. Le plus important étant la danse du soleil. La danse du soleil commençait pendant la pleine lune et finissait le soir au coucher du soleil. La première danse consistait à regarder fixement le soleil et la deuxième à regarder fixement le bison soleil au sommet du poteau. C'est à partir de la deuxième danse que l'on pratiquait des incisions derrière les omoplates pour y passer des broches de bois auxquelles serait attaché un crâne de bison.

La troisième consistait à regarder fixement le soleil attaché à un poteau. Pour la troisième danse, les participants recevaient des incisions dans le dos et sur la poitrine pour être attachés au poteau.

La quatrième danse consistait à regarder fixement le soleil tout en étant suspendu au mât. Pour cette dernière danse, les incisions n'étaient pratiquées que sous les pectoraux.

Le don de son corps était considéré comme le plus grand des sacrifices. Chaque participant se présentait devant l'homme-médecine qui pinçait entre son index et son pouce une partie de la peau de la poitrine des adeptes. Avec un couteau aiguisé, il transperçait cette partie du corps et y glissait une baguette en os ou en bois. Cette « broche » était ensuite reliée à l'aide d'une lanière de cuir au mât sacré. Ces lanières étaient censées représenter les rayons de lumière émanant du Grand Esprit.

L'homme devait ensuite se libérer en tirant sur cette lanière. Souvent, il y avait une demi-douzaine de guerriers qui dansaient autour du mât, courant vers le poteau puis se jetant en arrière avec la rapidité d'un cheval de guerre et la férocité d'un lion dans le but d'arracher les broches de leur chair blessée. En général, en deux ou trois heures, la victime parvenait à se libérer, mais il existe de nombreux cas où il était nécessaire de doubler et même de tripler ce temps.

Il y avait trois manières d'offrir sa souffrance : fixer le soleil en étant percé, en étant suspendu, ou en tirant des crânes de bisons accrochés aux lanières qui étaient fixées dans le dos. Il était aussi possible aux danseurs d'offrir des morceaux de leur chair à leurs parents ou amis. Cette auto-torture symbolisait une renaissance. La douleur représentant la mort, la libération de cette entrave symbolisait la résurrection, physique et spirituelle de l'homme, des bisons mais aussi de tout l'univers. Quand les danseurs étaient tous libérés, la Danse du Soleil était terminée. Lorsque la journée est presque terminée, et le dieu solaire presque à l'ouest, les guerriers torturés sortent de l'arène, un par un, et juste à l'extérieur de la porte, couverts d'une peau de bison très joliment décorée, ils s'agenouillent, et les bras croisés sur leur poitrine sanglante, ainsi que la tête inclinée face au soleil couchant, qu'il lèveront seulement quand il aura disparu.

On allongeait alors les danseurs sur des lits de sauge où ils continuaient à jeûner et racontaient leurs visions au chaman. On en faisait de nouvelles chansons, de nouveau pas de danses. On en tirait même des prophéties. Quand la tribu était prête à lever le camp, les objets sacrés étaient empilés au pied du mât. On ne les emportait pas parce qu'ils étaient trop sacrés pour être utilisé à nouveau et qu'ils devaient retourner à la nature.

Je me rappelle de ce jour, Michele racontait toujours des sottises pour nous faire rire, mais cette fois-là nous n'avons pas ri, nous l'avons écouté tous ensemble sans un bruit, sans l'interrompre. Et c'était tout le bar qui venait autour de lui, pour l'écouter. Il était assis sur sa chaise avec son verre de bière en main et il parlait. Je ne saurais dire pourquoi mais tous, nous avons cru ses paroles. Avec le recul, le temps d'une histoire, il était le griot – il était le conteur africain que tout le monde estime. Le conteur s'est aussi le sage, il est souvent assis près d'un arbre, à l'ombre des géants de bois à la chevelure verdoyante. Il observe des enfants insouciants jouant pieds nus autour de la cour principale ; il envierait presque leur naïveté. Le soleil est à son zénith, il fait 30 degrés à l'ombre. Les enfants courent dans tous les sens. Et tous les autres villageois s'affairent sous cette chaleur prenante, dont personne ne semble être gêné. C'est l'ancien, le chef du village, les gens viennent le consulter en cas de dilemme, lorsqu'ils ont besoin de conseils. Et le soir venu, tous sont réunis autour de lui près du feu pour écouter des légendes qui finissent toujours par de sages paroles.

Oui, à cet instant Michele était le sage, à la seule différence qu'il avait quelques verres dans le ventre.

Maintenant que j'y repense, son histoire m'a parue longue et à dire juste, c'est toute cette journée qui fut longue. Pour cause c'était le solstice d'été ; le premier jour de l'été qui arrive toujours le 21 ou 22 Juin, mais, fait inédit nous étions le 23.

En été, tout parait plus clair. Les hommes et les femmes laissent tomber leur tenue, tandis que les plantes et les fleurs s'habillent de leurs plus belles robes dont les couleurs lumineuses charment les Hommes. Les oiseaux reviennent chanter l'été. Les fruits prennent de la maturité et mère lumière nous envoie ses doux rayons. Nuit et jour la cigale chante. Les marmottes et les loirs attirés par le chant de l'étourneau quittent leur long sommeil. L'alouette pour séduire les femelles, procède à une parade aérienne. D'abord au sol, la crète dressée, les ailes abaissées et la queue en éventail, il marche fièrement. Puis il prend son envol ; il vole sur place de haut en bas, et tombe vers sa bien aimé en espérant qu'à son tour, elle tombe amoureuse.

En été les sourires sortent de leurs longs mois d'hibernation ; on peut ainsi voir des Hommes sourire à d'autres Hommes sans raisons apparentes. C'est comme si par l'action du soleil, le cœur des Hommes se réchauffaient.

En été les Hommes se découvrent de nouveau amis, avec le beau temps naissent de nouvelles amitiés, qui bien souvent ne résistent pas à l'automne. 

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