Éric Hubert souleva les paupières, tiré de sa somnolence par un énième arrêt de la voiture et soupira. Il fit rouler sa nuque raidie et se redressa sur le siège de la berline.
- Où sommes-nous ? grommela-t-il.
Le chauffeur – un homme au front dégarni – lui jeta un coup d'œil dans le rétroviseur. Il avait l'air épuisé mais ne baissait pas sa vigilance au volant.
- Toujours sur l'autoroute, monsieur le président. Plus très loin de la frontière espagnole.
- Et pourquoi n'avançons-nous plus ?
Hubert tourna les yeux vers son compagnon d'infortune, son premier ministre apparemment de fort mauvaise humeur. Celui-ci lui rendit son regard et haussa les épaules avant de consulter son portable, comme il n'avait cessé de le faire depuis leur départ alors même qu'il avait conseillé au président de ne communiquer avec personne.
- Les bouchons se sont épaissis, répliqua le chauffeur. Je ne peux pas aller plus vite.
Des coups de klaxon retentirent en rafale et des cris en provenance d'une voiture proche firent baisser sa vitre à Hubert. Un homme interpelait les autres automobilistes, furieux, bras tendu par la fenêtre de sa Clio.
- Ils paniquent, murmura le président. Ils tentent de fuir et ne sont pas certains d'y arriver.
Un goût amer lui envahit la bouche et il tira sur sa ceinture pour réduire la pression exercée sur sa cage thoracique. Lui-même s'était assuré de mettre à l'abri ses proches avant tout le monde, de la même manière que Van Euen l'avait fait avec sa femme et ses jumelles. Le pouvoir était une chose curieuse, quand on y pensait. Il n'était censé en user que dans l'intérêt des citoyens français, et avait cédé à la première occasion pour faire jouer ses relations et privilégier la vie de ceux qu'il aimait. Mais une vie en valait une autre, non ? Chaque personne, cherchant en cet instant à quitter le pays, méritait de ne pas mourir.
La voiture repartit sur quelques mètres puis le chauffeur freina de nouveau.
- Un bus est arrêté au milieu, annonça-t-il.
- Essayez de le doubler par la droite, si nécessaire, ordonna Van Euen. Mais qu'est-ce qu'ils foutent, à la fin ?
Hubert leva les yeux au ciel, bien qu'il se posât la même question, et observa l'agitation régnant sur l'autoroute, au-delà de la berline. Le bus, stoppé en travers, bouchait deux voies à lui tout seul, et le président haussa les sourcils à la vue de ses passagers résolument occupés à descendre. Un jeune homme brun se tenait à la porte et aidait une vieille femme chargée d'un sac à quitter l'habitacle, indifférent aux klaxons des autres véhicules. Lèvres serrées, Hubert observa la vieille rassembler ses jupes et enjamber tant bien que mal la glissière de sécurité, secondée par une femme plus jeune aux cheveux teints en bleu. Toutes deux se faufilèrent ensuite avec les autres passagers entre les voitures et marchèrent droit vers l'autre côté de la route. La seconde barrière franchie, elles entreprirent de gravir la petite pente herbeuse qui bordait les voies.
- Ils pensent qu'ils ont une chance à pieds, dit doucement Hubert. Ils vont franchir la frontière par la terre plutôt que par les passages officiels.
Son attention revint au jeune homme qui choisit cet instant pour pivoter vers leur berline et balayer les environs du regard. Il parut vaguement familier à Hubert, mais il ne sut s'expliquer pourquoi. Une fillette descendit à son tour du bus, suivie d'une seconde et récupéra son sac dans la soute avant de revenir se poster près du jeune homme. Une femme les rejoignit ensuite, serrant quelque chose contre sa poitrine qu'elle remit à son compagnon. Cela fait, Hubert la vit rajuster un chargement sur son dos et entrevis une tête sombre tapissée de cheveux. Un curieux sentiment au creux du ventre, il ouvrit la bouche sans savoir ce qu'il allait dire.
- Van Euen, vous avez vu ça ?
- Quoi ? Une femme suicidaire qui tente le tout pour le tout avec ses enfants ?
Le ton railleur du premier ministre choqua Hubert qui le foudroya du regard, mais Van Euen l'ignora. Les deux hommes se turent un instant, et lorsque le président se décida à parler, la jeune femme, son compagnon et les fillettes disparaissaient derrière la haie de bambou qui bordait l'autoroute. Songeur, Hubert referma la bouche, secoua la tête et se surprit à espérer qu'il ne leur arrive rien. Qui savait ce qui les attendait en Espagne, ou même s'ils l'atteindraient ?
- Puisque nous n'avons rien d'autre à faire..., marmonna-t-il pour lui-même.
Il sortit sa tablette et l'alluma puis se mit à pianoter sur son portable afin de partager sa connexion internet avec l'autre appareil.
- Que regardez-vous ? demanda Van Euen qui fouillait dans un sac placé entre eux deux pour y trouver quelque chose à manger.
- Les informations. Ici, nous sommes aveugles.
- Vous ne devriez pas. Si on nous localise...
- Je ne pense pas être la cible prioritaire du docteur Malcolm puisqu'elle œuvre en ce moment même à décimer nos troupes.
- Ce n'est pas une bonne idée, monsieur. Que ferez-vous, de toute manière ? Les dés sont jetés pour eux.
Une légère tension renforçait la voix de Van Euen. Hubert haussa un sourcil et tapa résolument son code sur le clavier.
Résigné mais étrangement désapprobateur, le premier ministre se tourna vers l'extérieur. La voiture se remit en branle et le chauffeur parvint à se glisser entre le bus toujours arrêté et un gros 4x4. Ravi de reprendre un peu de vitesse, Van Euen sourit, sourire bien vite effacé par le hoquet étouffé du président. Celui-ci tenait la tablette à bout de bras, fixé sur des images de Paris détruite.
- Monsieur le président ?
Hubert ne dit rien et serra un instant les paupières avant de tendre la tablette d'un geste lent à son premier ministre. Ce dernier s'agita sur son siège avant de la prendre. Son visage exprimait une sorte de malaise.
- Regardez, intima sèchement Hubert.
- Je regarde, chuchota Van Euen.
Il se racla la gorge et lorsque son compagnon tenta de le regarder en face, se détourna légèrement.
- Ce n'est que de la pierre, tempéra-t-il maladroitement. Nous reconstruirons, monsieur le président. Si des vies peuvent être sauvées ainsi...
- Des vies ? Sauvées ? Nos hommes aussi sûrement que nos ennemis se font ensevelir sous la ville. Quel genre d'arme a fait cela ?
Éric Hubert n'attendait pas réellement de réponse à ses interrogations, jugeant que ce qu'il voyait sur son écran était le résultat de l'affrontement sauvage qui avait dû se dérouler là-bas. Il n'avait plus eu de contacts avec Marissa et le regrettait à présent, avec le sentiment de ne pas vraiment avoir joué son rôle de chef de l'Armée française, ainsi que ses pouvoirs le lui conféraient.
- Ce ne sont que des pierres, répéta plus vite Van Euen. Ce n'est qu'un moindre mal.
Hubert tiqua et fixa sans comprendre son premier ministre. Ce dernier avait posé la tablette sur le sac, entre eux et faisait tourner son portable entre ses doigts.
- Que voulez-vous dire ? le relança le président.
- Si la ville doit être rasée pour nous débarrasser de la menace, alors pourquoi pas ? Voilà ce que je veux dire, Éric. Peu importe le moyen, pourvu qu'on atteigne son but. C'est un principe utile en temps de guerre.
- Un principe qui met en jeu la survie d'innocents et permet d'effacer tout scrupule à donner la mort, gronda Hubert. Mesurez vos propos, Van Euen.
Un reniflement méprisant échappa à l'autre qui regarda obstinément par la fenêtre. Le président demeura silencieux un instant, le ventre noué d'une bizarre appréhension. Un présentiment envahit Hubert qui inspira une goulée d'air tremblante. Ce fut comme si la lumière se faisait dans son esprit, en réponse à l'attitude de son premier ministre.
- Qu'avez-vous fait ?
La question plana entre eux comme une chape de plomb pendant de longues secondes. Le chauffeur loucha dans son rétroviseur pour observer les deux hommes, l'un de toute évidence résolu à ne rien dire, et le second, inquiet sans qu'il n'eût compris pourquoi.
- Van Euen, répondez ! aboya subitement le président.
Le conducteur sursauta et se reconcentra sur la route où le trafic dense et lent gênait leur progression. Derrière lui, Hubert attrapa l'épaule de son premier ministre et le força à lui faire face. Une expression venimeuse barra les traits de l'autre qui grimaça un sourire.
- Ce qu'il fallait faire, monsieur le président. Juste ce qu'il fallait faire.
***
Niels, étalé sur le dos au beau milieu de l'allée, respirait faiblement. Annabelle remonta précipitamment sa manche.
- Une poche de sang, ordonna-t-elle. Vite. Une poche de sang, nom de Dieu !
Un Revenant la bouscula sans ménagement et la GEN se releva pour aller fouiller elle-même dans les caisses de matériel de soin, écartant de son passage plusieurs personnes qui tentaient de venir en aide à des blessés. Ceux-ci jonchaient le sol du jet qui prenait peu à peu de l'altitude. La soldate française qui avait pris les commandes avait l'air de savoir ce qu'elle faisait et, au moins, ils étaient hors de portée de l'ennemi.
Ne trouvant pas ce dont elle avait besoin – le compartiment réfrigéré était vide – Annabelle récupéra deux aiguilles à transfusion, un tuyau souple et, faute de mieux, un rouleau de gros scotch. Retournant auprès du Général, elle retira sa veste et massa son bras, juste au-dessus de l'intérieur du coude.
Près de la porte de l'appareil, Gaspard tentait de faire marcher le système de communication pour appeler les occupants de l'autre jet. L'espèce de téléphone fixé au mur émettait tout un tas de crachotements. Nacera, qui aidait une femme à s'asseoir sur l'un des sièges latéraux, vint à sa rescousse. Ses cheveux collés de sang du côté où elle avait été blessée à l'oreille frôlèrent la joue de Gaspard et elle secoua le téléphone.
- Il nous faut un plan, lâcha le Revenant. On doit savoir qui se trouve dans l'autre jet et décider quoi faire.
- Je suis d'accord, opina la jeune femme d'un détaché.
Gaspard n'insista pas et la laissa vérifier les branchements du système de communication. Elle pressa une touche sur le panneau de contrôle.
- Vous m'entendez ? lança-t-elle d'une voix forte pour couvrir le bruit résultant de l'agitation dans le jet.
- Vous nous recevez ? renchérit Gaspard. Ici l'agent Olbec, vous nous recevez ?
Il y eut un sifflement aigu qui fit grimacer la GEN à l'ouïe sensible.
- Olbec ? Olbec, on vous entend.
Le timbre rocailleux ne laissa pas de doute sur l'identité de leur interlocuteur et les deux équipiers échangèrent un sourire de connivence.
- Stone ? C'est vous ? On vous croyait mort.
Gaspard fit signe à Martial qui errait dans l'habitacle sans être utile à qui que ce fut et failli interpeller également Annabelle, mais la lieutenant paraissait absorbée par sa tâche consistant à transfuser son sang à Albert Niels. Une aiguille plantée dans le bras, l'autre insérée dans celui du chef Revenant, elle vérifiait que son sang coulait bien dans le bon sens et leur tournait le dos.
- Stone, reprit-il, qui est avec vous ? Vous avez vu Amanda ?
- Elle est aux commandes, répliqua le colosse. On était sur le flanc droit lorsque vous avez foncé comme des balles vers les jets. Attendez, je me déplace.
Quelque chose tomba de son côté et l'ancien instructeur de l'Institut jura tout haut. Un choc sourd s'ensuivit et il finit par reprendre la parole. Martial, un peu en retrait, tendit l'oreille vers le combiné.
- Là, c'est bon ? s'enquit Stone. Je suis avec Amanda. Marissa Kadi se trouve aussi avec nous. Elle était restée à bord du jet pendant l'attaque et est indemne.
- Ça va, les gars ? demanda la GEN Noire en écho.
- Nous avons beaucoup de blessés, exposa Gaspard qui balaya l'intérieur du jet du regard.
Ceux qui ne portaient pas secours aux autres étaient eux-mêmes trop faibles pour le faire. On allongeait chaque soldat nécessitant des soins sur le sol dur, distribuant des bandages ou des rations de nourritures. Gaspard évalua le nombre de survivants à une cinquantaine de personnes.
- Il n'y a plus grand monde en état de se battre, ajouta Nacera qui était parvenu à la même conclusion que lui. Niels a été touché, il n'est pas en capacité de décider de la suite des opérations. Et vous ?
- Même chose ici, indiqua Amanda. Quelques-uns de nos hommes ont même trouvé utile de mettre des cadavres à bord. Nous sommes quarante-et-un.
- Que faisons-nous ? voulut savoir Stone. Il reste des Soldats Noirs, en bas, mais nous ne serons pas assez fort pour les battre.
Gaspard croisa le regard de Nacera qui hocha doucement la tête. Elle le devança alors qu'il allait parler.
- Harvey, écoutez-moi, Luna Deveille est en ce moment-même sur la Tour afin d'arrêter Irina Malcolm.
- Luna ?
- Nous l'avons en quelque sorte récupérée, ce serait trop long de vous expliquer maintenant. Comprenez seulement qu'elle n'est plus un danger et qu'elle va essayer de trouver un moyen de mettre un terme à tout ça.
- Mais que fait Irina sur la Tour ? s'enquit Amanda. Quel est son plan ?
- Luna a récupéré les souvenirs de l'Ange Noir, c'est-à-dire les souvenirs de ce qui s'est passé pendant que l'Institut lui lobotomisait le cerveau. Irina a l'intention de faire exploser un projectile au-dessus de Paris afin d'exposer au sérum contenu à l'intérieur tous les humains sur un rayon extrêmement large.
- Large comment ?
Marissa Kadi parlait pour la première fois. Une once de désespoir perçait dans ses paroles. Nacera jeta un œil par le hublot pour voir l'autre appareil en vol près d'eux et imagina la ministre exsangue et épuisée, assise près d'Amanda.
- Large comme « Et la France devint le premier royaume des mutants », ironisa Gaspard. Il faut empêcher cela. Nous devons...
- Il faut nous mettre à l'abri, le coupa brutalement Nacera. Il faut mettre les humains à l'abri.
- Quoi ? protesta vivement son équipier. Nacera, qu'est-ce que... ?
- Nous devons quitter la zone et contacter le plus rapidement possible le président, ou n'importe quelle autre personne susceptible de relayer l'information, martela la GEN qui l'ignora comme s'il avait été une poussière sur sa chaussure.
- Nacera, à quoi est-ce que tu joues ?
Gaspard tendit le bras et attrapa le poignet de la jeune femme, furieux. La GEN le défia froidement et son charisme se répandit autour d'elle, faisant relever la tête à Annabelle. Martial ne dit rien, pensif, l'air totalement ailleurs. Ses traits nouvellement lissés par la mutation n'exprimaient rien.
- On devait prévenir Niels pour aller prêter main forte à Luna, cracha Gaspard. Pas se faire la malle en douce !
- C'est ce que toi, tu as bien voulu comprendre, jeta Nacera, mais Luna avait autre chose en tête, crois-moi ! Si elle rate son coup et que la bombe explose, les humains devront être aussi protégés que possible pour limiter la catastrophe.
- Protégés ? Contre une substance volatile qui s'infiltrera dans les moindres interstices et pénètrera les bâtiments ?
Le Revenant n'en croyait pas ses oreilles. Dents serrées, il dévisagea son amie. Il n'avait pas prévu un tel revirement de sa part.
- Il ne s'agit pas uniquement d'éviter à des milliers de gens de se transformer en GEN, Gaspard. S'ils ne sombrent pas dans la violence, ils s'en remettront. C'est de morts que nous parlons. Tout le monde ne supporte pas le sérum, et Irina s'en moque. Elle aura, quoi qu'il se passe, une Armée gigantesque et pourra envahir le reste de l'Europe. Les nouveaux GEN seront vulnérables et ils la suivront ! Je sais de quoi je parle. Regarde-nous, tous autant que nous sommes à avoir quitté l'Institut. Sans Luna et les Revenants, nous n'aurions pas bougé.
- Et tu essayes de me faire gober que c'est ce que Luna veut ? Qu'on la laisse se débrouiller ?
- Elle n'a pas peur de mourir, dit doucement Nacera. Parfois, je me demande même si elle le pourrait. En revanche, toi, c'est une certitude.
- On est encore là, intervint Stone depuis l'autre jet. Vous avez fini ? Personnellement, je suis de l'avis de Nacera.
- Ben voyons ! Tu t'es bien foutue de ma gueule, Nacera.
Le Revenant secoua la tête, bouillonnant intérieurement. Il n'avait pas pensé un seul instant que Nacera donnerait la priorité à la protection des humains, même si, d'un côté, elle avait raison.
- On ne peut pas laisser reposer nos destins sur une seule personne, décréta soudainement Amanda dont les paroles résonnaient à travers le téléphone. Les enjeux sont trop importants.
- Je suis d'accord.
Annabelle, qui se mêlait enfin à la conversation, arracha le tuyau qui la reliait à Niels et comprima un instant la plaie. Le saignement arrêté, elle lui banda le bras et laissa sa propre veine cicatriser seule. Elle drapa Niels d'une couverture de survie et vint se poster près de Martial, bras croisés sur la poitrine.
- Luna risque sa vie pendant que nous sommes à l'abri ici. Elle peut sans aucun doute vaincre le docteur Malcolm, mais ce n'est pas son seul objectif. Nous pourrions faire diversion et désamorcer le missile.
- Nos troupes ont payé un lourd tribut, objecta Stone. Et Irina ne laissera pas s'approcher un bataillon de sa Tour.
- Je n'ai aucune nouvelle des Russes, appuya faiblement Marissa. N'espérez pas de renforts.
Gaspard s'adossa à la porte du jet, les yeux fixés sur le téléphone tenu par Nacera. Cette dernière tenta de capter son attention mais il refusa le contact visuel. Il ne pouvait décemment pas s'opposer à l'idée de son équipière, car elle avait, au fond, raison. Il fallait essayer, même si la cause était désespérée, de préserver autant que possible la race humaine qui risquait fort de se retrouver réduite si Irina gagnait. La vie d'une seule personne – fut-ce Luna – ne justifiait pas qu'on perde de vue l'objectif réel de l'Institut. Mais après tout, c'était à chacun de faire ce qui lui semblait juste et sa décision était prise.
- Soyons réalistes, dit-il lentement. Si le missile part et que le sérum se répand dans l'atmosphère, nous seront tous transformés ou mort. Un petit groupe devrait pouvoir grimper en haut de la Tour Eiffel.
Il haussa les épaules.
- A vous de choisir. Moi, j'irai.
- Soldat Olbec, commença Annabelle, vous êtes...
- Un humain, je sais, jeta le Revenant. Un humain qui compte bien le rester. Emmenez ces gens loin d'ici, faites votre possible, mais je ne crois pas une seule seconde que me trouver enfermé ici me sauvera de quoi que ce soit, alors j'irai. Sauf votre respect, lieutenant Maturet, inutile de me donner l'ordre de rester.
Gaspard la vit chercher des arguments à lui opposer, les ailes du nez pincées. La pilote du jet – la soldate française qui avait pris les commandes – lui sauva la mise en reculant son siège d'un geste sec. Elle agita la main vers eux.
- Lieutenant Maturet, vous devriez voir ça !
- Qu'est-ce qui se passe encore ? maugréa la GEN.
Elle s'éloigna vers le poste de commandement et Martial en profita pour toucher l'épaule de son ami :
- Je viens avec toi. Je ne crains plus grand-chose, désormais.
- Merci, mec, mais...
- Ouvrez le plan incliné ! beugla alors Annabelle qui revenait au pas de couse. Rapprochez-vous du sol, vite !
Nacera plongea vers le bouton d'ouverture sans poser de question et Gaspard colla son front contre la vitre la plus proche. En bas, il ne vit rien de plus suspect que la rue qu'ils survolaient en train de se faire avaler par une énorme crevasse et cligna des yeux. Annabelle hurlait des ordres et l'appareil perdait de l'altitude à toute allure.
- Lieutenant, je...
- Sur votre droite Olbec, et achetez-vous des lunettes, siffla la GEN qui se postait déjà au bord de l'ouverture, arme à la main.
Gaspard fronça les sourcils et regarda mieux, puis fut saisi par ce qu'il voyait.
Là, au pied d'un immeuble en train de s'effriter, se trouvait une voiture. Et sur son toit, Madeleine Maturet plaquée contre la surface dure et métallique se faisait étrangler par nul autre que Samuel.
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