Chapitre 18: Viens danser!
- Maman, j'y vais!
- Ok mais rappelles-toi, tu as la permission de minuit et demi! Et si jamais tu risques d'avoir du retard, tu m'envoies un message!
Pendant ce temps, j'enfile une paire de ballerines noires vernies. Malgré le fait que je ne les mette pas beaucoup, je les adore. Ça était le dernier cadeau que mon grand-père m'est fait. Elles sont plates et simples. En un mot: parfaites.
Alors que je mets sur le dos ma veste en jean, mon téléphone sonne.
- Allô Jeanne?
- Oui, dépêches-toi, on t'attend en bas!
- Ok j'arrive!
Je m'empare de ma pochette blanche, récent cadeau de Sébastien, avant de partir embrasser ma mère. Je lui plante un baiser sur le front alors qu'elle téléphone à Paul. Elle me fait un petit signe de la main avant de reprendre sa discussion avec son nouveau copain.
Au moment où j'ouvre la porte, Garfield tente de passer entre mes jambes pour s'échapper. Je l'attrape par la peau du coup et embrasse sa petite tête plate.
- Où tu crois aller comme ça? Ce soir, c'est moi qui fais la fête, pas toi!
Je le repose à l'intérieur avant de refermer à clé derrière moi. Tandis que je glisse mon trousseau dans ma pochette, je vérifie que j'ai bien tout ce qu'il me faut: de l'argent au cas où je doive rentrer en taxi, mon téléphone, des kleenex, des Dolipranes, des pansements, des chewing-gums à la fraise... Tout à l'air en place.
Je descends les marches rapidement, le coeur léger. Ce soir, c'est ma première fête. Ce soir, je vais aller danser.
Alors que l'air frais du début de soirée me fouette le visage, une fille dans une Audi A5 noire me fait des signes. Je cours vers la voiture, ouvre la portière passager gauche et m'engouffre dans le véhicule. Je souris à ma meilleure amie qui m'adresse un sourire rayonnant.
- Salut Sabine! lancé-je.
- Coucou ma puce! Prête pour ce soir?
- Et comment!
Elle me fait un clin d'oeil par le rétroviseur avant de se mettre à insulter tous les conducteurs de la route. D'abord, Jeanne et moi restons silencieuses avant de nous mettre à bavarder à voix basse.
- Alors, tu as vu Axelle ces derniers temps?
Elle me répond par la négative.
- Tu sais, elle a prit des millions d'options pour sa rentrée en seconde. Elle n'a quasiment pas le temps de sortir. En plus, elle n'a pas pu voir sa soeur jeudi...
- Tu sais pourquoi?
Elle hausse les épaules.
- Après tout, elle devait avoir une tonne de devoirs.
Après quelques instants de silence, elle chuchote:
- Et alors, avec Guillaume? Tu ne m'avais pas raconté!
Le souvenir de notre discussion mercredi soir me revient en mémoire.
- Oh, tu sais, on ne c'est rien dit de bien important. Il m'a demandé ce que j'avais fait de mon après-midi. Et puis il m'a posé des questions sur moi et j'ai fait de même.
Jeanne se trémousse sur son siège, visiblement excitée. Je prends le temps de la regarder: elle a enfilé une robe blanche cintrée, au col carré et sans manches. Un long sautoir composé d'une pierre verte et de quelques chaînes dorées pend à son cou. Ses jambes interminables sont mises en valeur par une paire d'escarpins assortis à sa robe. Le côté droit de son crâne a été tressé et le reste de ses boucles encadrent son visage maquillé simplement d'un trait d'eye-liner et d'un peu de rouge à lèvre.
Comme d'habitude, elle est sublime. Je me sens souvent complexée face à elle. Je suis mignonne. Mais pas jolie.
Elle n'est pas jolie non plus. Elle est magnifique.
- Cass'? Allô?
Je redescends sur Terre et la regarde en fronçant les sourcils.
- Alors Guillaume?
- Bah quoi?
Elle lève les yeux au ciel et secoue la tête.
- Je te demandais ce que tu avais appris sur lui! Vous avez des atomes crochus?
Je me mords l'ongle du pouce, fraîchement manucuré.
- Pas vraiment: j'aime le bâteau, il a le mal de mer; il adore les chiens, je préfère les chats; j'ai fait de l'équitation, lui de la boxe; il fume, je déteste ça; j'ai eu cinq petits amis au total, il en a eu plus d'une cinquantaine depuis le collège.
- Cinquante?! s'exclame Jeanne, toute aussi surprise que moi lorsqu'il m'avait annoncé le chiffre au téléphone.
- Oui, entre celles qu'il avait en vacances, les filles qu'il trompait, les histoires d'une semaine ou deux, les plus jeunes et les plus vieilles... Faut dire qu'il s'est fait plaisir.
Elle reste interdite et se pince les lèvres.
- Fais quand même attention à ce qu'il te promet Cass'.
Je m'empoupre.
- Mais oui, bien sûr, je...
- Si je te le dis, c'est que je te connais, réplique-t-elle. Tu es un peu naïve sur les bords. Il suffit qu'il te fasse de belles déclarations, que tu es quelques soucis avec Sébastien et hop! Tu finis dans son lit!
Je tripote ma pochette. C'est vrai. Je suis quelqu'un d'assez crédule. Et il faut que je fasse attention.
Quand nous arrivons enfin, j'entends la musique à travers les parois de la maison d'Alexandre. Sabine grimace légèrement.
- Tu es sûre qu'il n'y a rien à craindre Jeanne?
- Rho, mais oui m'man, tout va bien! grogne ma meilleure amie. Allez, à plus.
Elle sort de la voiture en trombe et vient m'ouvrir la portière. Je baisse la tête et me redresse. Nous attendons que Sabine est fait demi-tour et nous l'observons s'éloigner. Pendant que Jeanne glisse son téléphone et autres bric à brac dans mon sac. Je fais comme si de rien n'était.
- Bon, on y va?
J'hoche la tête et elle me prend par la main, m'entraînant dans un monde de lumière et de chaos.
***
La musique bat son plein, les verres s'entrechoquent, les gens braillent et gesticulent.
Je suis adossée contre un mur, observant tout ce petit monde s'enjailler. Et même si je me dis qu'au milieu de toutes ces personnes à moitié ivre je passerai inaperçue, je ne peux me résoudre à me mélanger à eux.
Et puis, je le cherche des yeux, mais ne le vois pas. Et s'il n'était pas venu? Peut-être a-t-il essayé de m'appeler pour me prévenir?
Je consulte mon téléphone. Non rien. Pas d'appel en absence ni de message.
Je range mon IPhone en soupirant. Et lorsque je redresse la tête, je le vois. Enfin. Cheveux ébouriffés, sourire craquant, chemise en jean, chino beige roulotté jusqu'au dessus de le cheville, baskets basses blanches: le combo parfait.
Je me redresse pour être un peu plus droite et lui adresse un de mes plus beau sourire. Dès qu'il se trouve face à moi, je pose ma main sur son coeur et me mets sur la pointe des pieds. Il passe ses bras autour de ma taille et m'attire à lui. Je rapproche mes lèvres des siennes, mon nez effleurant le sien. Et mes yeux se ferment quand nos deux bouches se rejoignent dans un doux baiser, telle une caresse. Nous restons là quelques secondes, les yeux clos, nos fronts collés l'un à l'autre. Lorsque j'ouvre mes paupières, je tombe dans son regard charmeur.
Je me noie dans ses iris vertes.
- On va danser?
J'hoche à peine la tête et me mordille nerveusement la lèvre. Il m'entraîne au milieu de filles qui s'esclaffent pour un rien, au milieu des gens déjà bourrés ou des personnes bougeant timidement les bras. Quand on s'arrête enfin, il me fait un clin d'oeil et commence à danser. J'apprends une chose: s'il continue de bouger, la foudre va s'abattre sur la maison d'Alexandre.
Je tape d'abord du pied, en rythme. Puis la tête suit, ainsi que les épaules et les hanches. Bientôt, tout mon corps bouge, faisant un peu n'importe quoi: deux coups de hanches à gauche, deux coups de hanches à droite, et mes épaules qui décrivent un espèce de huit. La musique s'intensifie, mes bras se lèvent au dessus de ma tête, je bouge plus, je sautille. Et quand je ferme les yeux, je me laisse emporter par la fièvre dansante. Ce soir, je m'éclate.
Je rejette ma tête en arrière, faisant voler mes cheveux. Je me trémousse, je me tortille de tous les sens. Je ne cherche pas à faire bien comme je le fais au lycée: je cherche à me laisser aller, à me libérer, à profiter.
Aujourd'hui j'ai seize ans et je vis.
Quand le morceau se termine - deux minutes ou une heure plus tard - Sébastien s'avance vers moi.
- Je vois que tu t'amuses! hurle-t-il pour essayer de couvrir le brouhaha.
- Tu l'as dit! je réponds les joues en feu et les mains moites.
- Viens, faut que je te présente!
Il m'attrape par le poignet et me guide vers les limites de la piste de danse. Un peu contrariée, je le suis pourtant. J'ai encore envie de danser moi!
Il se retourne vers moi et me lance un sourire. OK, je veux bien arrêter cinq minutes.
- Hey, les gars!
Aussitôt, deux personnes jusque là plongés dans leur discussion se tournent vers lui et lui font signe.
- Je vous présente Cassandre. Cass', voici Rob et Shiva.
- Salut, me lance celui que je présume être Rob.
C'est un garçon à peine plus petit que Sébastien, au corps athlétique comme le laisse imaginer son torse sous son tee-shirt noir. Il a des cheveux blonds et lisses, ébouriffés dans tous les sens et tenus par un minimum de gel. Sa mâchoire carrée est parsemée de poils courts, lui faisant une charmante barbe de quelques jours. Ses yeux bruns sont un peu enfoncés dans leurs orbites mais pétillent de malice. Ses joues sont légèrement creuses et ses pommettes assez saillantes. Il me sourit de toutes ses dents, faisant apparaître des fossettes, et passe ses mains dans son jeans troué aux genoux.
Quant à la fille à ses côtés, je suppose que c'est Shiva. Elle est légèrement plus grande que moi. Elle a le teint pâle, les lèvres rouges. Son front haut est caché par un bonnet gris, mettant en valeur ses yeux bleus en amande, soulignés par un trait de crayon noir et par un coup de mascara. Elle a un nez fin en trompette et ses joues sont parsemées de tâches de rousseur. Ses cheveux rouges aux pointes blondes tombent en cascade sur ses épaules couvertes par une chemise à carreaux ouverte sur un débardeur Guns'n'Roses. Elle porte également un short taille haute effiloché avec des collants opaques et des bottines en cuir marron.
De vrais look de rockers.
Shiva me fait un petit signe de la main en souriant timidement.
Sébastien poursuit les présentations.
- Comme vous le savez déjà, Cassandre est ma petite amie.
Il se tourne vers moi et me fait un petit signe de la tête.
- Et eux, ils sont dans mon groupe: Rob est le batteur et Shiva la bassiste.
Je m'humecte les lèvres et les observe: leurs doigts ne font que s'effleurer et ils se jettent des petits regards en douce.
Me voilà rassurée: Shiva ne va pas me piquer mon Sébastien.
Mon petit ami, ne semble rien avoir remarqué de leur petit manège et attrape Rob par l'épaule.
- Viens, faut que je sache quelles modifications tu voulais ajouter sur notre morceau!
Il l'amène hors de notre vue, traversant la foule de gens agglutinés les uns aux autres.
Je me retrouve seule avec la bassiste.
- Ça te dis de sortir? Il fait chaud ici!
J'hoche la tête et avance jusqu'à la porte. Avant de passer le pas, je me retourne pour essayer de trouver Jeanne. Je la vois non loin de là, danser avec un garçon. Eh, une minute! C'est celui du bus! Celui qui tripotait ses cheveux! Mais avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, une main aux ongles rouges m'agrippe par l'avant-bras et m'attire vers l'extérieur.
Lorsque je suis arrivée ici, le soleil finissait sa descente derrière les montagnes. Maintenant, la lune baigne les alentours d'une douce lueur blanche et les étoiles se font concurrence pour être des plus brillantes.
Shiva m'amène dans un coin qu'elle juge "tranquille" et s'assoit par terre en tailleur. Je fais de même, repliant mes genoux sur ma gauche. Nous restons cinq minutes sans parler ni bouger, à contempler le ciel. Puis je la vois farfouiller dans ses poches et en extirper un briquet ainsi que des Malboros. Elle l'actionne et une petite étincelle jaillit, dansant quelques secondes avant de s'enrouler autour de la cigarette. La flamme s'éteint mais commence à consumer le papier, sur lequel tire à présent Shiva.
- Tu en veux une? me propose-t-elle en me tendant le paquet.
- Non non, merci! dis-je en mettant mes mains devant moi. Tu sais que ce truc est bourré de saloperies en plus du goudron? Y a du carburant pour fusée!
Elle me lance un petit sourire moqueur.
- C'est pour ça que j'ai toujours la patate! me dit-elle avec un clin d'oeil.
Elle tire de nouveau sur sa cigarette et laisse s'échapper un mince ruban de fumée entre ses lèvres.
- Ça fait longtemps que tu fumes?
- Un an et demi ou deux. C'était avant que Sébastien rejoigne le groupe. Et puis à force de me voir fumer, il a craqué et m'en a demandé une. Depuis, on fume ensemble pendant les pauses entre les répèts.
OK.
C'est de sa faute si Sébastien fume. Je pince mon collant.
- Et ça fait combien de temps pour toi et Rob?
Elle me lance un regard mortifiée.
- Ne dis rien à Seb' surtout!
Je la regarde sans comprendre. Elle s'empare de ma pochette et fouille dedans sous mes cris de protestations. Elle en sort mon téléphone et je la vois taper quelque chose dessus.
Note à moi-même: mettre un code.
Elle me le rend finalement, avec mon sac.
- J'ai noté mon num, comme ça si tu veux qu'on parle, tu pourras le faire.
Elle se lève, jette son mégot par terre et l'écrase du bout du pied.
- Allez, salut Cassandre et à bientôt!
Elle m'adresse un dernier signe de la main avant de disparaître. J'attends quelques minutes, perdue dans mes pensées, pour me lever et retourner à l'intérieur. J'épousste ma jupe, veillant à ce qu'elle ne soit pas relevée derrière.
J'ai envie de danser.
En chemin, je croise Alexandre rire bêtement avec un groupe de filles. Je soupire bruyamment en haussant les épaules, la tête basse.
Je pousse la porte et la musique me vrille les tympans, elle qui n'était jusque là qu'un bruit sourd à l'extérieur. Pourtant, la sourire aux lèvres, je rejoins la piste de danse où je tombe nez à nez avec Jeanne.
- Hey, me dit-elle, son haleine sentant légèrement l'alcool.
Elle me prend par la main et me traîne vers des garçons.
- Allez, viens danser! me crie-t-elle.
Elle recommence à se déhancher, la tête bougeant en rythme. Quelques garçons la regardent, mais s'en tiennent à ça. Rassurée, je me mets moi aussi à danser. Le volume est si élevé que j'ai l'impression qu'il bat à travers moi. Les lumières m'aveuglent, se réfléchissent dans mes lunettes, mais je n'en ai que faire.
Je m'éclate, je m'amuse.
***
Quand minuit sonne, je rends ses affaires à Jeanne et la quitte en lui faisant la bise. Je sors de la maison et vois avec plaisir mon petit ami m'attendre sur son scooter, le casque déjà sur la tête. Il me tend le mien et m'aide à l'attacher tant mes doigts sont fébriles.
Je suis exténuée.
Quand il commence à rouler, je pose ma tête contre son dos. Je repense à tout.
Et franchement, j'ai adoré.
Et voici un petit chapitre, pas terrible certes mais ça fait longtemps que Cassandre est au repos...
Que pensez-vous des deux nouveaux arrivants?
Appréciez-vous Shiva?
Qui peut bien être ce fameux garçon avec qui dansait Jeanne?
Je vous embrasse et tiens également à vous remercier.
A l'heure où est posté ce chapitre, Geek in Love a dépassé les 700 votes et les 7,5k vues! Et on a dépassé les 1k vues pour le premier chapitre! Je n'arrive pas à croire que plus de mille personnes différentes aient pu lire un seul chapitre.
En tout cas merci à vous, vous êtes fabuleux.
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