???

La pousse frémis , comme si mon souffle l'avait ébranlée. Une écorce pâle entoure la tige verte.
L'arbrisseau semble prendre une inspiration, il s'étend lentement vers l'arrière.

Après avoir "inspiré" l'Errant s'envole vers le haut pour devenir un petit arbre aux branches noueuses , beiges , et aux longues feuilles rousses et brunes. De petites fleurs pervenches fleurissent sur les branches encore frêles.

Une larme perle sur ma joue. Je l'essuie d'un revers de manche et fait de nouveau face à la foule.

C'est le premier enterrement, ils auront peut-être des condoléances passables.

Une famille s'avance en premier.
Les anciens Conseillers Kenrik et Oralie. En compagnie de leur fille , Coralia.

Tous exécutent une petite révérence puis Oralie s'approche de moi. Pour une fois le rose l'a quittée, sur ses joues autant que sur sa robe.

Elle me serre contre elle dans une étreinte parfumée. Les bijoux de son cou s'enfoncent dans ma clavicule. Mais je la serre aussi.
Comme si elle pouvait m'arracher au deuil.

Pourtant elle ne le peut pas. Personne ne le peut.

Elle s'éloigne. Sa robe verte pâle tourbillonnant en emportant son sourire triste.
Kenrik laisse un baiser délicat sur ma joue et murmure :
— Que la force t'accompagne ou que tu ailles. Que ton courage soit égal à celui qu'a eu Mélody en sauvant notre fille.

Puis il recule à son tour. Vient Coralia.

Celle pour qui ma mère est morte.

Celle qui a été trop faible pour se défendre elle même.

Celle qui a imploré, dans un cri fatal , l'aide de ma mère.

Et pourtant , je ne peux pas lui en vouloir. Pas à elle. Pas pour cela. Pas en mémoire de ma mère.

Ma mère , elle était la gentillesse incarnée. Mais pas une gentillesse de passage. Elle l'était vraiment. Elle vivait pour aider les autres. Elle vivait pour défendre les siens.
C'était une sympathie presque exaspérante. Non pas qu'elle en fasse trop pour notre bonheur, c'était qu'elle faisait passer sa vie après la nôtre.

Et cela l'a tuer. Sa gentillesse l'a tuer. Son cœur l'a emportée.

Coralia ne dit pas mot. Elle plonge ses yeux dans les miens. J'arrête de respirer.

Elle aurait voulu mourrir en aidant les autres. J'aurais dû mourrir en sachant que je lui avait évité la mort. Tu as tout le courage et la force que je n'ai pas eu en appelant à l'aide. 
Je t'en conjure, ne m'en veux pas , car la douleur , nous la partageons.

Puis je respire enfin quand elle détourne le regard. Ses yeux embrumés de larmes. Comme les miens.

Mes proches s'avancent. Mes amis.

Chacun avec des paroles préparées milles et unes fois. Chacun s'apprêtant à réciter un texte qu'ils répéterons durant les heures qui suivront. Mais rien ne peut plus me toucher que les mots de Coralia. Car elle a jurer partager ma peine. Car elle est Empathe. Car elle peut partager ma douleur.

Un regard attire mon attention. Bleu si pâle , rayonnant d'argent.

Un regard que je comparerai à une flèche si il n'y avait pas cette larme sur sa joue laiteuse.

Ses lèvres bougent.

— Je ne comprends pas l'amour que l'on peut porter à une mère. Mais je comprends l'amour que l'on peut porter à un proche. Alors je sais que cette épreuve sera difficile. Mais je sais aussi que tu as la force de continuer. Car ta mère était forte , et qu'elle t'accompagnera jusqu'au bout.

Comme si son murmure s'infiltrait au plus profond de mon être. Comme s'il se glissait dans mon cœur fendillé pour en être les pansements. Mais un pansement dont on ne peut plus se passer , qui est nécessaire une fois qu'on y a gouté.

Un murmure froid pourtant, glacé, mais un murmure qui réchauffe quand même.

Tout mon être me crie de me blottir dans ses bras pour ne jamais en sortir. Mais je ne le fais pas.

Parce que je n'ai pas le droit.
Parce que je dois pleurer.
Parce que je dois être malheureuse.
Car je n'ai pas le droit au bonheur aujourd'hui, même si ma mère le souhaiterai.

Il range sa longue frange noire-argentée et laisse la place à une jeune fille qui doit être sa sœur. Elle parle. Tout en sentant que je ne l'écoute pas.

J'écoute les bercements de la voix du garçon. Qui résonne toujours dans ma tête comme une mélodie dont je ne peux pas me séparer.

Puis il part. Mais il y a toujours la mélodie. Elle reste. Tout le long de la cérémonie. Comme si rien ne pouvais l'effacer après qu'elle ai atteint mon cœur.

Puis les autres cérémonies. Enchaînement de paroles censées réconforter. Mais à quoi sert il de réconforter une âme momentanément épuisée. A rien. Le but de la cérémonie ? Aucun.

Mais je continue quand même. A pleurer malgré le manque d'émotions. A parler malgré ma gorge qui se dessèche. A consoler malgré mon opinion.

Les Errants poussent. Mais aucun n'égale la grâce et l'aura de celui de Mélody. 

Tout simplement car ils ne le peuvent pas. Celui de ma mère , ce n'est pas qu'un arbre. C'est une douce odeur caramélisée. Un peu de saveur de pins , et le parfum des fleurs des champs. Mais aussi une sensation de bien être qui vous enveloppe comme une couverture. Qui s'infiltre comme le vent dans son feuillage.
Qui réchauffe comme les sourires.

— Thalia c'est bien cela ?

Je sursaute. Arrachée à mes pensée par sa voix.

— Ou... oui. Et toi ?

Demandai je en me retournant pour replonger dans l'océan brumeux.

— Tam Dai Song.
— Enchantée.
— Pareillement.
— Tu ... est venu pour quelques chose ?
— Pas forcément. Mais si tu as besoin d'aide je suis là.
— D'aide pour quoi ? Tu sais faire passer le temps ?
— Non. Mais je peux le rendre plus doux.
— On peut s'éloigner ? Ta sœur nous accompagne ?
— Je pense , Linh ne supporte pas les cérémonies, elle pleure plus qu'elle ne le peux.

Nous nous éloignons de la foule faussement attristée.

Remarque inutile : nos pas sont synchronisés.

Vous êtes bien les jumeaux qui ont participé au concours de Foxfire Exelium ? Demandai je , désireuse d'entendre à nouveau la voix de Tam Dai.
— Oui. C'est ça. Me répond Linh

Nous nous asseyons au pied d'un arbre , Linh au milieu.

Je passe la main sur une racine pâle et lis l'écriteau : Jolie Ruwen

— Elle était belle , cette fille. C'est Maï qui me l'a dit.

Je me retourne vers Linh.

— Qui est Maï ?
— Ma mère.
— Notre mère. Réplique Tam

Je ramène mes cheveux bruns sur mon épaule et m'assois en tailleur.

— Vous allez rejoindre Foxfire bientôt ? Demandai je encore
— Si le Conseil accepte. Répond Linh.
— Ou s'il dégag-

Tam s'arrête sous le regard furieux de Linh.
— Le Conseil va périr , ce n'est un secret pour personne , Linh. Fit je remarquer.

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— Ne croyez vous pas que le peuple se révoltera après cela ? Ne risque t'on pas de perdre notre place ?
— Je crois que tu n'as pas encore bien compris, Darek
— Alors expliquez moi
— Peut importe que l'on extermine les hommes ou pas , nous serons remplacés. Cela ne constitue que notre dernière action en tant que Conseil. Qu'elle soit cruelle ou gentille , c'est la dernière.

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En espérant que vous ne tenez pas à la vie , 😅😝

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