Agitation nerveuse

Il porte une longue veste en laine épaisse noire, des lunettes de soleil noir et dans les rues des quartiers pauvres de Serbie, il est aussi discret qu'un éléphant dans un magasin de porcelaine. Sa voiture est une Mercedes. Je le sais parce que tout le monde en parle. Il doit rouler sur l'or, peut-être un mafieux, sûrement sinon il n'oserait pas s'aventurer ici. Je me dis que ce type est suicidaire. Il va se faire liquider rien que pour sa bagnole. Ses talons claque sur le sol. Il s'arrête devant moi, les mains dans les poches, la clope au bec. Je renifle avant de lui demander s'il a pas du pognon, et si des fois, par hasard, s'il voulait pas m'en refiler.

Le même discourt, avec la trogne d'une morveuse, observant ses chaussures comme si le sol allait s'ouvrir et l'engloutir. Il dit rien. Puis il se met à rire. Je relève la tête et lui jette un regard noir. Son rire est une insulte, et je n'ai pas peur de le lui montrer. Il rit de plus belle. J'hésite une seconde, et je me jette sur lui, toutes griffes dehors, enfin plutôt ongles, et je lui lacère la peau, mes jambes enlacent sa taille, je suis juchée sur lui, et je mords, je griffe.

Cet imbécile a osé rire de moi. J'suis p-t'être une rien du tout, mais j'l'emmerde lui et les autres qui se donnent des airs de grands. Il y a tant de colères en moi, que je ne peux la retenir. Elle jaillit hors de moi telle une énergie incontrôlable. Il se débat, et finit par arriver à choper mes deux poignets. Il doit me plaquer contre un mur, et manquer de m'étrangler pour que je m'arrête, presque à bout de forces, mais les yeux lançant toujours des éclairs de colère et de rage.

« Calme-toi. Je ne voulais pas me moquer de toi. 

Je crache par terre, mais l'idée de lui infliger ce crachas à la gueule m'a bien traversé l'esprit. Il me regarde à la fois étonné, médusé, toujours le regard rieur. Ce qui m'énerve passablement d'ailleurs.

- T'es belle. fait-il simplement.

Je m'agite à nouveau. Il caresse mon visage, et je me débats. J'ai envie de hurler quand il me touche avec douceur, et je sens son désir palpiter contre ma hanche. Je finis par attraper sa main et la mordre. Il lâche un hoquet de douleur et me frappe aussitôt. La douleur se diffuse dans mes veines, remonte jusqu'à mon cerveau, grillant les neurones, laissant s'ouvrir la porte de l'endorphine qui par un curieux hasard s'insinue dans mon cerveau, un fucking bug ou je ne sais quoi, mais y'a des putains de papillons qui s'agitent dans mon bas-ventre, ça palpite là dessous.

Je sais ce que c'est, j'ai dix-sept ans, j'ai déjà baisé des types pour avoir quelques thunes, juste assez pour bouffer, parfois m'enfiler un truc dans les veines, ça fait oublier, mais ça laisse toujours un goût amer en bouche, si bien que les drogues ce n'est pas mon truc, juste de temps en temps. Là n'est pas le sujet. Cette putain de baffe qui a failli me décoller la mâchoire m'a filé la trique. J'suis excitée bordel, et ce n'est pas la première fois que ça m'arrive. À chaque fois j'ai conscience qu'il y a un truc qui cloche en moi. Ça me gêne. Ce qui m'excite encore plus. Foutu bordel. Je dois avoir un défaut de fabrication.

Il doit avoir capté le truc parce qu'il se colle à moi en me caressant encore plus, tirant sur le bout de tissus qui couvre mon corps pas encore terminé, palpant mes seins avec une avidité animale. J'ai envie de me débattre, et je le fais, je hurle un non à moitié avaler par des larmes que je ravale douloureusement, et il me saisit par les épaules pour me plaquer durement contre le mur.

- Fais pas l'idiote. J'te paierais si c'est ça que tu veux.  réplique-t-il durement en me plantant ses yeux noirs dans les miens.

Un frémissement me parcourt. Mon crâne a heurté le mur quand il m'y a collé, et cette douleur se diffuse en moi, délicieuse, amer et douce à la fois, j'aime la sensation de la douleur alors qu'elle me poignarde la cervelle. Il touche mon corps, tire sur le tissu, l'arrache, me fout à poil dans une putain de ruelle sale et je le laisse faire. J'en ai envie. Je sais que c'est sale, mal, les leçons de mes parents me reviennent en tête, l'image de mon père reste un peu plus longtemps. Je me pince les lèvres. Le désir efface tout.

J'ai mal à la tête, il me fait mal, il me pince, me serre trop fort, me plaque contre le mur, me retourne, me penche contre une poubelle. Je me sens salie et j'aime ça. Quand il a fini son affaire, il se rhabille tranquillement. Je tiens plaqué contre moi le bout de tissus sale qui me servait de robe, attendant ses maudit billets en espérant qu'il crèvera égorgé par un gang local.

- T'as pas l'air si farouche que ça une fois qu'on t'a baisée. » lâche-t-il.

Je renifle.

- T'es pas très bavarde, mais j't'aime bien.

Putain, ce con va me donner mon fucking fric ? J'ai envie de lui arracher la langue. Et tout ce qu'il fait c'est de me regarder avec cet œil vitreux, presque aimable. Quel sale con !

- Ecoute, ici tu feras pas long feu. Camée ou crevée, t'espère quoi ? Rien. J'en vois tous les jours des gamines comme toi, vendant leur corps pour trois fois rien, allant s'acheter une dose pour oublier et recommençant le même cirque.

- Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Demandais-je.

- Ca me fait que, p'tite conne, je te propose mieux. Viens avec moi, tu seras bien habillée, je te protégerais, et tu seras loin de toutes ces conneries. T'as pas envie d'une vraie douche ? D'un lit ? Ca fait combien de temps que t'as pas eu un vrai repas ? »

Je serre mon bras, je me mords la lèvre sans oser lever le nez. Au fond, il n'a pas tort. Et puis lui ou un autre, hein ? Quand est-ce qu'une telle chance se représentera ? Je finis par lâcher un oui dans un hoquet, en me disant qu'après tout, je n'aurais qu'à le buter dès que l'occasion se présentera en me barrant avec tout son fric.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top