24. La fugue de l'esclave

Nous sortons tous les trois de l'hôtel. Depuis que Dalila a pris la décision de partir pour l'Acropole, Noah passe son temps à bougonner dans son coin. Dalila et moi avons vite pris l'habitude de l'ignorer et de nous concentrer sur notre conversation.

- Donc pour fermer ton esprit, m'apprend Dalila, il faut que tu fasses le vide dans ta tête. Je sais que tu risques d'avoir du mal au début mais une fois que ce sera fait, tu n'auras plus de problèmes.

Je respire un grand coup et essaie de chasser toutes mes pensées.

Ne penser à rien, ne penser à rien.

- Tu y arrives ?

- Je suis littéralement en train de penser au fait de ne rien penser.

Dalila pouffe et me sourit.

- Ne t'inquiètes pas pour ça, cela va venir avec la pratique.

Je lui adresse une moue septique et me retourne vers Noah.

- Je crois qu'il n'a toujours pas digéré le coup que tu lui as fait, dis-je avec amusement.

- C'est certain, me répond-t-elle après s'être retourné pour observer discrètement Noah.

Malgré mon amusement, je ressens une pointe de culpabilité. Je sais que Noah à réagis comme cela pour nous protéger tous les trois. Mais les souvenirs sont plus importants que la possibilité que les Ailes Blanches sachent potentiellement où nous allons. Les souvenirs sont les seuls moyens de trouver des indices à propos de la chef des Ailes Blanches.

Nous ne passons pas par le même chemin que ce matin mais les maisons se ressemblent. Elles sont toutes carrées et colorées. J'entends le vent se faufiler entre les maisons et les arbres. J'entends la douce mélodie que les oiseaux chantent dans les arbres. Tout est calme. Je pensais qu'une grande ville serai plus bruyante.

Dalila s'est un peu éloignée de moi pour observer quelque chose que je ne peux pas voir derrière une maison.
Je me cogne contre un pavé de la route et une sensation désagréable m'envahit.

                             ※※※

Du peu que je me souvienne, j'ai toujours grandi ici, au milieu des gens et des habitations de la cité d'Athènes. Mais tout a changé dans ma perception des choses depuis que c'est arrivé. Maîtresse Alma dit que c'est un cadeau des Dieux et qu'ils m'ont fait entrée dans sa maison pour leur bonne conduite à son mari et elle. Elle a toujours respectée les règles de la cité. Mais malgré mes pouvoirs, je ne deviendrais jamais oracle. C'est une élite réservé aux femmes et filles de citoyens les plus riche et je ne suis qu'une esclave.

Je lâche un soupire tracassé, le chemin vers la maison de mes maîtres me semble plus long que d'habitude. Le citoyen Plare menace mes maîtres de me faire un procès. Il soupçonne quelque chose depuis un moment déjà. Je suis certaine qu'un de ses esclaves m'a vue rôder autour de ses champs et qu'il l'a prévenu. Plare a raison d'avoir des soupçons, je n'étais pas là par hasard. Maîtresse Alma m'avais envoyé assécher ses cultures.

Elle, son mari et Plare sont en compétition permanente pour la vente de leurs produits de la terre. Et sans eau, pas de récolte. Peut-être même que l'esclave m'a vue assise, les mains dans la terre, à murmurer des paroles inaudibles. Je n'avais jamais drainé autant d'eau en même temps, je suis restée couchée pendant une journée entière. Si jamais Plare gagne le procès, je ne survivrais pas longtemps, peu importe ce que feront mes maîtres pour m'aider.

Je bute sur un pavé inégal de la route et manque de tomber. Je lève les yeux de la route pour regarder devant moi. A cette heure tardive, il n'y a plus personne dans les rues de ce quartier. Je regarde les bâtiments carrés à plusieurs étages. Pour certains, les couleurs vives sont si neuves qu'elles arrivent à m'éblouir même en pleine nuit. Je passe devant la boutique de produit fermier de mes maîtres. Plaut, mon maître, a réussi à s'expendre même au-delà de la cité, le commerce y est florissant.

J'ai toujours eu conscience de la chance que j'ai de vivre dans cette famille. Leurs richesses leur permettent d'êtres importants et d'avoir beaucoup de champs. Ils sont aimables et traitent bien les esclaves et domestiques de la maison. C'est grâce à eux que j'ai eu mon instruction et, quand mes pouvoirs se sont manifestés, maîtresse a absolument tenu à améliorer mes connaissances, mon vocabulaire et mon écriture. Je me souviens avoir été immensément heureuse, même si mes dons ont été difficiles à maîtriser.

J'ai presque atteint l'entrée de la propriété que je m'arrête net pour mieux jauger l'inconnu devant la porte de la propriété où j'habite. Il est tout et noir vêtu et porte une capuche. Étant donné sa carrure et sa taille, je dirais que c'est un homme. Je ne peux en savoir plus, la nuit est trop épaisse. Peut-être est-ce seulement un étranger perdu, mais mon instinct me souffle de me méfier.

L'homme effectue une légère courbette et enlève son capuchon.
A première vue, je dirais que rien ne le différencie d'un homme normal. Ses cheveux sont attachés en catogan et la finesse de son visage est renforcée par un nez aquilin qui lui mange la moitié de son visage. Je jette un coup d'œil à ses vêtements pour identifier sa classe sociale. Il n'est pas pauvre mais pas aussi riche que mes maîtres. Je dirai qu'il appartient à la classe moyenne.

Il ne cesse de sourire depuis que je l'observe, je me demande ce qu'il peut bien l'amuser chez moi.

Je garde le silence pour ne pas avoir de problèmes. Si cela se trouve, c'est peut-être une personne embauché par Plare pour s'occuper de mon cas avant le potentiel procès. A cette pensée, je me crispe et me tiens prête à me battre pour ma vie. Malgré l'interdiction qui plane au sujet de l'utilisation de ma magie en dehors de la maison ou sur ordre, j'ai déjà dû effectuer un combat magique car mes agresseurs étaient bien trop nombreux pour que je puisse les affronter seulement avec ma dague. Mais ça a été mon seul combat, j'espère ne pas avoir besoin d'en arriver là.

- Avant de vouloir m'attaquer, je tiens à vous signaler que je ne suis pas là pour me battre avec vous ou pour vous tuer. Je veux discuter, dit-il avec sa voix caverneuse.

Je fronce les sourcils, incapable de savoir s'il dit la vérité ou s'il me ment pour me prendre par surprise.

- De quoi voulez-vous discuter ?

J'essaie de paraître plus veille et plus assurée pour l'intimider. Après tout, je n'ai que dix-sept ans.

- De votre magie. Inutile d'essayer de le cacher, votre aura magique est extraordinaire. Elle l'avait prédit.

Je fronce les sourcils d'incompréhension. De qui parle-t-il ? Mais surtout comment sait-il pour ma magie ? J'ai toujours été extrêmement prudente en l'utilisant !

- Je...je ne vois pas de quoi vous parlez monsieur.

Un sourire mi malicieux mi bienveillant apparaît sur son visage.

- Je parle de votre magie, celle qui vous permet de contrôler l'eau. Vous êtes comme moi, me dit-il avec calme.

Je n'ai pas le temps d'analyser cette phrase que l'homme claque des doigts. Une minuscule flamme s'échappe d'entre eux. Je suis fasciné par ce minuscule point rouge et orange qui danse dans la nuit, éclairant faiblement les yeux vert magnétique du magicien.

- Vous...vous êtes magicien ? ma voix chevrotante doit être encore plus pitoyable que ce que j'entends.

Un léger rire s'échappe de sa bouche mais je ne comprends pas pourquoi.

- Je ne suis pas un magicien, je suis un Immortel, et vous aussi.

J'ai le souffle coupé, la surprise est intense. Je laisse échapper un rire hystérique. Seuls les Dieux sont Immortels. Mes pouvoirs sont peut-être un cadeau des Dieux mais je ne suis certainement pas une déesse.

- Seuls les Dieux sont Immortels, c'est un fait, dis-je d'une voix choqué.

L'homme éclate d'un rire bruyant.

- Je suis désolé de vous décevoir mais vous n'êtes certainement pas une déesse. Et moi, je ne suis pas non plus un Dieu. Je suis un homme avec des pouvoirs et une vie éternelle. Mais il est vrai que l'attribution de Dieu me ferai plaisir, dit-il avec un sourire, sauf qu'ils n'ont rien à voir avec tout ça.

- Comment cela ? Ma magie ne vient pas des Dieux.

L'homme eu un instant l'air gêné.

- Parlons d'autres choses voulez-vous ? Je ne suis pas là pour discuter des origines de la magie, mais pour vous proposer un marché.

Je l'écoute attentivement. Depuis qu'il m'a montré cette flamme sortant de ses doigts, j'ai l'impression de ne plus être seule au monde. D'avoir un allié au milieu de tous ces gens.

- Nous avons besoin de vous.

- Nous ?

- Oui. Je travaille pour une association nommé les Ailes Blanches. Je dis "nous" car il n'y a pas que vous et moi qui ayons des pouvoirs liés aux éléments. Nous sommes des centaines d'hommes et de femmes regroupés sous une seule bannière, celle des Ailes Blanches. Je ne viens pas exactement de mon propre chef mais pour celui de notre chef. Elle souhaite vous rencontrer, achève-t-il en me jaugeant du regard, cherchant à savoir quelle décision je vais prendre.

Je tombe des nues, une chef ? Une femme ayant du pouvoir ? C'est impossible ! Ici, aucune femme n'oserait jamais demandé à son mari ou son père un rôle important. Mais, malgré mon étonnement et ma répulsion, cette femme m'intrigue.

- Elle a un nom votre chef ?

- Oui, mais je ne puis vous le dire aujourd'hui. Il faut que vous acceptiez de faire partie des nôtres, et c'est ce pourquoi je suis venu vous voir.

- Je ne peux pas accepter.

Ma réponse est catégorique et ferme. Je n'ai pas le droit de le faire, mes maîtres ne seront jamais d'accord.

Mais toi, qu'en penses-tu ?

- Vraiment ? Je croyais que vous étiez intéressé...

Je me mords les lèvres pour ne pas hurler.

Tu n'as pas le droit de le suivre. Tu n'as PAS de droit de le suivre.

J'ai beau être heureuse d'avoir trouvé un autre magicien, je suis toujours méfiante envers lui. Et si il essayait de me tuer ou pire... et puis il y a maîtresse Alma, si je disparaissais, elle pourrait envoyer d'autres esclaves et des citoyens me poursuivre. Les châtiments réservés aux fuyards sont terrifiants.

- Si vous acceptez de me suivre, l'esclave que vous êtes aujourd'hui disparaîtra.

Cette possibilité est très tentante. L'étranger pousse un soupir résigné, me tourne le dos et commence à s'en aller.

- Au revoir Adelina. J'ai été très ravi de vous rencontrer.

Je le regarde s'éloigner avec la sensation d'avoir raté quelque chose. Mes yeux se posent sur la maison de mes maîtres. Je prends une grande inspiration.

- Attendez ! Je vous suis !

L'homme se retourne et me fait signe de le suivre.
Je ne sais pas si j'ai bien fait de prendre cette décision mais je sais que j'aurais regretté toute ma vie de ne pas avoir tenté ma chance. J'ai la possibilité de découvrir une nouvelle vie. Loin des ordres de mes maîtres. Même si je les apprécie, ils n'auraient jamais pu m'offrir la liberté qu'ils offrent à la plupart de leurs esclaves pour bon service.

Je pose une dernière fois mon regard sur ce qui a été mon foyer pendant dix-sept ans et emboîte le pas au magicien.

                               ※※※

Je cligne des yeux, complètement éblouie par le soleil.

- Tout va bien Jane ? me demande avec inquiétude Dalila.

Je secoue la tête positivement.

- Oui ne t'inquiètes pas, je lui montre un pavé de la route, j'ai trébuché.

Je ne tient pas à lui révéler que j'ai vue un souvenir d'Adelina. D'après les informations des Ailes Blanches, il y a un souvenir à l'Acropole, et il est peut-être plus important que celui-ci !

J'ai l'impression que toutes les Gardiennes ont été approchées par les Ailes Blanches au cours de leur vie. Il n'empêche que je me demande depuis quand cette organisation existe... De ce que m'a dit Dalila, les Immortels comme elle et Noah descendent tous des anciennes Gardiennes. D'après le journal de Tao, la première Gardienne est née il y a plusieurs milliers d'années... Cela veut dire que cette organisation existe presque depuis les origines du monde. Puisque toutes les Gardiennes sont mortes, il s'agit forcément d'un descendant qui a créé les Ailes Blanches...

Ou en l'occurrence d'une descendante...

Je m'emmêle dans mes idées. Je n'ai même pas de nom pour m'aider. Malgré tout, je continue d'espérer que les souvenirs des Gardiennes me mettront sur la piste de la chef des Ailes Blanches.

- À quoi tu penses ? m'interroge Dalila.

Je me tourne vers elle. Son sourire me rassure. Après tout ce que l'on à vécu, elle continue de sourire. J'ai l'impression qu'il s'agit de mon opposé. Contrairement à elle, plus le temps passe, plus j'ai l'impression de m'enfoncer dans la panique et la peur.

- Je pense aux Ailes Blanches. Je n'arrête pas de me torturer le cerveau à propos de cette mystérieuse chef...

Les yeux bruns de Dalila se plissent de concentration.

- C'est vrai que ce mystère est étrange. A quoi cela lui sert-elle de rester caché de tous ?

Je hausse les épaules.

- Elle est peut-être moche...

- Jane ! proteste-t-elle.

Je n'arrive pas à m'empêcher de rire même si ma blague était franchement limite.

- Plus sérieusement, je reprends, rester caché lui permet peut-être de prendre les gens par surprise. Peut-être que nous la connaissons sous le nom d'une personne influente ?

- Cela me semble probable. Ou bien cela à un rapport direct avec toi et les souvenirs.

Nous nous taisons toutes les deux. Je me tourne un peu pour observer Noah. Cette attitude nous prouve qu'il nous en veut toujours. C'est vrai qu'il a raison de privilégier notre sécurité aux souvenirs mais sa théorie n'est pas prouvable. Et puis, c'est grâce aux souvenirs de Kumiko et d'Amonet que nous sommes arrivés ici. Nous n'aurions sûrement jamais quitté la Chine sans ces souvenirs. D'ailleurs nous ne nous serions peut-être jamais rencontrés.

Je pousse un soupir, tout est tellement compliqué...

Noah est toujours assez loin derrière nous. Je me demande à quoi il pense, peut-être à la même chose que moi.

Finalement, pourvoir lire les pensées des autres ou voir l'avenir me paraît plus intéressant voire même plus utile que voir le passé. Si je n'en avait pas besoin pour les souvenirs des Gardiennes, cela me serait certainement bien inutile, sauf si j'envisageais une carrière d'archéologue.

Nous nous dirigeons sans parler jusqu'à l'Acropole qui se dresse au centre de la ville. Une fois devant la grande colline, je prends le temps de lever les yeux et d'apprécier la vue.
D'ici, je ne voie que le sommet des plus grandes architectures car la fortification masque la vue.

J'emboîte le pas à Dalila qui commence l'ascension de la colline. Plus nous montons, plus la vue sur Athènes est impressionnante. Je voie des maisons puis la mer s'étendre à perte de vue. J'ai envie de m'arrêter ici et de regarder le paysage pour l'éternité, c'est si calme...

Je sors de mes pensées et repère Dalila plus loin, je me faufile en cachant au mieux mon visage au milieu d'un groupe de touristes. Quand je parviens à rattraper mon amie, elle se tient devant les restes d'une arcade d'un blanc nacré. Je fais un pas de plus et je me retrouve à plonger dans le passé.

                            ※※※

Je pose mon regard sur l'Acropole, la place principale de la colline est déserte, de jour, elle fourmille de tous les côtés. Nous remontons lentement la place jusqu'au Parthénon. Nous passons sans nous arrêter devant les autres bâtiments de la cité. J'ai toujours trouvé de l'Erechthéion était le temple le plus impressionnant. Son architecture est tellement inhabituelle... Les toits de tuiles rouges sont éclairés faiblement par la lune. L'odeur de la nuit, mélange de feuille d'arbre et d'humidité, me procure une sensation de bien-être et me rassure.

- Pourquoi ici ? demandé-je à mon guide.

- Entendez-vous quelque chose ?

Je hausse un sourcil interrogateur, c'est peut-être un test. Je me concentre mais le silence est total. Seul le bruit de nos deux respirations insuffle un peu de vie à cet endroit.

- Je n'entends rien du tout.

- C'est exactement pour cela que nous sommes ici. Il n'y a âme qui vive.

- L'endroit idéal pour une conversation secrète, terminé-je.

Il incline la tête et souris.

- Suivez-moi.

Nous marchons entre les bâtiments et les temples en silence. La lune éclaire doucement notre chemin. J'essaie de paraître calme mais je n'ai jamais été aussi peu à l'aise. Je viens tout de même de fuguer de la maison de mes maîtres ! J'espère sincèrement que nous serons loin d'Athènes demain matin, car quand maîtresse Alma découvrira ma disparition, toute la cité sera à ma recherche.

Le magicien s'arrête net et je ne l'évite qu'in extremis.

- C'est l'endroit parfait pour parler.

Sans un mot de plus, il s'assoit sur le podium qui mène au Parthénon. Je mets quelques secondes à faire de même, ayant toujours du mal à réaliser ce que j'ai fait.

- Bien. Commence-t-il une fois que je me suis assise. Les Ailes Blanches existent depuis les confins du monde. Tous ceux qui ne sont pas comme nous ignorent notre secret. Notre chef Lania, c'est son nom, travaille depuis plusieurs siècles à préserver la paix dans le monde entier. Donc également entre la cité d'Athènes et ses ennemis, dit-il en me dévisageant pour être sûr que j'ai bien compris.

J'acquiesce agacé, ce n'est pas parce que je suis une femme et une esclave que je suis stupide.

- Et comment faites-vous pour préserver la paix ? demandé-je.

- Nous nous battons, répond-t-il comme s'il s'agissait de la chose la plus normale du monde.

Je le regarde avec incompréhension. Le magicien dut le remarquer car il précise :

- Dans un monde idéal, la paix s'obtient en parlant, mais dans un monde tout sauf idéal, la guerre a fini par devenir une arme de paix.

Je médite sur ses paroles et il ne rajoute rien pour me laisser réfléchir.

- Et vous êtes une armée entière... d'Immortels ?

- Une armée ? Non, nous ne sommes pas assez, mais nous pouvons faire plus de dégâts qu'une dizaine d'armées réunies.

Je le regarde avec des yeux ronds, comment est-ce possible ? Une telle puissance armée pourrait mettre à genoux même les plus puissantes cités et les plus puissants empires. Alors pourquoi n'ont-ils pas encore ce qu'ils recherchent ?

- Mais comment n'avez-vous pas encore accompli votre but ?

Le magicien prend le temps de bien réfléchir avant de me répondre.

- L'être humain est complexe... Nous résolvons une guerre d'un côté de la Terre et cinq autres conflits éclatent ailleurs dans le monde. Mais j'ai confiance en Lania. En plus de son don pour diriger les autres, ses pouvoirs dépassent l'entendement. Mais elle a également besoin de vous, vous êtes spécial. Quand vous parviendrez au summum de votre puissance, vous serez plus forte que la plupart des nôtres. Et les dieux savent que nous avons besoin d'hommes et de puissance...

- Mais je ne peux pas me battre ! protesté-je. Je suis une femme.

L'homme éclate d'un rire qui brise le silence. L'écho de son rire s'éloigne lentement de l'Acropole.

- Ce n'est certainement pas un problème. Vous êtes tout à fait capable de vous battre comme un homme. Être femme n'est pas un problème.

Je dévisage mon interlocuteur. Ses propos sont d'un tel décalage avec ce que l'on m'a appris que j'en reste muette. Depuis toujours je sais qu'une bonne femme et une femme qui se soumis aux ordres de son père et de son mari. Elle reste tranquillement à la maison et ne fait rien qui puisse déshonorer son statut.

- C'est normal que vous soyez déstabilisée, me confit l'Immortel, votre société n'a pas les même principes de vie que la mienne. Mais vous verrez qu'aux côtés de Lania, vous vous sentirez vraiment à votre place.

- Depuis combien de temps Lania est-elle la chef ?

- Depuis toujours. Certains vous dirons même qu'elle est la première des Immortels. Personnellement je n'y crois pas... Lania aime particulièrement se vanter, et si elle est véritablement la première Immortelle, cette information ne serai pas nimbée de mystère.

Je ne réponds rien et laisse mon regard se perdre vers le noir de la mer. En plissant les yeux, j'arrive à voir des navires de guerre voguer doucement sur les flots.

- Adelina, êtes-vous prête à rejoindre notre combat ? me demande la magicien.

Je le regarde avec attention.

- Je ne connais même pas votre nom, magicien.

- Je m'appelle Alec.

Alec ? Je n'ai jamais entendu ce nom. Mais ce n'est pas le plus important. Il me demande si je souhaite faire partie de leur combat. J'imagine qu'en quittant mes maîtres, j'ai scellée mon destin. Alors autant aller au bout des choses.

- Alec, déclaré-je au bout d'un moment de silence, j'accepte de faire partie de votre combat mais à une condition.

- J'écoute, dit-il avec méfiance.

- Je souhaite rencontrer Lania.

Alec se lève sans un mot. Il se retourne vers moi et me tend la main.

- Marché conclu, assure-t-il.

                             ※※※

Je lève les yeux vers le Parthénon, le temple me paraît moins éclatant après avoir vue la construction aussi neuve.

- Jane ? Qu'est-ce tu as vue ? me demande une voix inquiète.

Je me retourne vers Noah en sursautant. Je ne m'attendais pas du tout à ce que ce soit lui qui me pose la question.

- J'ai vu un souvenir d'Adelina évidemment.

- Parfait, me murmure-t-il à l'oreille, maintenant il faut partir.

Je voie à son visage que quelque chose ne va pas. Son front est plissé et ses poings sont serrés.

- Noah, qu'est-ce qu'il ne va pas ?

Sans me répondre, il me monter l'entrée de l'Acropole. Je mets quelques secondes à trouver ce que montre son doigt avec tous ces touristes. Mais quand je les vois, mon sang ne fait qu'un tour. On ne peut plus fuir.

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