Baby-sitting
Point de vue de Lucy...
Je ne m'attendais pas à l'irruption de Leythis si tôt. Je pensais avoir le temps de me recueillir en paix sur la tombe de mes parents, mais il a fallu que cet instant soit gâché par cet énergumène. Ce porc qui ne perd jamais une occasion pour me toucher le bras ou la cuisse quand il est convaincu que personne ne le verra faire. Ce même pachyderme qui me déshabille constamment du regard... Le plus surprenant cependant, c'est l'intervention des deux soldats armés jusqu'aux dents qui sont sortis de nul part. Personne ne les a vu arriver. Mais quand le plus costaud a parlé, j'ai compris qu'ils ne faisaient pas semblant. Et quand il a tiré, cette certitude a été renforcée. Il m'a fallu quelques instant pour vraiment réaliser la situation dans laquelle je me trouvais, mais ce qui m'a permis de me reconnecter complètement à la réalité, c'est ce nom : Drear.
Lorsque l'homme en face de moi s'est présenté, j'ai immédiatement pensé à la lettre de mon père. Mais quand il a indiqué qu'il était ici en « mission de baby-sitting », car oui en gros c'est ça quand même, je n'ai pas su réagir. J'étais soulagée, blessée, furieuse, triste... Je ressentais toute une palette d'émotions similaires et contradictoires simultanément. Je me sentais insultée et je n'ai pas pu m'empêcher un commentaire désagréable qui, je l'espère, n'a pas été entendu. Mais d'après le regard qu'il m'a lancé, j'avais très peu de chance que ce soit le cas. Ses yeux bleu-gris, derrière lesquels couve un orage dévastateur, me dévisageaient avec colère. Mais à part ça, il ne laissait rien paraître. Il nous a suivi en silence jusqu'au salon donnant sur les jardins et, une fois seuls, à découvert son visage.
Ses yeux m'ont d'autant plus saisis à ce moment-là. La cicatrice en forme d'éclair qui traverse le côté droit de son visage, allant de son arcade à sa joue, les sublime. De plus, elle n'enlève rien à sa beauté, au contraire. Quoique, je ne sais pas si « beau » lui convient vraiment. Charmant, attrayant... sexy ? Un regard de braise et des lèvres qu'on rêverait d'embrasser. Ce mec a tout simplement l'air d'un mauvais garçon capable de susurrer des mots doux à l'oreille des femmes pour satisfaire ses appétits. Et au vu de sa carrure, je n'ai aucun doute que ces femmes doivent lui courir après. C'est un putain de démon de luxure qui se tient dans mon salon...
Un petit sourire arrogant se dessine sur son visage et je comprends que je l'ai fixé trop longtemps. Je reprends contenance et engage la conversation, acceptant les condoléances qu'il m'adresse et expliquant la situation de mon point de vu. Ce qui est plutôt maigre, il faut bien l'avouer.
- Votre père se faisait manipuler et a tenté de vous protéger, reprend t'il après un court silence. Et par delà la mort, son ultime recours a été de nous contacter. C'est pourquoi mon équipe et moi sommes ici, déclare t'il calmement. D'après ce que vous dites, vous n'aviez vraiment aucune idée quant à ses intentions. Je me doute que notre présence doit vous perturber, cependant le fait est que notre mission est d'assurer votre protection et ce pour un temps indéterminé. D'après sa lettre, il pense qu'une fois que vous serez mariée, ses anciens associés vous laisseront en paix.
- Mariée ? Pour ça il faudrait déjà que je fréquente quelqu'un. Et même, qui dit que j'ai envie de me marier ? Je pourrais aussi bien rester célibataire toute ma vie. Que deviendrait votre mission dans ce cas-là ? C'est totalement absurde... je bougonne.
- Je ne suis pas là pour discuter les ordres de mes supérieurs. C'est le Général en personne qui m'a confié cette mission. Mon devoir en tant que Soldat, et plus encore en tant que Colonel, est de l'accomplir. Et c'est ce que je ferais, déclare t'il fermement.
- Faites comme bon vous semble. Mais je vous préviens. Je ne vais pas me forcer à sortir avec quelqu'un juste pour vos beaux yeux et il ne faudra pas me tenir responsable si je finis seule, entourée de chats !
- Merci pour le compliment sur mes yeux, dit-il d'un air suffisant.
- Ce... Ce n'est pas ce que je voulais dire ! m'exclamais-je, rouge de honte en prenant conscience de ce que j'ai dis.
- Quoiqu'il en soit, nous devons maintenant parler des changements à effectuer et de certains détails, réplique t'il.
- Comment ça ? je demande réticente.
- Je n'ai vu aucune voiture aux alentours du manoir, je suppose donc que vous disposez d'un parking sous-terrain. Est-ce exact ?
- Euh, eh bien oui mais...
- Parfait, me coupe t'il. Je vais faire venir des véhicules. Je n'avais pas envie qu'ils soient à la vue de tous, surtout des indésirables.
- D'accord, mais... je tente à nouveau.
- Voici les changements. Ma subordonnée est affectée au poste de dame de compagnie et vous suivra dans tous vos déplacements. Et avant que vous ne demandiez, oui ça inclut également les toilettes des restaurants ou tout autre espace public ou privé réservé aux femmes. Vous ne devez rester seule sous aucun prétexte. Vous aurez tout de même votre intimité dans votre chambre une fois qu'elle sera sécurisée. Deux membres de mon équipe seront en charge des patrouilles et de la surveillance de votre domaine. Quant à moi, princesse, je vous suivrai comme votre ombre en tant que votre garde du corps une fois toutes les mesures de protection mises en place.
- Et mon avis alors ?! je hurle. Qu'est-ce que vous en faites ?!
- Vous vous lèverez chaque matin en même temps que nous. Vous assisterez aux entraînements de mon unité et vous pratiquerez l'autodéfense avec moi.
C'est moi où il ignore totalement ce que je dis ?! Avant que je ne puisse répliquer quoi que ce soit, j'entends frapper à la porte. Je pousse un soupir et autorise la personne à entrer.
- Princesse, les compagnons de Monsieur Drear sont ici. Dois-je les introduire ? me demande Virgo, une de mes plus fidèles servantes et amis.
- Apparemment j'ai eu le nez creux en vous appelant « Princesse », se moque Luxus de manière que je sois la seule à l'entendre.
Je lui jette un regard noir tout en autorisant Virgo à convier l'équipe de l'homme blond à notre « réunion ». Je me retourne tout de même vers l'entrée de la pièce en entendant des pas approcher. Ils se mettent en ligne après m'avoir salué. Du coin de l'œil je vois leur chef leur faire un signe de tête. Ils sont tous les trois silencieux, comme s'ils attendaient quelque chose. Cependant, à leur posture et leur regard franc, je comprends qu'ils tiennent leur chef en haute estime.
- Bien, passons aux présentations, reprend ce dernier. Princesse, voici l'unité des Raijins composée du Lieutenant-colonel Freed Justin, du Capitaine Ever Green et du Lieutenant Bixrow Lonan, dit-il en même temps que chacun s'avance d'un pas en entendant son grade et son nom.
- Enchantée...
- Ensuite, reprend sans attendre Monsieur Je-m'en-bas-les-couilles-de-ce-que-tu-dis. Vous n'allez pas aimer ce que je vais dire mais nous devrons loger à proximité de vos appartements privés. Le mieux étant les pièces situées de part et d'autre de votre chambre.
- Vous êtes sérieux ?! m'indignais-je.
- Mortellement sérieux, affirme-t-il en fronçant les sourcils.
- Pff... Je présume que je n'ai pas le choix ? Je vous crois capable de faire comme bon vous semble même si je suis la Maîtresse de cette maison. Ai-je tort ? je demande en le maudissant en silence.
- J'aime quand les gens comprennent à qui ils ont affaire, confirme t'il avec un air suffisant et un sourire narquois que je rêve de lui faire ravaler. Bixrow, Ever, vous restez avec elle. Freed, mets-toi au travail. Je vais appeler la base pour rapatrier le matériel qui nous fait défaut.
Qu'est-ce que je donnerais pas pour une poupée vaudou à son effigie et des dizaines d'épingles... Si je pouvais, je les lui planterai dans le cul ! Il a beau être bel homme, j'ai envie de le tuer en ce moment... Il débarque et impose sa loi comme si c'était normal ! En ruminant toutes les insultes que je voudrais lui balancer, je le regarde sortir à la suite de son collègue aux cheveux verts puis reporte mon attention sur les deux qui restent. L'homme est celui qui l'accompagnait plus tôt et la femme doit être celle qui va me coller le train à partir de maintenant.
- Ne vous prenez pas la tête concernant notre Boss, intervient Bixrow en se dirigeant vers la baie vitrée. Il est stricte mais avec le temps ça ira mieux.
- Stricte ? Le mot est faible... bougonnais-je. J'aurais plutôt dis un Tyran !
- Il est surtout stressé car il ne maîtrise pas encore notre nouvel environnement. Une fois que tout sera comme il le veut il sera déjà plus détendu. Enfin, façon de parler vu qu'il est en charge de l'opération, renchérit la jolie brune. Je suis désolée qu'il m'ai imposée à vous, mais comprenez que c'est pour votre bien.
- Je peux comprendre que c'est le souhait de mon père mais... C'est une manière brutale de me mettre devant le fait accompli on va dire. Il y a à peine une heure j'étais dans les jardins avec mes amis, en train de me recueillir sur la tombe de mes parents et d'un coup, je me retrouve avec des militaires dont le chef prend ma propriété pour son terrain de jeu personnel et s'amuse à me donner des ordres... Ça fait beaucoup d'un coup, maugréais-je.
- Il prend juste très aux sérieux les missions qui lui sont confiées. Surtout quand elles sont spéciales, comme celle-là. Votre père, qu'il repose en paix, a été sous les ordres de son grand-père. Il y a une chose que vous devez savoir nous concernant... La plupart des personnes sous les ordres du Général Drear sont des orphelins de guerre ou des enfants de soldats. Nous formons une grande famille. Luxus ne le montre peut-être pas, mais c'est un grand protecteur dans l'âme. Si sa famille est menacée, il fera tout pour la protéger, quitte à risquer sa propre vie, m'explique t'elle avec une certaine tristesse dans la voix. C'est comme ça qu'il a écopé de cette cicatrice au visage d'ailleurs... Il a failli perdre son œil...
- Ever ! la réprimande son camarade.
- Je suis désolée Bix. Je n'aurais pas dû en parler...
- Ça fait rien. Juste... N'en parlons pas aujourd'hui... soupire t'il. En tout cas Mademoiselle Heartfilia, vous n'avez rien à craindre de notre patron. Il est autoritaire mais c'est un homme bon.
- Hum... Donc vous voulez dire que, même en ne me connaissant pas, il se soucie de moi. En quelque sorte du moins. C'est bien ça ?
- Tout à fait. Il ne l'admettra pas cependant. Il est comme ça le Boss. Donc faites ce qu'il dit et vous verrez qu'il sera plus facile à vivre, rit-il.
Je médite sur leurs paroles mais finis par secouer la tête et soupirer. Je ne suis pas du genre à obéir aveuglément. Je suis plutôt indépendante et il est hors de question que je m'écrase devant un homme des cavernes. J'ai même envie de savoir combien de temps va s'écouler avant qu'il ne commence à s'arracher les cheveux à cause de moi...
- Oh oh... Je connais cette lueur dans votre regard. Et vous avez le même sourire que la Cupidémone quand elle prépare un coup tordu... fait remarquer Ever en commençant à trembler. Quoi que vous pensez faire, oubliez. Je vous en conjure !
- Ah ? Cupidémone ? je demande, perplexe.
- C'est une de nos collègues... Elle ressemble à un ange mais... À l'intérieur... Elle est définitivement une démone sortie tout droit des Enfers. Elle ne recule devant rien pour vous faire avouer tous vos secrets. C'est d'ailleurs à elle qu'on fait appelle quand nous avons besoin d'informations venant de personnes peu ou pas coopératives on va dire... Et son autre spécialité et de mettre les gens en couple. Elle est un cupidon démoniaque, tressaille Bixrow.
- Oh... Euh... Elle a l'air... charmante ? Et flippante, dis-je sans être vraiment sûre de moi.
- Ne vous méprenez pas. Elle est très gentille mais quand elle a une idée en tête... même toute une armée ne pourrait pas l'arrêter, soupire la jeune femme.
Après ça, le silence s'est abattu sur nous. Bixrow a continué à regarder par la fenêtre, sans doute perdu dans ses pensées, et Ever semblait mal à l'aise, tout comme moi. Cette situation est pesante, trop nouvelle pour pouvoir réellement être détendue. Des bruits de pas dans le couloir attirent soudainement mon attention et un mauvais pressentiment me saisit... Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai le pressentiment qu'un militaire, grand, blond et arrogant va me taper sur le système dans peu de temps...
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