Chapitre 46. Défaite de Famille
Nora sortit de la salle de bain et je poussai un grognement appréciateur. Elle portait une robe d'été laissant apparaître ses épaules et la naissance de sa poitrine, ses longs cheveux bruns étaient lâchés et tombaient en cascade sur ses épaules, j'avais au moins la satisfaction d'être avec une femme superbe.
Elle parut satisfaite de mon regard envieux et s'approcha de moi pour m'embrasser du bout des lèvres.
— C'est tout ? murmurai-je déçu.
— On va être en retard mon cœur.
Consultant ma montre, je m'aperçus qu'effectivement il allait falloir y aller, Max et Leïla étaient déjà partis depuis une demie heure et mes parents également.
— Dommage, fis-je en laissant ma main descendre sur ses fesses rebondies.
Nora se contenta d'un clin d'œil encourageant pour le retour à la maison et glissa sa main dans la mienne pour quitter la maison. Ma grand-mère vivait à une dizaine de minutes de chez mes parents, ce qui était plutôt pratique, nous n'avions pas besoin de prendre la voiture. Il était midi et demi, j'avais fait l'effort de mettre une chemise et je le regrettais vivement, il faisait 45° à l'ombre et je mourrais déjà de chaud.
— Tu crois que je vais faire bonne impression ? demanda ma copine.
— T'inquiète pas, t'es magnifique et presque tout le monde te connait, pas de raisons que ça se passe mal.
Plein de raisons que ça se passe mal. Comme pour venir confirmer mes pensées, mon portable vibra en recevant un message de mon frère.
Max : T'es pas prêt pour ce qui est en train de se passer.
Oh putain.
Je lui envoyais une série de points d'interrogations pour lui répondre mais n'en n'eus pas plus de sa part.
Ce fut avec la boule au ventre que j'arrivai chez ma grand-mère. Tout le monde était déjà en train de prendre l'apéro dans le jardin, ça jactait de tous les côtés. Maxime me tomba dessus directement, il me saisit pas le bras et me tira dans une chambre en refermant brusquement la porte derrière nous.
— Je sais que t'as toujours été fasciné par moi, Max, mais l'inceste c'est puni par la loi et je suis hétérosexuel.
— Ta gueule, c'est pas le moment de faire le con.
Il n'avait effectivement pas l'air d'avoir envie de rire.
— Tu savais que Pauline était en école d'archi ? demanda-t-il.
Je fronçai les sourcils, pourquoi il me parlait de Pauline ce con ?
— Deen ! Bordel percute ! Y'a Violette dans le putain de jardin de Mamie !
Dans un autre contexte, sa phrase m'aurait fait rire. Mais sur le moment, je sentis juste mon coeur s'arrêter quelques secondes avant de repartir.
— Hein ?
— Ah ben tu vois quand tu veux ! Violette et Pauline sont en cours ensemble, elles sont grave potes et elles passent la semaine ensemble, du coup Pauline l'a ramenée.
Putain de merde.
Est-ce que la situation pouvait être pire ?
J'allais présenter ma copine à ma famille devant Violette.
Ma copine détestait Violette sans la connaître.
Je n'avais pas vu Violette depuis six mois et j'avais potentiellement encore des sentiments pour elle.
Nora était enceinte.
— Putain je veux mourir.
Quelqu'un tambourina à la porte.
— Deen ! Qu'est-ce que vous faites ? Tu m'as laissée toute seule, fit la voix de Nora.
Me passant la main sur le visage, j'adressai un regard désespéré à mon frère avant d'ouvrir la porte pour sortir.
Nora avait l'air paniquée.
— Qu'est-ce qui se passe ? C'est à cause de moi ?
— Non chérie, il faut que je te prévienne de quelque chose. S'il te plaît maîtrise toi.
Elle fronça les sourcils, je marchais sur des œufs, clairement.
— Il se trouve que ma cousine Pauline est pote avec Violette, j'étais même pas au courant. Et du coup elles sont là toutes les deux.
Nora parut très surprise de ma révélation, elle me détailla quelques secondes, puis son visage finit par s'adoucir.
— Tu me jures que tu savais pas ?
— Je te jure, Jehk vient de me l'apprendre.
Elle hocha la tête.
— Tu resteras avec moi ? Pas vrai ?
J'acquiesçai, j'allais pas la laisser toute seule avec ma famille de fous. La pauvre.
— D'accord alors allons-y.
Je poussai un soupir de soulagement, c'était déjà un problème en moins.
Nora saisit ma main et je l'entrainai vers le jardin où comme d'habitude, je fus accueilli comme le Messie.
Depuis petit j'avais toujours un peu été la star de la famille, sans me vanter, j'étais le plus vieux des cousins ce qui faisait qu'ils étaient tous un peu fan de moi. Mes tantes m'adoraient, et j'aimais bien cultiver leur affection en jouant les gendres idéaux.
Je fis le tour de la famille, présentant Nora à ceux qui ne la connaissaient pas. La plupart avaient l'air ravis de me voir avec quelqu'un. Ma grand mère se contenta de m'embrasser sur les deux joues en se plaignant que je ne rentrais pas assez souvent, puis salua un peu froidement Nora. Elle me jeta un regard équivoque. « Toi et moi on va parler mon garçon » me disaient ses yeux bleus.
Puis j'arrivai vers mes trois cousines qui riaient comme des enfants dans leur coin. Avec elles il y avait Leila et... Une petite blonde en robe d'été. Je ne voyais que sa nuque dégagée par un chignon haut perché, mais je savais déjà que j'allais la trouver encore plus belle qu'avant.
— Oh Mike ! lança Eloïse, la grande sœur de Pauline.
Violette se retourna aussitôt. Je déglutis difficilement. La main de Nora se crispa sur la mienne. J'avais envie qu'elle me lâche.
J'avais oublié l'effet de son sourire sur mes sens. Elle était archi bronzée et ses dents blanches ressortaient plus que jamais.
Elle posa sa main sur mon bras en me faisant la bise et son odeur emplit mes narines. J'avais ma réponse, mes sentiments n'avaient rien de potentiels.
— Deen ! lança-t-elle, J'ai cru halluciner quand j'ai découvert que Paupau était ta cousine ! J'ai bugué pendant bien une minute quand Max nous a ouvert la porte !
Le ton de sa voix était trop enjoué, elle avait le même au chalet. Je connaissais trop bien Violette pour ne pas voir qu'elle était bouleversée.
Et moi donc.
— Mais oui ! enchérit Pauline, Violette m'avait pas dit qu'elle était pote avec tout L'entourage.
J'eus un petit sourire gêné en sentant que Nora allait péter un câble.
— Oh Violette, c'est plus qu'une pote, c'est la famille.
Je me giflai mentalement, qu'est-ce qui me prenait de dire un truc pareil ?
Je vis la jeune femme étouffer un petit rire, elle était suffisamment intelligente pour comprendre que je disais n'importe quoi par maladresse.
— C'est tout à fait ça ! Mais j'aime pas trop dire que je vous connais, expliqua-t-elle, en première année il y avait des gens qui venaient me parler par intérêt, ça m'a saoulée.
— C'est vrai que toi t'es pas intéressée.
Aïe. La phrase de Nora fit l'effet d'un seau d'eau glacé sur notre discussion. Violette changea de couleur, son sourire ternit un peu.
— Voyons chérie, murmurai-je, Et du coup bah je vous présente Nora, ma copine, dis-je un peu plus fort à l'intention de mes cousines.
Ces dernières partirent dans des petits cris de hyènes. « Nan mais c'est la première fois que Deen nous présente une femme c'est trop fou » « Bienvenue dans la famille ». Nora adressa un regard un peu condescendant à Violette avant de répondre aux autres avec un sourire. Elle ne lâchait pas ma main.
Finalement je réussis à l'extirper des griffes de mes cousines pour rejoindre mon frère et nos cousins qui tapaient allègrement dans l'apéro.
— Je sais pas comment t'as pu être intéressé par elle, me fit Nora, elle est... banale. Elle a une tête de gamine et un corps d'enfant.
Je mordis dans une part de pizza pour tenter de maîtriser mon envie de remballer violemment ma copine.
— C'est vrai non ? On dirait qu'elle a quinze ans.
Arrête. Arrête ça, suppliai-je mentalement.
— Bébé ! Je te parle !! s'énerva-t-elle.
Mon frère entendit sa réplique et m'adressa un sourire moqueur.
— Bébé ! Elle te parle !!
Tuez moi.
— Écoute je sais que tu la portes pas dans ton cœur, mais Violette ne t'a rien fait. Elle et moi c'est de l'histoire ancienne, mais elle reste une amie et je veux pas que tu l'insultes, elle ne le mérite pas.
J'eus un regard assassin pour seule réponse, je savais très bien que Nora essayait de se rassurer en dénigrant Violette, elle avait toujours cette peur irrationnelle. Mais putain c'était pas Violette qui portait mon ou ma future gosse.
— Tu te souviens ce que je t'ai dit à l'échographie, Nora ?
Les yeux de la belle maghrébine s'adoucirent un petit peu.
— Que tu seras toujours là pour nous.
— Oui. Je vais pas te laisser. Arrête d'avoir peur, s'il te plaît chérie. Et j'ai pas besoin dire que Violette est moche pour te trouver magnifique.
Ce besoin de rabâcher sans cesse les mêmes phrases pour la rassurer, c'était usant. Elle posa sa tête sur mon épaule et j'embrassai brièvement son front.
Vint ensuite le moment de passer à table, tout le monde nous questionna avec Nora sur ce qui faisait que nous nous étions mis ensemble. J'étais mal à l'aise de parler de tout ça devant Violette, je détestais l'idée que me voir en couple puisse potentiellement la faire souffrir. Je tentais assez rapidement de faire dévier le sujet, d'autant que Nora s'en donnait à coeur joie pour partager notre histoire.
— Alors comme ça, tu connaissais la petite Violette ? me demanda ma mère qui était à côté de moi.
Elle avait parlé bas, comme si elle voulait que je sois le seul à l'entendre.
— Oui, murmurai-je entre mes dents, Elle traine pas mal avec nous.
— Quelle âge elle a ?
Surpris par sa question, je mis quelques secondes à répondre.
— Vingt-deux ans.
Ma mère m'adressa un sourire un peu triste et me passa affectueusement la main dans les cheveux.
— Je comprends mieux.
Devant mon regard interrogateur, elle se mit à rire doucement.
— Mikael, je suis la première à écouter tes chansons. J'ai compris tout de suite quand elle m'a dit son prénom et que j'ai vu qu'elle connaissait Max. La montre qu'elle a au poignet me dit vaguement quelque chose, je l'ai déjà vue sur celui de mon fils, enfin pour l'amour de Dieu, je te l'ai dit hier, je sais quand tu aimes une femme.
Ma daronne, dans toute sa splendeur. J'avais l'impression d'être à la fin d'un vieux feuilleton policier, quand le détective balance tout son raisonnement et que l'on sait enfin qui est le tueur. Inspecteur Sylvie, au rapport.
— Pense à te faire engager chez les RG, grognai-je dans ma barbe.
— Tu m'expliqueras pourquoi c'est pas Violette qui est à côté de toi aujourd'hui.
Ah ben super, maintenant elle se mettait à appuyer bien fort sur mes regrets. Je me levai brusquement de la table.
— Peut-être parce qu'on a douze ans d'écart, que tous nos potes nous ont pourris notre relation et que ma copine attend mon enfant. T'as beau être perspicace, il y a des choses qui t'échappent, alors s'il te plaît Maman, pour mon bien, le sien, et celui de ton futur petit enfant, ne t'en mêle pas.
Elle parut très surprise, malgré mon ton très bas, je lui avais répondu avec une certaine véhémence, il était vraiment rare que je m'énerve contre elle. Faisant mine de débarrasser, je récupérai quelques plats vides et me réfugiai dans la cuisine pour tenter de retrouver mon calme. Voir Violette dans mon cadre familial me perturbait énormément. C'était le mélange de deux mondes qui étaient totalement différents.
Et pourtant...
Et pourtant je pouvais pas m'empêcher de penser qu'elle aurait dû être là avec moi, pas avec ma cousine. Ça faisait à peine quelques heures qu'elle était chez nous et tout le monde était déjà amoureux d'elle, je le voyais bien, c'était un vrai soleil. C'était typiquement le genre de personne à la fois déjantée et bien élevée qui plaisait à ma famille.
— Je ne vous ai jamais vus ensemble et pourtant je suis triste que ce soit fini entre vous.
Mes yeux se fermèrent en entendant la voix de ma Grand-mère derrière moi. Elle allait pas en rajouter une couche elle aussi.
— Mamie...
— Et je suis surtout triste de vous voir malheureux tous les deux. Elle est formidable.
À croire que les deux femmes de ma vie s'étaient unies pour sauter à pieds joints sur les débris de mon coeur.
— Arrête, s'il te plaît, la suppliai-je.
— Je ne te juge pas Mikael, tu fais tes choix, tu les assumes. Nora est une fille bien, on la connait depuis toujours. Tu peux très bien construire quelque chose avec elle, être attaché à elle, vous pouvez même vous marier. Mais, regarde moi bien, si un jour tu te réveilles dans le lit d'une autre pendant que ta femme t'attend à la maison, il ne faudra pas t'étonner.
Il fallait vraiment qu'elle arrête elle aussi, mais pour le coup, jamais de ma vie je n'oserais mal répondre à ma grand-mère. Il fallait que je lui explique.
— Mamie, Nora et moi... On va avoir un bébé.
Un bruit de vaisselle brisée résonna derrière nous, nous faisant sursauter tous les deux. Je me retournai pour voir Violette, dans l'encadrement de la porte. À ses pieds, le plat vide du gratin venait visiblement de percuter le sol et d'éclater en morceaux.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top