16 - Réveil en douceur

Elio

J'ouvre le robinet de la baignoire, tempérant l'eau avec les doigts. Franck m'a apporté plusieurs serviettes, me laissant comme un con dans sa salle de bain avec Max évanouie sur les toilettes. Je me suis couvert la bouche et le nez avec un masque, respirant le plus possible par la bouche. Je lui retire son sweat, la laissant en débardeur. Enlève ses chaussures, ses chaussettes, son baggy et sa culotte. Je me sens mal à l'aise de la voir ainsi dévoilée devant moi, mais je prends toutes mes précautions pour ne pas la regarder dans son entièreté. Franck passe la tête par l'entrebâillement de la porte.

— Laisse-moi la laver, et va chercher de quoi la changer.

Je souffle. Soulagé de quitter un instant cette vision. Je traverse mon antre pour récupérer un jogging et un t-shirt avant de revenir. Certes, elle a engagé un travesti pour me piéger, mais la dose que je lui ai mise aurait pu être dangereuse. Je me tape le front avec le poing, me traitant d'imbécile.

Je rejoins Franck dans la salle de bain. Il l'a dans les bras. Endormie. Enroulé dans une serviette. Il récupère les vêtements que je lui tends. Tobias nous rejoint à ce moment-là. Il sourit en la regardant. Franck lui transmet les informations, lui demandant au passage s'il peut squatter chez lui. Il accepte. Et me donne un coup derrière la tête.

— Je reviendrai demain pour prendre de ses nouvelles, mais vous deux, indique-t-il en pointant du doigt Max et moi, va falloir vous stopper à un moment donné.

— Seulement, si elle accepte.

Je ne démords pas sur l'objectif de cette vendetta. Il souffle. Secoue la tête, résignée. Puis, il nous accompagne jusqu'à mon logement après avoir lui-même habillé Max. Il l'allonge dans mon lit, effleurant ses cheveux trempés, puis la recouvre de ma couette. Franck dépose sur ma table deux packs d'eau. Une boite de paracétamol, de vogalen et un sac rempli de pâte et de riz. Tobias y ajoute deux paquets de cigarettes et un cendrier. Je lève les yeux, devinant qu'elle aura besoin de sa dose de nicotine. Ils me saluent, m'intimant fortement de prendre soin d'elle.

Je ferme la porte derrière eux et m'adosse à celle-ci. Mes yeux se portent sur elle. Cerbère. La chienne des enfers. Dormant dans mon lit. Je souffle. Je me dirige vers ma salle de bain. Me change. Enfilant un jogging. Je me dirige vers elle. M'assied au bord du lit. Applique délicatement ma main sur son front. Je grimace. Elle est fiévreuse. Et, tellement vulnérable dans cet état. Laissant son aura meurtrière dans une certaine sérénité.

Je me lève et vais humidifier un gant de toilette. Je l'applique sur son front, la voyant froncer des sourcils. Sans que je présage ses mouvements, elle m'attrape le poignet et m'attire vers elle. Je me rattrape avec l'autre main en la posant à côté de sa tête. Je suis proche de son visage. Sens sa poitrine se soulever en dessous de moi. Je tente de m'asseoir à côté d'elle, mais elle me bascule sur le côté, m'emprisonnant dans ses bras. Vile tentation.

— Petit mouton sautant au-dessus des piques... Ne te rate pas sinon...

Sinon quoi ? Bordel, v'là qu'elle parle dans son sommeil. Je tente de me défaire de ses bras, mais une de ses mains glisse sur mon sexe. J'inspire un grand coup. Fermant les yeux. Contractant la mâchoire. J'attrape son poignet, le décale sur elle. Puis, m'extirpe de ses bras en me glissant comme un asticot jusqu'au bord du lit. J'arrive à m'extraire avec beaucoup d'efforts, remarquant avec désespoir la bosse qui s'est formée dans mon jogging. Je souffle.

J'attrape la Bible et me cale sur le canapé. Essayant d'oublier sa main posée, il y a peu, sur mon membre. Portant mon regard de temps à autre sur elle, veillant à ce qu'elle se repose correctement. Je vois uniquement son dos et ses épaules remuer légèrement. Elle est mignonne quand elle dort. Je souris à cette pensée, me plongeant dans ma lecture.

Maxine

Une douleur au ventre me réveille. Je me redresse mollasse en me frottant les yeux et décale mes pieds sur le sol. La main posée sur mes intestins, je me laisse porter par mes pas jusqu'à la salle de bain, trouvant grâce sur les toilettes. Je bâille fortement en me vidant. J'ouvre les yeux et sursaute devant ma salle d'eau aussi propre que dans une maison témoin. Mes yeux clignent plusieurs fois, me demandant à quel moment Cendrillon est venu la briquer. Mais, la douleur me vrille le bide. Je n'en peux plus d'être malade comme ça.

Je me baisse après avoir fini ma petite affaire pour remonter ma culotte. Or, je fronce les sourcils en ne la voyant pas. Analysant le survêtement niché sur mes chevilles. Je me redresse et touche le tissu que j'ai sur le dos, découvrant que je porte un t-shirt large, ne comportant pas mon odeur.

— Fichtre ! C'est quoi ce bordel ?

Je m'essuie. Tire la chasse. Me lave les mains, sait-on jamais si j'ai la gastro. Et, je repère au coin du lavabo un dentifrice et une brosse à dents qui ne m'appartiennent pas. Je tique. En me redressant, voyant mes yeux cernés dans le miroir, je distingue des pieds nus dépassés de l'encadrement de la porte posé sur un canapé taupe.

Avec précaution. Je sors de la salle d'eau et découvre avec effroi que je suis dans le logement du prêtre. Bordel ! Que s'est-il passé hier ? Je me rappelle seulement en train de me vider sur les chiottes de Franck. Mais, le summum d'être ici, c'est de découvrir qu'il dort la tête cachée par sa Bible. Je fouille dans mes poches, mais ne trouve pas mon arme ni mon pique-cheveux. Sur la pointe des pieds, je me dirige vers la cuisine et trouve un couteau dentelé dans l'évier. Un sourire narquois s'étire quand je me déplace jusqu'à lui.

Il ne porte pas de t-shirt, laissant son corps exposé. Délicatement, je glisse une jambe par-dessus lui et la coince entre lui et le canapé. Je m'installe à califourchon, scrutant attentivement le serpent, partant de la base de son cou en descendant jusqu'à son cœur. La gueule ouverte. Des effets d'ombre le mettent en relief quand il semble passer sous sa peau. Couvrant par endroit des cicatrices. Sans m'en rendre compte, mon doigt glisse sur l'une d'elles. Comme hypnotisé par le détail du dessin l'entourant.

Une poigne ferme m'attrape le poignet. Instinctivement, je pose le couteau contre sa gorge. Son autre main se déplace, retirant la Bible de son visage.

— Tu peux me dire ce que tu fais ? siffle-t-il.

Je le fixe dans les yeux. Il a les sourcils froncés. La mâchoire contractée. Je ne réponds rien. Ma bouche se tord dans une grimace. Je tente de faire abstraction de la douleur, mais je cours de nouveau vers les toilettes en lâchant le couteau. Fichtre. Je n'ai jamais été malade comme ça.

En sortant de la pièce, il s'approche de moi avec un verre d'eau et deux comprimés dans la main. Hors de question que j'avale ce qu'il me donne !

— C'est du paracétamol, sans danger. Tu as encore de la fièvre.

— Qui me dit que ce n'est pas du poison, fulminé-je en croisant les bras.

Il souffle d'exaspération. Se retourne. Jette les comprimés. Puis me montrent ses gestes pour me prouver que j'ai tort. Surtout quand je repère qu'il y a un emplacement vide dans les plaquettes de médicaments. Je me rapproche, puis avale les comprimés.

— Recouche-toi, je vais te préparer du riz.

Je n'aime pas son ton. Froid. Je glisse mon regard sur mes paquets de cigarettes. Je les attrape, embarquant le cendrier avec moi, et m'installe sur le canapé. La douce saveur de la nicotine m'étreint. Je laisse la fumée s'évacuer vers le plafond, occultant le fait de me demander pourquoi je suis chez lui et pas chez moi. Je tente de me rappeler quoi que ce soit, mais c'est le trou noir. Or, je me rappelle que j'étais revenu en sentant mes boyaux se tordre, avec ma mallette. Mes yeux s'écarquillent d'horreur. Mon Artic ? Il est où ?

— Où est ma mallette ? demandé-je à cran.

— Chez toi, répond-il en s'affairant dans la cuisine en me tournant le dos.

— Et pourquoi ne suis-je pas chez moi ? rétorqué-je dans la foulée.

Il soupire.

— C'est Tobias qui m'a demandé de veiller sur toi. Il passera tout à l'heure.

Il ne me dit pas tout.

Si le boss lui a explicitement demandé de me surveiller, c'est que soit j'ai fait une connerie, soit c'est lui. La dernière fois qu'il a agi ainsi, c'est quand il m'a ordonné de baby-sitter la perche après que je lui ai mis un laxa... Oh bordel de merde. Ce n'est pas un hasard si je me retrouve coincé avec le père mon cul.

— Puis-je te raconter une histoire ? sollicité-je en souriant sadiquement.

Il perce le sachet de riz qu'il vide dans sa casserole sans me répondre. Un seul haussement d'épaules se distingue alors qu'il ouvre ses placards. Je prends ça pour un oui. Raclant ma gorge pour prendre l'intonation d'une conteuse, je me lance :

— Il était une fois, un homme banal fit la rencontre d'une douce créature.

Je me lèverai bien pour m'approcher de lui, mais il ne vaut mieux pas que je bouge avec le grognement de mon ventre. Lui, par contre, je perçois ses épaules se contracter.

— Il la contempla chaque jour et chaque nuit depuis sa fenêtre, continué-je. Un jour, il entreprit par désir de s'introduire chez elle. Erreur de sa part de sous-estimer sa beauté macabre. La créature l'avait repérée et l'attira dans un piège qui, lentement, sans qu'il s'en aperçoive, se referma sur lui.

Ses gestes se sont arrêtés. Il est attentivement à mon écoute. Mes lèvres s'étirent diaboliquement, tandis que mes yeux se plissent.

— L'homme, pris d'une illusion, s'avança dans l'antre du démon. La créature apparut dans son dos et glissa ses griffes une à une le long de sa carotide. Progressivement, d'un geste assuré, elle lui lacéra la peau.

— Restez vigilants et priez pour ne pas céder à la tentation. L'esprit est bien disposé, mais par nature l'homme est faible, Matthieu 26 : 41.

Je ris. Belle répartit. Il me sort un verset de la Bible pour contrer mon histoire. Le prêtre s'avance vers moi, un bol à la main et une fourchette qu'il dispose sur la table basse. Il se rapproche de son lit, attrape une couverture qu'il roule en boule dans ses mains avant de me la jeter au visage. Réflexe zéro. Je me la prends en pleine poire.

— Mange, je vais me doucher.

Mon regard glisse sur lui. Il est imperturbable. Maintenant qu'il a dévoilé sa véritable nature, il ne se cache plus. J'attrape le bol et plante ma fourchette dans le riz, l'air renfrogné. Je me force à manger, même si j'avais souhaité un bon café à la place. Il reste un temps sous la douche. Je pose le bol vide sur la table, me cale dans la couverture. Allume une cigarette. Et, je me perds dans mes pensées en observant les toits de Paris. S'il est derrière mon problème de tuyauterie, je lui tire mon chapeau pour avoir été aussi vicieux. Mais, que cache-t-il derrière son tatouage ?

Elio

Sous la douche, je me remémore l'histoire de Maxine. Mais, surtout, je calme mon membre qui ne fait que de se dresser depuis que je l'ai sentie me monter dessus. La sensation de ses doigts traçant les lignes du dessein de mon tatouage. Mes cicatrices que l'autre fils de pute m'a faites. Je souffle sous le jet, les bras calés contre les carreaux gris de ma douche italienne. Vivement qu'elle retourne chez elle. Cependant, pour ça, il faudrait que Franck revienne. Ce p'tit con m'a enfermé des deux côtés avec Cerbère. Ah, j'étais malin cette nuit quand je me suis levé pour aller dans mon antre et que je me suis cogné contre la trappe.

Il y en a eu des jurons qui ont fusé. Par contre, ça n'a pas réveillé la demoiselle, se tournant et se retournant dans mon pieu en parlant de chasse aux moutons. J'attrape la serviette pour m'essuyer, repensant à son visage crispé quand elle me grimpait. Merci aux sénés d'avoir encore agi. Parce qu'un réveil avec un couteau sur la carotide, ce n'est pas des plus plaisant. Après avoir brossé les dents et fini mon petit rituel matinal, je sors, serviette sur les hanches, oubliant le temps d'un instant qu'elle est sur mon canapé.

Bordel ! Foutu réflexe de ne pas prendre mes fringues.

Elle ne me regarde pas. Elle fume sa clope, le regard perdu sur le ciel grisonnant. Je détourne mes yeux d'elle, allant rejoindre ma commode pour attraper un boxer, des chaussettes et un survêtement. Or, j'ai beau être de dos, je sens son regard s'alourdir sur mon dos. Des frissons parcourent mon échine. Je fais semblant de rien et passe devant elle pour retourner dans la salle d'eau. Cependant, elle saute du canapé comme montée sur des ressorts et me passe devant en criant :

— Pétard de pétard, depuis cinq minutes, je serre les fesses !

La porte claque devant mon nez. Me laissant comme un con devant mes affaires en main. Un faible sourire apparaît sur mon visage. Cette créature est vraiment un sacré phénomène. Je profite de son absence pour m'habiller. Ramasse le bol sur la table basse avant de le déposer sur l'évier. Puis, fait couler du café. Elle sort de la salle d'eau en remontant mon jogging jusqu'au-dessus de ses seins, enfonçant mon t-shirt en dessous.

— Quelle dégaine, je rétorque en déposant une tasse fumante à côté du cendrier. Il ne manquerait plus que les chaussettes dans les sandales en cuir.

Elle baisse la tête sur elle, puis la relève avec un sourire narquois :

— C'est vrai que tu préfères les bonnes sœurs travesties.

Ma main se serre sur ma table. Ma mâchoire tressaute. Elle lève la main en balayant ma réaction, puis s'assied en attrapant son paquet. Franck, dépêche-toi, si elle continue ses allusions à sa dernière blague, j'ignore si je pourrais me contenir. Surtout quand je tourne la tête en repérant la croix de mon seigneur, mit la tête en bas.

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