38 - L'ennemi intérieur
Maxine
Nue, allongée sur le ventre sous la couette, la tête posée sur mes bras, je me réveille doucement en entendant Elio gémir dans son sommeil. Gémir, que dis-je, c'est plus des complaintes d'un agneau agonisant au fond d'un fossé. Je tourne la tête vers lui, le jour filtre à travers les rideaux éclairant la sueur sur son front. Je fronce les sourcils et décale mon bras de sous l'oreille pour lever la main vers son visage. Mes doigts effleurent sa tempe jusqu'à atteindre sa barbe. Douce. Faisant des effets incomparables. Mon bas ventre allume son brasier.
— Non, maman...
Mon geste se stop, mon feu s'éteint. Son souffle est saccadé. Un cauchemar. Je m'appuie sur mes coudes, l'observe. Son front se plisse, sa main s'agrippe à la couette avec une telle force que ses jointures en blanchissent. Je reporte mon regard sur son torse se soulevant rapidement. Le serpent danse avec ses mouvements. Sa tête se met à tourner d'un sens à l'autre. Voilà que mon prêtre est possédé. Je souffle. Qui ne le serait pas ?
Je m'approche de lui, colle ma poitrine contre son épaule, glisse ma main sur son cou jusqu'à attraper son épaule à l'opposé. Le secoue légèrement. Rien n'y fait, il est profondément ancré dans son cauchemar.
— Non, arrêtez...
Je passe à califourchon sur lui sentant son membre dur, esseyant au plus haut point de ne pas céder à la tentation matinale. Je le secoue à nouveau un peu plus fort. Il geint. Ses paupières luttent. Ce n'est pas un homme de foi ni un hackeur sous ma prise, mais une simple personne ayant eu un passé difficile. Je le sais, mes recherches sur lui se sont résumées à un échec.
— Non...
Je sors de mes pensées. Soupire. Plus qu'une solution pour l'extirper de son sommeil. Je me penche jusqu'à atteindre ses lèvres. Reste en suspens au-dessus. Le regarde. Plisse les yeux alors qu'un rictus s'affiche sur mon visage. Je me décale sur le côté, approche ma bouche de son épaule, pose mes lèvres en les étirant, puis le mords sans ménagement.
Son réveil est brutal, lui arrachant un cri. Maxine un, cauchemar zéro. Il m'attrape par la taille et me retourne en grimpant sur moi. Son regard affolé cherche le mien. Que t'est-il arrivé petit prêtre pour que tu essaies d'échapper à tes démons ?
Son souffle se régule. Ses yeux noisette s'accrochent enfin à mon regard. Sa main glisse sur ma joue.
— T'es pas une chienne des enfers pour rien toi.
Mon sourire s'élargit.
— La tentation de te dévorer était trop tentante.
Il souffle. Sa mâchoire se contracte. Il se penche vers moi, mais son téléphone se met à vibrer. On l'ignore. Or, l'engin a décidé que l'on n'irait pas plus loin. Il se penche pour l'attraper et fronce les sourcils en regardant l'écran. Elio sort du lit rapidement en décrochant. La vue reste exceptionnelle. J'esquisse une moue quand il enfile un jogging. Je me lève à mon tour et pars à la recherche de mes sous-vêtements.
Bordel, il les a foutus où ? Je retrouve la plupart de mes fringues dans la salle d'eau, en plus de mon téléphone. Je me passe un coup de flotte sur la tronche, avant de retourner dans la pièce principale. Mon beretta est gentiment posé sur la table basse, attendant sa maîtresse. Je le récupère et le glisse dans ma ceinture. Reste à trouver ma deuxième chaussure. Et pour le coup, j'ai beau chercher, je ne la trouve pas.
— Tu ne vas pas la voir de sitôt, indique Elio dans mon dos.
Je me relève alors que j'étais à quatre pattes en train de regarder sous le canapé et le regarde avec étonnement.
— Suis-moi.
Il m'invite à le suivre dans son placard. Je n'ai plus l'âge pour jouer à action et vérité, mais obtempère. Elio ouvre une trappe où une échelle est présente. Je descends après lui, il pousse une porte et découvre l'antre d'Elder.
— Diantre !
Il rit devant ma tête hallucinée. C'est qu'il en a du matos le curé, et pas qu'en dessous de la ceinture. Il s'installe sur sa chaise et clique sur sa souris. Une image s'affiche où l'on voit un gars sur un brancard avec ma pompe enfoncé dans son cul. Les souvenirs de mon escapade de la nuit d'avant me reviennent en mémoire. Mes lèvres se pincent, contrôlant comme je peux un sourire innocent et porte mes yeux ailleurs.
Mouais, j'ai sacrément déconné pour le coup.
— Damien et Tobias ont remonté ta trace jusque là avant que tu disparaisses et que je te retrouve affalée sur le palier.
Ouche. Le boss va me faire la peau. Et la perche va me massacrer. Mais comment ont-il pu savoir où j'étais ? Face à mon regard interrogateur devant l'écran, Elio répond à ma question silencieuse :
— Le caméléon avait mis une puce GPS dans ta chaussure à la demande de ton collègue.
— Je connais une tong qui va manger des cailloux, me renfrogné-je en croisant les bras sur mon torse.
Il va vraiment falloir qu'ils arrêtent de me tenir en laisse.
La porte sur le côté s'ouvre laissant Franck apparaître avec une tasse de café fumant dans les mains. Il se fige quand il nous repèrent tous les deux.
— Je pensais que vous dormiez encore, monsieur.
— J'ai eu un appel du caméléon pour m'informer de...
— La réunion de ce soir, le coupe rapidement Franck.
Je fronce les sourcils. L'homme de main du prêtre me cache une info. Je glisse mon regard sur Elio. Il évite le mien. Ça pue. Et le silence qui s'installe ne m'annonce rien de bon.
— Je vais rejoindre Tobias au bar, on se voit tout à l'heure, annonce Franck en s'éclipsant rapidement.
Ma mâchoire du bas bouge nerveusement, mais je sens que l'on m'attire. Je perds l'équilibre et atterris sur les genoux d'Elio. Vil tentateur.
— Je vais être occupé pour rassembler les informations sur la position de notre ennemi, tu devrais aller te laver.
Traduction : t'as rien à foutre ici, casse-toi tu me gênes.
Je souffle. Ce mec, c'est le jour et la nuit. Même pas un remerciement pour l'avoir extirpé de son cauchemar. Il s'est tout de suite braqué et a voulu noyer le poisson en allumant la flamme. Il me dépose un baiser sur la joue et m'indique de sortir par son studio. Je me lève, et me dirige vers la porte menant à l'échelle. Un regard en arrière, il a déjà son casque sur les oreilles et pianote comme un fou furieux sur son clavier. Mon instinct m'indique qu'il y a un loup que l'on me cache.
Je remonte, attrape mes clopes sur la table, sors de chez lui pour rentrer chez moi. Après une bonne douche, je ressors et m'allume une cigarette dans les escaliers. Mon cerveau s'est mis en marche au moment où Franck à coupé la parole à Elio. En passant devant chez Cendrillon, je m'arrête. Ça fait un moment que je n'ai pas pris de ses nouvelles. Je sors mon téléphone, et l'appel. Il ne répond pas.
Je vais pour sonner chez lui, mais je reçois un message du boss.
« Viens au bar tout de suite ! »
Fichtre. Il m'a foutu la paix depuis le retour, mais avec mes conneries il va pas me louper. Je continue ma descente en réfléchissant à comment je vais m'en sortir cette fois. Arrivé à l'extérieur, je ne vois pas Gertrude à sa fenêtre. L'aurais-je effrayé hier ? Je ne me rappelle pas de tout et ça ne m'étonnerait pas. Je hausse les épaules.
* * *
Je gare titine sur le parking du Torb'j, l'esprit toujours en ébullition. En me calant dans mon siège, je m'allume une clope. Mieux vaut que je prenne mon temps avant d'affronter papa ours. Mon regard se perd sur la devanture du bar. Les stores sont baissés. Je cale mon coude contre la vitre. Que peuvent-ils me cacher ?
Mon doigt tapote le volant. C'est bien beau de savoir ce qu'ils s'efforcent à me dissimuler, en attendant je vais avoir un autre steak à gérer. Mon téléphone vibre. Je le récupère dans ma poche et fronce les sourcils en voyant l'appel inconnu. Je décroche.
— Tu sais que ton commanditaire ne respire pas la joie actuellement ?
Léon.
— Un sur deux, s'est déjà pas mal, rétorqué-je en tirant sur ma cigarette.
Il soupire.
— Tu n'as pas tué le principal et le délai est passé.
Entre l'envoyer bouffer les pissenlits par la racine et lui faire bouffer mon pissenlit, j'avoue que mon fusil a changé d'épaule.
— Un nouveau contrat a été émis, Max.
— Le prêtre comme toujours ? demandé-je lointain.
Foutu palpitant qui se serre rien qu'à cette pensée.
— Toi, répond-il.
Pétard de pétard.
— Le tueur en question ?
— Moi et quelques joyeux lurons dont certains que tu as croisés en Corée.
Je souffle. C'était à prévoir.
— T'as abandonné ta promesse à Darius ? Tu me déçois Léon. Tu as au moins la politesse de m'informer.
— La partie ne serait pas drôle sinon, ricane-t-il de l'autre côté du combiné.
J'aperçois le boss sortir du bar et croiser les bras sur son torse en me repérant.
— Ah, j'ai oublié de préciser, continue-t-il. Certes, tu es en tête de liste avec le curé, mais tous tes copains également, à bientôt Max, hâte de t'affronter et de m'occuper d'Uriel.
Mes doigts se crispent sur le téléphone. Il raccroche. Ce n'est plus plusieurs contrats, mais une guerre entre tueurs qui commence.
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