- Chapitre 9 : Amertume -

« Il hurle, espère, rôde comme un esprit damné. »               

Un grand trou noir qu'elle avait du mal à combler faisait place dans l'esprit de Gaku. Elle se trouvait dans une des salles du poste de police du village, sur un coussin, les genoux repliés contre sa poitrine. Elle se balançait d'avant en arrière, tentant de rassembler les pièces du puzzle. Peu après le meurtre, ses jambes l'avaient menée jusqu'au commissariat, en suivant les traces de Gaara. Il avait fait appeler Suiri, Itome et Kinshi et leur avait relater la scène et eux-mêmes avaient immédiatement contacter le médecin légiste, suivant exactement les mêmes étapes que lors du premier assassinat.

Le shinobi de Suna reparut et lui tendit un gobelet contenant un café brûlant qu'il avait obtenu à la machine de l'entrée. Il ne dit pas un mot, se contentant d'observer ses réactions. Elle tendit le bras pour se saisir de la boisson et y trempa ses lèvres, ignorant la chaleur du liquide et grimaçant à cause de l'amertume, qu'elle aimait malgré tout.

Le Dr. Myaku entra également dans la salle, les résultats de l'autopsie dans une main. Il avait déjà fini. Depuis combien de temps est-ce qu'elle était assise ici ? Trois heures ? Cinq heures ? Est-ce que le soleil était déjà levé ? Les volets fermés ne lui permettaient pas de répondre à cette question. Le café brûlant qu'elle sentait couler dans son pharynx, puis dans son œsophage, la réveillèrent un peu. Son esprit se désembruma et elle leva ses yeux vers le médecin, qui prit la parole.

« Le mode opératoire est exactement le même. Même gravure du symbole de Suna sur le foie. Même travail de boucher au niveau du cou de la victime. Cependant, cette fois, il y avait une autre substance dans son corps. Une drogue. Une sorte de médicament à libération prolongée, composé de deux principes actifs. La première partie est directement métabolisée par l'organisme et agit comme un shoot d'adrénaline. La personne se sent possédée par une force surhumaine et la fatigue ne l'atteint plus, comme si l'esprit et le corps étaient séparés pour un instant. La seconde partie du médicament est métabolisée environ une heure plus tard par l'organisme et a l'effet totalement inverse. La victime s'écroule sous son propre poids, dénuée de toute force physique. La substance disparaît complètement de l'organisme au bout de trois heures, c'est pour cette raison que je ne l'ai pas détectée sur le premier cadavre.

-       Qu'est-ce que ça veut dire ? interrogea Gaara.

-       Ça veut dire que cet enfoiré fait exprès de stimuler ses victimes afin de se lancer à leur poursuite, puis les achève quand elles sont en situation de faiblesse, n'ayant plus aucun autre sentiment que la peur et l'impuissance. » lui répondit Gaku en serrant les dents. 

Gaara baissa les yeux, réfléchissant, mais la jeune fille fut à nouveau incapable de deviner à quoi il pensait. Elle prit une grande inspiration et se mit sur ses jambes, en titubant car elles étaient engourdies par l'immobilité.

« On devrait rentrer à l'auberge, Gaara, pour réfléchir à ce qu'on va faire ensuite. »

Il leva les yeux vers elle et la suivit tandis qu'elle se dirigeait vers la sortie du commissariat. Quand ils franchirent le pas de l'entrée, la lumière du soleil couchant éblouie Gaku qui fut obligée de plisser les yeux. Son amnésie était bien plus importante que cinq heures finalement. Elle était restée assise toute la journée.

La rue piétonne face au commissariat était calme. Il n'y avait pas un chat, la plupart des commerces commençaient à fermer leurs portes et les haut-parleurs en haut des lampadaires diffusaient un morceau de piano qui donnait un air paisible à la scène. L'air sentait la mer et on pouvait entendre le bruit des vagues si l'on se concentrait un peu. Gaku eut honte de se sentir si bien en repensant à la scène de la nuit. Elle se frotta les yeux et rattrapa Gaara qui se dirigeait déjà vers l'auberge. Elle entendit le son de sa voix pour la deuxième fois depuis le meurtre :

« Est-ce que tu penses que tous les gens qui tuent sont des enfoirés, comme tu dis ?

-       Mmh, ça dépend. Si quelqu'un tue pour protéger sa famille, face à un agresseur menaçant par exemple. S'il n'a pas d'autres choix, alors non. En revanche, s'il tue par plaisir ... Pourquoi ?

-       Et si quelqu'un tue par devoir ? Parce que c'est ce à quoi il est destiné ?

-       Personne n'est destiné à tuer ... La raison prime sur l'acte. »

Il regarda ses pieds et Gaku se demanda où il voulait en venir. Ses questions innocentes lui donnaient l'air d'un enfant mais elle se demandait s'il n'essayait pas de lui faire dire quelque chose en particulier. Alors qu'il allait reprendre la parole, les haut-parleurs se mirent à grésiller et l'air du piano s'arrêta. Une voix modifiée artificiellement prit la parole, et les mots prononcés glacèrent le sang de Gaku.

« En cette jolie soirée, nous conseillons aux deux shinobis originaires du village de Suna de rentrer dans leur contrée. En effet, il serait regrettable que leur curiosité mal placée et leur soif de justice ne soit la cause de la mort d'un grand nombre de villageois. Ils partiront donc ce soir, ou se réveilleront demain matin en découvrant le décès de la totalité des villageois de l'île Taro. »

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