Chapitre 29: Balle à tête chercheuse
Gadriel
Je ferme les yeux, prêt à affronter ma mort, prêt à mettre fin à mon éternité.
Puis, rien.
Tout ce que j'entends est un claquement suivi d'un cri d'agonie. J'ouvre les yeux et vois l'homme s'effondrer au sol. Je cligne des paupières, abasourdi.
— Ouf, c'était moins une, Gadlounet !
Cette voix...
Elle m'irrite autant qu'elle me soulage. Je pivote afin de faire face à mon souverain.
— Stan, soufflé-je.
Debout dans le chambranle, il m'offre son plus beau sourire puis jette un coup d'œil aux deux autres cadavres dans la pièce.
— Des amis à toi ? demande-t-il.
Je secoue la tête prêt à décharger toute la colère accumulée contre lui dans dans les dernirs jours. Néamoins, ma mission principale me revient à l'esprit et sans perdre un instant de plus, je fonce vers les escaliers, les monte quatre à quatre et débouche sur un long corridor. Fumée et chaleur suffocante règnent en maître dans l'espace clos. J'arrive à peine à respirer. Mes yeux s'embrouillent de larmes pour se protéger de l'agression.
— Mickaël !! hurlé-je avant de tousser comme un damné.
Soudain, des sanglots étouffés atteignent mes oreilles. Satanaël arrive derrière moi au même moment et nous nous précipitons de concert vers la dernière porte du couloir. Je la défonce d'un coup de pied et réalise aussitôt mon erreur. Le feu qui s'oxygène sort de la pièce dans une explosion phénoménale. Les flammes mordent dans ma chair, la consument. Je retire mon chandail qui prend feu et recule sous la douleur. Je suis à peine conscient de Stan qui me dépasse et éteint le feu autour de moi avec sa magie.
Mes bras, mon cou et peut-être une partie de mon visage ont cramé. Et pourtant, malgré la douleur lancinante et le poison du démon qui court encore dans mes veines, je serre les dents et je fonce à l'intérieur de la pièce. Plusieurs corps carbonisés gisent au sol devant moi. À travers la fumée, j'arrive à distinguer un matelas délabré et un bureau couvert de conserves vides. J'ai de plus en plus de difficulté à respirer et mes idées s'obscurcissent, s'embrouillent.
— Mickaël ? prononcé-je à bout de souffle.
— Gadriel ? me répond une petite voix devant moi.
Je contourne le bureau et aperçois le gamin, accroupi en dessous. Ses genoux sont remontés sur sa poitrine, ses petits bras les entourant. Des larmes de terreurs barbouillent son visage couvert de suif. Il relève ses yeux vers moi et je peux y lire toute la profondeur de sa peur et de son incompréhension.
— Viens, dis-je de ma voix la plus rassurante.
Je tends une main vers lui et je le tire jusqu'à moi. Ses petits bras s'enroulent autour de mon cou et s'agrippent tandis que je le soulève. J'aperçois Stan à quelques mètres de moi. Ses yeux ronds comme des soucoupes parcourent la petite boule humaine dans mes bras. Son air ahuri me confirme qu'il ignorait réellement son existence.
Avec Mickaël toujours dans mes bras, nous rebroussons chemin le plus vite possible et sortons de la maison en flamme par la porte arrière. Quelques voitures de pompiers arrivent sur les lieux et nous empruntons les ruelles pour éviter d'être repérés. Quatre pâtés de maisons plus tard, je m'arrête un instant et dépose le petit sur un muret afin de vérifier son état. Son visage est barbouillé de larmes, ses yeux sont irrités par la fumée, mais il ne tousse pas, ce qui me rassure.
— Ça va, petit ? demandé-je avec inquiétude.
Il ne me répond pas. Son regard est plutôt fixé sur Satanaël qui se tient derrière moi. Ses yeux parcourent la silhouette de mon souverain tout comme il avait fait avec moi quelques jours plus tôt.
Il voit son aura...
Son père, quant à lui, reste là, sans rien dire. C'est bien la première fois que Stan n'ouvre pas la bouche pour dire des conneries.
— Papa ? prononce le petit, d'une voix faible.
Je scrute le visage de mon souverain qui garde le silence. Après ce qui me semble une éternité, ce dernier hoche la tête, confirmant les soupçons de Mickaël.
Des rugissements au loin détournent mon attention. Trois sangrégats foncent vers nous à toute vitesse.
— Stan !
Mon ami tourne la tête dans ma direction, encore sous le choc.
— Attrape le petit et ramène-le en sécurité à Shéol ! J'irais vous rejoindre avec sa mère dès que possible !
Ses yeux vitreux semblent reprendre vie et il hoche la tête. Il déploie ses ailes noires aux pointes brunes et saisit Mickaël avant de prendre son envol.
Et maintenant, à moi de jouer.
Je pivote sur mes talons et fonce tête baissée vers ces sales bestioles qui vont regretter d'être venues au monde.
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