Chapitre 17: Présentations officielles

Gadriel

— Je peux en avoir une autre ? demande Mickaël après avoir englouti sa quatrième crêpe.

Au grand plaisir du gamin, j'ai tenu ma promesse. Une montagne de crêpes l'attendait à son réveil. Émilie, elle, a souri lorsque j'ai déposé un café devant elle. Elle l'a enveloppée de ses petites mains et l'a humée comme si c'était la 8e merveille du monde. Va savoir pourquoi, ce n'est qu'un simple café filtre, le même qu'elle se fait chaque matin.

— C'est toujours meilleur quand quelqu'un d'autre le prépare pour nous, m'explique-t-elle lorsque je l'observe, un sourcil arqué.

— C'est vrai aussi pour les crêpes, renchérit Mickaël. Gadriel fait de meilleurs crêpes que toi m'man.

Émilie éclate de rire devant la bouille mi-enthousiaste, mi-repentante de Mickaël. Une douce mélodie à mes oreilles qui me fait sourire comme un putain d'idiot.

— Je vais devoir lui piquer sa recette dans ce cas ! plaisante Émilie

Elle m'offre un joli sourire puis se lève de table avec son assiette.

Je remarque qu'elle n'a pas beaucoup mangé. Un demi-crêpe et un café. Elle ne mange jamais beaucoup, en fait. Toujours une petite portion, comparée à celle de Mickaël. Je l'ai même déjà vue, à son insu, attendre que son fils ait quitté la table pour terminer les restes du petit au lieu de se servir une portion à elle. Soit elle n'aime pas beaucoup le gaspillage, soit elle n'a pas assez d'argent pour se le permettre. Je regrette soudain d'avoir cuisiné pour une armée avec ses maigres provisions et surtout, de lui imposer ma présence. Je note mentalement de demander à Asbeel de nous livrer une énorme commande d'épicerie dans les prochains jours.

— Merde, fait chier !

Surpris de l'entendre jurer ainsi, je tourne la tête vers Émilie, adossée à l'îlot de la cuisine, son téléphone en main.

— Ça va, maman ? demande Mickaël, inquiet.

Elle lève les yeux dans sa direction.

— Oui, ne t'inquiète pas, mon ange.

Elle se mord les lèvres, presse ses paupières un instant puis son regard se pose sur moi.

— Gadriel, je peux te parler un instant ?

— Tu veux lui parler de quoi maman ? demande Mickaël, pas totalement convaincu que tout va bien.

Émilie ouvre la bouche, hésite puis la referme ensuite.

— Elle veut surement me parler de choses de grands très très ennuyeuses, expliqué-je à Mickaël.

Il semble satisfait de ma réponse, car il hausse les épaules et attrape une autre crêpe au centre de la table pour la noyer littéralement sous le sirop.

J'en profite pour me lever et rejoindre Émilie qui me fait signe de la suivre dans sa chambre. Elle referme la porte dernière nous.

— J'ai reçu une mauvaise nouvelle, m'annonce-t-elle.

Elle hésite un moment avant de reprendre la parole.

— Ma mère a été admise à l'hôpital de Montréal hier. Les infirmiers ont tenté de me joindre sur mon portable hier soir, mais je l'avais fermé.

— Il lui est arrivé quelque chose de grave ?

Un rictus cynique déforme son visage.

— Je prédis une chute dans les escaliers, marmonne-t-elle. Dans tous les cas, je vais les rappeler. Tu crois que c'est possible d'aller la voir... je veux dire, qu'il y a un danger à quitter la ville ?

— Non, je vais t'accompagner et avertir mes hommes postés à l'extérieur.

Elle écarquille les yeux.

— Tu as engagé des personnes pour surveiller mon appartement ?

— En quelque sorte.

Elle détourne le regard en jouant nerveusement avec la manche de son pyjama.

— Je ne suis pas certaine que ça me rassure...

— Ne t'inquiète pas. Deux de mes hommes ratissent la ville au peigne fin, Asbeel écoute les radios de police et épluche tous les rapports. Nous allons mettre la main sur ceux qui te veulent du mal et je vais les ramener à Shéol avec moi ou les éliminer sur le champ s'ils résistent.

Elle hoche la tête.

— D'accord. Je rappelle l'hôpital et l'on pourrait partir dès que possible.

Elle se montre forte, mais son regard qui fuit le mien m'indique que quelque chose ne va pas.

Sans réfléchir, je glisse mes doigts sous son menton et relève son visage.

— Hé, tout va bien aller. Tu es en sécurité avec moi.

Ses yeux gris me sourient tristement.

— Je ne m'inquiète pas pour ça. Du moins, ce n'est pas ce qui m'inquiète le plus.

— C'est ta mère qui t'inquiète ? hasardé-je, mon pouce caressant légèrement sa joue.

— Je n'ai pas envie d'aller la voir, m'avoue-t-elle.

Je fronce les sourcils puis m'écarte.

— Alors n'y va pas ?

— Je... je n'ai pas le choix. Je suis son seul contact en dehors de...

Elle secoue la tête et inspire longuement pendant qu'à l'intérieur de moi, je réprime l'envie de la serrer dans mes bras pour la réconforter. J'ignore le mal qui la ronge, mais j'aimerais pouvoir balayer ces émotions qui tirent les traits de son beau visage.

— Je rappelle l'hôpital, répète-t-elle d'une voix qui se veut plus assurée et on verra par la suite.

— D'accord.

Je décide de la laisser seule pendant qu'elle compose le numéro et d'aller rejoindre Mickaël. Ce dernier a quitté la table et joue maintenant avec des figurines en forme de dragon dans le salon.

Incapable de rester en place, je mets les restes du repas au frigo et ramasse la table.

Trois minutes plus tard, Émilie sort de sa chambre, son masque de mère de retour sur son visage.

— Mickaël, ça te dirait d'aller voir grand-maman aujourd'hui ?

Le petit lève la tête de ses jouets et fronce les sourcils.

— Elle est encore à l'hôpital ? demande le petit.

Émilie ouvre la bouche, puis la referme avant de confirmer d'un hochement de tête.

— D'accord, dit-il sans grand enthousiasme.

J'aide donc Émilie à préparer un sac de voyage avec des collations et quelques jouets pour la route. J'envoie aussi un message à mes hommes pour les avertir de nos déplacements pendant qu'Émilie prend sa douche. L'un d'eux nous suivra, les autres resteront ici. Quelques minutes plus tard, nous sommes sur la route en direction de Montréal.

Le voyage se fait sans encombre. Cette fois-ci, je n'hésite pas à traverser les grandes portes automatiques de l'hôpital à la suite d'Émilie et Mickaël. Je mets de côté mes réticences et mes tourments et suis Émilie dans les couloirs aseptisés de cet endroit qu'elle semble connaître par cœur.

Elle nous conduit dans l'aile ouest et s'arrête au comptoir d'accueil où elle demande à une infirmière le numéro de chambre de sa mère. L'infirmière regarde dans le dossier, lui demande une pièce d'identité puis lui indique le numéro. Une fois devant la chambre, Émilie prend une grande inspiration et pénètre à l'intérieur. J'hésite à la suivre, quand Mickaël qui était derrière moi me dépasse et entre à son tour. Je décide d'y aller, mais de rester à l'écart.

La chambre est plongée dans l'obscurité et seuls quelques jets de lumière traversent les rideaux blancs recouvrant les fenêtres. Un lit accueille une silhouette frêle à la chevelure terne et sans éclat. Une perfusion est reliée à son bras gauche strié de veines éclatées alors que son autre bras est recouvert d'un plâtre.

— Bonjour maman.

Émilie s'avance dans la pièce et rejoint le lit. La femme tourne la tête dans sa direction et cligne des yeux. L'un d'eux arbore un hématome verdâtre de la taille d'une poire.

— Émilie ? C'est toi ?

— Oui, maman, répond-elle d'une voix douce.

Elle garde une certaine distance, tout comme Mickaël qui observe la scène tout près de moi. Elle balaie le corps de sa mère du regard et ses épaules s'affaissent.

— Qu'est-ce qui s'est passé ?

Sa voix lasse.

— Tu me connais, rit faussement la patiente. J'ai manqué la dernière marche de l'entrée et puis voilà.

Elle lève le bras pour montrer son plâtre tandis qu'Émilie jette un coup d'œil dans ma direction en voulant dire « qu'est-ce que j'avais dit... »

J'ai l'impression que quelque chose m'échappe. Émilie manque de chaleur et de compassion et j'ignore pourquoi.

— Oh Mickaël est avec toi, sourit la dame alors qu'elle suit le regard d'Émilie et l'aperçoit devant moi. Viens me voir. Oh, que tu as grandi ! s'exclame la mère d'Émilie alors que Mickaël s'approche de quelques pas.

— Est-ce que ça fait mal ? demande-t-il en pointant le plâtre du doigt.

La mère d'Émilie n'a pas le temps de répondre. Un médecin entre dans la chambre et me salue d'un signe de tête au passage.

— Vous êtes mademoiselle Pelletier ? demande le médecin à Émilie, un dossier en main.

— Oui, c'est moi.

— Vous êtes bien la fille de Mme Saint-Laurent ?

Émilie hoche la tête en silence.

— J'aimerais vous parler.

Il avise Mickaël près de sa mère et s'accroupit à côté de lui.

— Toi, je parie que tu aimes les sucreries !

— Ouaip ! Mais seulement celles que ma mère me donne. Pas celles des étrangers.

Le médecin ricane en se redressant.

— C'est très sage, petit.

Il s'adresse ensuite à Émilie :

— J'ai un plat de bonbons au poste des infirmiers et quelques jouets, votre mari pourrait peut-être l'amener là-bas pendant qu'on discute ?

— Ce n'est pas mon ma...

— Viens, Mickaël ! dis-je en coupant Émilie. On va laisser parler les adultes de choses ennuyeuses et pendant ce temps, on va essayer de trouver ce fameux plat de bonbons.

— Okay.

Mickaël me suit et nous retournons au comptoir d'accueil ou un infirmier nous sourit et sort une boîte brune en forme de coffre au trésor dans lequel se trouve tout l'attirail possible pour distraire les enfants.

Pendant que le petit humain est absorbé par toutes ces merveilles, je reviens sur mes pas et tends l'oreille à l'extérieur de la chambre tout en gardant un œil sur le petit.

— Arrête de mentir, maman ! Je sais très bien ce qui s'est passé.

La colère contenue dans la voix d'Émilie me surprend.

— Vous pouvez porter plainte à la police. Une maison pour des femmes dans votre situation est prête à vous recevoir. Votre mari ne connaîtra pas l'emplacement et ne pourra pas vous retrouver.

— Puisque je vous dis que je suis tombée. Richard n'a rien à voir avec ça ! Émilie, tu dois me croire !

— Non, maman. Plus maintenant. Tu sais très bien ce qui va arriver si tu retournes à la maison. Il va t'apporter des fleurs, pleurer et jurer qu'il ne recommencera plus et dans un mois, je vais devoir me retaper toute la route pour revenir te voir ici, à l'hôpital.

— Tu parles de moi comme si j'étais une corvée, répond la voix rocailleuse de sa mère. Je t'ai donné la vie, je t'ai élevée. La moindre des choses est que tu viennes me voir à l'hôpital lorsque j'ai un léger accident.

— Lorsqu'il te bat tu veux dire !

Émilie a crié si fort que l'infirmier à l'autre bout du corridor relève la tête.

Maintenant, je comprends mieux ses réticences de ce matin. Si ce qu'Émilie prétend est vrai et que sa mère refuse l'aide qui accordée, son dilemme intérieur doit être insupportable. Comment aider quelqu'un qui ne veut pas s'aider soi-même ?

Je décide que j'en sais assez entendu et retourne rejoindre Mickaël quand un homme roux d'une cinquantaine d'années accoste l'infirmier en poste. Son manteau est rapiécé et il tient un bouquet de fleurs dans ses mains. Il ne fait pas attention à nous et questionne l'infirmier qui s'est occupé de Mickaël.

— Je cherche Connie Saint-Laurent. On m'a dit qu'elle se trouvait à cet étage.

L'infirmier tape le nom à l'ordinateur puis fronce les sourcils

— Vous êtes un membre de sa famille ?

— Ouais, Richard Martin, son conjoint.

Je serre mes poings lorsqu'il mentionne son nom. Le visage de l'employé tic nerveusement.

— Je suis désolé, mais les heures de visite sont terminées pour aujourd'hui, déclare-t-il.

Il ment, j'en suis certain.

— Je m'en occupe, lâché-je avant d'agripper l'homme par la manche et le guider vers l'ascenseur.

— Hey, mais qu'est-ce que..?!

J'entre dans la cabine, le plaque au mur et écrase mon poing sur le bouton du troisième sous-sol. Dès que les portes se ferment, j'empoigne l'enfoiré par le col et le soulève du sol. Son bouquet tombe par terre, ses pieds balaient le vide à toute vitesse.

— Fuck ! T'es qui toi ?

— Ton karma !

Mon poing le percute à l'estomac. Une fois. Deux fois. Puis je le lâche. Il s'écroule au sol, plié en deux, ses yeux prêts à sortir de leurs orbites. Il tente de parler, de reprendre son souffle, mais en vain. Il rampe pour s'éloigner de moi lorsque je le rattrape et me penche sur lui.

Mon pouls bat dans mes tempes et tous mes muscles sont tendus devant ce salaud qui a osé lever la main sur sa femme.

D'un geste vif, j'harponne son bras et le renverse. Son radius éclate dans un doux son que je savoure. Putain que ça m'avait manqué !

L'homme hurle de douleur, chiale comme un gamin. Il tente de s'enfoncer dans le mur derrière lui. J'empoigne alors sa gorge pour le faire taire.

— Maintenant tu vas m'écouter, craché-je, mon visage à quelques centimètres du sien. Tu vas laisser Connie Saint-Laurent tranquille et disparaître de sa vie. Tu quittes la ville et ne reviens jamais. Si j'apprends que tu as repris contact avec elle d'une manière ou d'une autre, c'est tous les os de ton corps que je vais broyer. Un.à.un. Capiche ?

Un gargouillis incompréhensible sort de sa bouche. Je presse plus fort sur sa gorge.

— Pardon ? Je n'ai pas bien compris.

De son bras valide, il s'agrippe à ma poigne et hoche la tête du mieux qu'il peut.

— Parfait.

Au même moment, les portes s'ouvrent sur un stationnement sous-terrain.

— Maintenant, tu dégages.

Je le saisis par le manteau et le jette à l'extérieur de l'ascenseur comme un vulgaire sac de vidanges. Son visage percute le béton humide dans un craquement sonore satisfaisant.

Lorsque les portes de l'ascenseur se referment, j'inspire un grand coup. Les battements de mon cœur ralentissent pendant que je me délecte de la sensation de l'adrénaline qui coule dans mes veines. Bordel que ça fait du bien !

***

Quelques heures plus tard, nous sommes sur le chemin de retour. Sa mère a eu son congé de l'hôpital et nous l'avons reconduit chez elle. Comme je l'espérais, son conjoint n'était plus là, ses vêtements et ses affaires non plus. Connie, la mère d'Émilie, l'a toute de suite remarquée. Elle a aussitôt éclaté en sanglots en baragouinant que l'amour de sa vie l'avait quittée et qu'elle n'arriverait pas à vivre sans lui. Émilie a serré les dents puis s'est assise avec elle dans le canapé du salon pour la consoler comme elle l'a pu, mais son visage apathique m'indiquait qu'elle était déjà passé par là à de nombreuses reprises.

C'est à ce moment que j'ai décidé d'amener Mickaël à l'extérieur afin de lui éviter la scène et protéger son innocence. Ce dernier est resté silencieux un long moment, à botter des cailloux et à dessiner sur le bitume avec un bâton mouillé. Puis il a fini par me parler.

— Est-ce les gens sont tristes là d'où tu viens ?

—Euh... oui, ça leur arrive.

— Tu m'emmèneras un jour dans ton pays ?

Un rire nerveux m'échappe.

— Tu diras à ta mère que tu as envie de voyager. Je suis certain qu'elle trouva un moyen pour te faire visiter le monde entier.

Et je le crois réellement. Émilie a démontré à plusieurs reprises qu'elle serait prête à tout pour son fils.

Le petit me parcourt lentement du regard, si lentement, qu'un malaise s'installe dans ma poitrine.

— Je ne pense pas qu'elle puisse aller chez toi, finit-il par déclarer.

Je fronce les sourcils.

— Pourquoi dis-tu cela ?

Il hausse les épaules puis baisse les yeux sur une petite roche grise qu'il fait rouler du pied jusque dans une flaque d'eau.

— Tu sais, reprend-il. J'ai pensé donner un câlin à mamie pour la consoler.

— Ah oui ? Et pourquoi ne l'as-tu pas fait ?

Le petit continue à faire rouler le caillou et le sort de l'eau. Il se penche pour le ramasser, se relève et l'observe.

— Mes câlins portent malheur.

Je réprime un éclat de rire. Sa naïveté est rafraîchissante.

Je m'approche de lui et m'accroupis pour être à sa hauteur.

— C'est impossible, crois-moi.

— Je te le jure ! La dernière personne à qui j'ai donné un câlin est tombée malade.

Cette fois, je ne peux cacher mon sourire.

— Ce n'est qu'un mauvais hasard. Aucun câlin n'amène la malchance. Tu devrais continuer à en donner.

Il détourne son attention du caillou et plante ses yeux marron pleins d'espoir dans les miens.

— Tu crois ?

Je lui souris, tendrement.

Du moins le plus tendrement qu'il m'est possible de faire.

— J'en suis certain.

Il me renvoie mon sourire, un sourire éclatant de joie comme seul lui sait les faire.

— Génial !

— Tu as envie qu'on trouve le plus beau caillou de tous les temps pour le donner à ta maman ?

— Ouais !

Contre toute attente, je passe donc la prochaine demi-heure avec Mickaël à scruter à la loupe tous les cailloux sur mon chemin. Ouais, Asbeel et Stan se foutraient vraiment de ma gueule, mais je m'en fiche.

Le petit humain jette finalement son dévolu sur une pierre blanche en forme de cœur.

Lorsqu'Émilie sort enfin de la maison, l'après-midi est déjà très avancé. Elle nous presse de retourner à l'auto afin de reprendre le chemin du retour. Après une heure de route où nous restons bloquer dans le trafic de la ville, nous nous arrêtons dans un petit restaurant en périphérie de l'autoroute.

À table, l'atmosphère est morose. Mickaël tente de faire le pitre pour détendre l'atmosphère et je décide d'embarquer dans ses bêtises. Émilie sourit à quelques reprises, mais je vois bien que son esprit est à des kilomètres de nous. Son regard est empreint de tristesse et d'amertume. J'aimerais balayer ces sentiments, les enfermer dans une boîte et revoir ses yeux briller à nouveau.

Le reste de la route s'effectue dans un silence complet. Lorsque nous arrivons à l'appartement, le soleil est déjà couché depuis plusieurs heures et Mickaël s'est endormi à l'arrière. Émilie le détache, le tire jusqu'à elle et le soulève dans ses bras.

— Laisse.

Je tends les bras pour la décharger. Elle me fixe et cligne des yeux. Puis, tout doucement, comme si ça lui coûtait beaucoup, elle me confie ce qu'elle a de plus précieux au monde.

Une fois Mickaël dans son lit, je laisse Émilie seule avec lui et m'installe à l'îlot pour lire les derniers rapports de Zaamiel. Suriel et lui ont peut-être trouvé une piste. Un bar sur la rue Notre-Dame a attiré leur attention. Quelques accrochages y ont eu lieu dans les derniers jours, signe qu'une sirène est peut-être à l'œuvre. Je leur propose d'aller y jeter un œil demain soir. Je pourrais m'y rendre tout de suite, mais j'ai la drôle d'impression que ma place est ici ce soir, avec Émilie. Je préfère seulement être là si jamais elle a envie de parler.

Néanmoins, je comprends vite que ce n'est pas le cas quand, en sortant de la chambre de son fils, elle me souhaite bonne nuit et s'enferme dans la sienne. 

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