Chapitre 4

PDV Margot

Le lendemain, je me réveille à sept heures du matin, Théo étant toujours endormi près de moi. Je me demande comment je peux dormir aussi longtemps, moi qui, d'habitude, fais des nuits de six heures pas plus.

J'ai l'impression d'être une marmotte, vraiment.

Je me lève de sorte à ne pas faire de bruit pour ne pas le réveiller. Il a l'air détendu. Je ne l'avais jamais vu comme ça, avec cette expression calme sur le visage. Ce n'est pas son caractère.

Je souris et m'apprête à sortir de la pièce quand je m'aperçois que Théo a reçu un message.

Je sais, ce n'est pas poli, je sais, la curiosité est un vilain défaut, mais je jette un coup d'œil rapide à l'écran.

C'est Élise.

De Élise :

Il faut qu'on parle.

Mon cœur tambourine dans ma poitrine. Je n'ai que quelques secondes pour répondre, tant que la notification est affichée sur l'écran de verrouillage et que Théo dort.

De Moi :

Appelle-moi, c'est mieux.

De Élise :

Ok. Margot dort toujours ?

De moi :

Oui.

J'entends le téléphone vibrer et je décroche. Je vais enfin savoir ce qu'il se passe, du moins je l'espère.

Il faut juste que j'évite de parler pendant quelques minutes. La voix d'Élise se fait entendre de l'autre côté du fil, fluette, un brin aiguë, insouciante et provocatrice.

- Déjà, je tiens à te dire que je n'ai rien de nouveau. Je ne le trouve toujours pas, mais... Théo, je pense qu'il est en Alaska.

Je sursaute. Qui ? Le kidnappeur ?

- Qui ça ?

C'est sortit tout seul. Je plaque une main devant ma bouche, comme si celle-ci avait le pouvoir d'annuler mes mots.

- Margot.

- Effectivement.

- Écoute, je n'ai pas le temps de te gronder - mais c'est pas bien de piquer le téléphone des gens ! -, sinon je t'aurais fait une leçon de morale dont tu te serais souvenue, crois-moi. Maintenant, pose ce téléphone et je ferai comme s'il ne s'était jamais rien passé.

- Je m'en fiche, que tu lui dises que j'ai pris son téléphone ou pas ! De qui parles-tu quand tu dis « Il est en Alaska. » ?

- Tu le sais, Mar'. Ça ne sert à rien de me poser la question, sauf à me faire perdre du temps. J'ai un devoir à rendre, en plus. Je raccroche.

Elle ne fait jamais ses devoirs.

L'appel de termine. Je reste quelques secondes immobile, le cellulaire à la main, pleine de questionnements, avant de me rendre compte d'une présence derrière moi.

Je me retourne immédiatement. Théo est appuyé sur le mur à quelques dizaines de centimètres de moi, son sourire en coin sur le visage.

- Ce n'est pas très poli de regarder les messages des autres, commente-t-il.

Je me sens rougir, même si je ne peux pas savoir si je rougis vraiment. Mes joues brûlent.

- Je... C'était pour savoir s'il y avait du nouveau.

C'était pour savoir qui t'envoyait des messages à sept heures du matin.

- Alors ? Il y a du nouveau ?

- Élise pense qu'« il » est en Alaska, elle n'a pas spécifié qui.

Il fronce les sourcils, soucieux.

- Bien. Tu veux continuer à dormir, flâner dans les boutiques qu'on a faites mille fois ou partir avec moi ?

- À ton avis. Mais... Théo ? Est-ce que c'est le kidnappeur dont elle parle ? Sincèrement ?

Ses yeux de voient un instant, puis reprennent leur éclat azuré.

- Oui. Elle parle du kidnappeur.

- Il est là ? Pourquoi on ne va pas le voir ?

- Margot, rassure-moi, tu rigoles, n'est-ce pas ?

- Ça ne sert à rien de le fuir, il y aura bien un moment où... On devra se retrouver les uns en face des autres, et je préfère avoir choisi quand arriverait ce moment.

- Tu n'es pas prête à savoir.

Il frôle mes lèvres des siennes et monte dans un taxi. Je le suis te près et m'assois avec lui.

Je ne veux plus savoir où on va.

Je m'en fiche.

Tout ce qu'on fait, ce qu'on voit, ce qu'on dit, ce qu'on sent, cela n'a plus aucune importance pour moi.

Tout ce que je veux, c'est la vengeance.

Oui, c'est ça, une soif de vengeance que j'ai toujours réprimée, parce qu'elle me faisait peur. Parce que je refusais d'admettre que je n'étais pas celle que les autres pensaient que je suis.

Mais, cette fois, alors qu'il est si près, je ne peux pas m'empêcher de vouloir le trouver. Le trouver pour en finir, une bonne fois pour toute. Il va regretter de s'en être pris à ma famille.

PDV Séléné

Le froid est mordant contre mon épiderme, je voudrais rentrer mais il me pousse à avancer, seuls dans la rue. Pourquoi ai-je fait ça ? Pourquoi avoir continué à lui fournir tout ce dont il avait besoin ? Pour au final être traitée de la sorte ?

Je soupire et il me demande - me crie serait le mot le plus approprié - de continuer de marcher.

Nous nous arrêtons enfin, et je sens un poids dans la gorge, dans le ventre, des larmes sous mes yeux cernés, ma peau brûlante qui semble frigorifiée pour la première fois depuis des semaines.

Les remords me prennent, mais un coup d'œil à ma gauche, là où il se trouve, suffit à me prouver que cela ne sert à rien de riposter. Il a été longtemps mon pire cauchemar. Aujourd'hui encore plus.

Je pense à Hélios, resté à la maison. J'étais obligée, j'étais obligée. Ça ne sert à rien de ressasser. Pourtant je culpabilise, et je sais que je fais bien vu la situation.

Nous nous arrêtons devant une bâtisse, plutôt grande, formant un pavé droit au milieu des immeubles et maisons peuplant la ville.

Il y a plusieurs étages, visiblement, ainsi que plusieurs fenêtres donnant sur nous.

Pourvu qu'on ne nous voie pas.

Il me reste seulement quelques mois à vivre, je ne tiens pas réellement à les passer en prison en sa compagnie.

La porte est fermée à clef, mais je ne sais comment, il parvient à l'ouvrir.

Ce type est dangereux.

- Tu rentres avant, fait-il.

- Pourquoi ?

Je ne devrais pas être insolente avec lui, mais rien que sa tête me donne envie de le briser, de lui reprendre tout ce qu'il est parvenu à construire, de faire de sa vie un enfer pour qu'il comprenne ce que ça fait, d'être utilisée pour une entreprise dont on ne supporte même pas le but.

- Parce qu'il feront confiance à une fille comme toi. T'es petite, tu f'rais pas de mal à une mouche. En plus, t'es malade. On dirait que t'as pris soixante coups de soleil en même pas une heure. T'es parfaite pour le rôle, Séléné.

Je grimace. Être critiquée ouvertement par un homme que je connais très - trop ? - bien ne faisait pas vraiment partie de mes projets.

- Et donc, je dois me planter dans le hall d'un hôtel ? Jamais de la vie, tu n'as qu'à le faire toi-même puisque c'est si facile !

- Il en va de ma vie, Séléné ! Tu veux que je meure triste ?

- Je voudrais plutôt que tu meures maintenant, sale pourriture !

- Tu me parles pas sur ce ton, c'est clair ?

Je ne dis rien et hoche la tête. Si c'est pour qu'il me tape en public, sur le perron d'un hôtel, je préfère encore me taire. Il s'occupera de le faire après, de toute façon, mais j'aurai gagné un peu de temps sans bleus.

Il sourit d'un air satisfait.

- Bien, maintenant, tu rentres dans cette pièce, est-ce que j'ai été assez clair ? Ou faut-il que je répète encore ?

- Vas-y, répète, on perdra un peu plus de temps, comme ça.

Pourquoi je ne sais pas fermer ma bouche ? Pourquoi je suis si franche ? Sa main fuse vers moi, à une telle vitesse que je ne la vois pas tout de suite arriver, jusqu'au moment où je ressens une douleur aiguë et brûlante sur ma joue. Je retiens de justesse la larme qui perle au coin de mon œil.

Une femme qui était il y a quelques secondes à quelques mètres de nous s'est écartée et est partie dans le sens inverse. Alors c'est ça, le monde. Plus personne ne se soutient. Je soupire et place mes cheveux noirs sur mes deux joues, de sorte qu'on ne voie rien.

Je fais un pas vers les marche est entame la montée.

- Tu vois, quand tu veux ! T'es comme un âne, en fait, 'faut juste te mettre la carotte.

Le fouet, plutôt.

Un jour, je me vengerai, de lui, de ma vie, du karma, des maladies, de ceux que je n'ai pu connaître parce que le destin en a décidé autrement.

Un jour, très prochainement, avant la fin des quelques mois qu'il me reste, je me vengerai, et ma vengeance aura de graves conséquences pour tous ceux que je connais.

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