Chapitre 4
HAYDEN
Plus tôt dans la journée
— Salut, les amoureux. Quoi de neuf ? m'exclamé-je en m'asseyant face à mon meilleur pote et son mec.
Après mon troisième cours de la journée, Nolan et Clay m'ont donné rendez-vous au Miley's Diner. Ils devaient me parler d'un plan pour mon appart et je n'ai pas eu le temps de déjeuner, autant faire d'une pierre deux coups.
J'ai retrouvé un brin d'espoir lorsque mes amis m'ont expliqué avoir une piste qui pourrait m'intéresser. Je sais que je peux leur faire confiance, qu'il ne me caserait jamais avec un fou. Alors oui, c'est une bonne nouvelle.
— Salut mec, tout va bien ? demande Clay d'un ton enjoué.
— Ça baigne et vous ?
— Idem.
Je profite de cet instant de silence pour intercepter la serveuse afin de passer commande.
— Salut Hayden, qu'est-ce que je te sers ? me questionne Nancy de sa voix mielleuse habituelle.
Oui, on se connaît plutôt bien. J'ai pris pas mal de bon temps avec elle en deuxième année, mais ce n'est pas allé plus loin. On ne voulait tous les deux que du cul et c'est ce qu'on a obtenu. On a tout arrêté et contrairement à mes autres plans cul, on est restés en bon terme. Il le fallait bien, car je viens parfois manger ici avec les gars et loin de moi l'envie de retrouver ma nourriture empoisonnée.
Ouais les nanas avec qui je baise ont ce degré de folie. J'ai un jour jeté une fille qui travaillait à la cafétéria du campus et j'ai failli mourir à cause d'un muffin qu'elle avait volontairement inversé. Elle m'avait donné celui au caramel cacahuètes alors que j'étais allergique aux cacahuètes. Heureusement pour moi, je n'avais plus faim et Kyle s'est chargé de le gober à ma place. J'ai failli avoir une attaque lorsqu'il m'a demandé ce que je foutais avec un muffin qui pouvait me tuer dans la minute.
J'ai pensé à la dénoncer, mais comme j'ai été un parfait connard avec elle, j'ai préféré laisser couler.
Depuis ce jour-là, j'ai arrêté de baiser longtemps avec la même fille. Trop de complications pour rien.
— Salut, beauté. Tu me mets un double cheeseburger, une grosse portion de frites et un soda, s'il te plaît.
— Tout de suite.
Elle accompagne sa phrase d'un clin d'œil avant de nous fausser compagnie.
— Dis-moi pas que tu te la fais à nouveau ? râle Clay en me fusillant du regard.
Depuis l'incident, Clay non plus ne veut plus que je voie les mêmes filles quotidiennement, si ce n'est pas sérieux. Son côté papa poule n'a pas envie de me voir clamser pour une simple histoire de meuf. Et pour une fois, il n'a pas tout à fait tort.
— Bien sûr que non, je suis juste polie. Mes parents m'ont bien élevé, réponds-je d'un air insolent.
— C'est vrai que reluquer son cul et son décolleté, c'est le comble de la politesse, se marre Nolan.
— Je suis un mec, c'est une nana canon, je n'y peux rien.
Clay lève les yeux au ciel avant de finir son soda cul sec.
— Bon, on n'est pas venu là pour parler meufs... Enfin, si, mais une meuf en particulier alors revenons au vif du sujet.
Une meuf en particulier ? De quoi parle-t-il ? On était censés parler de mon coloc, non ?
— Je pensais que vous deviez m'expliquer deux-trois trucs sur mon potentiel coloc ?
Ils se lancent leur fameux regard.
Oh, oh, dans quel bordel m'entraînent-ils ?
— À ce sujet, on a oublié de préciser un petit détail, commence Nolan.
— Ce coloc potentiel ou devrais-je dire « cette » coloc potentielle est une fille.
— Tu me fais marcher ? dis-je en riant nerveusement.
C'est vrai que j'avais dit être prêt à tout, même à cohabiter avec Médusa, mais c'était évidemment une façon de parler. Je n'ai rien contre les filles, au contraire, j'aime les caresser, les faire jouir et les laisser flatter mon égo les trois quarts du temps, mais ça s'arrête là. Cohabiter avec elles, c'est ce que j'apparenterais le plus à l'enfer sur Terre. Elles prennent toute la place dans la salle de bain, elles pètent un câble quand la maison est en bordel, elles regardent leurs séries de midinettes et elles finissent par tomber amoureuse de moi.
Ouais, je parle comme un connard, mais les filles, j'ai fait une croix dessus depuis longtemps. Alors je ne vais pas me taper une coloc, aussi gentille et désespérée soit-elle. Ça ne finira jamais bien.
— Si on t'en avait parlé tout de suite, tu aurais refusé sur-le-champ et tu n'aurais pas pris la peine d'écouter nos arguments, tente de m'expliquer Clay.
Évidemment que j'aurais dit non, et puis quoi encore ? Mon appart, c'est un repère de mec, on boit, on regarde le match, on jure comme ça nous chante, on fout le bordel et on fait la fête jusqu'à pas d'heure. Pas de place pour une femme.
C'était peut-être un peu misogyne de ma part...
— Encore heureux. Tu me faisais la morale sur les filles, il y a quelques secondes et tu veux m'en caser une, dans le seul endroit où j'aime être tranquille.
— Primo, je te mets en garde contre les tarées avec qui tu baises, car ça ne finit jamais bien. Deuzio, celle-là tu n'auras pas le droit d'y toucher, à moins que tu veuilles passer sur le corps de Nolan, répond mon meilleur ami en ponctuant sa phrase d'un demi sourire.
Son mec me fixe sérieusement pour m'intimider, ce qui marche totalement. Je suis musclé, plutôt costaud, mais comparé à ce tank qu'est Nolan Grey, je ne fais pas le poids. Il a beau être une crème, il te briserait d'un mouvement de main s'il le souhaitait.
— Sans façon. Et pourquoi je ne peux pas y toucher, au juste ? Pas que je comptais le faire, mais je suis tout de même curieux.
— Parce qu'il s'agit de Kaylee, ma meilleure amie. On vivait ensemble jusqu'à cette année et quand j'ai décidé d'emménager avec Clay, elle s'est retrouvée sans appart. Elle squatte notre canapé pour l'instant, mais je sais qu'elle ne tiendra pas longtemps chez nous, m'apprend Nolan.
— Elle pense qu'elle dérange, bien que ce ne sera jamais le cas. Mais je la comprends, elle a besoin de son intimité et ne peut pas se permettre un appartement seule. Elle a besoin d'un endroit où vivre au plus tôt et tu as besoin d'un coloc avant la fin du mois d'octobre, poursuit Clay.
C'est vrai que c'est un bon argument. En temps normal, je me permettrais de me plaindre. Surtout si j'avais eu le financement de Nate jusqu'à la fin de l'année, comme c'était initialement prévu. Malheureusement, ce n'est pas le cas et si cette Kaylee peut me payer une partie du loyer et nous éviter à tous les deux de vivre dans la rue, je devrais l'envisager.
— Si tu crains pour ton intimité, ton espace, des centaines de filles dévalisant ton appart, tu peux tout de suite retirer ça de ton esprit. Kaylee n'est pas comme les filles que tu côtoies tous les jours, reprend Clay.
— Elle est plutôt réservée, méfiante et asociale. En dehors de Clay et moi, elle ne fréquente personne. Elle a vécu des trucs moches qu'elle essaye d'oublier. Elle ne t'embêtera pas, insiste son copain.
Cette fois, je suis intrigué. Nolan m'avait déjà dit qu'elle n'était pas ordinaire et c'est vrai que je meurs d'envie de savoir qui se cache derrière ce simple nom. Mais une colocation est-elle la meilleure des idées ?
— Elle a cependant son caractère bien à elle. Si tu la cherches, elle répliquera bien plus fort. Ne t'en fais pas une ennemie, me préviens mon meilleur pote.
Ah bah chouette. Très rassurant tout ça.
— Tu mettras un peu de temps à l'apprivoiser, mais si tu lui montres qu'elle peut t'accorder cette confiance qu'elle ne donne qu'à très peu de gens, tout ira bien.
S'ils avaient réussi à me convaincre, là, c'est plutôt le contraire qui se produit. Une fille superficielle et insupportable, c'est l'horreur, mais une fille froide qui risquerait de sortir les crocs à chaque plaisanterie, c'est encore pire. Je veux bien faire des efforts, mais je compte sur la réciprocité du geste.
Nate et Clay me mettent définitivement dans une situation délicate. D'un côté, j'ai envie de signer tout de suite et être rassuré jusqu'à la fin de l'année. Mais d'un autre, j'appréhende énormément cette colocation. Je veux bien me coltiner des connards à longueur de journée sur le campus, mais quand je suis chez moi, c'est la paix que je recherche.
Est-ce que cette Kaylee fera en sorte que ça marche ? J'ai un léger gros doute.
Mais ai-je vraiment le choix au fond ? C'est elle ou abandonner le confort et le calme de mon appart pour rejoindre le bordel qu'est la coloc de mes coéquipiers.
Et cette option est encore moins alléchante que la première.
Putain, pourquoi j'ai bêtement cru que mon plan A pouvait fonctionner. Lorsque Nate est parti, j'aurais dû chercher un coloc tout de suite. Les demandes auraient été bien plus nombreuses avant la rentrée.
— Bon d'accord, je veux bien la rencontrer et en discuter avec elle, finis-je par lâcher en soupirant.
Un sourire illumine à nouveau le visage de mes amis, et je tente de réprimer le mien pour insister sur mon mécontentement. Même si c'est plutôt difficile de faire la gueule à ces deux imbéciles.
— Tu fais le bon choix, Hayden, m'assure Clay.
— J'espère bien. Vous pensez qu'elle peut passer ce soir avant l'entraînement ?
Clay tourne la tête vers son copain pour avoir la réponse et ce dernier hoche la tête.
— Je pense que c'est possible. Je l'appellerai tout à l'heure et je te confirme ça par texto, répond Nolan.
Je hoche la tête pour donner mon approbation et ne rajoute plus rien. Je ne sais pas pourquoi, mais je la sens mal cette histoire.
***
J'avais raison de ne pas être confiant. En plus de ne pas être chaud pour partager mon environnement avec une nana, j'apprends maintenant qu'il s'agit de la nouvelle-folle du cours de psycho. Quand je pensais que ça ne pouvait pas être pire...
Son corps s'est raidi à la minute où elle m'a aperçu. On dirait qu'elle n'a pas été prévenue non plus. Ses yeux verts me fusillent du regard, ses mains tremblent de colère. Si la situation ne m'énervait pas aussi, j'en rirais presque, mais je réprime tout ça en lui adressant mon meilleur regard insolent. Si les gars pensent que cette folle peut m'impressionner, ils se fourrent le doigt dans l'œil.
— C'est une blague ! s'exclamons-nous en même temps.
Elle croise ses bras et fronce un peu plus les sourcils.
— Ne répète pas ce que je dis, connard, crache-t-elle.
— C'est toi qui as parlé en même temps, la nouvelle.
Derrière elle, ses gardes du corps se lancent des regards perdus. C'est sûr que personne ne s'attendait à ce qu'on se connaisse déjà. Moi non plus, d'ailleurs. Si j'avais su que la merveilleuse Kaylee de Nolan, n'était autre que cette salope qui n'a pas voulu me rendre ma place en psycho et qui m'a parlé comme si j'étais de la simple merde, je n'aurais jamais accepté. Une fille, c'était déjà compliqué, mais celle-là, c'est impossible. On ne pourra jamais partager le moindre centimètre sans se cracher à la figure. Cette fois, je préfère définitivement dire adieu à mon appart.
— On a raté un épisode ? résonne soudainement la voix de mon meilleur ami.
J'arque un sourcil alors que la rouquine se tourne pour lui adresser le même regard que j'ai eu l'honneur de recevoir.
— Pourquoi vous ne m'avez pas dit que c'était cette espèce de con prétentieux avec l'égo le plus large qu'il m'ait été donné de rencontrer, que je devais rencontrer ce soir ? Et ne faites pas comme si je ne vous avais jamais exprimé tout le mépris que j'ai pour lui, gronde-t-elle en pointant son index sur les deux accusés.
Les deux déglutissent en même temps et j'avoue que la scène est à mourir de rire. Mes amis sont deux grands gaillards plutôt costauds, mais ils arrivent à être terrifiés par ce bout de femme qui ne doit pas peser plus lourd que mon casque de hockey.
— On savait que tu le méprisais, mais pas que tu le connaissais réellement, répond Clay d'une petite voix.
— Et d'ailleurs, quand est-ce que vous avez fait connaissance tous les deux. Hayden, tu me disais ne pas la connaître, poursuit Nolan.
Je secoue la tête en alternant mon regard entre la rousse furax et son pote.
— Je ne savais pas que c'était elle, je ne connaissais pas son prénom.
Kaylee lâche un rire nerveux avant de reporter son regard sur moi.
— Évidemment que tu ne le connaissais pas, tu es bien trop égocentrique pour ça, Jones.
— Désolé, poupée, mais je ne peux pas connaître toutes les filles de ce campus. Surtout celles immunisées à mon charme légendaire, répliqué-je.
Je sais que cette dernière réplique va la faire craquer, j'ai compris qu'elle n'aimait pas les petits cons qui ne se préoccupent que de leur nombril. Alors je vais continuer pour la faire enrager.
— Vous voyez, c'est ça que je déteste chez ce type, dit-elle à l'intention de nos amis. Ne pas me connaître c'est une chose, mais agir comme si je n'étais qu'un moustique sur son passage, ça me met hors de moi. Hors de question que je passe une seconde de plus dans cet endroit.
Si elle croit que c'est ce que je souhaite, elle a encore tout faux.
— Kaylee... souffle Nolan.
— Non, qu'elle parte. Moi non plus je ne veux pas partager cet appart avec une folle pareille. Je n'étais déjà pas ravie d'être en coloc avec une fille, maintenant, c'est clair, ça n'arrivera pas.
— Hayden... imite son mec.
— Pas de Kaylee, ni de Hayden, on ne s'entendra jamais. Je préfère encore me coltiner votre canapé toute l'année et si ça vous dérange, je trouverai autre chose. Mais je ne vivrai pas avec lui, conclut-elle avant de sortir brusquement de l'appartement.
Nolan s'empresse de lui courir après alors que Clay reste ici. Je vais avoir le droit à sa fameuse leçon de morale, et clairement, je m'en passerais bien.
Alors avant qu'il n'ouvre la bouche, je le plante et rejoins ma cuisine. Si je veux avoir cette conversation, il va me falloir quelque chose de fort.
— Le coach va te tuer s'il le sent, me réprimande mon ami alors que je décapsule une bière.
Je hausse les épaules et porte le goulot à ma bouche. Je n'ai pas le droit de boire, sûrement pas une heure avant le début de l'entraînement, mais à ce moment-là, je m'en cogne. Entre mes problèmes d'appart que je pensais réglés et voir cette petite peste chez moi, c'est trop. Kaylee était ma dernière chance, j'ai eu un brin d'espoir, mais dès que je l'ai reconnue, j'ai su que c'était foutu.
— Je suis foutu mec, et si vous m'aviez précisé qui elle était, je n'aurais pas osé espérer.
Clay pousse un nouveau soupir avant de m'arracher la bouteille et d'en boire, à son tour, une gorgée.
— Comment j'étais censé savoir que c'était elle ?
Il n'a pas tort. Je n'ai pas cherché à savoir qui était la folle de mon cours, ni à demander une photo de cette fameuse Kaylee. Le monde est sacrément petit, quand même. Quelles étaient les chances pour que tout soit lié ?
— Écoute Hayden, Kaylee et toi êtes tous les deux importants pour moi. Mais je me sens surtout coupable vis-à-vis d'elle, m'avoue-t-il.
Je fronce les sourcils, ne comprenant pas où il veut en venir. Alors, il s'assied avant de poursuivre.
— Kaylee vivait avec Nolan depuis deux ans. Elle a d'abord été méfiante avec moi, c'est sa nature et je l'ai rapidement compris. Elle était comme ça avec Nolan aussi, mais rapidement, ils sont devenus inséparables. Elle m'a accepté dans leur univers et j'ai un peu tout cassé en proposant à Nolan de vivre avec moi. Je ne connais pas toute sa vie, mais je sais qu'elle travaille dur pour gérer ses cours et son job qui l'aide à payer ses factures. Elle ne peut pas se permettre de vivre seule, ce n'est pas dans ses moyens, surtout pas dans une ville aussi chère que Boston. Je me sens coupable, car sans moi, elle vivrait encore avec Nolan et ne galérerait pas aujourd'hui.
Clay a le don de me faire culpabiliser en un temps record. Lui et moi, on est pas mal différent, mais je ne serais réellement pas le même sans lui. Il est ce calme dont mon tempérament de feu a besoin. Il est super, voire parfois trop gentil, trop attentionné, trop soucieux. Il ne supporte pas que son entourage se porte mal, jusqu'à se blâmer pour ce qui ne le concerne parfois pas.
Je sais qu'il n'avait aucune mauvaise intention en me présentant Kaylee. Je pense qu'une partie de lui savait que ça ne collerait pas, mais il voulait quand même tenter, pour se dire qu'il aurait au moins essayé.
Je ne sais pas ce qui se passe dans la tête de cette fille, ni ce qu'elle a vécu pour être aussi renfermée. Mais si Clay tient à elle, c'est qu'elle ne doit pas être si terrible. Il est possible qu'avec un peu de temps, on arrive à faire marcher cette coloc. Mais bon, même si je le voulais, pas sûr que ce soit son cas. En plus d'être facilement irritable, elle a également l'air sacrément têtue. On a peut-être quelques points en commun, après tout. Mais pas sûr que ce soit les meilleurs pour vivre ensemble.
— J'ai simplement besoin que tu essayes. T'es mon meilleur pote, je sais de quoi tu as l'air en apparence et qui tu es réellement. Je sais qu'elle t'apprécierait vachement plus si tu le lui montrais, termine-t-il en replongeant son regard sur le mien.
Comment suis-je censé dire non à ça ? J'ai l'impression que c'est lui qui est à la rue et qu'il ne passerait pas la nuit si je refusais.
— Même si je te disais oui, Clay, ça ne dépend pas que de moi. Tu me connais, même si elle m'insupporte, je suis capable de me contenir, mais le peut-elle ? Je ne connais pas le personnage aussi bien que Nolan et toi, mais ce que j'ai vu me laisse assez perplexe.
Il hoche la tête pour me donner raison.
— Kaylee est compliquée, très compliquée. Elle ne se confie pas beaucoup, que ce soit à Nolan ou moi. Mais si on creuse un peu, on peut y trouver un tas de bonté. Il faut juste être persévérant.
— Qu'est-ce que je suis censé faire, concrètement ? Prendre des pincettes, ne jamais lui parler, faire comme si on vivait dans un hôtel avec chacun sa chambre et sa vie. Super principe de la colocation, soupiré-je.
Il avale une nouvelle gorgée de sa boisson, se lève pour venir plus près de moi, avant de secouer la tête.
— J'aimerais que tu deviennes son ami. Pas de blagues salaces, pas de prétention, pas de double jeu. Montre-lui qui est le Hayden Jones que nous aimons et respectons et tout ira bien. Je vais aider Nolan à la convaincre et je te laisse carte blanche pour ne pas la faire fuir au bout d'un jour. Tu penses que c'est possible ?
Je déteste quand il prend son air de papa protecteur qui attend que ses enfants se comportent convenablement avec les invités.
Mais Clay ne me demande jamais de faveur, alors je peux essayer de mettre mon ego de côté et accéder à sa requête.
Gérer une petite rouquine aux yeux verts perçants ne doit pas être bien difficile. Pas vrai ?
***
Boum boum boum
Des coups insistants me sortent de mon paisible sommeil, jusqu'à m'en faire sursauter. Bordel qui peut bien venir faire tout ce boucan un samedi matin ?
Mon réveil indique huit heures moins dix. Je pousse un grognement en cachant ma tête sous mon oreiller. Peut-être que si je l'ignore, la personne s'en ira et je pourrais me rendormir, non ?
Mais j'ai à peine le temps d'essayer que la sonnerie rejoint ce concert insupportable.
— Putain, mais qui peut bien être casse-couille à ce point ? grommelé-je en sortant à pas d'ours de mon lit.
Je frotte mes yeux, passe ma main dans mes cheveux, mais ne fait aucun effort vestimentaire. Quelqu'un veut me parler à huit heures du matin, qu'il assume mon simple boxer.
La sonnerie continue de retentir jusqu'à ce que j'ouvre enfin cette foutue porte.
— Ce n'est pas trop t...
Je suis accueilli par ma tornade rousse préférée. Bah putain, je ne pensais pas la revoir de sitôt. Je ne pensais pas la revoir tout court, en fait. Ça va faire deux jours qu'elle a quitté mon appart telle une furie, j'imaginais qu'elle avait fait son choix.
Nous nous observons un instant. Moi, essayant de m'habituer à la lumière, elle, complètement pétrifiée face à mon corps de rêve. Ça, je peux comprendre, il fait le même effet à toutes les filles.
— Je sais, impressionnant hein ? dis-je en souriant fièrement.
Je crois que j'ai enfin réussi à la faire réagir, car son regard quitte immédiatement mon torse pour se reporter sur mon visage. Ses yeux redeviennent sombres, elle déglutit légèrement avant de croiser ses bras sur sa poitrine.
— Tu me donnes déjà envie de repartir, siffle-t-elle en guise de bonjour.
Je ne peux réprimer un sourire, puis adopte la même posture qu'elle.
Arrête ton humour, résonne la voix de Clay dans ma tête.
Mais encore une fois, je décide de l'ignorer. C'est beaucoup trop amusant de faire chier cette fille.
— Alors, crazy Kaylee, que me vaut l'honneur de ta visite ?
J'arrive à l'entendre jurer dans sa barbe alors que mon sourire s'élargit. Oh oui, vraiment jouissif.
— Sois gentille, sois gentille, marmonne-t-elle comme si elle révisait un texte.
Je parie que Nolan lui a fait la même morale que son mec avec moi. Je fais mine de taper du pied pour lui faire croire que je suis impatient. Elle me jette un nouveau regard noir, souffle un bon coup avant de reprendre plus calmement :
— Je peux entrer ou on va discuter encore longtemps sur le palier ?
— Ça dépend, tu vas me crier dessus et détruire tout sur ton passage ou on va se comporter comme des adultes civilisés ?
Son regard perçant me mitraille de nouveau et si je ne m'arrête pas là, je n'atteindrai jamais l'âge légal pour boire.
Je choisis donc de m'écarter du passage pour la laisser entrer.
— Un café, un jus d'orange, un thé ? demandé-je sur mon éternel ton joueur.
— Non, je ne reste pas. Je viens simplement te dire que j'accepte de vivre avec toi. Pour un semestre, je demanderai une chambre sur le campus à l'instant où elles se libèrent.
La dernière information me surprend quelque peu. Après avoir goûté à la vie en appartement, retourner sur le campus peut rapidement être étrange. Mais ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre. Moins elle sera là, mieux je me porterai.
— Pour le loyer, je ne peux pas mettre plus que mille six cents dollars, poursuit-elle.
— Je ne t'en demande que mille deux.
— Parfait. On a chacun notre intimité, on n'a aucun compte à se rendre, j'aime être seule, ne crois pas qu'on va se faire les ongles et se raconter nos journées. Tu restes dans ton coin, moi dans le mien.
Bonjour l'ambiance.
— Quoi d'autre ? demandé-je avec une fausse pointe d'agacement.
— Si tu organises une soirée, tu me préviens. Idem quand tu invites tes plans cul. Aucune envie de me retrouver face à une meuf à poil dans ma cuisine ou dans la salle de bain.
— Quoi, un plan à trois, ça ne te tente pas, plaisanté-je.
Elle grogne, mais ne rebondit pas sur la question. Dommage.
Physiquement, Kaylee est rousse aux yeux verts avec un visage recouvert de taches de rousseurs. Elle est plutôt maigre, cache son corps derrière des jeans trop grands pour elle et des pulls larges. Mais même avec ça, j'arrive à distinguer un cul assez impressionnant et une poitrine loin de me laisser indifférent. Oui cette fille est carrément belle avec un corps plutôt attirant.
Celle-là tu n'auras pas le droit d'y toucher, me souffle à nouveau la voix de mon meilleur pote.
Tu parles, comme s'il pouvait se passer un truc avec cette furie.
— Tu m'écoutes, Jones ?
Je reviens à moi lorsque la main de Kaylee se secoue devant mes yeux.
— Je rêve, t'étais en train de me mater ? s'écrie-t-elle.
— Quoi ? Mais non...
— Tu parles, t'étais totalement en train de le faire. Point numéro quatre, pas d'exhibitionnisme, ce genre de tenue, tu oublies, me dit-elle en me reluquant de la tête aux pieds.
Avec tout ça, j'avais oublié que je ne portais que mes sous-vêtements. Un nouveau sourire se dessine sur mon visage face à son air outré.
— Oh ce n'est rien qu'un peu de peau, bébé, pas de quoi en faire une montagne. Et pour ta gouverne, c'est toi qui te pointes à huit heures du matin et qui me réveille, alors ne t'attends pas à ce que je fasse un effort.
— Oui... Eh bien, on s'en moque, pas de ça quand je suis là. Quand j'ai la salle de bain, tu n'entres pas. Et tu toques à la porte de ma chambre si tu veux me parler. Encore mieux, évite de me parler.
J'opine du chef, attendant la prochaine règle.
— Pour la cuisine, ce n'est pas parce que je suis une femme que je dois tout faire. Les tâches ménagères on se les partage, compris ?
— Tu me prends pour un macho ou quoi ? Évidemment qu'on va se les partager.
Je veux bien être un connard prétentieux en apparence, mais je ne suis pas un petit con assisté. Tout ce que j'ai ou fait, je travaille dur pour l'avoir. Toujours.
— Je préfère que tout soit clair, rétorque-t-elle, avec une pointe de remords dans la voix.
— Ok, autre chose ou tu penses qu'on peut signer le règlement intérieur ?
— J'essaye juste d'être clair pour que tout se passe au mieux.
— Tout se passera très bien. Ce n'est pas la première fois qu'on vit en coloc, je pense qu'on peut survivre, lui fais-je remarquer.
Elle me toise un instant et croise de nouveau les bras en tapant légèrement du pied.
— Dernière chose, toi et moi on n'est pas amis et on ne le sera jamais. Je ne suis pas non plus le genre de filles qui va baver devant ton corps musclé. Tu ne m'attireras pas dans ton lit, alors tu peux me remballer tes surnoms débiles, tes sourires de charmeur. Ça ne marche pas avec moi.
Eh ben, après on dit que c'est moi le prétentieux.
Je m'approche un peu plus, la faisant reculer d'un pas. J'avance à nouveau, elle recule et nous répétons ce schéma jusqu'à ce qu'elle se retrouve coincée contre le mur.
Nos visages ne sont plus très loin, sa respiration s'accélère, son corps frémit. Ravi qu'elle se contredise toute seule.
Un sourire étire mes lèvres, je replace une mèche de ses cheveux derrière son oreille, la faisant trembler davantage. J'approche enfin la bouche de son oreille avant de murmurer :
— T'en fais pas, bébé. Tu ne me fais aucun effet.
J'éloigne de nouveau mon visage pour faire face à son regard meurtrier. Je lâche un petit rire puis termine cet échange avec une dernière petite pique.
— Bienvenue chez toi, Kaylee.
📚🏒🎨
Bonne nouvelle, Hayden est encore en vie 😂 pour le moment !
Bon on a bien pu voir que leurs échanges ne sont toujours pas pleins de mots d'amour 🤣 mais ça viendra, faut garder espoir.
Bon la coloc commence officiellement! Hâte de voir ce que ça va donner ?
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