Chapitre 20

KAYLEE

3 ans plus tôt

— Je ne suis toujours pas très sûr pour cette soirée, ma puce. Vous êtes certains de ne pas vouloir rester tranquillement à la maison ? me demande mon père, lorsque je les rejoins dans le jardin extérieur.

— Papa, on en a déjà parlé. C'est notre dernier feu de camp pour fêter la fin de nos années lycée. C'est important que j'y aille. Et puis, Marco sera là.

Il hoche la tête, toujours aussi sceptique. Nous sommes actuellement fin mai, ce qui signifie que les seniors du lycée Roosevelt ont enfin reçu leur diplôme, dont moi. J'ai l'impression que l'année est à la fois passée doucement et hyper vite. Mais c'est honnêtement la meilleure que j'ai pu avoir, sans aucun doute. Et tout ça, je le dois majoritairement à l'homme qui partage ma vie depuis maintenant sept mois.

Marco est le petit ami idéal et il n'a cessé de me le prouver durant ces derniers mois. Je n'ai pas eu le moindre doute lorsque je lui ai donné ma virginité. Il a tellement pris soin de moi, ça ne m'était encore jamais arrivée.

Après ce cap important, j'ai jugé nécessaire d'en parler avec mes parents.

Je n'étais pas à l'aise avec le fait de garder ça secret, sachant que la famille Parker ne se cache rien.

Ce qui m'a cependant surprise, c'est le fait que ma mère s'en doutait déjà. Apparemment, le fait qu'on traîne toujours ensemble dans ma salle d'art, ne passe pas inaperçu. Sachant que très souvent, je ne laisse personne y entrer.

Et puis, elle a bien vu les regards qu'on se lançait durant les dîners, et eux non plus n'avaient rien d'innocents.

Mon père, quant à lui, n'avait rien remarqué, ce qui nous a beaucoup fait rire, maman et moi. Il était hyper surpris et son côté papa protecteur a immédiatement fait surface. Invitant Marco un après-midi afin d'avoir une longue conversation avec lui.

Il l'a mis en garde et l'a gentiment menacé de lui ôter la vie s'il venait à m'arriver quoi que ce soit par sa faute.

Mais étrangement, il n'a pas mal pris la nouvelle. Je pense que le fait qu'il connaisse bien Marco y a beaucoup joué. Ils ont tous les deux appris à lui faire confiance et à le traiter comme un fils. Ils l'ont pris sous leur aile depuis leur rencontre et ils savaient pertinemment qu'ils pouvaient avoir une confiance aveugle en lui.

Même si maintenant qu'il est au courant, nous n'avons plus le droit de nous enfermer dans mon repère, ni dans ma chambre, quand mon père est ici. On doit trouver de meilleures tactiques pour se peloter. Ce qui signifie, le faire entrer en douce en plein milieu de la nuit.

Depuis le jour où Marco m'a entièrement découverte, en bref, depuis qu'on a fait l'amour pour la première fois, on ne s'est jamais arrêté. Il m'a fait découvrir les nombreux aspects du sexe que je ne connaissais pas encore. Et j'avoue que c'est très agréable. J'y ai pris goût et je suis maintenant la première à en réclamer plus.

— Tu vas lui dire ce soir pour Boston ? me questionne ma mère, d'une voix douce.

Je grimace à cette mention puis hoche la tête.

Évidemment, tout ne pouvait pas rester idyllique. Il y a quelques jours, j'ai reçu toutes mes admissions et j'ai dû faire un choix. J'ai candidaté pour plusieurs universités telles que Yale, Princeton, Harvard, Boston University, et j'ai aussi mis celle de Seattle. Celle où Marco se trouve.

On en avait discuté et il m'a confié me vouloir à ses côtés l'année prochaine. Il a peur que la distance ne nous fasse plus de mal qu'autre chose, et j'avoue être également effrayée. Cependant, Boston a toujours été mon rêve. J'affectionne cette ville depuis que je suis toute petite et lorsque j'ai participé aux visites, j'ai eu un coup de cœur pour la Boston University.

Leur programme de Marketing est excellent, alors y faire mes études m'a paru comme une évidence.

Sauf que je n'en ai pas encore parlé avec Marco et j'ai peur de sa réaction. Je ne sais pas s'il va m'en vouloir. S'il va tout de même vouloir essayer cette relation à distance. De mon côté, je suis persuadée que ça peut marcher. Je sais que je ne pourrais jamais aimer quelqu'un d'autre que lui, il peut avoir une confiance aveugle en moi. Mais je ne sais pas si de son côté ce sera pareil. Je sais qu'il m'aime, mais parfois, j'ai l'impression que mes sentiments sont les plus forts. Ou alors que je le montre davantage. Honnêtement, je ne me vois pas arrêter cette relation. Il me fait un bien fou et je suis pratiquement sûre que lorsque les sentiments sont aussi forts, on peut tout surmonter.

Mais le pensera-t-il également ?

— Je n'ai pas trop le choix, mais...

— Tu as peur ? devine-t-elle.

J'opine du chef en baissant les yeux. Elle attrape alors ma main et m'attire contre elle. Ses étreintes chaleureuses me font toujours un bien fou. Elle sait que c'est la solution pour m'apaiser et elle n'est jamais avare en câlins.

J'ai parfois l'impression qu'être loin de Marco sera la chose la plus difficile à vivre. Mais lorsque je suis près de ma mère, je sais de source sûre que jamais il ne me manquera plus que ma famille. On a toujours été très unies et ce départ va tout chambouler. Mais savoir qu'ils me soutiennent et qu'ils seront toujours fiers de moi, me conforte dans cette idée de départ.

— Tout va bien se passer, mia cara. S'il t'aime réellement, il comprendra et te soutiendra. Quand l'amour est vraiment fort, rien ne peut le briser, pas même la distance. Sinon, ton père et moi aurions déjà divorcé depuis longtemps.

Ils lâchent tous les deux un petit rire, m'entraînant avec eux, par la même occasion. Je ne sais pas si l'amour que Marco et moi partageons arrivera un jour au niveau de celui de mes parents. Pour moi, il a toujours été impossible de voir deux personnes s'aimer plus fort que ces deux-là. Ils sont la réelle définition d'âmes sœurs.

Mais j'aime à croire qu'un jour, moi aussi, j'aurais quelque chose qui leur ressemble. Et je ne demande qu'à l'avoir avec Marco.

La sonnerie retentit, signe que mon copain est arrivé. Je tente de masquer les larmes naissantes sur mes yeux, mais c'est plutôt compliqué. Mon père le remarque et m'arrête d'un geste de main.

— Je m'en charge. Retrouve calmement ton sourire et rejoins-nous sur le perron lorsque tu te sens prête, murmure-t-il avant de déposer un doux baiser sur ma tempe.

Je le remercie d'un sourire avant qu'il ne disparaisse.

Ma mère se redresse et disparaît à son tour pour revenir quelques secondes plus tard avec une petite trousse de maquillage.

Elle sort un petit coton démaquillant et commence à m'en appliquer sur mes yeux.

— Tout va bien se passer, Kaylee. S'il t'aime, il voudra ton bonheur en priorité. Les âmes sœurs trouvent toujours leur chemin l'un vers l'autre. Toujours.

— Et si on ne l'était pas. Des âmes sœurs.

Elle me regarde toujours avec cette tendresse infinie, tout en prenant soin de me repoudrer correctement.

— Alors ce ne sera pas la fin du monde. Tu es si jeune, tu as tellement de choses à voir et à apprendre. L'amour ça viendra quand tu t'y attendras le moins. Ça ne doit jamais être ta plus grande priorité, simplement un plus qui t'apportera le reste du bonheur que tu auras déjà en t'aimant toi-même.

Elle caresse ma joue délicatement en esquissant un large sourire.

— Tu sais ce que j'aime le plus chez toi, mia cara ? Ta joie de vivre et ton si beau sourire. Quoi qu'il arrive, tu vois toujours le côté positif des choses et tu continues de croire fort en ce monde. Promets-moi de ne jamais perdre cette qualité. Ne laisse personne t'arracher ce précieux cadeau. Ni ta famille, ni tes amis et surtout pas un homme. J'ai déjà fait cette erreur, il y a longtemps et je n'ai jamais eu aussi tort de ma vie. Heureusement que ton père me l'a rappelé, afin que je sois assez forte pour te le transmettre. Tu vas grandir, tu vas faire des erreurs, mais ne cesse jamais de croire en toi et tes qualités. Continue de sourire, de rire et d'être la personne la plus joviale que je connaisse.

Je m'imprègne de chacun de ses mots, ravalant de nouvelles larmes, menaçant de ruiner le travail de ma mère.

J'aime ma mère plus que je n'aime la vie, elle trouve toujours les mots juste pour me ramener sur le droit chemin. Elle m'encourage, me motive. C'est la personne la plus gentille et la plus soucieuse que je connaisse. Je suis vraiment admirative de la femme qu'elle est. Elle est tout ce que je veux devenir dans la vie. Et je suis tellement reconnaissante d'être sa fille.

Alors à la place de m'effondrer, je me montre digne de ses mots et la serre fort dans mes bras.

Ti amo mamma. (Je t'aime, maman)

Anch'io ti amo, mia cara. (Je t'aime aussi, ma chérie)

Nous nous éloignons après quelques secondes. Ma mère en profite pour me donner un certain nombre de directives, avant de me souhaiter une bonne soirée.

Je lui adresse un dernier sourire avant de rejoindre les hommes de ma vie, devant la maison.

Lorsque j'ouvre la porte, mon père et mon copain sont en pleine discussion, mais s'arrêtent au moment où ils m'aperçoivent. Les lèvres de mon copain s'étirent en un sourire ravi, que je lui rends. Il s'est vêtu d'un simple jean accompagné d'un polo rose. Quant à moi, j'ai opté pour un short noir et un débardeur blanc. C'est une soirée au bord de la plage, il était inutile d'en faire des tonnes.

— Voilà la plus belle, s'exclame Marco en m'attirant près de lui.

Il dépose un chaste baiser sur ma joue, étant donné que mon père est ici.

Ce dernier m'observe longuement, toujours aussi sceptique. Il n'aime pas trop me savoir dehors le soir. Il m'autorise à me rendre aux quelques soirées que les lycéens organisent, mais est plutôt à cheval sur le couvre-feu. Il ne me contrôle pas, ne m'interdit rien mais il me fait part de ses doutes. Alors c'est à moi de me montrer responsable et de prendre les bonnes décisions.

Mais ce soir, je veux profiter de ma dernière soirée en tant que lycéenne. M'amuser avant de rejoindre les bancs de l'université et de commencer ma nouvelle vie.

— Tout va bien se passer, papa. Je ne rentrerai pas tard, tenté-je de le rassurer.

Il me sonde un instant avant de hocher la tête. La confiance est la clé chez les Parkers. Et mon père respecte plutôt bien cette règle.

— Je te fais confiance, trésor. Fais attention à toi. Marco, je te confie ma princesse, tu as intérêts de me la ramener entière, le préviens mon père d'un ton autoritaire.

Mon copain acquiesce sans broncher.

— Allez, amusez-vous bien. Appelez-moi s'il y a un souci. On se voit quand tu rentres, je t'aime.

Il m'attire contre lui, m'offrant une longue étreinte avant de déposer délicatement ses lèvres sur ma joue.

— Je t'aime, lui dis-je avant de lui adresser un signe de main et de rejoindre Marco dans la voiture.

Il met le contact et démarre sous le regard insistant de mon père. Wyatt Parker est un amour, mais lorsqu'il s'agit de ses deux princesses, il pourrait tuer.

***

— Ça te dit qu'on aille marcher, il y a quelque chose dont j'aimerais qu'on parle, dis-je à Marco.

Il accepte et attrape ma main pour nous guider hors de la foule.

Voilà deux heures que nous sommes ici et je n'ai toujours pas trouvé le courage de lui parler de Boston. Je ne sais vraiment pas ce que cette conversation va donner. S'il va vouloir tout arrêter ou non. Alors je me suis laissée du temps pour profiter pleinement de sa présence.

Mais mon couvre-feu approche à grands pas et il faut que je me lance.

Au fond de moi, j'espère sincèrement qu'il sera d'accord avec mon choix et qu'il voudra tenter une relation à distance. Cela voudra dire qu'il croit assez en nous pour le faire. Et j'ai besoin de savoir qu'on est sur la même longueur d'onde.

— Alors, qu'est-ce qui trotte dans cette jolie petite tête ? demande-t-il en esquissant un grand sourire.

— J'ai reçu ma dernière lettre d'admission cette semaine. Comme tu le sais, j'ai postulé un peu partout et une grande majorité des universités m'ont acceptée.

— C'est super ça. Mais vu ton dossier en béton, ça ne m'étonne même pas.

J'opine en souriant. Pour l'instant, ça se passe bien.

— Ça veut dire que j'ai le choix, lui rappelé-je.

J'essaye de l'orienter du mieux possible afin qu'il comprenne où je veux en venir. Mais je n'ai pas l'impression que ça marche, car il est toujours aussi ravi. Il doit sûrement penser que mon choix s'orientera vers Seattle.

— Je sais, amore mio. Ça veut dire que tu peux choisir Seattle.

Qu'est-ce que j'avais dit ? Je perds mon sourire et affiche une grimace plutôt indicative. Il semble enfin comprendre que quelque chose ne va pas, car il perd le sien au même moment. Ses sourcils se froncent, montrant sa totale incompréhension face à la situation.

— Tu sais que je t'aime, Marco. J'aime notre vie ici, j'aime t'avoir près de moi chaque jour. J'aime aussi cette ville de tout mon cœur, j'y ai toujours vécu et je m'y sentirai toujours chez moi.

— Pourquoi je sens qu'il y aura un « mais » à cette conversation ?

J'affiche une moue coupable en hochant la tête.

— Mais j'ai eu un coup de cœur pour la Boston University et c'est là-bas que je souhaite faire mes études, avoué-je alors que sa tête se décompose.

Il lâche ma main, comme si mes mots venaient de le brûler, puis recule de quelques pas.

Voilà, le moment que je redoutais est enfin arrivé. Il est en colère. Il est vrai qu'on avait parlé quelques fois de l'université de Seattle. Je lui avais assuré que je la mettrais dans mes choix. Mais je n'ai jamais certifié vouloir y aller. Je ne veux pas que mon choix se base sur ma famille, mes amis ou mon copain. Je veux étudier où je me sens le mieux, où je sais que je pourrais être heureuse et accomplir tous mes objectifs.

Et cette destination, c'est Boston. A 4000 kilomètres de Seattle. De mes parents. De Grace. De Marco.

— Tu te fous de moi, Kaylee. Boston ? C'est à l'autre bout du pays, putain !

J'ai déjà vu Marco s'énerver, mais ça ne m'était jamais adressé. Et j'avoue que c'est assez déstabilisant. Sa respiration est plus forte et ses yeux bien plus sombres.

— J'en suis consciente, mais je pensais que...

— Tu pensais que quoi ? Qu'on allait se taper quatre ans de putain de relation à distance ? Tu te rends compte à quel point ça va me rendre fou ?

— On s'appellera tous les jours et on se verra pendant les vacances, tenté-je pour dédramatiser la situation.

Mais ça ne marche absolument pas, car son regard se fait plus dur alors qu'un rire amer sort de sa bouche. Le rendant bien plus intimidant.

— On s'appellera, ce n'est pas d'une putain de correspondante que j'ai besoin, mais de ma copine. Merda, Kaylee, les relations à distances, c'est voué à l'échec.

Ses yeux sont emplis de fureur, de dégoût. L'homme doux et souriant que j'ai connu est loin derrière. Et le pire, c'est que je ne peux même pas lui en vouloir. Je n'ai pas été claire dès le début sur mes choix d'avenir, surtout parce que j'étais perdue moi-même.

Mais dois-je vraiment renoncer à quelque chose qui me rendrait heureuse pour conserver un autre bonheur ?

Impossible. Si je restais et que Marco m'empêchait de suivre ce que je désirais vraiment, je nourrirais une trop forte rancœur à son égard. Et ça, ça nous détruirait, plus que la distance.

Sauf qu'à l'heure actuelle, il n'est pas disposé à m'écouter et je sens que cette soirée ne se finira pas comme nous l'avions prévu.

— Mes parents ont réussi, lui rappelé-je, sans hausser la voix.

Il hausse un sourcil comme pour me dire « t'es sérieusement en train de ramener tes parents sur le tapis ? ». Mais c'est la vérité, mes parents ont tenu près d'un an loin de l'autre. Et c'était carrément un continent qui les séparait. Alors oui, avec de la volonté ça marche.

— C'est vrai que tes parents ont tenu des années loin de l'autre. Oh non, j'oubliais, au bout d'un an, ta mère n'en pouvait plus et a tout plaqué pour venir s'installer aux États-Unis. Prends un meilleur exemple la prochaine fois, beugle-t-il.

Cette fois ça suffit, qu'il soit en colère, c'est une chose. Mais qu'il me parle comme si j'étais une pauvre merde, ça non. Je ne suis peut-être pas très impressionnante, mais mon père m'a appris à me battre pour mes idéaux et à ne pas me laisser faire lorsque quelqu'un s'en prend verbalement ou physiquement à moi.

— Maintenant stop, Marco. Arrête de me hurler dessus, arrête de me traiter comme une pauvre cloche. Arrête. Je comprends que cette nouvelle te chamboule, mais ce n'est pas une raison pour me manquer de respect, hurlé-je à mon tour, bien décidée à lui tenir tête.

Il me sonde un instant, son regard me fusille tellement que je suis surprise de tenir encore debout. L'amour en continue que je lisais sur son visage a complètement disparu. C'est un Marco froid et fermé qui se trouve devant moi. Un homme que je ne reconnais pas.

— Non, tu ne comprends pas. Tu ne comprends rien. Je... Je ne peux même pas te regarder, je me casse, crache-t-il avant de tourner les talons.

Il commence à s'en aller, sans se retourner. Me laissant comme une moins que rien, seule sur cette plage, la bouche grande ouverte et les larmes dévalant mes joues.

— Tu ne peux pas partir, Marco. On doit discuter, je t'en prie. Ramène-moi et on parlera sur le chemin.

— Il n'y a rien à dire, Kaylee. Si je reste là, je risque de faire des choses que je regretterai probablement. Alors fou moi la paix.

Cette fois-ci, je ne réponds rien. Je le regarde disparaître totalement de mon champ de vision, impuissante sur toute cette situation.

Putain, ce n'était pas du tout ce que j'avais prévu. Et maintenant, j'ai bien peur de l'avoir perdu à jamais.

Après dix bonnes minutes à verser toutes les larmes accumulées, je dégaine mon téléphone pour composer le numéro d'une des seules personnes qui ne m'abandonnera jamais.

— Kaylee, un souci ? demande la voix de mon père, morte d'inquiétude.

— Papa... J'ai besoin de toi...

Je sais que je n'ai pas besoin d'en dire plus pour qu'il comprenne. Et sa réponse me le confirme.

— Bouge pas, ma princesse. J'arrive tout de suite.

***

Voilà plus de quarante minutes que je tourne en rond sur ce foutu parking. Mon père aurait dû arriver depuis vingt bonnes minutes. Ça ne lui ressemble pas de me faire faux bond, surtout sans prévenir.

Peut-être qu'il y a des bouchons ? résonne la voix dans ma tête

À presque minuit ? Non sûrement pas. Et puis, même s'il y avait un souci sur la route. Il m'aurait appelée la seconde d'après. Non, c'est forcément autre chose et ça me rend morte d'inquiétude.

J'ai tenté de l'appeler des centaines de fois et je suis tombée sur sa messagerie, à chacune d'entre elles. J'ai également essayé de joindre ma mère, aucune réponse.

Putain, mais que se passe-t-il enfin ? Où sont mes parents ? Pourquoi ai-je accepté d'aller à cette foutue soirée. Me voilà maintenant seule, fatiguée et morte de froid.

Super, Kaylee, tu réfléchiras deux fois avant de sortir la prochaine fois. Ou avant de choisir d'annoncer une terrible nouvelle à ton copain, qui est également ton chauffeur.

Putain de Marco. Énervé ou pas, il aurait pu avoir la décence de me ramener. Mon père va le tuer s'il l'attrape, ça j'en suis sûre.

Mais pour le tuer, il faudrait déjà qu'il arrive. Et le temps commence à se faire long.

Je tente une nouvelle fois de l'appeler, avec un infime espoir d'entendre sa voix à l'autre bout du fil. Mais non, toujours cette foutue messagerie.

Mio dio, quelle soirée de merde. Ma mère m'a toujours dit que l'honnêteté était la chose primordiale entres plusieurs personnes, que ça payait toujours.

Conneries.

L'honnêteté m'a mené ici, dans un parking presque désert à côté de la plage de Seattle. Seule, apeurée, frigorifiée et désespérée.

Au diable la franchise. La prochaine fois, j'attendrai d'être sur le point d'agir pour annoncer quelque chose.

Je m'assois sur un rocher, soufflant longuement avant de prendre ma tête en coupe.

Du calme, Kaylee. Ton père va arriver, ce n'est qu'un retard. Ne dramatise pas tout.

Bip, bip, bip

Mon téléphone sonne enfin, je ne prends même pas le temps de regarder de qu'il provient. Il ne peut s'agir que de mes parents.

— Papa, enfin ! Tu es où ?? m'exclamé-je en bondissant du rocher.

— Kaylee, murmure la voix de mon interlocuteur.

Ça, ce n'est pas mon père.

— Grand-mère ? Que se passe-t-il ? Pourquoi m'appelles-tu à cette heure ?

Ma grand-mère est très rarement réveillée à cette heure-ci. Alors la panique me gagne presque instantanément.

— Ma chérie, où es-tu ?

Sa voix est faible, comme si elle était malade ou qu'elle avait pleuré. Lui est-il arrivé quelque chose ? C'est pour ça que mon père ne répond pas ? Parce que ma grand-mère avait besoin d'aide ? Non ça n'a pas de sens, encore une fois, il m'aurait prévenue.

— Sur le parking près de Alki Beach. J'attends papa, il est censé venir me chercher. Même s'il semble avoir du retard.

Un lourd silence s'installe, augmentant mon inquiétude. Lindsay Parker est une pipelette, quand on s'appelle ou qu'on se voit, j'ai rarement l'occasion d'en placer une. Alors ce silence soudain ne me dit rien qui vaille.

— D'accord, ne bouge pas, je suis là dans dix minutes.

Je n'ai pas le temps de répliquer que la conversation se coupe.

Putain c'est quoi ce bordel ? Pourquoi ma grand-mère vient-elle me chercher ? Qu'est-il arrivé à mon père ?

Comme indiqué, la voiture de ma grand-mère se gare sur le parking dix minutes plus tard. Ses phares m'aveuglent. Je contourne donc l'engin pour arriver à hauteur de la portière conductrice. Ma grand-mère s'empresse de l'ouvrir afin de me prendre dans ses bras.

— Ma chérie, tu n'as rien. Dieu merci, s'écrie-t-elle en me serrant beaucoup trop fort.

Son corps tremble sous le mien.

Tu n'as rien.

Pourquoi m'a-t-elle dit ça ? Pensait-elle qu'attendre ici seule pouvait être dangereux ? Je ne comprends plus rien. J'en ai marre d'être dans le flou, j'ai besoin de réponses.

— Que se passe-t-il grand-mère ? Où est papa ? Lui est-il arrivé quelque chose ? Ou à maman ? Est-ce que Marco a appelé, demandé-je, complètement hystérique.

Lorsque nos prunelles se rencontrent, je remarque une immense tristesse dans celles de ma grand-mère. Ses yeux sont rouges, comme si elle avait pleuré ou fumé quelque chose d'illégal. Et connaissant le personnage, il n'y a que la première option qui fait sens.

— Kaylee, tu ferais mieux de t'asseoir.

Oh non, cette phrase n'est prononcée qu'à titre de mauvaises nouvelles. Non, non, pas de mauvaise nouvelle. Pas ce soir.

— Ton père m'a appelée il y a une heure pour que Grace dorme à la maison. Il m'a dit que tu avais besoin qu'il vienne te chercher, parce que ton copain t'avait probablement lâchée. Alors j'ai accepté, il a déposé ta sœur, et ta mère et lui ont repris la route jusqu'à toi, m'explique-t-elle.

— Mais... S'ils ont pris la route ? Pourquoi ne sont-ils pas là ? Je ne comprends absolument rien, grand-mère.

Elle attrape mon bras, m'invitant à m'asseoir sur le banc derrière moi. Je jette un coup d'œil à la voiture où Grace dort paisiblement. Quelque chose ne tourne définitivement pas rond et j'imagine déjà le pire.

— Il y a eu un accident, mon trésor, lâche-t-elle sans prendre de pincettes.

Mon cœur rate un battement à l'entente de ces quelques mots.

Accident ?

Est-ce que mes parents l'ont causé ? Ou alors sont-ils hospitalisés ?

Mais à en juger les larmes soudaines de ma grand-mère, je devine que c'est plus grave que ça.

— Grand-mère non, je t'en prie tout mais pas ça.

— Le choc a été trop lourd et les ambulanciers sont arrivés trop tard. Je suis désolée, ton père et ta mère nous ont quittés.

Cette dernière phrase suffit à m'achever. Je ne vois plus rien, n'entends plus rien. Mon corps tremble, mes larmes coulent automatiquement et il ne m'en faut pas plus pour m'écrouler définitivement.

Les ténèbres me capturent et m'aspirent, ne laissant aucun contrôle à mon corps. Plus rien n'a de sens parce que les mots que je redoutais le plus viennent d'être prononcés.

📚🏒🎨

Voilà la première partie de ce qui a brisé notre Kaylee !

Parce que ses parents étaient toute sa vie et qu'ils sont mort en venant à son secours.

On en saura plus dans les prochains chapitres pas d'inquiétudes !

Mais le mystère commence à se résoudre !

Des idées sur la suite de son passé ?

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