20 - Le médecin et la pluie

Nous entrons dans le J-4 avant la veille de Noël... j'ai remarqué que beaucoup de gens courent partout dans les magasins...
Agaroche au rapport en ce 20 décembre et mon dernier jour de calendrier !
Bonnes fêtes de fin d'année !

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Ranpo poussa un long gémissement, affalé de tout son long sur son bureau. Des friandises entamées parsemaient la table en sapin sombre, et, à sa droite, un tas de papillotes était laissé à l'abandon. En ce samedi du 20 décembre, les bureaux étaient vides, tout le monde était rentré chez soi pour se préparer pour les fêtes. La salle était étrangement silencieuse quand Kunikida ne criait pas sur Dazai, quand les frères et sœur Tanizaki ne flirtaient pas avec le socialement acceptable et quand Atsushi ne chuchotait pas avec Kyoka. Le bureau était vide et cela rendait Ranpo triste.

Bien sûr, l'Agence des Détectives Armés avait commencé avec seulement deux personnes, puis trois avec Yosano, pendant quelques mois, mais Ranpo s'était tellement habitué aux sons ambiants, lui-même étant un inventeur créatif de bruit, que le silence le rendait mal à l'aise. C'était partiellement sa faute aussi, de venir un samedi. Il savait que personne ne serait là, mais ça faisait quand même mal de le constater. Il poussa un autre long soupir et s'étira le dos, le faisant bailler. Il devait vraiment finir cette tâche au plus tôt, il commençait à s'endormir. Ses yeux se plissèrent sur le papier griffonné devant lui. Une moue boudeuse se forma sur ses lèvres. Il s'ennuyait.

Un bruit provenant du couloir le fit relever la tête. Ses quelques neurones encore réveillés se triturèrent pour trouver la source des pas. Il se pencha sans bruit vers le tiroir du bas de son bureau, commençant doucement à le tirer vers lui. A part lui, il était sûr qu'il n'y avait personne, même le bureau du directeur était vide. Une silhouette sombre arriva au pas de porte et le détective banda ses muscles.

Le bruit de la capeline de Yosano émit un « splash » visqueux quand elle la laissa tomber sur un dossier de chaise dans l'entrée. Elle secoua la tête, retirant les quelques malheureuses gouttes de pluie qui avaient réussi à passer la barrière du parapluie noir qu'elle tenait à la main. Ses yeux améthystes se concentrèrent sur la forme immobile de Ranpo et elle souleva un sourcil. Le détective se détendit et referma le tiroir d'un geste, mettant l'arme hors de vue.

« Yah Yosano ! Préviens quand tu arrives au lieu de te faufiler comme une voleuse ! Qu'est-ce que tu viens faire là ?

- Il pleut des cordes et c'est ainsi que tu m'accueilles ? Et pour te répondre, je suis venu remplir le stock de fournitures médicales avant les fêtes de fin d'année. Mais je dois dire, de nous deux, c'est moi la plus surprise à te voir ici ! Que fais-tu à l'agence un samedi ? Même le café est fermé.

- Il pleut ? Il se tourna vers la fenêtre derrière lui et se maudit doucement, ayant oublié son parapluie.

- Tu n'avais pas remarqué ? Elle s'approcha du bureau et se pencha dessus, lisant la feuille laissé à l'abandon à l'envers. C'est... une liste ?

- Ne lis pas ! Paniqua Ranpo en cachant la feuille de son corps. Je n'ai pas fini! »

Yosano se releva et fredonna, cherchant à comprendre ce que signifiait son comportement. Elle ne tarda pas à trouver si ses yeux brillants étaient une indication, elle le connaissait bien.

« C'est pour le directeur ? »

Ranpo, oubliant à dessein la feuille qu'il cachait, croisa les bras pour bouder, ses orbes émeraudes transperçant le médecin sadique qui en profita pour prendre la fameuse liste. Elle la parcourût du regard et une grimace maladroite traversa rapidement ses traits. Elle ne cacha pas la déception dans sa voix.

« Le chien de Baskerville ? Vraiment ? Tu es sûr que ce n'est pas TA liste que tu es en train de faire ?

- Ne me regarde pas comme ça ! Je n'ai aucune idée et il ne laisse rien filtrer !

- Tu peux faire mieux que ça... et ta capacité ? »

Le génie marmonna quelque chose dans son écharpe vert forêt, refusant de croiser le regard son amie. Elle se pencha plus près, lui demandant de répéter.

« C'est de la triche... il chuchota, se tendant par instinct.

- Ranpo !

- Quoi !

- Ce n'est pas le moment de faire la fine bouche alors que Noël est à deux pas !

- Je ne peux décemment pas utiliser mon incroyable pouvoir ! Ce serait manquer de respect au di... directeur ?! »

Yosano fit volte-face, faisant tournoyer sa jupe longue et fût, elle aussi, bouche bée en voyant les vêtements et les cheveux trempés de Fukuzawa. Elle se précipita dans le couloir, criant qu'elle allait chercher des serviettes. Ranpo se releva d'un bond, contourna son bureau en jetant la feuille dans la corbeille au passage avant d'aller aider le directeur de l'agence à retirer son manteau.

Le grand loup argenté faisait peine à voir : frissonnant sous ses vêtements, les lèvres bleues à cause du froid, il ressemblait à un grand chiot triste et mouillé. Pourtant, il gardait la tête haute et ne semblait pas très affecté.

« J'ai été surpris par la pluie. Il déclara dans sa voix grave et calme.

- Ce n'était pas annoncé par la météo. Expliqua Yosano qui était revenue et lui tendait une serviette. J'ai eu de la chance, il pleuvait déjà quand je suis sortie de chez moi.

- Ne vous en faites pas directeur ! Cela arrive même au meilleur! »

Ranpo récupéra une serviette des mains gantées de la médecin et la posa avec douceur sur la chevelure grise du plus vieux. Il commença à frictionner la tête avec vigueur. Yosano reparti à l'infirmerie, allant chercher des vêtements secs dans la salle de stockage. Elle avait une grande panoplie de vêtements génériques de toutes les tailles qu'elle gardait pour les urgences. Un silence confortable s'installa entre les deux hommes, se prélassant dans la présence de l'autre. Ranpo, bien conscient de l'ambiance de la pièce, rompît quand même le silence.

« Dites-moi directeur, vous êtes retourné voir les chats ?

- En effet, cela faisait un moment que je ne suis pas allé les voir.

- Ils vont bien ?

- Aussi bien que le temps leur permet. La vie en ville pour un chat sauvage n'est pas facile. »

Ranpo fredonna de compréhension et continua sa tâche. Ses neurones, bien réveillés, hurlaient de joie. Il avait trouvé le cadeau parfait.

Quand Yosano revint, il s'excusa avec joie, la laissant prendre sa place, enfila son manteau et sortit au plus vite du bureau devant le regard médusé des deux vétérans de l'agence. Entre temps, la pluie avait cessé.

Le regard métallique de Fukuzawa se posa sur le papier froissé dans la corbeille. Yosano le cacha habilement en se mettant devant ses yeux et en tendant la pile de vêtements frais. Le directeur n'eut besoin que d'un mot pour aller se changer dans son bureau. Quand il en ressortit, une pile de vêtements mouillés dans les bras, le papier avait disparu mais Yosano était toujours là.

Les deux adultes se regardèrent dans le blanc des yeux avant que le loup argenté ne rompe le silence.

« Dis-moi Yosano, j'aurais besoin de ton aide...

- Pour trouver le cadeau de Ranpo ? Le coupa la médecin d'une voix lasse.

- En effet. Mais si cela te pose problème, je me débrouillerai de mon côté. »

Les hommes, se dit Yosano avec pitié, sont vraiment des êtres lamentables.

Surtout Fukuzawa et Ranpo qui, malgré le fait qu'ils étaient ses meilleurs amis, et avaient la meilleure relation de mentor/protégé, n'étaient pas capable de se parler correctement. Si c'était elle, elle aurait déjà demandé quels cadeaux ils voulaient. Mais c'étaient deux canards socialement maladroits. Et elle les aimait pour ça. Même si cette situation revenait chaque année, ils étaient la meilleure chose qui lui soit arrivée et elle savait qu'ils étaient ce père et ce fils qu'ils n'avaient jamais connu.

C'est pourquoi elle lui répondit qu'elle l'aiderait en souriant. Comme chaque année.

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