Chapitre 5 - Une nouvelle force

Est-ce que Roc ne s'était pas trompé en écrivant la formule ? Est-ce que c'était bien Strog qui était connecté ? Tant de questions qui avaient hanté le jeune homme aux cheveux noirs pendant toute la nuit. Le réveil fut difficile, même après s'être débarbouillé le visage. Allant voir où en était le déchiffrement des fichiers récupérés la veille, le vagabond soupira de dépit, en voyant les maigres 20 % de fichier déchiffré. À ce rythme, il lui faudrait encore quelques jours, et il ne les avait peut-être pas. Mais son attention se ramena sur son propre corps, quand son ventre émit un puissant gargouillement. Il n'avait que peut manger la veille au soir, et il n'avait plus rien dans sa ration. Une escapade en ville s'imposait, semble-t-il. Il cacha l'ordinateur en plein travail avant de fermer sa chambre à double tour, ayant gardé son Glock dans sa poche. Il n'était plus serein du tout, même en ville. Il possédait des données de Frundtech, et certaines personnes semblaient en vouloir à Frundtech tout comme lui. Peut-être qu'une alliance serait possible ? Faudrait-il déjà savoir à qui nous avons affaire, et pour ça, une idée germa dans le crâne de Roc. Il monta à bord de sa jeep, roulant doucement jusqu'au commissariat local. Les distributions commenceraient dans quelques minutes, mais il avait comme ça le temps de se renseigner. Deux jeunes policiers s'affairaient à préparer les rations pour la distribution, sous la tutelle d'un militaire à peine plus vieux qu'eux, sûrement vers la quarantaine. L'ex-ingénieur s'avança vers celui-ci, le saluant de la main. « Bonjour ! Si vous venez pour les rations, ce n'est pas de suite et il vous faut faire la queue.

- Ce n'est pas pour ça en priorité, je voudrais vous demander quelque chose, lui répondit Roc, sur un ton égale.

- Quelque chose ? L'homme à la carrure athlétique et à l'uniforme militaire tacheté de boue observa son interlocuteur.

- Connaissez-vous des gens qui pourraient vouloir des soucis à Frundtech, dans la région ? La question fit mouche aux oreilles du Ranger, qui essayait de choisir ses mots avec précision.

- Certaines rumeurs parlent d'un groupement paramilitaire qui sème le chaos dans le désert, mais je ne sais rien de plus. Aucun Ranger n'est autorisé à quitter la ville à cause de ce qui se passe là-bas. La réponse était simple, mais Roc n'était pourtant pas convaincu.

- Je vois... merci des informations. » Résigné, le jeune homme partit rejoindre la file des civils venant chercher leur ration du jour. Il était arrivé à obtenir une place parmi les premiers, mais l'attroupement qui s'était créé se faisait oppressant derrière le vagabond. De plus, il sentait comme une présence qui le mettait mal à l'aise.

Finalement, il s'avança pour récupérer enfin sa ration, remerciant rapidement le jeune policier avant de repartir à son véhicule. Il monta en vitesse, posant les provisions à côté avant de démarrer en trombe pour rejoindre le motel. Il ne savait pas pourquoi, mais une impression d'être traqué le tenaillait, jusqu'à ce qu'il soit posé dans sa chambre, en train de manger un morceau d'une viande en conserve qui n'avait pas réellement de goût particulier, mais c'était déjà mieux que rien. Alors qu'il surveillait du coin de l'œil l'avancée du déchiffrement des dossiers, écoutant d'une oreille distraite les dernières informations sur la situation dans le pays, une pierre traversa la vitre de la petite salle de bain, pour arriver jusqu'au lit de Roc. Celui-ci dégaina immédiatement son arme de poing, visant vers la fenêtre brisé. « Qui est là ?! » Il ne voyait personne par la fenêtre, il se leva donc pour faire le tour de la chambre, cherchant l'auteur de l'acte. Mais malheureusement, il semblait déjà s'être volatilisé. Le vagabond avait senti une présence en attendant les rations, puis ça... C'était bizarre, très bizarre. Le jeune homme s'avança vers la pierre, où était accrochée une petite feuille, qu'il déplia pour lire ce qui était inscrit dessus. « On dirait que tu as quelque chose qui nous intéresse. Nous avons aussi des choses à offrir. Retrouve-moi au cimetière de voitures, dans le désert. Viens seul. » Aucune signature, aucun moyen de savoir qui avait écrit ceci. Roc sourit doucement en jetant la lettre à la poubelle. Il savait bien que ce n'était pas un rendez-vous de courtoisie auquel l'inconnu l'invite. Il vérifia les stocks de munitions qu'il avait, rangea son ordinateur en lieu sûr, avant d'emporter son couteau au plus proche de lui. Il était assez fou pour se jeter dans la gueule du loup, mais il n'en sortirait pas sans éliminer les soldats qui l'attendront. Il condamna la salle de bain pour s'assurer que personne ne pourrait entrer par là, avant de fermer à double tour la chambre du motel. Quand il fut prêt, il monta dans son pick-up, démarrant à toute vitesse pour rejoindre au plus vite le désert.

Après de longues minutes de route à travers l'étendue de sable calme, Roc arrivait à l'entrée de ce que l'on appelle ici un cimetière de voitures. Les véhicules sont éparpillés, dans des états plus que lamentables. Il y a même des hélicoptères qui jonchent le sable chaud. Mais étrangement, aucun véhicule de Frundtech en vue, ni même de soldat. Roc arrêta son véhicule après quelques mètres à l'intérieur du cimetière, cherchant du regard un possible interlocuteur. Ne voyant personne, il coupa le contact, dégainant son Glock, avant de descendre. Hurler ici était la pire chose à faire, avec les choses qui vivent dans le désert et la possible présence de Frundtech... Mais comment allait-il faire pour savoir où était celui qui l'avait demander ? Il semblerait qu'il n'ait même pas à chercher, étant donné qu'après quelques minutes à attendre, un homme déboula d'entre deux voitures, les mains dans les poches. Il avait une tenue de civil habituelle, portant un simple jean et un t-shirt. Ses cheveux courts trahissaient une cicatrice sur la tempe, qui devait dater de plusieurs décennies. L'homme n'avait pas plus que la trentaine, il s'avança un peu plus vers Roc, avant de s'arrêter pour planter ses yeux verts dans ceux du vagabond. « Tu es donc venu ? C'est très gentil de ta part, tu nous faciliteras au moins la tâche. » Un sourire s'étira sur le visage de l'homme, alors que deux autres soldats sortaient de leur cachette, fusil d'assaut à la main. Roc comprit bien vite qu'il était tombé dans un piège, mais étrangement, aucun des combattants ne portaient d'habit de Frundtech. Ce n'était pas des soldats de l'entreprise ? L'ex-ingénieur voulait s'en assurer. Il pointa son Glock vers l'homme non armé. « Bon... Je vous laisse trente secondes pour me dire qui vous êtes ou je fais sauter la cervelle de votre pote. » Roc gardait un calme sans pareil, il était presque stoïque alors que deux armes étaient pointées sur lui. Pour s'assurer de la "coopération" des combattants, il retira la sécurité de son arme. « Eh bien... On dirait que tu fais honneur à ton surnom du traqueur de Frundtech. » L'homme signifia d'un simple mouvement de tête à ses collègues de baisser leur arme. Mais Roc, quant à lui, gardait toujours en joue son interlocuteur. « Réponds à ma question. » Le ton de celui-ci devenait dur, mais après avoir entendu ce surnom, il voulait en savoir plus. « Nous faisons partie de la Résistance. Un groupe de civil qui a pour objectif de faire tomber Frundtech et les faire payer pour ce qu'ils ont fait à notre pays. » Le vagabond soupira, remettant la sécurité de son arme avant de la ranger. « Qu'est-ce que j'ai à faire dans tout ça ? » Roc était dans l'incompréhension la plus totale, désormais. « Nos troupes t'ont repéré à la tour radio. Avant notre assaut et après. Nous savons que tu as des informations sur Frundtech que nous n'avons pas. Notre chef souhaiterait donc te rencontrer, si tu es d'accord. » Rencontrer le chef de la Résistance ? L'idée enchantait peu Roc, mais cela pourrait s'avérer utile d'avoir des alliés supplémentaires, pour combattre Frundtech. « J'accepte de vous accompagner, mais simplement pour discuter. » Les trois hommes se regardèrent, hochant ensemble la tête d'une même entente. « Suis nous alors, nous allons te guider à notre base. » Le groupe attendit donc que Roc remonte dans son véhicule, pour commencer à se mettre en marche. Un gros 4x4 avec trois troupes à l'avant en plein désert, ça paraissait invraisemblable, et pourtant, c'était ce qui se produisait en ce moment même pour traverser le cimetière de véhicule.

Après plusieurs dizaines de minutes de route, une petite bâtisse qui tenait à peine debout se dressait devant le groupe. L'homme en tête de file fit un signe à Roc, pour lui intimer de s'arrêter. Le vagabond ouvrit la fenêtre pour savoir ce qui en retournait. « Tu peux laisser ton pick-up ici, on est arrivé. » L'ex-ingénieur fut assez surpris que leur base se trouve... Dans une vieille maison prête à s'effondrer au moindre coup de vent. Il descendit de son véhicule, le fermant à clé, avant de suivre la petite troupe qui se glissa dans la maison. Lorsqu'ils furent tous dedans, les deux combattants armés déplacèrent une étagère poussiéreuse, révélant une porte caché menant vers un sous-sol. Le chef du groupe toqua trois coups rapides, puis un plus lourd. Une voix filtra à travers la porte, ténue. « Mot de passe. » Le résistant en tête de l'équipe murmura simplement. « Les colombes sont éternelles. » Quelques secondes passèrent après le murmure, tout le monde retenant son souffle, avant que la porte s'ouvre sur un homme cagoulé, fusil d'assaut à la main. « Te revoilà Don, on ne savait pas si tu avais réussi ta mission, à force. » Le concerné sourit en guise de remerciement pour cet accueil chaleureux, avant de se glisser avec ses acolytes et Roc dans des escaliers menant aux sous-sols. « Je vais l'amener au chef ! » La sentinelle hocha simplement la tête avant de refermer la porte derrière le groupe. Celui-ci se fraya donc un chemin dans ce qui semblait être la base de la Résistance. Un bunker souterrain en plein désert, remplis de salles aux utilités diverses. Sur le chemin, Roc put voir des combattants qui se restauraient, d'autres s'entraîner au tir. Puis, après une bonne minute de marche supplémentaire dans des couloirs étroits, il déboucha sur une porte, au bout d'un autre de ces couloirs à la couleur noir des plus sobres. Don fit signe à ses troupes qu'ils pouvaient disposer, laissant Roc et le résistant devant la porte fermée. L'homme toqua un coup puissant à la porte, patientant pour avoir une réponse. « Entre, Don ! » Une voix forte résonna de derrière la porte, avant que l'intéressé daigne l'ouvrir pour se glisser à l'intérieur de la pièce. Roc le suivit, découvrant un bureau assez ancien, quelques photos disposés de-ci de-là, mais surtout un homme assis sur la chaise derrière le bureau. Il avait des cheveux courts qui commençaient à virer vers le gris, signe d'un âge qui se fait sentir. Il avait aussi une longue barbe imposante, aussi grise que ses maigres cheveux trônant sur le haut de son crâne. « C'est donc lui, le traqueur de Frundtech ? » Don allait répondre, mais il fut pris de court par l'intéressé. « En personne. On m'a demandé, si j'ai bien compris ? » Roc essayait d'avoir un ton égal à celui du chef de la Résistance, soutenant son regard relativement dur. « C'est exact. Don, tu peux nous laisser. Surveille les stocks de munitions et ensuite organise une patrouille supplémentaire dans le désert. » Après avoir répondu à Roc, l'homme donna ses instructions au combattant, avant que celui-ci ne quitte la pièce, fermant la porte derrière lui, pour laisser les deux personnes discuter plus calmement. « Bien... Maintenant que nous sommes seuls, j'ai quelques questions à te poser. Quelles sont les raisons de ton attaque sur la tour radio de Frundtech ? As-tu des complices dans le coin ? Et est-ce que tu as des données particulières qui viendraient de Frundtech ? » Tout ceci sonnait comme un interrogatoire pour Roc, qui soutenait tant bien que mal désormais le regard de ce vieil homme qui cherchait à le déstabiliser. « Je voulais porter un coup à Frundtech, pour ce qu'ils ont fait à notre pays. Je n'ai aucun complice, je suis un solitaire, en temps normal. J'ai récupéré des données dans la tour radio, mais elles sont inutilisables en l'état, pas avant un déchiffrement qui prend assez longtemps. Donc si c'est ce qui vous intéresse, j'ai juste à faire sauter l'ordinateur et vous perdez tout. » Roc comptait jouer à couteaux tirés cette fois-ci. Il savait que le résistant le jaugeait pour savoir ce qu'il valait, et surtout, s'il tiendrait face à la pression. « Perspicace. Tu ne manques pas d'air pour un jeunot, mais c'est une bonne chose. La Résistance a besoin de troupes, capable de tirer voire de pirater des choses. Que dirais-tu de nous rejoindre ? » La proposition surprit Roc, qui ne s'attendait absolument pas à une telle demande. Peut-être était-ce là une opportunité pour qu'il puisse se rapprocher de la vérité sur son ami disparu ? Il voulait malgré tout du temps pour réfléchir a tout ça. « Je... J'ai besoin de temps pour réfléchir. Puis-je trouver un de vos hommes dans deux jours, derrière le motel d'Escalante ? » Le chef de la résistance acquiesça, se levant enfin de sa chaise. Il savait que le temps aiderait à faire un choix plus réfléchi, et il ne doutait pas que Roc tienne parole. « J'enverrais un de mes soldats derrière le motel, dans deux jours, au crépuscule. Cela te convient-il ? » Observant le chef de la résistance se déplacer pour ouvrir la porte menant hors de son bureau, Roc hocha simplement la tête. « Rooks, ramène... Merde, je ne t'ai même pas demandé ton nom, en fin de compte. » L'homme se gratta doucement la barbe, en observant Roc avec un regard bien moins dur que lors de l'entretien. « Je m'appelle Roc. » Ce regard confiant, l'arme dans la poche, le chef de la résistance savait que ce jeune homme serait l'atout qui ferait enfin pencher la balance contre Frundtech. « Bien... Ramène Roc en haut, s'il te plaît. » Le soldat hocha la tête avant de faire signe au vagabond de le suivre. Il ne pipa pas un mot sur le trajet retour, signifiant simplement à la sentinelle qu'il pouvait ressortir. Roc retrouva, après quelques pas supplémentaires, son véhicule en parfait état et l'air qui commençait à se rafraîchir dans le désert. La nuit tomberait bientôt, mieux valait ne pas tarder.



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