Chapitre 11 - Concrétisation
Ellie ne savait pas s'il était vrai qu'on voyait sa vie défiler devant ses yeux quand on était sur le point de mourir. Tout ce qu'elle savait était, qu'elle, ne verrait pas grand-chose. Au final qu'avait-elle fait de sa vie jusqu'à maintenant ? Elle avait suivi les traces de son père, c'était faîtes deux amies et ce uniquement parce que leurs pères étaient amis d'enfance et finalement s'était battu dans l'unique but de récupérer quelque chose qu'elle n'avait jamais vraiment eu.
Après tout, elle savait bien que les personnes de sexe féminin n'avaient aucun pouvoir militaire à Solum alors pourquoi continuer à se battre ? Au final, sa vie n'aura été qu'une immense erreur. Elle n'aura qu'un regret, celui de n'avoir pu se rapprocher plus de Fenrir. Elle aurait tellement aimé pouvoir sentir à nouveau sa main dans ses cheveux, rien qu'une fois.
Soudain, quelqu'un la poussa et elle entendit un entrechoquement d'acier à côté d'elle.
— Le règlement n'interdit pas de tuer mais ne crois-tu pas que t'en prendre à un homme à terre risque de tacher ton honneur ?
Fenrir ! Il venait de lui sauver la vie.
Ellie essayait à nouveau de se relever quand une fée et une elfe blanche vinrent l'attraper par un bras chacune pour la relever. Mais... Pourquoi l'aide t'elles ?
— Très belle performance. Avec ça vous êtes quatrième pour cette épreuve. On va vous porter jusqu'aux tribunes où vous pourrez vous reposer jusqu'à l'annonce du classement final.
Attendez, quoi ? Mais, elle n'avait pas quitté le cercl...
Il lui fallut quelques secondes pour s'en rendre compte mais oui, elle avait bien atterri en dehors du cercle. Fenrir n'avait sûrement pas fait exprès mais il l'avait éjecté de la zone...
Non mais quelle sortie idiote ! Ça lui rappelait quand elle était petite et qu'en jouant à la balle au prisonnier, elle s'était faite pousser dans la prison et qu'elle avait dû y rester durant tout le reste de la partie. Fenrir avait intérêt à gagner, histoire qu'elle n'ait pas été sortie pour rien.
Une fois dans les gradins, elle put voir pourquoi elle était quatrième. Fenrir n'avait pas eu le temps de s'occuper de ses deux adversaires et de celui resté au sol avant de venir la secourir. Résultat le combattant au sol y était toujours. Mais plus pour longtemps, l'équipe médicale venait le chercher, le classant à la troisième place. Il ne restait plus que le duel Fenrir-Ronan qui avait réussi à mettre tout le monde en haleine. Si elle pouvait, elle hurlerait « Allez Fenrir » mais bon, venant de se faire éjecter par ses soins, ça ferait un peu bizarre.
Elle était absorbée par le duel quand elle sentit un regard sur elle, un regard pénétrant. Elle chercha partout et tomba finalement sur le regard de son père qui la fixait. Il avait compris. Le roi Achéon et Lila ne semblaient pas y faire attention, ne quittant pas le duel des yeux mais sa façon de combattre n'avait pu échapper à Iliakó qui était son entraîneur depuis toujours. Puisque, de toute façon, elle pouvait bien se faire reconnaître maintenant, ça n'avait plus d'importance, elle fit un petit signe signifiant « Désolée » à son père qui compris immédiatement et tourna son regard vers le combat.
Ellie eut à peine le temps de se retourner elle-aussi que le présentateur se mis à hurler.
— Terminé ! Fenrir est le grand vainqueur de l'épreuve finale !
Elle se demandait bien comment ce présentateur pouvait encore avoir de la voix à force de s'époumoner comme ça ; mais Fenrir avait battu Ronan et c'était le plus important, bien qu'elle n'en ait pas douté une seconde.
Les deux combattants eurent à peine le temps de rejoindre les autres que le présentateur reprit la parole.
— Ça y est ! Les jurys ont terminé d'accorder leurs points. Mieux vaut tard que jamais j'ai envie de dire. Je vous présente donc le podium de cette édition du tournoi du jour et de la nuit !
Contrairement à ce qu'elle avait pensé, il n'y eu pas que l'affichage du classement. Au-dessus de celui-ci apparaissait une image mouvante du premier et à gauche et à droite de celle-ci, celles des second et troisième. Mais ce n'était pas ça qui la surprenait le plus dans cette histoire. Non, c'était plutôt de voir son nom à la seconde place du classement, derrière Fenrir et devant Ronan.
Et plus encore, de voir son véritable nom et une image d'elle sans tout son déguisement. Sur le coup, Lambsi et Diane avaient vraiment sorti le grand jeu et elles ont également eu raison sur un autre point, les jurys lui avaient bien accordés des points. Pas assez pour gagner son pari mais assez pour faire ce pourquoi elle était venue, vaincre Ronan en public.
Le problème, maintenant, était que tous les regards étaient dirigés vers elle. Elle leva la tête vers la tribune des VIP pour voir les princesses lui faire de grands signes de félicitations. Bon, autant sortir le grand jeu.
Cependant, elle n'eut pas le temps d'enlever sa perruque qu'elle lui fut arrachée violement alors qu'un seau d'eau froide était envoyé sur ses ailes. L'effet fut immédiat, contrairement aux dires de Lambsi, la peinture partait très bien à l'eau et coulait lamentablement sur le sol alors que le doré naturel de ses ailes ressortait et que ses cheveux dévalaient ses épaules. On dirait bien que Ronan n'a pas apprécié son petit déguisement. Ellie était sûre que s'il le pouvait, il lui enlèverait aussi ses lentilles.
— Héliris Bagueria ! Comment ose-tu ? Te faire passer pour un combattant de Solum alors que tu n'es qu'une vulgaire... Femelle.
Il avait craché ce mot comme s'il parlait d'un paria ou d'un déchet. Ellie n'avait qu'une envie, répondre et défendre ses droits, violemment si possible. Mais elle ne devait pas rentrer dans son jeu, surtout pas. Par contre elle ne savait pas du tout combien de temps elle pourrait se retenir...
— Je ne vois pas où est le problème. Elle a combattu vaillamment comme chacun d'entre nous. Elle ne mérite pas de telles injures, surtout en ayant atteint la seconde place.
Et voilà Fenrir qui arrivait encore en soutien. Décidément, elle ne savait pas comment elle pourrait le remercier pour tout ce qu'il a fait.
— De quel droit vous mêlez-vous de cette histoire, votre majesté ? C'est une affaire interne à Solum.
— Dans ce cas je m'en occuperai.
Ellie était incapable de dire si le roi Achéon serait en sa faveur ou non. Elle espérait seulement éviter un sermon public, surtout devant ses parents. Heureusement, elle avait le prince de Teneris et les princesses de Solum de son côté.
— Héliris, je dois avouer que je suis plutôt étonné.
Ça allait être douloureux...
— Je ne m'attendais pas à un tel talent de ta part.
Pardon ? Serait-ce possible que...
— Mes filles m'ont parlé de la façon dont tu as réussi à prendre une fausse identité afin de t'inscrire malgré nos lois. J'ai toujours considéré celle interdisant aux femelles de participer au tournoi comme une forme de protection mais je me rends compte que, dans ton cas, tu n'avais aucunement besoin de cette protection. Tu as magnifiquement représenté Solum et ce ne sont pas nos jurys qui diront le contraire.
À côté du roi, Iliakó souriait et quelques larmes de joie coulaient des joues de Lila. Quelque chose lui disait que les princesses n'étaient pas les seules à avoir plaidé en sa faveur.
— Mais votre Altesse ! Elle a transgressé une loi !
Mais c'est qu'il ne lâchait pas l'affaire lui...
— Quelques fois, ce sont les lois qui n'ont plus lieu d'être. Tu finiras par le comprendre. Tu es encore un peu jeune, Ronan.
Cette fois-ci, il ne dit rien de plus et le roi de Solum se tourna vers Fenrir.
— En tous cas, je vous félicite pour cette victoire prince Fenrir. Vous nous avez montré de bien beaux combats.
— Merci votre Majesté.
C'est ainsi que le tournoi prit fin, de la meilleure des façons possibles. Ellie était bien arrivée en tête des ennemis de Ronan mais ça l'importait peu pour le moment. Elle avait des choses plus urgentes à faire.
Une heure plus tard, la jeune fée nouvellement célèbre retrouva Fenrir devant sa cabane. Ils avaient prévu de se voir pour finaliser leur pari.
— Félicitations. On peut dire que cette opération est un succès, déclara le prince.
— Cette opération ? Je crois que je déteins sur toi.
Ils éclatèrent de rire alors que Fenrir s'adossait contre sa cabane.
— Et c'est une mauvaise chose ?
— Ça dépend mais je ne pense pas que je t'aimerais autant si tu étais mon sosie au masculin.
Elle ne se rendit compte qu'après de ce qu'elle venait de faire. Avait-elle vraiment dit ça ? La rougeur monta le long de ses joues alors qu'elle essayait de rattraper le tir.
— Sinon, c'est moi qui devrais te féliciter, tu as gagné le tournoi et donc notre pari.
Fenrir n'avait toujours pas réagit et ça commençait à l'inquiéter. Est-ce qu'il aurait mal pris ce qu'elle a dit ? Évidemment qu'il l'a mal pris ! Elle venait d'avouer avoir des sentiments pour lui !
Il se redressa alors et s'avança vers elle, s'arrêtant à quelques centimètres seulement.
— Non, tu es celle qui a gagné. Au final, le véritable pari était que tu passes devant Ronan et tu l'as fait.
— Mais...
— Demande moi ce que tu veux.
Il n'avait pas l'air de vouloir céder. Pourtant c'était bien lui qui avait gagné. Il était premier et elle était seconde. Alors pourquoi ?
Néanmoins, une occasion comme celle-là ne se représenterait peut-être pas de sitôt et il y avait quelque chose qu'elle voulait absolument lui demander.
— Très bien, dans ce cas... J'aimerais que tu enlèves ton masque.
Il ne fit aucun mouvement pour s'éloigner d'elle et ne trahit aucun sentiment, comme d'habitude. C'était d'ailleurs la raison de sa demande. Elle voulait voir son visage, ses émotions. Elle ne voulait plus qu'il puisse se cacher derrière son masque. Pas avec elle.
— Enlève-le-moi.
Elle ne se fit pas prier, supprima la distance minime qui restait entre eux et passa ses mains derrière la tête du prince pour détacher son masque.
Ce geste la rapprochait énormément de lui et augmenta sa rougeur mais ça ne l'arrêta pas. Elle réussit finalement à détacher l'attache et retira le masque.
Une fois celui-ci dans sa main, elle se mit à détailler le prince sans aucune gêne et Fenrir ne bougea pas, la laissant faire.
La première chose qui frappait le regard était les deux cicatrices qui jalonnaient son visage. Une formait une diagonale passant par son sourcil droit, le dessus de son nez et venait se terminer au-dessus de sa mâchoire. L'autre était perpendiculaire à son œil gauche et le fendait en deux. Cet œil, justement, était la seconde chose remarquable. Il était d'un noir d'encre. Rien n'y était visible, ni l'iris, ni la pupille, ni même le blanc de l'œil. Il n'y avait que du noir. N'y tenant plus, elle posa le masque au sol et passa doucement le bout de ses doigts le long des cicatrices.
Son second œil était vert. Du vert profond de la forêt. De ce même vert qu'elle voyait chaque fois qu'elle volait vers Teneris. Un vert envoûtant et mystérieux.
S'il y avait une chose dont elle était certaine c'était que rien de ce qu'elle voyait ne pouvait diminuer la profonde virilité qui avait toujours caractérisé Fenrir. Bien au contraire. En fait, il faisait bien d'avoir un masque, sinon elle lui aurait sans doute déjà sauté dessus. Cette mâchoire carrée, ces traits envoûtants. Il pouvait dire ce qu'il voulait sur ses origines, il était définitivement un prince. Pour elle, il symbolisait la perfection. Sans pouvoir s'arrêter, elle continuait de passer ses doigts le long des cicatrices et autour de son œil gauche.
— Pas joli joli hein ? Mon père préfère que je porte un masque. Il dit que je suis plus présentable ainsi.
Ces mots eurent le don de la réveiller de la transe dans laquelle elle s'était elle-même plongée. Pour la première fois, elle parla en étant sûre de le regarder dans les yeux.
— Ne crois rien de ce que dit ton père. Tu es... Tu es...
Elle n'arrivait pas à le dire. Bon, changement de stratégie.
— Comment t'es tu fais ça ?
— Un conflit qui a mal tourné au sein de mon territoire. Le roi a préféré envoyer son fils plutôt que de s'en occuper lui-même. J'y ai perdu un œil et le droit d'avoir un visage.
Jamais, jamais elle ne pourrait tolérer ça. Personne, pas même le roi de Teneris, n'avait le droit de l'empêcher de montrer son visage.
— Ton œil... J'aimerais tellement pouvoir t'aider...
— Ne t'en fais pas pour ça. Les meilleurs guérisseurs du royaume ont essayé de me rendre mon œil mais tout ce qu'ils ont réussi à faire c'est le conserver de la dégradation.
Un sort de conservation. Elle comprenait mieux pourquoi il était entièrement noir. Cela signifiait que le meilleur combattant des deux royaumes n'avait besoin que d'un œil pour vaincre ses adversaires. Décidément, elle le trouvait plus extraordinaire de jour en jour.
N'y tenant plus, elle se mit sur le pointe des pieds et embrassa la naissance de l'une des cicatrices sur sa mâchoire. Elle avait tellement envie de lui, là, maintenant, tout de suite. Elle perdait peut-être la tête mais elle avait tellement envie qu'il soit à elle. Elle voulait tellement plus que de l'amitié.
— Fenrir...
Elle ne put que murmurer son prénom avant qu'il ne capture son visage et presse ses lèvres contre les siennes. Elle ne se fit pas prier et répondit au baisé, agrippant ses cheveux noirs à deux mains. Aucun des deux ne semblaient vouloir lâcher l'autre. Fenrir finit par déplacer ses mains et serrer Ellie dans ses bras, les rapprochant l'un de l'autre. Le baisé devenait de plus en plus fougueux et intense. Ellie pouvait sentir le torse tout en muscle du prince contre sa poitrine, son ventre. Tout son corps brûlait de désir.
Fenrir mit fin au contact part manque d'air mais continuait à serrer Ellie contre lui, déposant de multiples baisés sur son front.
— Ellie...
C'était un appel, une supplique. Il la voulait autant qu'elle.
— Si on continu, je ne sais pas si je pourrais me retenir. Je ne voudrais pas te faire de mal, tu n'es pas encore tout à fait guérie.
— Personne ne t'a demandé de te retenir.
Cette phrase mit fin à toutes ses hésitations. Quelques secondes seulement plus tard, ils étaient dans la chambre de la cabane et s'attachaient tous les deux à enlever les vêtements de l'autre. En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, ils s'embrassaient à nouveau, en sous-vêtements.
— Tu es magnifique , murmura Fenrir alors qu'il traçait les courbes de son amante des doigts.
Tout en donnant l'accès à sa bouche à la langue de Fenrir, Ellie suivit les pectoraux et les abdominaux du prince des doigts. La plupart des fées avaient des muscles peu apparents mais ce n'était pas son cas. Fenrir était un merveilleux mélange de force et de douceur. Il pourrait lui briser le bras d'une torsion du poignet et il le savait. Il la touchait comme si elle était la plus belle chose du monde.
— Je te retourne compliment, souffla t'elle entre deux gémissements.
Le lendemain, Ellie n'eut pas le temps d'émerger de son profond sommeil que Fatzìs entrait en trombe dans la chambre de son maître.
— Mon Prince ! Mademoiselle Héliris !
Devant la panique de son serviteur, Fenrir sortit rapidement de son sommeil et se redressa. Le litard ne devait pas souvent se retrouver dans cet état.
— Des...Des...Des...
— Calme toi. Que se passe-t-il ?
Ellie réussi finalement à se redresser, elle aussi, dans le lit tout en enroulant le drap autour de sa poitrine. En plus d'être paniqué, le pauvre Fatzìs semblait effrayé.
— Des gardiens de Solum sont devant la porte !
Alors ça, ce n'était pas prévu au programme...
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