Mia

Vous voyez la fille qui tient la chandelle durant un premier rendez-vous ? Isolée de la conversation qu'entretiennent les deux personnes concernées, le regard subjugué l'un par l'autre. Tandis que le garçon dévore littéralement la fille des yeux et que celle-ci rigole à chacune des blagues du garçon alors qu'elles ne sont même pas drôles.

Eh bien cette fille, c'est moi.

Mia Judent, 17 ans, meilleure amie de Justin Pelman, actuellement en rendez-vous galant avec Pénélope Kriss, la plus jolie fille de la ville. Et ce n'est pas une blague. Des cheveux blonds magnifiques, des yeux de biche couleur océan, une peau blanche et des lèvres pulpeuses. En résumé, la fille rêvée pour n'importe quel mec.

Eh oui, je suis présente lors d'un premier rendez-vous. Vous devez vous dire : mais what ?

Alors je vous rassure, je pense aussi la même chose mais Justin a insisté plus d'une fois pour que je l'accompagne. Au départ j'avais catégoriquement refusé mais lorsque j'ai vu un panier rempli de muffins aux chocolats, j'ai vite déchanté. Pas très classe je sais, mais bon je m'en fiche. Lorsque Justin est passé me prendre avec son rendez-vous, je l'ai trouvé tellement beau que j'ai cru que j'allais devenir rouge tomate. Son cheveux blonds coiffés, ses yeux vert pétillants, son pull gris et son pantalon noir lui allaient à merveilles. Et puis lorsque Pénélope me vit, je compris dès l'instant que nous ne seront pas les meilleures amies du monde. Et pour cause, lors de ce rendez-vous, je n'ai pas dit un seul mot, sauf pour commander mon hamburger. Oui un hamburger, mais bon pardonnez moi mais le garçon que j'aime et actuellement entrain de draguer sous mon nez la déesse de la ville. Alors un hamburger ne me fait pas de mal, au contraire.

Je n'avais jamais vu Justin regarder quelqu'un, même pas moi, comme il la regarde. Il y a dans son regard une lueur que je ne lui connaissais pas. Et je crains que cela ne soit pas une bonne nouvelle pour moi...

« Alors comme ça se passe chandelle ? »

Le message de George me sauve de cette affreuse situation. Obnubilé l'un par l'autre, les deux tourtereaux n'ont même pas entendu la sonnerie de mon téléphone.

Je lui répond dans la foulée.

« En trois mots : Horrible, Horrible et Horrible »

Et c'est bien le cas, je sens que le sol sous mes pieds est entrain de s'effondrer progressivement au fur et à mesure que la soirée passe.

« Bon...tu veux que je vienne te chercher ? »

Oh.Mon.Dieu.

Un miracle...

« Tu serais un dieu vivant George ! , je suis au Jenny's Café, fait vite stp je vais pêter un câble »

« A tes ordres ! Je monte dans la voiture et je t'appelle quand je suis là »

Je souffle un coût et je sens un sourire apparaître sur mes lèvres. Heureusement que j'ai George. Pour vous expliquer, George est comme un frère. Nous nous connaissons depuis deux ans. À son arrivé à Jamestown George ne connaissait personne alors je me suis présentée la première afin de l'aider à s'intégrer. Mais je me suis vite rendu compte qu'il n'avait pas besoin d'aide pour faire des nouvelles connaissances. D'un naturel sociable et joyeux George a vite été accepté par tout le monde et depuis on ne se quitte plus. Il est le seul à me comprendre.

Je regarde les deux amoureux devant moi et constate que je n'existe plus à leurs yeux. Et cela me fait de la peine. Beaucoup de peine.

Les minutes passent et j'ai l'impression que mes jambes ne vont plus tenir en place lorsque je partirais.

Mon téléphone sonne, c'est George. Je me lève et sort du café. Je ne préfère pas les saluer, après tout il est toujours plus agréable de faire un premier rendez-vous en tête à tête, et non avec une chandelle invisible.

J'aperçois la voiture de George et monte à la vitesse de la lumière, afin de m'éloigner le plus vite possible de cet endroit maudit. Moi qui aimais tant venir ici avec Justin pour boire notre milkshake à la fraise, je crois que je ne reviendrais plus.

— Bon tu vas bien ?, demande George en démarrant la voiture.

— Est-ce que j'ai l'air d'aller bien ? Sérieux ? Comment est-ce qu'une personne censée demanderai à sa meilleure amie de l'accompagner à son premier rendez-vous ? Enfin c'est compliqué débile ! Et absurde ! Et, et cruel !

George rigole et s'arrête sur le bas côté. Je sens des larmes monter et la main de George sur mon épaule.

— Je sais que c'est dur Mia, mais tu n'y peux rien, c'est la vie. Mais j'avoue que te faire ce coup là c'était exagéré. Enfin il est idiot ou quoi ?

— Ne parle pas de lui comme ça.

— Excuse moi mais il n'est pas censé te faire souffrir Mia, au contraire.

—  Ça je le sais George, mais je ne lui ai jamais avoué mes sentiments et je rends compte que maintenant c'est trop tard. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ? Hein ?, dis-je en commençant à pleurer.

George me prend dans ses bras et me donne un mouchoir. Je pleure de tout mon être, sans retenue, et ça fait du bien.

— Allons, allons ma chérie, ça va aller. Cet idiot de Justin ne sait pas ce qu'il rate tu peux me croire !, dit-il en m'essuyant les joues, trempées. Et puis il n'y pas que Justin dans Jamestown, il y a plein d'autre garçons qui seraient très bien pour toi Mia. Mais sauf moi bien sûr, dit-il accompagné d'un clin d'œil.

Je ris et l'enlace. Qu'est-ce que je ferais sans lui ?

— Oui sauf toi, répondis-je en me mouchant.

Au cas où vous ne l'auriez pas encore compris, George est branché garçon. Et le pire, c'est que toutes les filles à son arrivé étaient à fond sur lui. En même temps George est très beau. Brun au yeux bleus, bien fait et tellement gentil. Évidemment que toutes les filles aient craqués sur lui, toutes sauf moi. C'est sûrement pour cela que George et moi avons de suite compris que nous nous entendrions bien.

— Bon tu veux une part de cheesecake ?

— Tu rigoles là  ? Hein ?

— Mais non ma chère, regarde.

George me tend alors un petit paquet, je l'ouvre et découvre une part de cheesecake. J'aime tellement cet homme.

— Oh merci George ! Comment je ferais sans toi ?, dis-je en commençant à dévorer ma part de gâteau.

— Sûrement pas grand chose.

Nous rions et reprenons la route. Une fois la part de gâteau finie, j'expire et souris de toutes mes dents.

— Ah bah voilà ce que je veux voir sur ce beau visage ! Tu te sens mieux ?

— Oui beaucoup mieux, à tel point que je ne pense plus à eux !

George me regarde, persuadé du contraire.

— Quoi ?

— Si tu le dis, c'est que tu le pense Mia.

Et zut...

— Oui bon je me suis faites démasquée, mais imagine être dans ma situation ! Comment tu ne peux pas y penser ?

— Non je n'imagine pas, mais je sais que c'est dur. Mais Mia arrête avec Justin, tu te fais du mal. Et je n'aime pas voir ma petite Mia dans cet état.

Je lui souris, touchée par ses paroles. Mais mon cœur ne pense pas la même chose. J'aime Justin depuis l'instant même où j'ai posé les yeux sur lui. Cela fait dix années que je l'aime alors je me vois mal arrêter de penser à lui du jour au lendemain. Cela est impossible. Bien que nécessaire sûrement, mais impossible.