Les mois passèrent à Stern Bild, et la vie des Kaburagi continua de se reconstruire doucement après la perte de Tomoe. La décision de Kotetsu d'envoyer Kaede à Oriental Town pour vivre avec leur mère, Anju, avait marqué un tournant. Bien que Barnaby ait initialement résisté à cette idée, il avait fini par céder, incapable de contrer l'argument implacable de son frère :

— Notre monde est dangereux, Barnaby. Si quelqu'un découvre nos identités, Kaede pourrait devenir une cible. Et je ne pourrais jamais me pardonner si quelque chose lui arrivait.

Ces paroles avaient résonné profondément en Barnaby. Lui-même savait trop bien à quel point les héros étaient exposés aux menaces constantes. À l'Académie, on lui rappelait sans cesse que les héros ne faisaient pas seulement face à des criminels, mais aussi au sacrifice, à la douleur, et parfois à la mort. Alors, même si cela lui brisait le cœur, il avait accepté.

— Tu as raison, grand frère, avait-il dit d'un ton résigné, bien qu'une partie de lui détestait se séparer de Kaede.

Pourtant, derrière ce front uni qu'il présentait à Kotetsu, Barnaby menait une bataille intérieure. Depuis sa rencontre avec Albert Maverick, il avait repris ses recherches sur Ouroboros et l'assassin de ses parents. Chaque soir, une fois ses devoirs terminés et la maison plongée dans le silence, il se plongeait dans ses fichiers, compilant les moindres indices qu'il pouvait trouver. Maverick lui avait ravivé ce feu qu'il pensait éteint, un feu qu'il cachait soigneusement à Kotetsu et à Kaede.

En présence de son frère, Barnaby s'efforçait d'agir normalement, arborant un sourire calme et chaleureux. Il ne voulait pas inquiéter Kotetsu, encore moins lui révéler qu'il avait renoué avec ce désir de vengeance que Kotetsu avait mis tant d'efforts à apaiser. Mais cette façade devenait de plus en plus difficile à maintenir.

Kotetsu, de son côté, sentait que quelque chose pesait sur Barnaby. Ses regards prolongés, ses silences soudains, et cette lueur d'intensité dans ses yeux lui donnaient l'impression que son petit frère lui cachait quelque chose. Pourtant, il choisit de ne rien dire. Il ne voulait pas risquer de briser la confiance que Barnaby lui portait.

— Si Barnaby a besoin de parler, il le fera à son rythme, pensa Kotetsu.

Il avait toujours fait confiance à Barnaby, au point de mettre sa propre vie entre ses mains. Mais cette confiance allait de pair avec une peur sourde : celle de ne pas pouvoir protéger Barnaby, que ce soit des ennemis extérieurs ou de ses propres démons intérieurs.

Le soir, alors qu'ils partageaient un dîner tranquille, Kotetsu tenta de sonder Barnaby sans paraître trop insistant.

— Tu te débrouilles bien à l'Académie, Bunny. Tes professeurs disent que tu as un excellent potentiel.

Barnaby releva les yeux, esquissant un léger sourire.

— Merci, grand frère. J'essaie de donner le meilleur de moi-même.

— Tant mieux, parce que tu vas en avoir besoin dans ce métier. Mais n'oublie pas... prends soin de toi aussi.

Ces mots réchauffèrent le cœur de Barnaby, mais ils ravivèrent aussi sa culpabilité. Kotetsu faisait tout pour lui, pour Kaede, et pour leur famille. Il n'imaginait pas une seule seconde que son précieux "petit frère" planifiait de s'aventurer dans des zones sombres, risquant tout pour obtenir justice.

Cette nuit-là, alors que Kotetsu dormait paisiblement, Barnaby s'enferma dans sa chambre, ses recherches étalées devant lui. Les indices qu'il accumulait pointaient vers un réseau complexe d'individus liés à Ouroboros. Mais ce n'était pas suffisant. Chaque piste semblait se perdre dans un dédale de secrets bien gardés.

— Je vais y arriver, murmura Barnaby pour lui-même. Peu importe le temps que ça prendra.

Mais au fond de lui, une peur persistait : et si Kotetsu découvrait tout ? Cette peur n'était pas seulement celle d'être découvert. C'était celle de décevoir l'homme qu'il aimait profondément.

Pour l'instant, Barnaby décidait de continuer seul, espérant qu'un jour il trouverait des réponses sans avoir à trahir la confiance de Kotetsu. Mais il savait aussi que ce chemin qu'il empruntait, fait de mensonges et de vérités cachées, risquait de tout bouleverser.