Epilogue - Ca paraît con, Franck...
Franck sentit vaguement qu'on lui touchait la main.
Il essaya d'ouvrir les yeux mais il y avait une lumière qui lui parut éblouissante.
Son corps était comme posé dans du coton et il ressentait une soif si terrible que sa langue, sèche comme de l'étoupe, le brûlait atrocement.
Il finit par réussir à plisser les yeux. Il y avait quelqu'un debout à côté de lui, une femme de forte corpulence avec un visage très doux. Puis il distingua d'autres personnes couchées dans des lits à roulettes à proximité du sien.
- Doucement, Monsieur Bordes. Ne bougez pas. On vous a opéré, tout s'est bien passé. Vous êtes en salle de réveil.
- Opéré ? bredouilla-t-il d'une voix méconnaissable.
- Oui, vous avez été gravement agressé, vous aviez plusieurs fractures qu'il a fallu réduire. Vous êtes hors de danger. Ne vous agitez pas.
- Ma femme, dit Franck.
- Vous la verrez plus tard. Pour l'instant, réveillez-vous tranquillement, ensuite on va vous transporter en service de réanimation afin de vous surveiller.
Agressé ? Par qui ? Il ne se souvenait de rien.
Après un temps qui lui parut une éternité, on fit rouler son lit dans une chambre.
Il se rendit compte qu'il était plâtré d'un peu partout. Une perfusion s'écoulait lentement dans une veine du dessus de sa main gauche et il était relié par des fils à un appareil à diodes lumineuses émettant des bips. A intervalles réguliers, l'engin se mettait à ronfler, prenant visiblement sa tension.
Des infirmières venaient le voir très fréquemment.
Il réclama à boire mais on ne voulut pas lui donner d'eau. Pas tout de suite, lui disait-on, le protocole.
Cela dura pendant un temps qu'il ne pouvait définir.
Il pensa qu'on lui administrait probablement de la morphine, raison pour laquelle il était incapable de se concentrer et de prendre un repère dans le temps.
Enfin, on lui donna à boire et il s'endormit.
Quand il se réveilla, ce devait être le lendemain et Muriel était assise à côté du lit, le regardant en lui pressant doucement les doigts.
Elle était méconnaissable, les yeux rougis et bouffis par les larmes, les traits tirés, le teint gris et le visage défait.
- Comment te sens-tu ? lui demanda-t-elle.
- Moyen. Que s'est-il passé ? J'ai perdu la mémoire.
- On n'en sait rien. Des gens t'ont trouvé gisant dans un parking souterrain près d'un centre commercial. Tu as visiblement été agressé très gravement. Tu étais dans le coma, avec traumatisme crânien et plusieurs fractures. On a cru que tu allais mourir mais c'est fini, tu es hors de danger ont dit les médecins.
Franck vit comme un flash et la mémoire lui revint d'un coup.
Le parking ! Le colis !
Il eut la présence d'esprit de ne pas montrer qu'il se souvenait : Muriel lui aurait demandé ce qu'il fichait là bas, ce n'était pas le moment !
- Il faudrait que je voie Christophe, dit-il. C'est très important. Téléphone lui, s'il te plaît.
Muriel éclata en sanglots et se cacha la tête entre les mains.
- Ne pleure plus comme ça, Muriel, je vais m'en tirer. C'est un mauvais moment à passer mais je me remettrai.
Elle ne parvenait pas à contenir ses larmes.
Franck essaya de lui prendre l'avant-bras.
- Muriel...
- C'est horrible, éructa-t-elle entre deux sanglots. Je ne devais pas te le dire pour le moment, ton agression est si récente. Mais c'est si horrible...
- Qu'est-ce qui est horrible ?
- Tout nous tombe sur la tête en même temps. Ce n'est pas juste !
- Mais pourquoi dis-tu cela ?
- Christophe et Mélisa....
- Oui, mais parle, bon sang, tu me fais peur !
- Ils sont morts.
- Quoi ?
Elle dit d'un ton monocorde, la voix brisée :
- On les a trouvés assassinés tous les deux dans la Jaguar hier, lendemain de ton agression, complètement criblés de balles. Tu te rends compte ? La police dit qu'ils ont été victimes d'un règlement de compte parce Christophe fréquentait des trafiquants. Les policiers ont trouvé une énorme somme d'argent dans le coffre de la voiture, cachée dans une valisette appartenant à Christophe, ainsi que des affaires, le strict minimum pour voyager. Ils disent que Mélisa et lui tentaient visiblement de partir précipitamment, comme s'ils prenaient la fuite, mais on ignore pourquoi. Je ne peux pas y croire. Ils étaient si gentils, ils étaient nos amis. Les pauvres, c'est affreux...
Elle tremblait et ne pouvait réfréner ses sanglots.
Une irrépressible bouffée de panique submergea Franck. Les paroles de Christophe résonnèrent dans sa tête.
« Ca paraît con, Franck, mais si tu perdais le colis, on est très mal tous les deux ».
Il sentit sa raison vaciller.
Muriel cessa soudain de pleurer.
- Ca n'a rien à voir, n'est-ce pas, ton agression et... leur mort, demanda-t-elle.
Il ne répondit pas.
- Ca n'a rien à voir, Franck, n'est-ce pas ? Mais dis moi ! Dis moi que ça n'a rien à voir ! hurla-t-elle d'une voix hystérique.
Il la regarda avec des yeux exorbités, puis tourna la tête et posa fixement son regard halluciné sur la porte d'entrée de la chambre.
__________
FIN
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