Chapitre 8 - Une certaine amertume


Dès qu'il fut dans l'eau, Christophe retira son maillot de bain et du coup, Franck se crut forcé d'en faire de même afin de ne pas passer pour le coincé de la bande.

L'eau était à peine fraîche mais cela lui fit du bien, dissipant un peu les effluves de l'alcool.

La scène lui parut vraiment surréaliste, entre Christophe et lui qui s'efforçaient de continuer à fumer leur havane dans la piscine, la musique cubaine émanant de la maison, et ces lampes allumées au fond de l'eau qui éclairaient leurs corps nus de façon totalement impudique.

Sans compter les bouteilles de Dom Pérignon et les verres posés çà et là, à vrai dire un peu partout.

Il repensa à une scène des Borgia et pouffa de rire involontairement.


- Pourquoi te gondoles-tu comme une baleine ? demanda Christophe.

- Oh pour rien. En nous voyant, je me disais qu'on ne s'emmerde décidément pas chez vous. On se croirait à une soirée des Borgia dans la Rome antique. Je dois être un peu bourré pour penser ça.


Muriel s'approcha et lui passa les bras autour du cou. Il posa précipitamment sa main sur le rebord de la piscine pour préserver le havane.

- Les soirées des Borgia étaient nettement plus osées, dit-elle.

- Muriel, tu as trop bu.

- Oui, admit elle, mais il n'empêche que c'est la vérité : elles étaient beaucoup plus osées.


Il la sentait se plaquer contre lui et vit du coin de l'œil que Mélisa s'approchait subrepticement.

Cela commençait à sentir le dérapage, cette histoire...

Christophe était écroulé de rire.


- Tu deviens gênante, Muriel, arrête, tenta-t-il.


Elle essayait de l'embrasser, insensible à ses protestations, avec cet entêtement qu'ont les personnes ivres.

Il s'en tira avec un bref baiser et parvint enfin à se soustraire des tentacules tentateurs, fuyant lâchement vers Christophe pour éviter ce qui se profilait.

Les filles se calmèrent enfin un peu.


Ils se baignèrent encore un petit moment tous les quatre et Franck, sans son maillot qui se trouvait hors de portée, n'osait pas sortir de l'eau le premier.

Mélisa n'eut pas la même pudeur : elle remonta les escaliers de la piscine le plus naturellement du monde, fila dans la maison et revint avec des serviettes qu'elle leur tendit.


Il n'était somme toute pas bien tard et ils se réinstallèrent dans les transats, les serviettes autour de la taille et le champagne de nouveau à la main.

Mélisa était allée mettre une musique plus feutrée.


- Tu travaillais, avant, Mélisa ? demanda Franck. Christophe m'a dit que tu étais dodo dancer ? Ca consiste en quoi, danse moderne ?

Mélisa, Muriel et Christophe éclatèrent de rire.


- Bon, j'ai dit une connerie...

- Ce n'est pas dodo dancer, dit Mélisa qui avait du mal à reprendre son sérieux, c'est go-go dancer. Mais effectivement, on peut dire que c'est une danse... moderne.

Ils rirent à nouveau. Franck se renfrogna.


- Ecoute, les go-go dancers ce sont les nanas que tu vois danser la nuit, à moitié à poil sur des plateformes ou en cage au-dessus du public dans les discothèques, les bars et cabarets érotiques. Elles sont là pour exciter et faire bouger le dance-floor. Je bossais dans un night club à Paris, jusqu'à ce que je rencontre Christophe et qu'il m'arrache à une future carrière éblouissante.

- Ah ok. Je comprends. Je me coucherai moins bête tout à l'heure.

- Mélisa plaisante en parlant de carrière éblouissante parce que certaines go-go sont devenues très célèbres, comme Lady Gaga, dans la chanson, ou Katsuni dans le porno, dit Christophe.

- Oui, enfin, je déconne, dit Mélisa. A part des exceptions comme elles et quelques autres qui ont eu du bol, ce n'est pas un métier d'avenir. En fait, quand tu fais ce job, personne ne se rend compte que tu sais danser mais tout le monde te prend pour une pute. Je préfère ma vie d'aujourd'hui.


Elle se pencha de son transat et embrassa Christophe.

- Je te comprends, dit Muriel en regardant le ciel étoilé. Moi, dans un autre registre, c'est un peu pareil : quand tu es instit ou prof, personne ne se rend compte de ce que c'est que d'enseigner tous les jours à 30 gosses ignares mais tout le monde te prend pour une feignasse de fonctionnaire qui est tout le temps en vacances. Seulement toi, on t'a peut-être prise pour une pute mais au moins maintenant ta vie a changé. La mienne elle ne changera pas.

- Ca dépend, dit Christophe, énigmatique, en regardant Franck.


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