Harry:

J'entends une voix crier à travers la vaste étendue qu'est le terrain de foot. Je pense pouvoir reconnaitre la voix forte et grave de notre coach. Je tourne instinctivement la tête vers l'endroit d'où semble provenir les paroles. J'aperçois effectivement notre coach, qui se trouve de l'autre coté du stade. Ses gestes et ses paroles m'indiquent que l'entrainement de ce soir est enfin terminé. 

Je m'arrête aussitôt de courir après le ballon qui semble être devenu une boule folle s'enfuyant au milieu de l'herbe tendre. Ma respiration est saccadée et mon cœur tambourine fortement dans ma poitrine. Je sens même mon sang battre au niveau de mes tempes. Mon front est recouvert de mes boucles qui, à cause de la transpiration, collent à ma peau. 

Alors que, je commence à marcher doucement en direction du coach, je dépose une de mes mains sur mon flanc droit espérant que ça soulagera -rien qu'un peu- la douleur que me procure mon point de coté.  

Le doux vent hivernal caresse gentiment mon visage rougis et déformé par l'effort. Chacune de mes expirations se transforment en de légers nuages de fumée s'envolant vers l'infinité qu'est le ciel.  

Ces deux heures intensives d'entraînement m'ont littéralement achevées. Je ne me suis jamais senti si épuisé...

Je mentirai si je disais que je ne m'attendais pas à ce que les préparations aux matchs soient plus rudes que l'année dernière, mais j'étais loin d'imaginer qu'elles le seraient autant. Ce n'est plus du football mais de la torture.  

Je jette un furtif regard aux autres joueurs de l'équipe : ils ont l'air de tous souffrir autant que moi. Je dois avouer que cette découverte me rassure un peu.

Je continue mon chemin vers les complexes sportifs, alors que Louis s'approche de moi. Je peux voir l'épuisement dans les traits de son visage. En le regardant, on sait qu'il a tout donné. Louis est le capitaine de l'équipe et celui qui y est de loin le plus investi. Cette équipe, c'est tout pour lui. 

Après encore quelques secondes de marche dans l'herbe humide nous arrivons au niveau de l'entraineur qui est entouré par le reste des footballeurs. Il paraît satisfait et un léger sourire est tracé sur son visage grossier. 

« Bravo les gars, vous avez fait un bon boulot! Pour une reprise c'est vraiment pas mal. A ce que je vois, vous n'avez pas perdu la technique. La prochaine fois on s'entrainera aux tirs aux buts avant de passer aux matchs préparatoires. Je vais faire de mon mieux pour qu'on gagne le championnat cette année! » 

Il marque une courte pause durant laquelle il passe en revue tous les joueurs des yeux avant de reprendre:

« Allez! Tous aux vestiaires. »

Je commence alors à me diriger vers les vestiaires, accompagné de tous les autres footballeurs, mais une voix me retient:

« Louis, Harry! Venez m'aider à ranger le matériel! Je l'aurais bien fait seul mais j'ai comme l'impression qu'il va pleuvoir et je n'aimerai pas que tous les équipements soient trempés ou détériorés! » 

J'entends Louis pousser un long et profond soupir avant qu'il n'aille à nouveau sur le terrain. J'y retourne à mon tour et je le vois s'empresser de ramasser et de ranger les différents ballons et autres équipements dont nous disposons pour nos exercices de foot. Je m'avance vers lui et m'exécute à mon tour. 

« Ça nous tombe toujours dessus, bougonne-t-il. » 

Je ris doucement à sa remarque avant de plonger une balle dans le grand sac noir prévu à cet effet. 

« Ça doit simplement être le hasard. Il ne fait sans doute pas attention à qui il choisi, répondis-je calmement.

-Rien n'arrive par hasard mon vieux, y'a toujours une raison, soupira-t-il. »

Je ne m'attarde pas sur sa remarque et me dépêche de tout remballer. 

Quelques minutes plus tard nous finissons enfin notre corvée et nous nous dirigeons une bonne fois pour toute vers les vestiaires. Nous y entrons le plus rapidement possible et découvrons qu'il est déjà vide. Tout le monde est déjà parti. 

« Ils n'ont pas pris beaucoup de temps pour se changer aujourd'hui, dis-je. 

-En même temps c'est normal, t'as vu l'heure? répliqua Louis avec un ton rempli de reproche. »  

J'ai vraiment l'impression qu'il est énervé. Je ne pense pas l'avoir déjà vu autant à fleur de peau, avant aujourd'hui.  

Je me laisse lourdement tomber sur le banc en bois avant de retirer promptement mon maillot rouge et de le jeter sur le sol froid. L'odeur habituelle de la transpiration flotte dans l'air humide me rappelant des souvenirs de l'année dernière. 

J'attrape ma gourde noire, que j'avais laissée poser sur le sol tout à l'heure, et l'apporte à mes lèvres avides. Je fais doucement couler le liquide froid le long de ma gorge me laissant comme une sensation de purification. Lorsque je n'ai plus soif je verse le reste du contenu de la gourde sur moi. On ne prend jamais de douche en hiver, au risque d'attraper une pneumonie, tant l'eau est glacée. Louis s'assoit à côté de moi et sort de son sac de sport, une barre chocolatée. Il arrache l'emballage plastique de cette dernière à l'aide de ses dents, avant de croquer dedans. Il mâche longuement avant d'avaler bruyamment sa bouchée. Il pose son encas sur le banc avant de reporter son attention sur moi. Il me toise un instant alors que j'enfile un tee short blanc, propre. Je le regarde à mon tour, un sourcil haussé. J'ai l'impression qu'il veut me demander quelque chose. 

« Qu'est-ce qu'il y a Louis? demandais-je. 

-Rien. Rien de grave, commença-t-il. Je me demandais juste si tu avais finalement décidé de rendre le livre, à Mia. »

À l'entente de son nom, je sens mon coeur s'emballer. Je n'ai pas l'habitude d'entendre Louis l'appeler comme ça. La seule fois où j'avais entendu le prénom de Mia sortir de sa bouche, c'était à la cantine. Toutes les autres fois, il avait utilisé des mots peu amicaux et assez dévalorisant, pour la qualifier. 

« Je lui ai rendu la semaine dernière, pourquoi? répondis-je.

-Qu'est-ce qu'elle-t-a dit? lâcha-t-il, ignorant ma question. » 

Je fronce un instant les sourcils alors qu'il croque à nouveau dans sa barre énergétique. Depuis quand Louis s'intéresse-t-il à elle? Je croyais que pour lui, Mia était une de filles sans importance et qu'il ne fallait pas s'attarder sur elle. Je pensais qu'elle faisait parti de ces personnes "pas assez bien pour trainer avec nous."

« Elle m'a remercié et elle m'a dit qu'il n'était pas à elle. En gros si je lui avais pas rapporté, elle aurait eu des problème. Enfin, c'est ce que j'ai compris, racontais-je.

-Ok, souffle-t-il. Je peux te poser une question perso? 

-J'imagine que oui. Je t'écoute. » 

Il passe rapidement sa main droite dans ses cheveux et jette le reste de sa barre de céréale à la poubelle. 

« Qu'est-ce qui te plait chez elle, mon vieux? demande Louis. 

-Pourquoi tu veux savoir ça? »

Il rit doucement avant d'enfiler son jean bleu marine.

« Je m'intéresse à toi, c'est tout! dit-il, en mettant les bras en l'air comme pour prouvé son innocence. Elle est différente de toutes les autres filles avec qui tu es sorti et du coup je veux savoir ce qui t'attires chez elle.

-J'aime sa différence justement, répondis-je. J'ai comme l'impression qu'elle cache des choses et je veux savoir quoi. J'en ai marre d'avoir tout ce que je veux si facilement. Elle, ça ne sera pas simple. C'est certain. Elle est un défi et je veux le relever. Je vais le relever... »

"Comme l'a dit Louis, rien n'arrive par hasard. Et Le fait que Mia oublie son livre sur cette table, n'était pas un hasard. C'était le destin. Et le destin voulait qu'on se rencontre..."